Deux conférences digitales de deux heures, ponctuées de « keynotes » de speakers prestigieux, de débats et de tables-rondes réunissant des experts de la finance européenne permettront de décrypter les tendances et les défis des prochains mois.
Nous évoquerons les nouveaux équilibres géopolitiques, dans un paysage mondial en totale redéfinition. Nous nous interrogerons sur les conséquences de l’inflation sur la consommation mondiale, sur les marchés obligataires et sur la solidité du système bancaire international. Nous regarderons aussi l’avenir du secteur financier : un avenir qui semble se dessiner « plus vert » et plus « techno ». Mais, concrètement, que faut-il comprendre derrière ces deux évolutions ?
Nous évoquerons les nouveaux équilibres géopolitiques, dans un paysage mondial en totale redéfinition. Nous nous interrogerons sur les conséquences de l’inflation sur la consommation mondiale, sur les marchés obligataires et sur la solidité du système bancaire international. Nous regarderons aussi l’avenir du secteur financier : un avenir qui semble se dessiner « plus vert » et plus « techno ». Mais, concrètement, que faut-il comprendre derrière ces deux évolutions ?
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00:00 [Musique]
00:05 On va accueillir Yoriko Bakkes, qui est donc la ministre des Finances du Luxembourg,
00:09 qui est en ligne dans l'Est de la France, bien sûr.
00:14 Bonjour madame la ministre.
00:20 Bonjour.
00:22 Bonjour Yoriko Bakkes. Vous êtes ministre des Finances du Luxembourg depuis près d'un an.
00:27 Vous avez dans votre vie professionnelle un cursus très spectaculaire, des études brillantes au Canada, à Londres, à Bruges.
00:36 Vous avez été diplomate à New York, à Bruxelles, au Japon.
00:39 Vous avez été le Sherpa, la Sherpa, je pense qu'il doit y avoir un féminin à Sherpa, de deux premiers ministres luxembourgeois.
00:46 Et vous êtes également ancienne maréchal de la cour Grand-Ducal.
00:51 Et puis vous êtes ministre des Finances, je le disais, depuis près d'un an.
00:55 Je suis donc très à l'aise vu votre parcours totalement mondial,
00:59 très à l'aise pour vous demander de faire ce matin justement un tour d'horizon des défis géopolitiques et économiques,
01:06 tels que vous les voyez, vous, de votre poste de ministre des Finances du Luxembourg.
01:09 Yoriko Bakkes.
01:11 Merci beaucoup pour cette introduction, monsieur Bettu.
01:16 En dix minutes, peut-être que ce n'est pas facile de faire ce grand tour d'horizon.
01:21 En tout cas, c'est vraiment un plaisir de vous rejoindre aujourd'hui à cette occasion de la conférence organisée par Luxembourg for Finance,
01:29 ensemble avec l'Opinion.
01:31 Je tiens aussi à saluer Nicolas Mackel, mon collègue et ami, CEO de LFF, ainsi que son équipe.
01:40 J'aurais préféré être à Paris aussi avec vous pour la réception de ce soir, mais malheureusement, ça s'est plus difficile pour moi.
01:49 Il y a deux événements à Paris aujourd'hui. Il y a Charles III qui est en France, mais il y avait surtout ce dîner de Luxembourg for Finance.
01:59 Ça sera, j'espère, pour une autre fois que je peux vous rejoindre à Paris.
02:05 Mesdames et messieurs, l'Europe a été confrontée vraiment à une série de crises, voire ce qu'on peut appeler une polycrise,
02:14 au cours de ces dernières années. Le choc de la chaîne d'approvisionnement provoquée par la pandémie,
02:22 suivi aussi de près par la guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine,
02:29 et aussi la crise énergétique qui s'en est suivie, a entraîné un retour de l'inflation en Europe, comme vous l'avez mentionné.
02:37 Cela, après plus d'une décennie de taux d'intérêt faible, voire négatif.
02:44 Le resserrement rapide de la politique monétaire a contribué à un ralentissement économique.
02:51 J'étais à Saint-Jacques-de-Compostelle la semaine dernière, dans le cadre de la présidence espagnole du Conseil des ministres.
02:59 On a eu des réunions de l'Eurogroupe et une réunion informelle de l'Ecofin.
03:04 C'était peut-être un peu comme un pèlerinage en Espagne.
