Le Déclic - Magazine de l'écologie

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Interview confession de personnalités politiques et médiatiques sur des sujets environnementaux
Transcript
00:00 [Générique]
00:28 – Bonjour Sarah, vous allez bien ? – Bonjour, très bien.
00:30 Sarah El Haïry, une force vive et engagée,
00:33 incarne le succès du modèle social français.
00:35 Du mouvement démocrate, elle est devenue députée
00:38 de la 5ème circonscription de Loire-Atlantique.
00:40 Elle a marqué les esprits avec son franc-parler.
00:42 Diplômée en droit de l'Université de Nantes,
00:45 elle a brillé par son parcours politique
00:47 en devenant la Benjamin du gouvernement à seulement 31 ans.
00:49 En tant que secrétaire d'État chargée de la jeunesse et de l'engagement,
00:53 puis de la jeunesse et du service national universel,
00:56 Sarah El Haïry œuvre avec détermination
00:58 pour construire un avenir écologique et solidaire
01:01 pour tous les jeunes français.
01:02 Bienvenue dans "Le Déclic".
01:04 – Sarah, quel a été votre déclic écologique ?
01:06 – Il y en a eu plusieurs, mais je pense que moi,
01:09 ce qui me touche le plus, en tout cas ce qui m'a touchée le plus,
01:11 c'est l'accès à l'eau, et à l'eau potable en particulier.
01:14 J'ai grandi une partie de ma vie au Maroc,
01:17 et je me souviens, on était partie dans le village de mes grands-parents,
01:22 et dans ce village, il n'y a pas d'eau potable.
01:24 Et donc les gens, pour les nourrissons,
01:27 ils achètent de l'eau en bouteille, pour le lait et pour la nourriture,
01:32 et sinon en fait, ils puissent dans un puits,
01:35 et ensuite ils doivent le faire bouillir pour évidemment cuisiner.
01:39 Et c'est quelque chose de très précieux, c'est rare et c'est précieux.
01:42 Et les grands moments de sécheresse,
01:44 quand ce puits, ça moindrit d'une certaine manière,
01:48 les voir inquiets, en tout cas pour moi,
01:52 c'était quelque chose qui m'a toujours beaucoup questionnée,
01:55 et je me souviens, mes premières recherches étaient plutôt sur
01:58 "Mais pourquoi on n'utilise pas l'eau de mer ?"
02:00 Parce qu'il y en avait plein autour au Maroc, il y en a plein.
02:02 Et ensuite, évidemment, j'ai compris que
02:04 dessaler l'eau de mer aujourd'hui technologiquement, c'est possible,
02:07 ça a un coût énorme, mais je sais que ça se développe.
02:10 Et par exemple, Israël commence à le faire.
02:13 Mais l'or bleu a du sens, en tout cas à mes yeux.
02:16 - On a envie de mieux vous connaître.
02:18 J'ai quatre à cinq petites questions que je souhaite vous poser.
02:22 Petite, qu'est-ce que vous rêviez de devenir ?
02:26 - Je crois que, par opposition, mais comme beaucoup de jeunes,
02:31 j'avais très envie d'être médecin,
02:33 mais en même temps, je ne voulais pas faire S pour ne pas devenir médecin,
02:36 parce que mon papa était médecin,
02:38 mais je pense que c'est le cas de milliers d'adolescents et d'adolescentes.
02:43 Et je pense que je voulais devenir avocate.
02:45 - Est-ce que vous vous souvenez de votre premier geste écologique ?
02:49 - Toujours lié à l'eau.
02:51 La notion de comment tu jauges et comment tu doses ta consommation d'eau.
02:56 - De faire mal au robinet, de faire mourir, brosser les dents, par exemple.
02:59 - Pas que.
03:00 Évidemment, il y a le brossage de dents, mais la question de la douche.
03:04 - Si vous deviez être à l'origine, à l'initiative d'une invention, d'une loi,
03:11 ce serait laquelle ?
03:12 - Je me souviens d'une invention que j'avais créée, j'étais super jeune.
03:17 Il se trouve que mon père est médecin et particulièrement engagé dans le monde associatif.
