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Chaque matin, Lionel Gougelot analyse l’actualité avec un invité. Ce mardi, il reçoit Nicolas Pouvreau-Monti, Cofondateur de l’observatoire de l’immigration et de la démographie.
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Transcription
00:00 - Europe 1, 6h, 9h.
00:02 - Lionel Gougelot. - Et soyez les bienvenus à 7h14, votre invité ce matin Lionel, Nicolas Pouvreau-Monti,
00:08 cofondateur de l'Observatoire de l'Immigration et de la Démographie.
00:10 - Bonjour Nicolas Pouvreau-Monti. - Bonjour. - Merci d'être en direct ce matin sur Europe 1, cofondateur donc de cet Observatoire de l'Immigration et de la Démographie
00:17 que vous avez fondé en 2020, c'est bien ça ? - Absolument.
00:20 - Vous rassemblez des hauts fonctionnaires, des membres de la société civile qui étudient les évolutions migratoires et démographiques en France.
00:27 Au-delà, on va le dire tout de suite, au-delà des postures politiques, vous observez la question migratoire en France de façon factuelle, chiffrée,
00:34 et le premier constat que vous faites, c'est qu'il n'y a jamais eu autant d'entrées sur le territoire français que sous les mandats d'Emmanuel Macron.
00:42 1,6 million d'entrées légales, précisons-le, c'est bien ça ?
00:47 - C'est ça, pour être précis, 1,6 million de premiers titres de séjour qui ont été octroyés en France entre
00:52 2017 et 2022. En moyenne annuelle, c'est 23% de plus que sous François Hollande et 41% de plus que sous Nicolas Sarkozy.
00:59 Sur ce volume record, l'année dernière, 2022, c'est l'année record des années record, puisqu'on a eu
01:04 316 000 premiers titres de séjour accordés, c'est absolument inédit.
01:08 Et à côté de ça, il y a tous les autres volumes de l'immigration légale, je pense notamment aux demandes d'asile,
01:13 680 000 premières demandes d'asile,
01:16 distinctes donc des premiers titres de séjour qui ont été accordés entre 2017 et 2022, là aussi on est sur des chiffres records.
01:21 - Alors ça, évidemment,
01:22 tout cela ne prend pas en compte l'immigration illégale, qui par définition est difficilement quantifiable.
01:27 - Elle est difficilement quantifiable, mais elle peut être approchée par certains indicateurs.
01:30 Si on prend par exemple le nombre des bénéficiaires de l'AME, l'Aide médicale d'État, qui comme vous le savez est réservée aux immigrés en situation irrégulière,
01:37 ce nombre de bénéficiaires a augmenté de 32% depuis 2017,
01:41 ce qui indique, je dirais, une croissance plus globale de la part de l'immigration clandestine.
01:45 - Alors la question que doivent se poser forcément les auditeurs d'Europe 1 en vous écoutant,
01:50 à quoi cela tient ?
01:52 - J'irais qu'il y a deux grands types de raisons. Il y a d'abord des raisons pour être d'une justesse aussi nécessaire qu'elle l'est,
01:59 qui ne tiennent pas à la présidence Macron, c'est-à-dire qu'on a une dynamique globale
02:02 d'augmentation des flux migratoires vers la France depuis la fin des années 90.
02:06 J'évoquais le chiffre de 316 000 premiers titres de séjour.
02:09 À titre de comparaison, c'est 153% de plus que le nombre de premiers titres de séjour qu'on octroyait en 1999.
02:15 Donc voyez, c'est une hausse qui continue depuis bientôt 25 ans.
02:19 Il y a une deuxième catégorie de facteurs qui ceux-ci sont plus de la responsabilité du politique en effet.
02:24 L'immigration, vous savez, c'est beaucoup une affaire de signaux et de contre-signaux.
02:28 Il y a d'une part les signaux d'attractivité, qui sont envoyés notamment par les immigrés
02:33 vers leur pays d'origine, via les réseaux sociaux, via les moyens de communication.
02:36 Et il y a d'autre part ce qui pourrait être les contre-signaux du gouvernement, c'est-à-dire une volonté de désinciter certains types d'immigration,
02:42 et ces contre-signaux à ce jour laissent à désirer.