03:09 En tout cas, on a discuté aussi des dernières prévisions économiques que la Commission européenne nous a présentées,
03:17 qui a une nouvelle fois revu à la baisse la croissance de l'économie de l'Union européenne,
03:24 qui devrait atteindre 0,8 % cette année et 1,4 % l'année prochaine.
03:32 Ce n'est pas fameux, mais au moins c'est la croissance.
03:37 La croissance mondiale a également ralenti à 0,5 % au premier trimestre.
03:45 L'effet de rebond économique de la réouverture de la Chine a été de très courte durée.
03:52 Cela signifie aussi que l'Europe ne peut pas compter sur la demande extérieure pour combler une perte de vitesse de son économie.
04:02 À moyen terme, l'Europe est confrontée à une croissance économique modérée et à une inflation persistante dans un contexte de tensions géopolitiques
04:12 qui continue à créer de l'insuffisance pour tous les acteurs économiques que Nicolas a bien mentionnés tout à l'heure.
04:19 La bonne nouvelle, et il y a toujours une bonne nouvelle, est que l'économie européenne continue à faire preuve de résilience
04:28 face au choc considérable qu'elle a subi ces dernières années.
04:32 Les marchés de travail en particulier restent quand même robustes, il faut le souligner.
04:38 Il importe également de souligner que l'Union européenne a fait preuve de solidarité remarquable,
04:44 et peut-être qu'on ne le mentionne pas assez, face à un état qu'on pourrait appeler le permacrisme.
04:52 De l'achat contraint de vaccins, à la création de Next Generation EU,
04:59 de l'accord sur un arsenal de sanctions vraiment massives contre la machine de guerre Chine,
05:06 aussi à la création, réduction pardon, de la dépendance aux énergies fossiles russes,
05:12 et cela vraiment dans un temps record.
05:15 Cela a montré une fois de plus que l'action européenne commune est la meilleure,
05:21 et même peut-être la seule réponse viable face aux crises.
05:27 Et celui d'une Europe qui peut être un partenaire international crédible,
05:32 un partenaire international aussi fiable pour élever les défis mondiaux.
05:39 Il est important de noter que l'Union européenne a créé les bonnes leçons des crises antérieures,
05:46 et c'est grâce à l'union bancaire et aux réformes de l'union économique et monétaire
05:53 que la zone euro est aujourd'hui mieux équipée pour résister aux chocs extérieurs.
06:00 Les stress tests publiés par la Banque centrale européenne et l'autorité bancaire européenne en juillet
06:07 montrent que les banques européennes resteraient résistantes face à un scénario défavorable
06:13 combinant une grave récession, une hausse des taux d'intérêt et des écarts de crédit.
06:20 Avec Next Generation, l'Europe s'est concentrée sur les investissements favorisant l'acquisition,
06:27 notamment dans la transition verte et numérique.
06:31 C'est très différent de notre réponse à la crise de la dette souveraine.
06:36 Aujourd'hui, il n'y a personne qui parle d'austérité.
06:39 Mais ne vous méprenez pas, notre réponse aux chocs extérieurs extraordinaires de ces dernières années,
06:48 y compris la suspension temporaire des règles budgétaires communautaires,
06:52 ne peut pas être un permis de vendetté.
06:56 Afin de pouvoir prendre les mesures appropriées en cas de nouveau choc,
07:02 il est vraiment essentiel que nous prenions maintenant une position prudente
07:06 en ce qui concerne les finances publiques, tant au Luxembourg que dans le reste de l'Union européenne.
07:12 Il ne s'agit donc pas uniquement de décisions qui ont un impact maintenant à court terme,
07:19 il faut toujours penser aux défis ici à plus long terme.
07:24 Cela inclut évidemment les priorités stratégiques que nous nous sommes données,
07:30 notamment en matière de défense, de la lutte contre le changement climatique
07:34 et aussi nos investissements dans la transition écologique.
07:41 Une politique budgétaire prudente permet de maintenir la flexibilité nécessaire
07:47 pour affronter les défis futurs et à faire face à des éventuels chocs externes.
07:54 Il ne faut pas oublier, mesdames et messieurs, que pour les marchés des capitaux,
07:59 une dette, ça restera toujours une dette.
08:03 Les marchés des capitaux ne s'intéressent pas vraiment au motif de l'endettement,
08:08 aussi valable soit-il.
08:11 On doit rester crédible vis-à-vis des marchés des capitaux aussi.
08:16 Pourtant, les investissements restent un élément essentiel.
08:21 La réalisation de la double transition rend l'économie européenne
08:25 non seulement plus résiliente, mais aussi plus compétitive
08:30 dans le monde globalisé dans lequel nous vivons.
