SMART BOURSE - Marchés à thème(s) : Alain Bokobza (Société Générale)

  • l’année dernière
Mercredi 20 septembre 2023, SMART BOURSE reçoit Alain Bokobza (Responsable Allocation d'Actifs Mondiale, Société Générale)

Category

🗞
News
Transcript
00:00 [Musique]
00:10 Dans ce dernier quart d'heure de Smart Bourg, ce soir, nous parlons stratégie d'allocation d'actifs avec Alain Bocopza,
00:15 à mes côtés, le responsable monde de l'allocation d'actifs de Société Générale CIB. Bonsoir Alain.
00:20 Bonsoir Grégoire.
00:21 Merci beaucoup d'être là. C'est le message clé résumé en une phrase que vous délivrez à vos clients
00:27 dans la perspective du quatrième trimestre qui va bientôt démarrer.
00:31 Toutes les routes de l'allocation d'actifs mènent aux États-Unis. C'est le titre de votre outlook, comme on dit Alain.
00:38 Alors, je veux bien que vous nous expliquiez, effectivement, pourquoi il faut regarder avant tout les États-Unis.
00:42 Mais ça veut dire qu'en creux, toutes les routes qui mènent ailleurs qu'aux États-Unis se retrouvent aujourd'hui en partie bouchées,
00:51 voire sont des impasses sur le plan de l'investissement et de l'allocation d'actifs.
00:56 En Europe, on a une croissance très modeste, l'Allemagne étant un petit peu en dessous de modeste.
01:05 Et donc pour les marchés d'action, c'est difficile d'imaginer un grand cycle des profits après ce qu'on a déjà connu.
01:12 Donc c'est plutôt des jeux de rotation sectorielle, thématique.
01:16 Et comme l'inflation a du mal à vraiment baisser, elle est au premier semestre, mais là, c'est un petit peu plus compliqué.
01:23 D'investir dans les obligations tout de suite, c'est aussi compliqué.
01:26 Donc on a un territoire qui n'est pas interdit. Il n'y a pas de grande crise, a priori, à anticiper.
01:31 Mais ce n'est pas un territoire extraordinairement attrayant, appétissant, sans être vraiment dangereux.
01:41 Et puisque la Banque centrale européenne a décidé, heureusement, de s'arrêter relativement tôt sur son cycle de resserrement,
01:49 ça soutient un peu moins l'euro, qui avait commencé à se redresser,
01:52 mais il s'arrête de monter les taux d'intérêt Banque centrale en même temps que la Banque américaine.
01:56 Donc le territoire européen, il subit ce qu'on appelle, dans un terme qui n'est pas très joli, la stagflation.
02:02 Donc c'est stagnation économique sans catastrophe. Il y a des facteurs de rappel.
02:07 Avec une inflation qui reste un peu gluante, c'est ni très bon pour les actions, ni très bon pour les obligations,
02:12 et pas nécessairement génial pour l'euro.
02:14 - Compris. Donc ça c'est pour le chemin qui mène à l'Europe, vous dites que ce n'est pas un chemin très appétissant aujourd'hui,
02:22 malgré toujours quand même une décote en matière de valorisation sur les actifs européens, à commencer par les actions.
02:28 Vous dites que ce n'est pas le moment où la valeur va forcément déclencher un appétit particulier des investisseurs mondiaux.
02:37 - Pas au niveau des indices. Pas au niveau des indices généraux, comme le stock 600 ou le stock 50.
02:42 C'est plutôt d'aller chercher des thématiques d'investissement.
02:45 Ça peut être des investissements verts, ça peut être des thématiques de plus long terme.
02:50 Mais au niveau de l'indice lui-même, c'est compliqué d'imaginer des progressions particulièrement importantes,
02:56 d'un côté comme de l'autre, à brève échéance.
02:58 - Qu'est-ce qu'on peut dire de la route, ou des routes, qui mènent vers l'ISEA Marjan, et donc vers la Chine, Alain ?
03:05 - La Chine, avant la pandémie, donc avant 2019, faisait du 6 à 7% de croissance.
03:12 La moitié de cela a été liée au secteur de la construction, qui est énorme, une trentaine de pourcents du PIB, qui est étale.
03:19 Aujourd'hui, on parle plus de restructuration de la dette qui a été émise pour financer tous ces gratte-ciels que personne n'habite.
03:26 Donc là, il y a une séquence pour la Chine qui est très restructuration financière.
03:31 C'est de la dette qui est locale, achetée par des autochtones, qui n'est pas du tout...