03:23 Il nous avait emmenés dans un énième congrès.
03:26 Comme tous les parents d'enfants qui sont particulièrement engagés dans le monde associatif,
03:30 on se retrouve toujours dans des congrès, des AG, des actions humanitaires.
03:33 Et là, c'était sur la sécurité routière.
03:35 Et en rentrant à la maison, j'avais créé des lunettes.
03:37 On avait cassé avec mon frère un thermomètre pour prendre du mercure
03:42 et on avait connecté une petite sonnette à l'oreille.
03:45 L'idée, c'était de dire que si quelqu'un s'endort,
03:47 parce que c'est une des premières causes de mortalité et d'accidentologie,
03:51 c'est s'il baisse la tête, il fallait que ça sonne dans son oreille pour le réveiller.
03:54 - Est-ce qu'il y a un accomplissement dont vous êtes très fiers ?
03:58 - Le développement du service national universel.
04:02 C'est une promesse.
04:03 C'est une promesse politique.
04:06 C'est une promesse d'égalité.
04:08 C'est une promesse de dépassement.
04:10 Et au-delà de mon engagement politique en tant que citoyenne,
04:14 je suis particulièrement fière de la naissance de ce sujet.
04:17 - Dans votre livre, "Envie de France",
04:19 vous racontez votre rencontre avec Edouard Philippe.
04:21 Ça a été le déclic, c'est le début de l'engagement politique.
04:25 - Le mien a commencé très tôt, en réalité.
04:28 Mon engagement politique a commencé en 2007.
04:30 Et c'était pour faire la campagne de Nicolas Sarkozy
04:33 avant de rejoindre François Bayrou quelques années après.
04:36 Parce qu'en 2007, il y avait une sorte d'élan.
04:41 Il y avait un mot qui avait du sens pour moi, j'avais 18 ans.
04:44 C'était "La France, elle reconnaît ton travail.
04:47 La France, elle reconnaît ton mérite.
04:49 Tu n'es pas condamné à être dans une case ou dans une autre,
04:53 dans une catégorie ou dans une autre."
04:55 La France est le pays de ses libertés où c'est possible.
04:58 Maintenant, personne ne te dit que c'est facile.
05:00 Personne ne te dit que c'est automatique.
05:02 C'est pas vrai. C'est difficile. C'est engageant.
05:05 Bien sûr qu'il faut être persévérant. Rien n'est dû.
05:08 Mais on a un peu cet essentiel.
05:11 On a l'école, on a le droit, on a la santé.
05:15 Et finalement, ces essentiels te permettent, pas après pas,
05:18 à force d'engagement, à force, je crois,
05:22 aussi de recherche de cette autonomie,
05:25 d'aller chercher un idéal et de se construire,
05:28 et de se dépasser, voire même d'aller chercher
05:31 presque une utopie personnelle.
05:33 Parce qu'il y a un collectif qui existe.
05:35 C'est comme ça que j'ai commencé mon engagement politique.
05:37 Qu'est-ce que ça fait d'entendre son nom à la télévision
05:40 le jour où on est nommé ?
05:42 Un peu de dépalpitation quand même.
05:44 Il est impressionné ?
05:46 Fier ?
05:47 Oui, il y a beaucoup de fierté,
05:49 et en même temps beaucoup de responsabilité.
05:51 Il y a une sorte d'ambivalence dans l'émotion.
05:53 Je pense tout de suite à mes parents.
05:55 Il y a une énorme pression ?
05:57 Oui, bien sûr, parce que j'ai envie d'être à la hauteur,
06:00 j'ai l'opportunité de rendre beaucoup
06:03 à un pays qui m'a donné beaucoup, et qui est le mien.
06:06 Trois jours après avoir été nommé,
06:09 vous prenez la parole en Conseil des ministres,
06:11 au sujet du SNU.
06:13 Est-ce qu'il y a une forme de traque ?
06:15 Qu'est-ce que vous vous dites à ce moment-là ?
06:17 Non mais c'est plus juste que du traque.
06:19 Je n'avais jamais vécu un Conseil des ministres.
06:24 Je ne savais pas ce que c'était.
