Affaire n° 2023-1075 QPC
Récupération et valorisation des métaux issus d’une crémation
Date de rendu de la décision : 18 janvier 2024
Récupération et valorisation des métaux issus d’une crémation
Date de rendu de la décision : 18 janvier 2024
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00:00 L'audience est ouverte. Nous allons commencer donc à la fois cette audience et l'année
00:11 avec la question prioritaire de constitutionnalité numéro 2023-1075 qui porte sur l'article
00:20 L2223-18-1-1 du Code Général des Collectivités Territoriales.
00:27 Madame la greffière expliquez-nous où nous en sommes de la procédure d'instruction.
00:31 Je vous remercie monsieur le Président.
00:32 Le Conseil constitutionnel a été saisi le 18 octobre 2023 par une décision du Conseil
00:37 d'État d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société
00:41 Europe Metal Concept portant sur la conformité aux droits et libertés que la constitution
00:45 garantit de l'article L2223-18-1-1 du Code Général des Collectivités Territoriales
00:53 dans sa rédaction issue de la loi numéro 2022-217 du 21 février 2022 relative à
00:59 la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures
01:03 de simplification de l'action publique locale. Cette question relative à la récupération
01:09 et valorisation des métaux issus d'une crémation a été enregistrée au secrétariat général
01:14 du Conseil constitutionnel sous le numéro 2023-1075 QPC. Maître Sébastien Braque dans
01:20 l'intérêt de la société Europe Metal Concept, partie requérante, a produit des
01:23 observations les 8 et 22 novembre 2023. La Première Ministre a produit des observations
01:28 le 8 novembre 2023. Dans cette affaire, Mme Jacqueline Gourault a estimé devoir s'abstenir
01:33 de siéger. Seront entendues aujourd'hui l'avocat de la partie requérante et le
01:37 représentant de la Première Ministre. Merci beaucoup Madame. Alors, Maître Berlottier
01:42 Merle, vous êtes avocat au Varo de Lyon, vous représentez la société Europe Metal
01:48 Concept, partie requérante, et vous avez la parole.
01:51 Je vous remercie Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil.
01:57 Effectivement, Jean-Baptiste Berlottier Merle, je plaide pour la première fois devant votre
02:00 Conseil et c'est un honneur. Je vous remercie, je plaide en présence bien sûr de mon client
02:06 dans la salle. Une question assez intéressante qui est posée, une question qui est aujourd'hui
02:13 de savoir si des tiers absolus peuvent récupérer et valoriser pour leur propre compte des
02:20 métaux issus de la crémation. Le régime actuel est issu de la loi 3DS, comme il a
02:27 été rappelé, et en réalité constitue une validation législative d'une pratique qui
02:31 existe depuis dizaines, quinzaines d'années environ. Une pratique qui veut que lorsqu'un
02:37 corps d'un défunt fait l'objet d'une crémation, effectivement, divers résidus
02:42 existent et restent à l'issue. Nous avons des éléments qui sont purement des éléments
02:48 du corps humain, c'est-à-dire des os, des calcius, et nous avons effectivement ces
02:52 éléments métalliques qui sont de deux origines diverses, des éléments qui ont été
02:58 extra-corporels, qui sont des restes de cercueils, des clous, des vis ou autre. Et nous avons
03:04 des éléments qui ont été, à un moment ou à un autre, implantés dans un corps humain.
03:08 Là, on parle de prothèse. Le régime tel qu'il est aujourd'hui mis en place par
03:16 la loi 3DS et par le décret d'application prévoit que ces métaux font l'objet d'une
03:22 récupération par les crématoriums et font l'objet d'une valorisation pour le compte
03:29 des crématoriums. Il nous semble aujourd'hui que ce régime pose deux problématiques.
03:35 La première question est liée à la qualification juridique de ces métaux issus de la crémation.
03:43 Est-ce qu'ils font partie ou pas du corps humain ? Est-ce qu'ils constituent aujourd'hui
03:47 des éléments du corps humain ? Et la deuxième question, si par extraordinaire ces éléments
03:53 ne font pas partie du corps humain, à qui appartiennent-ils ? Sur la première question,
04:03 il nous semble aujourd'hui qu'il faut faire une distinction entre les résidus métalliques
04:09 qui sont issus des cercueils et les résidus métalliques qui ont été implantés dans
04:19 le corps humain. Et c'est cette première distinction qui est réellement importante.