03:35 - Disséminée ? - Disséminée, comme les CEPRAM avaient pu l'être en leur temps.
03:39 Donc il n'y a pas de risque systémique attaché à ça autour.
03:42 C'est important dans les risques généraux, dans les plateformes d'investissement.
03:45 Mais n'empêche que la croissance, elle sera peut-être de 3,5, 4 l'an prochain, on vient de 6 ou 7.
03:50 Il n'y a pas d'espoir de redémarrage important de cette croissance économique à brève échéance,
03:56 parce qu'ils ont un objectif prioritaire de restructurer cette dette.
03:59 Donc là, il y a des assouplissements monétaires, des baisses de taux.
04:04 C'est plutôt bon pour les obligations d'État chinoise.
04:07 Le marché des actions, il peut rebondir en fonction des petits plans de stimulus par-ci, par-là,
04:12 ou tomber derrière. Mais a priori, ce n'est pas un grand mouvement.
04:15 Donc dans le pôle émergent, on va plutôt voir à l'extérieur de la Chine.
04:18 Ça peut être en Inde, ça peut être en Corée.
04:21 Ça peut être un peu en Amérique latine aussi, qui bénéficie d'un meilleur contrôle de l'inflation
04:25 et d'ouverture sur des baisses de taux des banques centrales.
04:28 Donc on va redéployer à l'intérieur du pôle émergent, qui depuis 2015 était très chinois.
04:34 On va redéployer le capital à l'intérieur d'émergent, mais à l'extérieur de la Chine,
04:39 suivant les différentes classes catives qu'on peut trouver.
04:42 Non, s'il n'y a pas de grand mouvement à attendre côté européen du point de vue des marchés,
04:46 côté chinois avec une répartition un peu différente dans la poche émergente,
04:51 comme vous dites Alain, et bien on regarde donc les États-Unis.
04:55 C'est le sujet de la discussion.
04:58 Comment on regarde les États-Unis aujourd'hui d'un point de vue de l'allocataire d'actifs que vous êtes ?
05:04 Qu'est-ce qui intéresse ? Où est-ce qu'on a envie d'être investi aux États-Unis ?
05:08 Et quel est le rationnel de l'investisseur qui doit se tourner vers les États-Unis aujourd'hui ?
05:14 Il y a eu une extrême focalisation de la tension sur le resserrement monétaire.
05:20 On était à taux zéro, on est à taux cinq.
05:23 Et avec une anticipation qui pour l'instant ne se déroule pas d'une entrée rapide, profonde en récession.
05:30 Là où il y a une autre variable qui en parallèle a bougé,
05:34 donc le resserrement monétaire, restriction des conditions monétaires et distribution du crédit,
05:38 en parallèle la politique fiscale qui est du côté de Président Biden et de Madame Yellen a été largement assouplie.
05:48 On est maintenant sur des rythmes de déficit budgétaire largement supérieurs à ceux qu'on avait l'an dernier.
05:54 Aucune de ces deux années ne sont des années de crise.
05:57 Et pourtant ils sont sur des rythmes, en fin d'année s'ils devaient continuer les rythmes actuels,
06:02 on serait peut-être à 7 ou 8% de déficit budgétaire.
06:05 Et quand on fait des déficits qu'on dépense beaucoup tel qu'ils le font,
06:08 une partie c'est de l'infrastructure, une partie c'est les investissements de subventions pour construire du renouvelable.
06:15 Il y a des bonnes idées, mais c'est du dépense publique, ça fait de la croissance économique.
06:20 Donc ça se retrouve dans les résultats publiés par les entreprises cotées en bourse,
06:26 qui se retrouvent dans des dividendes, qui se retrouvent dans des rachats d'actions.
06:29 Et ça explique quelque part le différentiel de performance qu'on a eu mais qu'on peut continuer d'avoir
06:35 entre les actions américaines, les actions européennes et les actions chinoises.
06:39 Maintenant, si on fait du multi-actif, à partir du moment où il y a un peu plus de croissance,
06:46 ou beaucoup plus de croissance, et des injections publiques, ça veut dire que l'inflation peut arrêter de baisser.
06:53 Parce que sur le premier semestre, on a eu un élément très vertueux pour l'ensemble des marchés,
06:58 avec des bonnes surprises, la délivrance des marchés d'action,
07:01 et ce qui était la baisse des chiffres d'inflation sur les points hauts d'octobre dernier,
07:06 avec un prix du baril qui réagit à cette croissance américaine,
07:10 qui réagit aussi à la rupture sur l'offre, puisque l'Arabie Saoudite a officialisé qu'ils accentuaient la réduction de l'offre,
07:18 à un moment où la demande est plutôt bonne.