06:26 Mais je n'oublierai jamais ce moment,
06:27 parce que j'ai demandé conseil.
06:29 Quelques heures avant.
06:31 On vous dit de faire moins d'une minute,
06:33 et de ne surtout pas lire.
06:35 C'était un conseil de François Bayrou,
06:37 avec Jacqueline Gouraud,
06:39 qui était à l'époque au sein du gouvernement.
06:42 Elle faisait une réception pour les députés Modem.
06:45 C'était mes premières heures,
06:48 et je me souviens, parce qu'on s'est mis un peu de côté
06:50 avec François Bayrou, Marc et Jacqueline,
06:53 et je leur ai dit que c'était la première fois,
06:55 et en même temps, il faut que j'annonce un texte.
06:58 Et François me dit "Ne lis jamais. Va droit au but.
07:01 Le temps est précieux, mais dis ce que tu as à dire au fond."
07:04 - Et c'est ce que vous avez fait ? - Et c'est ce que j'ai fait.
07:06 Comment on gère, quand on est Benjamin du gouvernement,
07:09 cette ultra-transparence des réseaux sociaux,
07:12 de la vie privée ?
07:14 Comment vous arrivez à gérer et trouver un équilibre ?
07:17 Moi j'ai fait le choix de ne pas exposer ma vie privée,
07:21 de ne pas aller sur ce terrain-là, c'est vrai.
07:24 Et en même temps, c'est extrêmement violent, les réseaux sociaux.
07:27 C'est particulièrement violent.
07:28 C'est un outil, c'est neutre.
07:30 T'en fais le meilleur ou t'en fais le pire ?
07:32 Le meilleur, c'est qu'on n'oubliera jamais la solidarité qu'on a eue
07:35 quand il y a eu le tsunami,
07:37 on n'oubliera jamais les solidarités, même dans nos villages,
07:40 pour sauver du patrimoine,
07:43 pour aider une famille qui a besoin d'un coup de main.
07:45 Enfin, ça permet ça aussi.
07:47 Mais malheureusement, ça peut être du harcèlement,
07:50 ça peut être des mots violents,
07:52 ça peut être des mots qui amènent jusqu'à des actes
07:56 dans la vie réelle.
07:58 Et pour le coup, la question de l'éducation
08:01 à l'utilisation des réseaux sociaux,
08:03 élever nos enfants dans les conséquences,
08:05 et leur rappeler que ce n'est pas une zone de non-droit.
08:07 Chaque mot compte, chaque acte compte.
08:09 Et je vous assure que tous ceux qui pensent
08:11 que se cacher derrière l'anonymat
08:13 pour vomir des horreurs,
08:15 eh bien, on sait élever ces anonymats.
08:17 C'est l'outil et c'est l'intelligence
08:19 de nos forces de sécurité intérieure.
08:21 Vous avez fait votre coming-out de façon très discrète ?
08:25 Il n'y avait aucun coming-out en réalité.
08:27 Et ce qui est assez intéressant,
08:29 c'est que je réponds à une interview dans Forbes
08:31 sur l'intelligence artificielle,
08:33 c'est un sujet qui me passionne,
08:35 sur plein de sujets, sur l'éducation,
08:37 sur la relation entre la France et le Maroc en ce moment,
08:39 sur des questions diplomatiques,
08:41 sur l'engagement, sur le lancement du service civique
08:43 Jeune et Nature, enfin bref, des sujets,
08:45 moi, qui me passionnent.
08:47 Et il se trouve qu'une des questions
08:49 était sur les réseaux sociaux.
08:51 Et je réponds assez simplement
08:53 que c'est bien sûr que quand moi j'ai choisi
08:55 de m'engager, donc je sais que
08:57 malheureusement, une des conséquences
08:59 c'est parfois des propos
09:01 très violents.
09:03 Quand ils dépassent la loi,
09:05 je dépose plainte. Mais souvent c'est violent.
09:07 Mais cette peine,
09:09 quand tu l'affliges aux gens que tu aimes,
09:11 ça touche. Et j'avoue très simplement
09:13 dans cet échange que oui, quand ça fait de la peine
09:15 à ma famille ou à ma compagne, ça me fait de la peine,
09:17 plus que d'habitude.