04:23 Parce que la jurisprudence, la loi est très claire aujourd'hui, une prothèse, à partir
04:29 du moment où elle est implantée dans le corps humain, devient un élément du corps
04:34 humain. Et si l'on suit ce raisonnement, tout élément du corps humain, selon le Code
04:39 civil, est indisponible, est hors du commerce. Aucune possibilité de convention commerciale
04:44 ne peut être faite dessus. Ce qui sous-entend que si ces éléments font bien partie du
04:50 corps humain, sont bien des éléments du corps humain, ils ne peuvent faire l'objet
04:53 d'une valorisation et doivent être traités au même titre que les cendres funéraires.
04:57 Aujourd'hui, la loi, en prévoyant la possibilité de valoriser des éléments du corps humain,
05:08 est inconstitutionnelle. Première option. Deuxième option, si par extraordinaire ces
05:20 éléments ne sont pas considérés comme des éléments du corps humain, ce qui est
05:25 relativement étonnant et compliqué à démontrer, puisqu'il n'y a rien, mis à part le passage
05:32 par le feu, qui changerait et qui justifierait un changement de l'état et de la nature
05:38 de ces prothèses. Ces éléments-là deviendraient donc des résidus métalliques qui peuvent
05:47 faire l'objet d'une valorisation. Mais la vraie question c'est, qui est propriétaire
05:54 de ces éléments-là ? Pour qui la valorisation peut être réalisée ? Le régime actuel prévoit
06:03 une valorisation pour le compte décrématorium avec une simple information des familles,
06:07 mais surtout, aujourd'hui, vous pourrez constater, le régime actuel ne prévoit pas, d'une
06:11 part, pour les familles, une information complète sur cette valorisation, sur la valeur des
06:16 métaux. Et il y a une vraie valeur dans ces métaux, il y a un vrai enjeu économique,
06:22 puisqu'aujourd'hui, il y a des métaux rares, il y a des métaux précieux, que l'on récupère
06:27 à l'issue d'une crémation. Cette valorisation par les crématoriums est irrégulière, puisqu'effectivement,
06:40 la jurisprudence est claire aujourd'hui. Nous avons eu des exemples, les restes humains,
06:48 qui ont fait l'objet d'une inhumation, qui ont été enterrés, qui ont fait l'objet
06:53 d'abandons, des sépultures abandonnées, ont été considérés comme des éléments
07:00 qui peuvent, qui ne sont pas insusceptibles de vol. Ce qui veut dire que la jurisprudence
07:07 a considéré que des tombes abandonnées ne permettaient pas de considérer que les restes
07:15 humains qui avaient dans ces tombes étaient devenus des biens sans maître. C'est-à-dire
07:19 que même des tombes abandonnées, il y a toujours une propriété sur les biens de ces tombes.
07:24 Il y a eu des condamnations de faux soyeurs qui avaient récupéré des objets de valeur
07:29 dans des tombes abandonnées, qui ont été condamnées pour vol. Aujourd'hui, ça sous-entend
07:33 donc que ces résidus du corps humain, ces résidus métalliques, font bien l'objet
07:39 d'un droit de propriété. Nous avons également un certain nombre de personnes, un certain
07:46 nombre d'auteurs, qui considèrent effectivement qu'il y a une certaine copropriété familiale
07:52 sur les restes des corps humains. Aujourd'hui, si l'on suit ce raisonnement, le régime tel
08:02 qu'il est envisagé permettrait à des crematoriums, qui sont des tiers absolus aux familles, de
08:11 récupérer des éléments du corps humain pour les valoriser pour leur compte, au détriment
08:15 des familles les ayant droit, qui ne pourraient bénéficier et qui, en réalité, légalement
08:21 ont un droit patrimonial sur ces éléments-là. Le régime est donc là aussi inconstitutionnel
08:31 puisqu'il porte une véritable atteinte au droit de propriété des familles sur ces
08:40 résidus métalliques qui appartenaient aux défunts. Deux hypothèses donc. Première
08:49 hypothèse, les résidus métalliques font bien partie du corps humain et sont donc insusceptibles
08:54 d'une valorisation à quelque niveau que ce soit. Seconde hypothèse, les résidus
08:59 métalliques ne sont pas des éléments du corps humain mais font l'objet d'un droit
09:02 patrimonial qui appartient aux ayant droit des familles et toute valorisation qui pourrait
09:08 être faite doit être faite dans l'intérêt exclusif des familles. Aujourd'hui, le régime
09:15 ne prévoit pas cela, prévoit une valorisation pour le compte des crematoriums et c'est
09:19 en cela que cette loi est inconstitutionnelle. Pour le surplus, Monsieur le Président, Mesdames
09:24 et Messieurs les membres du Conseil, je me rapporterai à mes écritures et je reste
09:28 à votre entière disposition si vous avez quelconques interrogations. Merci Maître.