07:20 Ça provoque des chiffres sur le pétrole, c'est un actif sur lequel on pense qu'il faut être aussi,
07:25 sur les secteurs liés dans les marchés actions, mais ça provoque peut-être un petit peu plus d'inflation sur la fin d'année,
07:32 ce n'est pas nécessairement très bon pour les obligations américaines.
07:34 Je comprends. Donc c'est plutôt action américaine qui vous intéresse aujourd'hui.
07:39 Et si on se dit que la baisse des taux d'intérêt attendus quelque part en 2024 peut être décalée dans le temps,
07:46 s'il y a un peu plus de croissance, on est à 15 mois de l'élection présidentielle américaine de novembre 2024,
07:52 il n'est peut-être pas idiot complètement de faire un lien entre des dépenses fiscales aujourd'hui
07:57 qui provoquent de la croissance avant une élection, et ça peut durer encore un petit peu.
08:02 Donc c'est le dollar qui en bénéficie. Et les anticipations généralisées, c'était que l'euro se raffermirait
08:09 avec le resserrement monétaire de la BCE, avec un arrêt de la hausse des taux de la Fed, le dollar pourrait s'affaiblir.
08:15 C'était les positions qu'on avait en début d'été sur le marché.
08:18 Oui, c'est ça. Et donc le dollar ne monte pas vraiment, mais il ne baisse pas par rapport aux attentes.
08:23 Et en débouclement des positions, de se dire que le dollar peut baisser à court terme dans les mois qui viennent,
08:29 à baisser, voire baisser sensiblement, pour nous c'est plutôt une erreur.
08:32 Je comprends. Donc on peut acheter des actions américaines sans trop se couvrir contre le dollar aujourd'hui.
08:37 Sans se couvrir pour l'instant, oui.
08:39 Vous parliez de l'ampleur des déficits historiques aux Etats-Unis en période de non-récession, Alain.
08:46 Dans quelle mesure c'est un sujet qui va nous accompagner ? Est-ce que ça devient un sujet structurel ?
08:51 Est-ce que ça veut dire que le trésorerie américain a peut-être perdu un peu de sa valeur d'actif sans risque,
08:58 d'actif refuge ultime ? Ce n'est pas passé inaperçu.
09:02 Il y a quelques agences de notation qui ont remillé sur la question de la soutenabilité des finances publiques américaines.
09:08 Alors quand on dit soutenabilité des finances publiques, c'est toujours sur des trajectoires à plusieurs années.
09:13 Mais est-ce qu'il y a quelque chose qui a changé peut-être de ce point de vue-là ?
09:17 Ou comment est-ce que vous revoyez la question des finances publiques revenir sur le devant de la scène pour les investisseurs ?
09:22 C'est peut-être d'ailleurs un sujet de 2024 et pas forcément de fin d'année,
09:25 mais c'est quelque chose qu'on a quand même mis sous cloche depuis trois bonnes années maintenant.
09:32 Il y a deux questions en une. Un peu partout dans les pays développés, les déficits publics restent importants.
09:39 Ils le sont beaucoup plus aux Etats-Unis que ce qu'on peut voir en Europe.
09:43 Mais un peu partout, depuis 2020, il y a des injections publiques très importantes.
09:47 Heureusement, quand on était en pandémie, ça dégrade, ça force à des émissions d'obligations d'État par les États.
09:54 Ça renforce la dette publique. Et il y a donc cet été, l'été dernier, les États-Unis se sont fait dégrader par une des grandes agences de notation.
10:02 Ils ont perdu le AAA. C'est parfaitement justifié. Il n'y avait rien d'étonnant à ça.
10:06 Ça a été une révolution sur place en disant "mais qu'est-ce que vous nous faites à notre AAA ?"
10:09 Mais c'était en gros sur la gouvernance, quand on voit la difficulté à trouver des équilibres sur les budgets aux États-Unis et à Washington.
10:18 C'est aussi la gouvernance qui pose problème, c'est pas que les dépenses.
10:20 C'était le même argument de SNP il y a dix ans.
10:22 Exactement. Donc là, c'est pas anormal. Il reste encore avec un très très bon credit rating.
10:27 Le deuxième élément, c'est si on devait développer quelque part dans 2024, parce que là, s'il doit y avoir une décélération des États-Unis,
10:35 c'est plutôt quelque part en 2024 que ce soit l'exercice 2023. Les actions sont en train de s'alluer américaines.