09:19 Et le journaliste titre, évidemment,
09:21 c'est un coming out de la Ministre.
09:23 Sauf que plusieurs mois auparavant,
09:25 il suffisait de télécharger la déclaration
09:27 de la Haute Autorité.
09:29 Évidemment, ma compagne
09:31 est déclarée, puisque c'est les nouvelles règles de transparence
09:33 dans ces déclarations.
09:35 Et j'ai jamais vécu caché.
09:37 Par contre, quand j'ai vu
09:39 les mois, l'impact
09:41 de tout ça, je me suis rendue compte que
09:43 finalement, j'aurais dit "mon mari"
09:45 ou "mon compagnon", ça n'aurait même pas fait une ligne.
09:47 Parce que j'ai dit "ma compagne".
09:49 Ça a provoqué quelque chose.
09:51 Et dans le fond, si ça a permis
09:53 à une famille, à une jeune fille,
09:55 peut-être de se dire
09:57 "oui, on peut en parler".
09:59 - De créer des libertés, de permettre d'assumer aussi
10:01 et d'en parler plus librement.
10:03 - Et bien tant mieux. C'est utile.
10:05 Et dans le fond,
10:07 j'avais peut-être même moi pas suffisamment conscience,
10:09 mais il y avait peu de femmes
10:11 qui avaient fait
10:13 ce pas-là.
10:15 Moi, ma vie était déjà très...
10:17 Nos amis nous voient ensemble,
10:19 très libre et très assumée,
10:21 très publique. J'avais simplement fait le choix,
10:23 mais ça aurait été, un garçon
10:25 ou c'est une femme, ça aurait été la même chose,
10:27 de ne pas mettre
10:29 en lumière ma vie privée dans mon engagement
10:31 politique parce que c'était ma manière à moi de protéger.
10:33 - Votre engagement, c'est la jeunesse.
10:35 Est-ce qu'on peut
10:37 l'engager sur tous les sujets ?
10:39 - Ah oui, sans exception.
10:41 - Et est-ce qu'on peut leur ouvrir le vote
10:43 dès 16 ans, par exemple ?
10:45 - Franchement, vous savez,
10:47 je suis très ouverte à plein d'idées,
10:49 mais quand vous leur demandez, ils ne sont pas favorables.
10:51 Il se trouve que le plus gros sujet
10:53 pour la jeunesse, c'est l'abstention.
10:55 Et quand on a entre 18 et 25 ans
10:57 et qu'on a un taux d'abstention, par exemple, aux dernières élections
10:59 régionales, de 9 jeunes sur 10 qui ne se déplacent pas,
11:01 la question c'est...
11:03 - Comment on explique ce besoin d'ultra-communication,
11:05 notamment au travers des réseaux sociaux,
11:07 d'exprimer en permanence,
11:09 de revendiquer ses libertés, d'exprimer son opinion,
11:11 et en même temps de ne pas aller voter
11:13 quand il y a des enjeux ?
11:15 - Il faut avoir la pudeur de dire
11:17 qu'il n'y a pas une seule raison, il y en a plusieurs.
11:19 Et que la jeunesse, elle est multiple,
11:21 elle est complexe, mais
11:23 il y a plein de choses qu'on peut faire pour lutter contre cette abstention.
11:25 La première, c'est une meilleure
11:27 éducation civique et morale, une meilleure compréhension
11:29 de nos institutions. Plus de transparence,
11:31 aussi, dans
11:33 les compétences
11:35 de chaque collectivité,
11:37 pour comprendre pourquoi on vote aux élections régionales
11:39 et qu'est-ce que ça amène de voter aux élections européennes.
11:41 Il ne faut pas prendre les jeunes pour ce qu'ils ne sont pas.
11:43 Quand ils ont envie de voter, ils y vont.
11:45 L'élection européenne, c'est le bon exemple.
11:47 Quand ils ont envie, quand le sujet
11:49 les intéresse, ils y vont. Parce que le sujet environnemental
11:51 se traite au niveau européen.