09:34 Alors maintenant, nous allons écouter pour le compte du Secrétaire Général du Gouvernement,
09:44 Monsieur Canguilhem. Merci Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil
09:52 constitutionnel. La récupération des métaux issus de la crémation est d'abord une pratique
09:56 qui s'est développée au cours des années 2010. L'intervention du législateur s'est
10:00 alors avérée nécessaire pour encadrer juridiquement cette pratique afin notamment de préciser
10:05 la destination des recettes financières ainsi générées, estimées par un rapport parlementaire
10:11 d'environ 2 millions d'euros par an. Il s'agissait également d'assurer la neutralité
10:16 du choix de la crémation plutôt que de l'inhumation quant à la situation des ayant droit vis-à-vis
10:21 de ces résidus métalliques. Il est important de rappeler ici que l'objectif poursuivi
10:27 par le législateur n'est pas d'encourager une valorisation économique des éléments
10:31 métalliques contenus dans le corps du défunt, mais au contraire de l'éviter lors de la
10:38 nécessaire gestion de ces résidus métalliques issus de la crémation et enjeu qui par définition
10:44 ne se retrouve pas en cas d'inhumation. Il résume donc désormais du grand 1 de l'article
10:50 L223-18-1-1 du Code général des collectivités territoriales, issu de la loi du 21 février
10:57 2022, nous citons que "sans considération de leur origine, les métaux issus de la crémation
11:02 ne sont pas assimilés au cendre du défunt. Ces métaux font l'objet d'une récupération
11:06 par le gestionnaire du crématorium pour cession à titre gratuit ou onéreux en vue du traitement
11:10 approprié pour chacun". En application de ces dispositions, des entreprises spécialisées
11:16 dans le recyclage des métaux peuvent donc acquérir les métaux issus de la crémation
11:22 qui peuvent provenir de trois origines distinctes, de bijoux ou d'accessoires qui étaient présents
11:27 sur le corps du défunt et qui auraient été maintenus sur celui-ci au moment de la crémation,
11:32 les métaux issus du cercueil ou encore les prothèses. Mais il est important de préciser
11:39 à cet état qu'il n'est pas possible, après la crémation, de déterminer au sein
11:44 de ces résidus leur origine. Ainsi la distinction qui est proposée par la société requérante
11:51 qui viserait à distinguer les résidus selon qu'ils soient originaires de prothèses ou
11:55 d'autres éléments métalliques est impossible en pratique. La crémation réalisée, il
12:00 n'y a que des résidus métalliques. Le grand 2 de ce même article L223-18-1-1 du Code
12:07 général des collectivités territoriales flèche la destination des recettes financières
12:12 générées par cette situation. Recettes financières qui ne peuvent être utilisées que pour réaliser
12:17 des dons ou pour financer la prise en charge des obsèques de personnes dépourvues de
12:22 ressources suffisantes. Il n'y a donc pas de logique de valorisation économique par
12:28 ces dispositions. Ces dispositions ne portent atteinte ni au principe de dignité de la
12:34 personne humaine ni au droit de propriété qui constitue les deux griefs autour desquels
12:38 s'articule cette question prioritaire de constitutionnalité. Concernant le principe
12:43 de dignité, vous n'avez à ce jour jamais eu l'occasion d'appliquer post mortem les
12:47 exigences du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine. Toutefois
12:53 le législateur traduisant les exigences constitutionnelles de ce principe a assuré un égal respect
12:59 au corps humain avant et après le décès. Ainsi l'article 16-1-1 du Code civil dispose
13:04 que le respect du haut corps humain ne cesse pas avec la mort. Le respect des exigences
13:10 du principe constitutionnel du respect de la dignité de la personne humaine s'applique
13:14 donc post mortem. Le grief tiré de la méconnaissance de ce principe est donc bien opérant en l'espèce.