10:40 Quelque part, les actions européennes, dans un contexte conjoncturel compliqué, elles n'ont pas baissé.
10:46 Non, elles n'ont pas baissé. C'est une résistance qui vient aussi. Les grandes entreprises européennes ont des gros contenants d'activités aux États-Unis.
10:54 Donc le deuxième élément, c'est comment on trouve s'il doit y avoir un ralentissement. Est-ce que vous le jouez par les obligations ou par le dollar ?
11:02 Et donc là, le dollar tient. Il ne tiendra pas demain. Il ne tiendra pas demain.
11:07 C'est donc par quel biais vous allez transformer ce côté plus négatif qui va se dérouler quelque part en 2024.
11:16 Et les obligations seront peut-être moins inquiétantes, puisque si vous êtes face à un ralentissement économique qui finira par arriver,
11:23 à 4,5 %, je suis acheteur d'obligations américaines. Vous voyez, dans un portefeuille multiactif, vous avez des actions, des obligations d'État,
11:31 des obligations privées, peut-être des actifs alternatifs de matières premières ou autres. À la veille d'un ralentissement économique qui n'est pas pour tout de suite,
11:39 vous achetez des obligations, parce que les taux, ils sont bien remontés. Donc dans un portefeuille équilibré, c'est ça qui permet d'avoir des actions,
11:46 qu'on soit un particulier, un patrimoine ou un institutionnel. On peut aujourd'hui protéger une position action significative avec des obligations,
11:56 parce qu'en cas de coup de griseau et de volatilité sur les actions, les taux des obligations baisseront et vous gagnerez de l'argent sur vos obligations.
12:03 Oui, très clair. Mais vous dites "attention, il faut bien respecter quand même le jeu des séquences, il ne faut pas se positionner trop vite, trop tôt
12:10 pour ce ralentissement américain qui finira peut-être par arriver à un moment au cours de 2024".
12:15 Il finira par arriver, c'est une certitude. Oui, oui, oui. Mais ce n'est pas le timing. Le timing est important quand même dans ces affaires-là.
12:20 Deuxièmement, il y a le timing et la quantité. Parce que si, tant que la politique fiscale reste franchement expansionniste, ce n'est plus le débat entre,
12:30 en franglais, entre "hard landing" et "soft landing", donc un ralentissement marqué ou un ralentissement modeste. Le débat en ce moment, il est devenu entre
12:38 "soft landing" et "no landing", c'est-à-dire si on continue d'injecter cette allure-là, le "no recession"... Il n'y a plus d'atterrissage, quoi !
12:45 Pour l'instant, il y aura beaucoup d'urgence. Oui, oui, le monde peut changer, bien sûr. Mais c'est la politique fiscale, quelque part, qui va nous donner un go,
12:51 et donc c'est ce qu'on observe de très très près en ce moment. Et pour l'instant, quand on voit Mme Yellen qui est revenue du G20 en Inde
12:58 avec un message particulièrement confortable sur l'observation qu'elle a de l'économie américaine, elle sait très bien ce qu'elle fait.
13:04 C'est elle qui dirige la politique fiscale. C'est la grande argentière des États-Unis pour le président Biden. Ils sont à 15 mois d'une élection,
13:10 ils sont du même bord politique, ils savent très bien ce qu'ils font. Donc c'est là où on a passé, je pense, dans les échanges que vous avez,
13:17 qu'on a un grand bonheur à écouter et à partager, on a beaucoup beaucoup focalisé en temps de parole sur la politique monétaire,
13:24 et est-ce que la prochaine fois c'est 25 ou c'est pas 25, et le QT, le QE... On a beaucoup focalisé sur la technicalité et les enjeux de la politique monétaire.
13:33 Là, il faut rééquilibrer. La politique monétaire, ça se calme, a priori. Au moins, pour un moment, ils ont arrêté de monter les taux.
13:39 Ils ont exactement exécuté la réduction du bilan, qui est bien préannoncée à des vitesses relativement modestes. Il faut focaliser aussi maintenant sur la politique fiscale.
13:48 Merci beaucoup Alain. Merci d'être venu nous éclairer sur la stratégie d'allocation d'actifs que vous recommandez pour vos clients dans la perspective du quatrième trimestre.
13:57 Alain Bocopzat, qui est avec nous, l'invité de ce dernier quart d'heure de Smartbourse ce soir, responsable membre de l'allocation d'actifs de Société Générale CIB.
14:04 [Musique]

Recommandée