11:53 - Pour vous, c'est les sujets, c'est les enjeux
11:55 qui ne sont pas suffisamment clairs ?
11:57 - Oui, les enjeux, je pense, ça fait partie,
11:59 mais aussi, franchement, on a aussi des difficultés
12:01 et des choses à améliorer sur
12:03 la gestion de notre manière de voter.
12:05 La carte électorale,
12:07 le vote du dimanche, parfois la difficulté,
12:09 même s'il y a plein d'investissements du ministère de l'Intérieur
12:11 pour faciliter les procurations,
12:13 pour avoir un flash code,
12:15 pour trouver où est son bureau de vote, tout ça,
12:17 ça va dans le bon sens.
12:19 - Vous êtes favorable à une évolution
12:21 des façons de voter ?
12:23 - Oui, je pense qu'aujourd'hui,
12:25 je sais que le débat est ouvert
12:27 et qu'il y a pas mal de positions,
12:29 mais je pense qu'il ne faut pas s'interdire d'aller chercher
12:31 des facilités pour permettre
12:33 à plus de monde de voter.
12:35 Par exemple, le vote anticipé, le vote par correspondance,
12:37 la question du vote informatique
12:39 ou en tout cas électronique.
12:41 - Est-ce que vous faites participer les jeunes à cette discussion ?
12:43 Sur les façons, les modalités
12:45 dont on peut voter demain ?
12:47 - Oui, parce que pour moi, c'était un vrai électrochoc.
12:49 Au lendemain des fameuses élections régionales,
12:51 j'avais réuni les mouvements de jeunesse.
12:53 On a pas mal discuté et je vous assure,
12:55 même si les sensibilités politiques étaient à l'opposé,
12:57 il y avait quand même un moment du consensus,
12:59 au moins sur les modalités.
13:01 Quand tu es jeune, étudiant, et que tu ne peux pas voter
13:03 dans la ville dans laquelle tu étudies,
13:05 tu peux voter dans la ville de tes parents,
13:07 celle où tu habites. Et tu n'as pas envie de changer.
13:09 Parce que tu tiens à apporter ton vote
13:11 là où tu vis. Mais que dans le fond,
13:13 c'est assez difficile... - Oui, de t'y rendre, par exemple.
13:15 - De t'y rendre ou d'accéder parfois
13:17 aux documents électoraux.
13:19 Ou au contraire, tu veux voter dans la ville dans laquelle tu vis
13:21 en tant qu'étudiant, mais finalement, il te faut un justificatif
13:23 de domicile. Donc, il y a une réalité
13:25 qu'on peut faciliter. C'était une des demandes,
13:27 par exemple, pour reconnaître la carte d'étudiant
13:29 comme un justificatif permettant
13:31 de voter ou d'inscrire dans ce secteur.
13:33 - Est-ce que c'est pas une volonté des jeunes générations
13:35 de plus participer à la discussion,
13:37 aux échanges ? - C'est pas qu'une volonté,
13:39 c'est une réalité. Aujourd'hui, quand vous regardez
13:41 un jeune sur trois participer à une marche pour le climat,
13:43 aujourd'hui, les jeunes, ils participent.
13:45 Mais ils participent d'une manière qui est
13:47 complémentaire, en réalité, à l'expression démocratique.
13:49 La question, c'est comment tu réconcilies les deux.
13:51 Et ce que je vois, et c'est pour ça
13:53 qu'on fait aussi de nouvelles...
13:55 qu'on utilise de nouvelles méthodes, on développe de nouveaux outils.
13:57 D'abord, le CNR.
13:59 Le CNR Jeunesse, qui fait le Tour de France.
14:01 Les rencontres à Matignon,
14:03 où ce sont des jeunes, pour une partie représentative,
14:05 pour d'autres, des jeunes qui viennent des territoires.
14:07 Mais faut pas s'arrêter à des moments
14:09 où tu ne fais qu'écouter.
14:11 Les jeunes, aujourd'hui, ils ont aussi besoin de preuves,
14:13 qu'on n'est pas en train de faire, et désolé pour l'anglicisme,
14:15 mais de "youth-washing".