13:21 Il est en revanche infondé. En effet, en prévoyant expressément, nous citons, que
13:28 les métaux issus de la crémation ne sont pas assimilés au cendres du défunt, le législateur
13:33 s'est inscrit dans ce cadre législatif et constitutionnel qui impose le respect post
13:39 mortem de la dignité aux seuls éléments du corps humain. Il a ainsi entendu assurer
13:45 une protection au seul cendre du défunt sans l'étendre à d'autres éléments résultant
13:49 de la crémation. Si les éléments métalliques dont les résidus sont cédés après la crémation
13:56 ne bénéficient pas d'une même protection, c'est justement parce que les produits dont
14:02 ils sont issus ne sont pas des éléments du corps humain. Cela relève de l'évidence
14:08 en ce qui concerne les bijoux et les éléments métalliques du cercueil, c'est également
14:12 le cas en ce qui concerne les prothèses que celles-ci soient externes ou internes au corps.
14:18 En effet, ces objets, s'ils sont indispensables et parfois même indissociables d'un corps
14:24 vivant, ces objets deviennent dépourvus d'utilité à la mort de la personne. Il ne s'agit
14:30 alors que d'une chose envers laquelle aucune protection particulière liée à la préservation
14:35 de la dignité du corps ne peut se justifier. Ce n'est pas, contrairement à ce qui a été
14:42 dit de l'autre côté de la barre, le passage par le feu qui modifie la destination de la
14:46 prothèse, mais bien le décès de la personne. Les dispositions contestées en permettant
14:53 la cession d'éléments métalliques distincts du corps humain n'ont donc pas porté atteinte
14:57 à la dignité de la personne humaine. Il est alors soutenu que si les résidus métalliques
15:03 issus de la crémation ne sont pas des éléments du corps humain, alors ils doivent nécessairement
15:07 être qualifiés de biens et que leur valorisation priverait alors les ayants-droits de leur
15:12 droit de propriété sur ces biens. La question de l'intégration à l'actif successoral
15:19 de ces résidus dépend là encore de la nature des biens dont ils sont issus, tout en rappelant
15:25 que les ayants-droits sont informés par affichage dans les crématoriums ainsi que dans les
15:30 documents contractuels qui leur sont fournis de la destination des résidus métalliques
15:34 issus de la crémation. En ce qui concerne les bijoux du défunt, ils sont à l'évidence
15:39 des biens meubles appropriés qui sont intégrés à l'actif successoral. Toutefois, en choisissant
15:45 de laisser les bijoux dans le cercueil destiné à la crémation, les ayants-droits ont nécessairement
15:50 renoncé à leur droit de propriété. Des décharges doivent d'ailleurs être signées
15:55 par les familles avant la crémation, indiquant les objets qui leur ont été resitués ou
16:00 ceux qui sont demeurés dans le cercueil. La fermeture du cercueil étant définitive
16:05 en application de l'article R22.13-17 du Code général des collectivités territoriales,
16:10 elle emporte par elle-même la cristallisation de la décision d'abandon du droit de propriété
16:14 des ayants-droits sur tout élément placé dans le cercueil destiné à la crémation.
16:20 La question de la propriété sur les éléments métalliques du cercueil obéit à une logique
16:25 similaire. L'abandon du cercueil et donc de l'ensemble de ses composantes est consubstantiel
16:32 à la crémation, crémation qui ne peut avoir lieu que conformément à la volonté exprimée
16:36 par écrit par le défunt en application des dispositions du R22.13-34 du CGCT. Il n'y
16:42 a donc pas d'avantage à ce stade d'atteinte au droit de propriété.
16:48 Enfin, en ce qui concerne les prothèses, la seule circonstance qu'elles ne soient
16:53 pas des éléments du corps humain n'a pas pour autant conséquence d'en faire pour
16:57 autant des biens transmis aux ayants-droits. En effet, vous avez jugé au considérant
17:02 12 de votre décision 274 QPC, nous citons que les héritiers ne deviennent propriétaires
17:07 des biens du défunt qu'en vertu de la loi successorale et aucune disposition législative
17:14 n'a ni pour objet ni pour effet d'intégrer ces prothèses dans l'actif successoral.
17:19 Or, il résulte de votre jurisprudence que la protection du droit de propriété ne peut
17:24 évidemment bénéficier qu'aux personnes légalement propriétaires d'un bien. En
17:28 ce qui concerne les résidus métalliques issus des prothèses du défunt, le grief
17:32 tiré de la méconnaissance du droit de propriété des ayants-droits est donc inopérant. Il
17:37 s'agit de l'ensemble de ce qui précède que le législateur n'a porté aucune atteinte
17:41 aux droits de propriété. Aucune exigence consécutive n'a été méconnue. Je vous
17:45 invite à déclarer les dispositions de l'article L223-18-1-1 du Code général des collectivités
17:50 territoriales conformes à la Constitution.