02:45 - Alors on va en reparler justement dans le cadre de la loi immigration qui a été votée au Parlement,
02:49 mais vous dites que, si je vous ai bien lu, ce sont les immigrés eux-mêmes qui ont pris le contrôle de la politique migratoire en France,
02:56 entretenue par l'État de droit. Qu'est-ce que vous entendez par là ?
02:59 - En fait, si on regarde aujourd'hui les grands volumes de l'immigration en France, on se rend compte que sur 20 ans,
03:04 la part principale tient à l'immigration familiale.
03:07 Et cette immigration familiale, elle est aujourd'hui hors du contrôle du politique.
03:10 Elle est corsetée par un ensemble de règles qui tiennent notamment aux traités,
03:14 je pense à la CEDH, l'article 8 sur le droit à la vie privée et familiale,
03:17 qui tiennent aussi à la jurisprudence, aux décisions des juges en France, notamment des juges constitutionnels et des juges administratifs,
03:23 qui font qu'en la matière, un texte de loi comme celui qui a été adopté la semaine dernière par le Parlement après la commission mixte paritaire
03:30 ne peut pas changer à lui seul fondamentalement la donne, puisqu'il faut se concentrer aussi
03:36 sur des éléments de droit qui sont supérieurs à la loi et qui tiennent notamment à ces traités.
03:40 - Donc ça veut dire que la loi qui a été adoptée la semaine dernière ne va rien changer, je veux dire, en termes de flux migratoire.
03:47 - Cette loi apparaît pour une série de mesures techniques, pour certaines d'entre elles de bon sens,
03:52 mais en effet elle ne changera pas
03:54 les grandes masses de l'immigration en France, elle ne les aborde pas.
03:58 Il n'y a quasiment rien sur l'immigration familiale, à l'exception d'une série de mesures techniques de restriction sur le regroupement familial.
04:03 - Et qui vont avoir un effet ?
04:04 - Qui vont avoir un effet très limité en termes de volume.
04:06 Je pense que ça ne suffira pas à endiguer la tendance à la hausse qui est celle que j'évoquais.
04:10 Il n'y a rien sur l'asile, l'asile qui lui aussi est contraint par un certain nombre de contraintes internationales.
04:16 Il y a eu, il y a de ça trois semaines au Parlement, un débat sur l'accord franco-algérien.
04:20 Comme vous le savez, les Algériens qui sont la première nationalité bénéficiaire des titres de séjour
04:24 - Ne sont pas concernés.
04:25 - Ne seront pas concernés par une large part des dispositions de ce projet de loi.
04:28 Tout cela, mis bout à bout, laisse sceptique quant à l'impact de ce texte sur les grands volumes de l'immigration.
04:33 - Les quotas d'immigration que le Parlement va pouvoir déterminer sur des périodes de trois ans,
04:39 est-ce que ça, ça ne peut pas avoir un effet, encore une fois, sur les flux migratoires ?
04:42 - D'abord, cette question des quotas, il faudra voir si elle passe le cap du Conseil constitutionnel.
04:47 On sait qu'elle est souvent citée parmi les mesures que le Conseil pourrait être amené à retoquer.
04:52 Mais plus fondamentalement, se pose la question de l'effectivité d'une politique de quotas
04:57 dans le cadre d'une zone de libre circulation.
04:59 Puisque comme vous le savez, aujourd'hui, les accords de Schengen,
05:02 ils valent à la fois pour les ressortissants des pays membres de l'espace,
05:06 mais ils valent aussi pour les étrangers extra-communautaires
05:08 qui obtiennent un titre de séjour dans un pays voisin.
05:11 Faire appliquer des quotas quand en réalité notre politique migratoire est liée à celle de nos voisins,
05:16 qu'un titre de séjour en Allemagne vaut aussi capacité à circuler librement en France,
05:20 laisse quand même assez sceptique.
05:21 - Alors justement, vous avez peut-être lu le dossier du Figaro ce matin,
05:25 qui observe que partout en Europe, on assiste à un durcissement des politiques migratoires.
05:30 En fait, si je vous comprends bien, c'est au niveau européen que l'on maîtrisera mieux la question ?