14:17 Donc, dire "très bien, on a consulté les jeunes
14:19 parce que regardez, ils étaient sur la photo". Pas du tout.
14:21 Ils ont envie de preuves.
14:23 C'est la génération des preuves.
14:25 Et donc, on a lancé, il y a quelques semaines maintenant,
14:27 un projet qui s'appelle
14:29 "T'es priorité de ta voix".
14:31 Et on présente aux jeunes
14:33 les différentes remontées des CNR Jeunesse,
14:35 des rencontres à Matignon, et les jeunes votent.
14:37 Qu'est-ce qui est ressorti, par exemple ?
14:39 Pas mal de choses.
14:41 Beaucoup sur l'éducation civique et morale, sur leur participation.
14:43 Beaucoup sur l'écologie à l'intérieur de l'école,
14:45 la question du gaspillage.
14:47 Il y en a qui voulaient qu'on puisse faire
14:49 avec les menus de la cantine,
14:51 comme ce qu'on fait avec "Too good to go".
14:53 C'est des jeunes qui sont hyper engagés.
14:55 Et la question, que je me pose, et que je leur ai posé,
14:57 c'est comment on fait pour que, finalement,
14:59 cette soif d'engagement,
15:01 elle se transforme en acte,
15:03 et pas uniquement en clic.
15:05 Et comment on passe du clic à l'action,
15:07 de l'action à l'organisation associative,
15:09 de l'organisation associative, évidemment, à l'expression démocratique.
15:11 – Est-ce que le service universel,
15:13 le service national universel,
15:15 ce n'est pas une des réponses
15:17 aussi aux grands enjeux de demain,
15:19 quand on parlait d'éducation,
15:21 de transmission ?
15:23 – Moi, je suis convaincue que le service national universel,
15:25 c'est un de ces grands projets
15:27 qui permet à une génération
15:29 d'avoir une sorte de souvenir commun,
15:31 de rendez-vous commun,
15:33 mais de se rendre compte aussi à quel point,
15:35 quand ils sont en collectif, ils arrivent à se dépasser.
15:37 On a besoin d'unité dans notre pays.
15:39 On a une jeunesse qui, ok, est engagée,
15:41 mais pas qu'eux.
15:43 Il y a une jeunesse qui est en situation de précarité,
15:45 il y a une jeunesse qui a une santé mentale plus fragile,
15:47 il ne faut pas oublier qu'on sort du Covid.
15:49 On a une jeunesse qui n'a pas les mêmes chances.
15:51 Ce goût de l'égalité, en fait, il n'y a pas trop de moments
15:53 où tu le vis. Tu l'entends, c'est écrit sur le fronton
15:55 de nos écoles, c'est écrit sur le fronton de nos mairies,
15:57 mais à quel moment tu le vis ?
15:59 Le SNU, tu n'as pas de carte
16:01 coupe-fils comme dans Disney,
16:03 ou le pass-vip.
16:05 – Tout le monde est logé à la même enseigne.
16:07 – Oui, c'est le même uniforme, c'est le même programme,
16:09 c'est le même dépassement de soi,
16:11 et donc on ne juge que ton mérite,
16:13 que ta participation.
16:15 Que tu sois un jeune très extraverti,
16:17 ou un jeune plus timide,
16:19 personne ne sait. Que tu viennes d'un établissement public
16:21 ou d'un établissement privé, personne ne sait.
16:23 D'un technologique ou d'un professionnel,
16:25 personne ne sait. Et donc finalement,
16:27 c'est comment on les prépare
16:29 à la vie de demain. Arriver dans une entreprise,
16:31 tu ne connais pas les gens qui t'entourent.
16:33 Et pourtant tu dois te dépasser.
16:35 – Vous souhaitez le rendre obligatoire ?
16:37 – Vous savez, ce débat, il arrivera. Pour moi,
16:39 ce n'est pas un tabou. Il arrivera et ce sera
16:41 à l'Assemblée nationale et au Sénat de trancher
16:43 si obligatoire ou pas obligatoire.
16:45 Moi, mon enjeu, aujourd'hui,
16:47 c'est d'aller chercher
16:49 les éléments permettant de le généraliser au maximum.