17:53 Merci beaucoup. Donc nous avons entendu les deux points de vue contradictoires. Est-ce
17:58 que les membres du Conseil vous posaient des questions ou est-ce que vous vous sentez clair?
18:04 Oui, Madame la conseillère Malbec.
18:06 Merci, Monsieur le Président. Une question peut-être au Conseil de la société. Qu'est-ce
18:11 que le texte nouveau qui fait l'objet d'un code d'acupéssis change pour votre client?
18:16 Est-ce qu'il y a une différence entre le texte tel qu'il ne résultait avant la loi
18:22 qui nous est soumise ou pas?
18:25 Venez à la barre parce que sinon on ne vous entendra pas.
18:28 Merci. Le texte ne change rien parce qu'en fait le texte vient créer du droit. En fait
18:34 le texte qui est contesté aujourd'hui est une pure création qui est venue mettre en
18:38 place un régime et qui est venue donner un fondement légal à un régime qui n'existait
18:45 pas auparavant. Il n'y avait strictement aucune règle jusqu'à la loi 3DS. C'est-à-dire
18:50 qu'on était dans une situation où les crématoriums étaient dans un flou juridique,
18:57 un grige juridique et cette loi est venue valider un état de fait. Nous sommes sur
19:05 une pure validation législative d'une pratique qui effectivement a commencé, comme l'a
19:10 dit le représentant du Premier ministre, depuis les années 2010.
19:14 Merci. Monsieur Corième, non pas là-dessus. Est-ce qu'il y a telle autre question? Oui.
19:20 Monsieur le conseiller Seners.
19:22 Merci Monsieur le Président. Ma question s'adresse à vous maître. Également sur
19:26 le second terrain, celui du droit de propriété. Donc en admettant que ce ne sont pas des éléments
19:31 du corps humain et que peut s'exercer un droit de propriété, Monsieur Canguilhem
19:36 a rappelé qu'en l'état actuel du droit, l'actif successoral qui est défini par
19:41 des textes législatifs ne comporte pas ce type d'élément. Donc je comprends que
19:45 votre grief tiré de la constitutionnalité de cette atteinte invoquée au droit de propriété
19:51 repose sur l'idée qu'il y aurait une espèce de droit de propriété par nature
19:56 en quelque sorte, indépendamment d'une définition législative. C'est bien ça?
20:01 Maître. Effectivement, Monsieur le conseiller, tout à fait. Il y a effectivement un droit
20:05 de propriété par nature. Si l'on suit aujourd'hui le raisonnement du Premier ministre,
20:08 il a été précisé à la barre juste avant, le Premier ministre considère que la fermeture
20:16 du cercueil et le fait de laisser des choses dans le cercueil reviendraient pour les ayant
20:20 droit à abandonner des éléments. Si j'en suis cette logique, c'est-à-dire que ces
20:26 éléments deviendraient des biens sans maître. Un subus qui pourrait faire l'objet d'une
20:31 appropriation par quiconque. Or, aujourd'hui, nous avons quand même une jurisprudence qui
20:37 est contradictoire de la part de la Chambre criminelle d'un cours de quêtation qui considère,
20:41 c'est ce que j'ai dit dans le cas de mes observations, que des tombes abandonnées
20:45 ne pouvaient faire l'objet d'une appropriation par quelqu'un d'autre. C'est pour ça
20:48 qu'on a eu des fausses voyeurs qui ont fait levé une condamnation pour avoir récupéré
20:54 en l'espèce des dents en or l'ordre des tombes qui ont été relevées. Si on suit
21:00 ce raisonnement-là, aujourd'hui, peu importe, la loi ne précise pas que ces biens entrent
21:05 dans l'actif successoral. La loi ne va pas préciser point par point ce qui rentre ou
21:10 non dans l'actif successoral. Par nature, ces éléments, effectivement, il y a cette
21:16 distinction entre tout ce qui va être extra-corporel, tout ce qui a été implanté dans le corps
21:21 humain. Aujourd'hui, effectivement, ces éléments-là, tant qu'ils ont été incorporés dans le
21:25 corps humain, tant qu'ils font l'objet d'un tout, puisque c'est un corps qui a
21:29 été brûlé, effectivement, il a des résidus, des résidus métalliques, des résidus de
21:33 seules, des cendres, des autres. On ne va pas faire cette distinction-là. Effectivement,
21:36 ça appartient bien aux ayants droits. C'est un tout. Et la distinction entre les résidus
21:43 métalliques et les autres résidus est totalement artificielle aujourd'hui. Si on doit suivre
21:49 une logique juridique, ces éléments-là appartiennent bien aux ayants droits. Et effectivement,
21:53 comme vous l'avez précisé, c'est bien le droit de propriété par nature, puisque
21:56 le droit de propriété sur le corps humain fait bien que ça appartient aux défunts
22:02 et donc aux ayants droits par votre conséquence.