05:35 - À ce jour, le niveau européen, il revêt plus l'aspect d'une contrainte
05:40 pour les États qui veulent contrôler leur politique migratoire que d'un vrai appui.
05:44 Les normes européennes en la matière, notamment celles issues des jugements
05:48 de la Cour de justice de l'Union européenne,
05:50 mais aussi de la Cour européenne des droits de l'homme,
05:51 qui sont deux tribunaux distincts, limitent fortement le poids des États.
05:55 En revanche, là où vous avez parfaitement raison,
05:57 c'est qu'il y a aujourd'hui dans une majorité de pays de l'Union européenne,
06:00 des gouvernements, quel que soit leur étiquette partisane d'ailleurs,
06:03 qui ont à cœur de reprendre la main politiquement sur ces sujets,
06:06 et cela pourrait se traduire par exemple par une modulation des traités.
06:09 Pour moduler les traités, il faut l'unanimité des États membres ou presque,
06:14 et on se rend compte que le paysage politique de l'Union change.
06:17 Et c'est très frappant de voir que ces préoccupations sont complètement décorrélées
06:20 du clivage gauche-droite tel qu'on le conçoit actuellement.
06:23 On parle beaucoup, et à juste titre, du modèle danois en la matière.
06:26 Le Danemark, qui a appliqué une politique de restriction sur le large plan de l'immigration,
06:30 c'est une politique qui a été mise en place par les sociodémocrates.
06:32 On entend aujourd'hui aussi ce que dit le chancelier Scholz en Allemagne,
06:35 qui est lui aussi social-démocrate,
06:36 et qui prend acte des échecs de la politique d'ouverture large
06:39 menée par le gouvernement Merkel.
06:40 - Dernière question, Nicolas Pouvremonti.
06:42 Les opposants au texte qui a été adopté par le Parlement
06:46 se sont scandalisés du fait que l'on instaurait en France la préférence nationale.
06:51 C'est un terme qui fait peur pour une certaine partie de la classe politique.
06:56 Est-ce que c'est vraiment le cas dans ce texte ?
06:57 - À mon sens, ce n'est pas le cas.
06:59 Les mesures qui sont visées par ces assertions
07:03 ont essentiellement trait à des durées de résidence,
07:05 c'est-à-dire qu'il faudra attendre un certain nombre d'années,
07:08 ça pourrait être cinq ans pour les allocations familiales ou les APL,
07:10 en réalité qui pourront être réduites très fortement si les étrangers en question travaillent.
07:14 Ce sera deux ans et demi pour les allocations familiales,
07:16 trois mois pour les APL, ce qui est très peu.
07:17 Et moi, je suis assez surpris qu'on se focalise sur ces mesures
07:19 qu'on présente comme de préférence nationale.
07:21 À mon sens, elles ne le sont pas,
07:23 alors qu'aujourd'hui, on a plutôt affaire à un phénomène inverse,
07:25 c'est-à-dire une sorte d'embolie d'un certain nombre de dispositifs
07:28 de solidarité collective du fait de l'immigration.
07:30 Pour citer simplement une donnée, les APL, ça a trait au logement.
07:33 On a aujourd'hui environ la moitié des ménages immigrés en France
07:36 originaires d'Afrique subsaharienne ou du Maghreb qui vivent en logement social.
07:39 C'est trois à quatre fois plus que les ménages non immigrés.
07:42 Et le projet de loi immigration, non seulement il n'inversera pas ce déséquilibre,
07:46 mais à mon sens, il ne le rééquilibrera même pas.
07:48 - Alors, pour être juste dans la terminologie,
07:50 plutôt que de parler de préférence nationale avec toutes les connotations que ça suppose,
07:54 il faudrait dire priorité nationale, peut-être ?
07:56 - Pour ce qui est des mesures évoquées, on pourrait parler d'un délai de carence,
07:58 fondamentalement, c'est-à-dire le temps pour les étrangers de contribuer eux-mêmes
08:02 aux dispositifs de solidarité collective avant de pouvoir en bénéficier.
08:07 - Merci Nicolas Pouvre-Montique, fondateur de l'Observatoire de l'immigration et de la démographie.
08:12 Merci d'avoir été en direct ce matin sur Orban.

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