16:51 Cette année, c'est la première fois où,
16:53 à l'été, il y a plus de volontaires
16:55 que de places. Il y a une liste d'attentes.
16:57 – Donc on peut se dire que c'est légitime de le rendre obligatoire ?
16:59 – Moi, mon enjeu, c'est comment tu garantis
17:01 la mixité ? Comment tu fais que demain,
17:03 un projet comme celui-là est vécu par
17:05 l'ensemble des jeunes de notre pays ?
17:07 Comment tous les jeunes de notre pays maîtrisent les gestes qui s'offrent ?
17:09 Comment tous les jeunes de notre pays, à un moment,
17:11 se dépassent, se rencontrent,
17:13 prennent ce temps
17:15 de l'action collective ? À quel moment ils vivent
17:17 aussi un temps de patriotisme ? C'est absolument
17:19 nécessaire. Ou simplement, puisque je sais
17:21 que c'est quand même l'ADN de votre émission,
17:23 comment on baisse leur égo-anxiété ?
17:25 En les formant
17:27 aux catastrophes naturelles ? À comment on les gère ?
17:29 70% de notre territoire
17:31 est à risque d'inondations.
17:33 Qui sait, autour de nous,
17:35 comment réagir en cas d'inondation ?
17:37 – Oui, mais en quoi le SNU permettra
17:39 aussi à des jeunes générations d'apprendre
17:41 à réagir face à des inondations ?
17:43 – On les forme à ça pendant le séjour de cohésion.
17:45 On les forme à trouver une personne disparue
17:47 s'il n'y a pas Waze et qu'il n'y a pas de téléphone portable,
17:49 donc à lire une carte. On leur apprend
17:51 à réagir et à s'inscrire dans un commandement
17:53 de protection civile en cas de canicule.
17:55 – Mais pourquoi le SNU est si
17:57 clivant ? Pourquoi ça dérange
17:59 autant alors ? – Il y a une
18:01 petite intelligentsia
18:03 des extrêmes gauches qui détestent, pour le coup,
18:05 l'idée même, en fait, de ce projet.
18:07 Ils disent que c'est militarisant,
18:09 ou que c'est contre-productif,
18:11 ou que ça serait contre l'école. Pas du tout.
18:13 On n'a pas vocation ni à remplacer
18:15 les objectifs de l'école, c'est complémentaire à l'école.
18:17 Et c'est une sorte
18:19 de temps un peu hybride, d'expérience
18:21 un peu unique, qui permet aussi
18:23 de créer de l'énergie dans le monde associatif
18:25 de demain. C'est les futurs bénévoles
18:27 de demain, c'est les futurs réservistes,
18:29 c'est les futurs responsables d'éducation populaire,
18:31 c'est les futurs citoyens, en réalité,
18:33 qu'on essaie d'accompagner.
18:35 – Est-ce que votre parcours personnel a
18:37 influencé votre engagement pour la jeunesse
18:39 et pour l'écologie ? – Oui, bien sûr.
18:41 On a toujours une part de soi.
18:43 Moi, je vous ai dit ça, j'ai grandi au Maroc,
18:45 j'ai envie de patriotisme,
18:47 j'ai envie de participer
18:49 à des grands moments, j'aurais adoré
18:51 faire le service civique, mais je ne savais même pas que ça existait.
18:53 Je m'en suis rendue compte
18:55 après l'âge limite.
18:57 Et dans le fond,
18:59 je me dis que c'est peut-être une chance manquée.
19:01 Et moi, je n'ai pas envie que notre jeunesse
19:03 vive avec des chances manquées, ou avec des regrets.
19:05 – Est-ce que votre âge
19:07 a une incidence sur le sujet ?
19:09 – Certainement, parce que
19:11 la forme pédagogique
19:13 qu'on a choisie est très jeune.
19:15 Moi, ce que je ne voulais pas,
19:17 c'est qu'un jeune d'un établissement
19:19 professionnel ou technologique, ou un jeune qui a
19:21 des difficultés, revive
19:23 ces difficultés pendant le SNU,
19:25 sur les apprentissages. Et donc,
19:27 on a totalement changé les règles
19:29 et on fait de l'escape game, j'adore les escape games.