08:34 Afin de réussir cette double transition dont on parle beaucoup,
08:37 il est vraiment nécessaire d'avoir un secteur financier pan-européen fort,
08:43 à même de soutenir les entreprises européennes à financer leur croissance durable
08:49 et à investir aussi dans l'innovation.
08:53 L'Union européenne, pour sa part, doit créer l'environnement propice nécessaire
08:58 et cela signifie établir les règles et les normes cohérentes
09:02 en matière de finances durables.
09:05 Ça signifie une réglementation visant aussi à promouvoir les services financiers numériques
09:11 et un meilleur accès aux sources de financement alternatifs en le capital risk.
09:17 Cela nécessitera une union des marchés des capitaux qui s'appuie sur l'expertise
09:23 des différents États membres et la proximité des autorités de surveillance nationale,
09:29 tout en tirant profit d'un marché unique, doté d'un cadre réglementaire
09:34 qui promeut la stabilité financière et aussi la protection des investisseurs.
09:40 Contrairement aux États-Unis, l'Europe continue de s'appuyer principalement
09:45 sur le financement bancaire.
09:48 La création d'un marché unique des capitaux permettra aux entreprises
09:52 de lever des capitaux plus facilement et à moindre coût,
09:56 offrant ainsi des avantages économiques et cela pour l'ensemble de l'Union européenne.
10:01 Si l'objectif est d'améliorer les conditions de financement des entreprises
10:06 dans l'ensemble de l'Union européenne, le projet d'union des marchés des capitaux
10:11 ne peut avoir pour but de reproduire la City of London chez nous.
10:17 Les États-Unis ne peuvent pas non plus fournir pour nous un modèle approprié.
10:23 Mesdames et Messieurs, la devise de l'Union européenne, unie dans la diversité,
10:29 devrait devenir le principe directeur de la conception d'une union des marchés
10:34 des capitaux polycentriques.
10:37 Une union qui fonctionne au bénéfice des citoyens et des entreprises,
10:42 et cela dans tous les États membres.
10:44 Une union qui profite pleinement des forces et de l'expertise
10:49 des différentes places financières en Europe, dans Paris, Luxembourg, bien sûr,
10:54 Francfort, Madrid, Milan, Varsovie, Dublin, par exemple.
10:59 Nous devrons aussi promouvoir les services financiers transfrontaliers
11:03 au sein du marché intérieur, tout en restant ouverts vers le reste du monde.
11:08 Nous ne souhaitons pas une "Fortress Europe", pas de "Fortress Europe".
11:13 Ces dernières années, nous avons assisté à la mise en place de mesures
11:18 protectionnistes sur différents marchés, y compris au sein de l'Union européenne.
11:23 Toutefois, il est dans l'intérêt des investisseurs,
11:26 ainsi que dans l'intérêt des entreprises européennes,
11:29 de pouvoir accéder aux meilleurs produits et services financiers,
11:34 quel que soit l'endroit où ils se trouvent dans l'Union européenne.
11:38 Nous célébrons cette année le 30e anniversaire du marché unique.
11:44 Il s'agit sans aucun doute de l'une des plus grandes réalisations
11:49 de l'Union européenne.
11:51 Veillant non seulement ensemble à le préserver,
11:55 mais aussi à le développer davantage pour faire de l'Europe
11:59 l'une des économies les plus compétitives au monde.
12:03 J'y crois fermement.
12:05 La façon dont nous répondons à la permacrise aujourd'hui,
12:12 déterminera l'avenir de nos économies et de nos sociétés.
12:18 Elle façonnera également l'avenir de notre Union européenne.
12:23 Mesdames et Messieurs, je vous souhaite une très bonne conférence
12:27 et je vous remercie pour votre attention.
12:30 Merci beaucoup, Mme Kovachev.
12:33 Merci pour cette introduction à la fois précise et ambitieuse.
12:37 Vous avez ouvert de nombreuses pistes sur lesquelles nous allons travailler
12:40 pendant toute la matinée, aujourd'hui et demain.
12:44 L'endettement, le sur-endettement même de certains pays,
12:47 évidemment je pense à la France, la permacrise,
12:51 ce concept que vous avez évoqué à la fin de votre intervention,
12:55 la transformation écologique, les grands défis géopolitiques.
12:59 Pour tout cela, nous allons avoir le temps de débattre
13:04 avec de nombreux invités sur notre plateau et également à distance.
13:08 [Musique]