19:31 Donc l'apprentissage est très gamifié.
19:33 C'est-à-dire qu'on utilise le jeu, escape game,
19:35 jeu de société,
19:37 mise en situation,
19:39 immersion. Et ça marche très bien.
19:41 C'est théorisé, bien sûr,
19:43 ça s'appelle la pédagogie active.
19:45 – L'objectif, c'est de les intéresser aussi.
19:47 – Exactement, et qu'ils soient passionnés,
19:49 et qu'ils soient dans l'action, et pas dans quelque chose
19:51 de très descendant. On en a fait des erreurs,
19:53 on a fait parfois des enseignements
19:55 qui étaient très descendants, et
19:57 ne vous inquiétez pas, les jeunes volontaires nous l'ont très vite dit.
19:59 Et donc, je suis plutôt ouverte
20:01 à ces méthodologies, en tout cas un peu différentes.
20:03 Mais aussi pour créer de la cohésion,
20:05 c'est pour ça que le monde sportif… – Comment on peut
20:07 sensibiliser les jeunes à la transition
20:09 écologique ? – En leur donnant
20:11 parfois les rênes
20:13 pour faire. Je pense que
20:15 déjà au SNU, nous on a envie
20:17 que l'ensemble des volontaires
20:19 puissent maîtriser la fresque du climat,
20:21 puissent ensuite débattre sur
20:23 qu'est-ce qu'ils peuvent faire après, après avoir maîtrisé
20:25 ces connaissances, qu'ils puissent participer
20:27 à des grandes recherches du CNRS,
20:29 en étant d'une certaine manière des sentinelles,
20:31 en étant des observateurs
20:33 de parfois la biodiversité
20:35 autour d'eux, faune et flore,
20:37 en étant des éclaireurs
20:39 sur… mais aussi une capacité de transformer
20:41 leurs entreprises après, là où ils seront.
20:43 – Est-ce qu'on peut avoir un discours apaisé ?
20:45 On a le sentiment qu'il y a
20:47 aujourd'hui une jeunesse qui se radicalise.
20:49 Est-ce qu'on peut avoir un discours
20:51 apaisé pour faire passer des messages ?
20:53 – On n'est pas obligé d'opposer, on n'est pas obligé d'hystériser
20:55 les familles,
20:57 le pays. L'écologie, elle doit créer
20:59 au contraire une sorte de force
21:01 un peu centrifuge.
21:03 Chacun a un petit bout de la réponse.
21:05 Donc si on veut une société qui répond
21:07 aux défis que nous pose la transition
21:09 environnementale, il faut de la technologie,
21:11 il faut de la science, il faut une transformation
21:13 de notre économie, il faut plus d'éducation,
21:15 il faut aussi beaucoup de solidarité internationale
21:17 parce que notre planète, elle est…
21:19 – Peut-être aussi que les entreprises ont un rôle à jouer
21:21 auprès des jeunes générations. – Absolument,
21:23 mais même pire que ça, c'est que si les entreprises
21:25 ne se transforment pas en profondeur, et ne transforment pas
21:27 même leur modèle de production
21:29 intrinsèque. En réalité, les jeunes, ils ne veulent plus
21:31 travailler chez eux. C'est même
21:33 plus fort que ça. Aujourd'hui, on a des jeunes
21:35 qui refusent d'aller dans des entreprises qui ne
21:37 transforment pas leur modèle de production.
21:39 – Dernière question, qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter
21:41 Sarah, à l'aérie ?
21:43 – Je pense beaucoup de
21:47 bonheur, beaucoup de santé, et
21:49 j'espère beaucoup d'unité dans notre pays.
21:51 Parce que cette unité, elle ne se décrète pas
21:53 et pour y arriver, il faut un petit bout de…
21:55 un pas, que chacun fasse un pas.
21:57 Il faut sortir parfois des babinères
21:59 pour arriver à quelque chose
22:01 de plus sincère. – Merci Sarah.
22:03 – Merci.
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