22:06 Merci. M. Graguillem, ensuite, sur ce point.
22:13 Juste un élément rapidement sur ce point. Il n'y a pas de cas qui auraient été remontés
22:17 de demande de famille de récupérer des prothèses internes. Ça peut-être existé, en tout
22:24 cas, aucun cas n'est remonté. Et dans ce cas, d'ailleurs, pour les crématoriums,
22:29 ils sont très clairs sur ce point, on ne serait pas, s'il y avait un enjeu de récupération
22:33 de la prothèse interne, on n'est plus dans le cadre de l'organisation des obsèques.
22:37 Donc il faudrait trouver un médecin, et encore dans quel cadre ça paraît compliqué à
22:43 concevoir, qui opérerait cette extraction de la prothèse interne. En tout cas, on ne
22:50 serait plus dans le cadre de l'organisation des obsèques.
22:54 Merci. Vous voulez rajouter un mot là-dessus, M. Consimé ?
22:59 Merci. Président, oui, une précision. Bien évidemment, nous n'avons pas eu de cas
23:04 où les familles demandent à récupérer des éléments métalliques, pour deux raisons.
23:10 La première raison, bien évidemment, c'est le deuil. Lorsqu'on est en train d'enterrer
23:15 un proche, on ne se pose pas spécialement ce genre de questions. Deuxième élément,
23:22 c'est parce qu'aujourd'hui, il n'y a aucune information des familles. Il n'y a aucune
23:27 information. Mais qui, aujourd'hui, est au courant, avant l'introduction de cette
23:32 affaire, qu'il y a des éléments métalliques issus des crémations qui peuvent faire l'objet
23:39 d'une valorisation ? Personne. Personne n'aurait l'idée. Et aujourd'hui, qu'on soit bien
23:45 clair, ma position n'est pas de mettre en place un régime qui permettrait aux ayants
23:49 droits de venir récupérer des morceaux de métal qui sont passés par le feu, on est
23:54 bien d'accord. Pour en faire des reliques ou je ne sais quoi, on est tout à fait d'accord.
23:59 Aujourd'hui, il y a une valorisation. Cette valorisation doit profiter aux familles et
24:05 aux ayants droits des défunts.
24:07 Merci. Monsieur le conseiller Bézard.
24:10 Oui, j'avais une question à M. Canguilhem. Il n'est pas contesté que les cendres sont
24:16 propriétés des familles, puisqu'on les restitue. Vous nous avez dit que la caractéristique
24:21 de la prothèse, c'était que ce n'était plus utile à la personne défunte. Mais y a-t-il
24:28 d'autres éléments du corps humain qui lui soient encore utiles ?
24:33 M. Canguilhem. Dans ce cas-là, c'est une question de nature. Le corps humain, c'était
24:43 le premier élément de la démonstration. La question de la dignité du corps est identique
24:50 dans son respect avant ou après le décès. Pour des éléments qui ne sont pas naturellement
24:57 du corps humain et qui n'en font partie que par destination du vivant de la personne,
25:01 la destination cède avec le décès.
25:05 Et si je peux me permettre de rebondir sur ce qui avait été dit par mon contradicteur,
25:11 je rappelle qu'il y a bien une information, aussi bien dans les crématoriums que dans
25:17 les documents contractuels, et de contrats il y a nécessairement. Et enfin, sur la
25:22 question de l'information pour la récupération des prothèses, qu'elles soient internes
25:27 ou plus facilement externes, bien sûr, il faut évidemment rappeler que nous sommes
25:31 dans le cadre d'un deuil et que là, la gestion des crématoriums se fait de manière,
25:38 avec l'intelligence humaine, plus qu'avec la rigueur de procédures systématiques,
25:43 et cela se fait selon la configuration des familles et de l'organisation des observatoires.
25:50 Merci. Y a-t-il d'autres questions ? Madame la conseillère Malbec.
25:54 Pardon, M. le Président. Tout à l'heure, on a évoqué le chiffre de 2 millions d'euros
25:58 annuels que représentait la valorisation, et je crois avoir lu qu'on était sur une
26:04 somme, et c'est la confirmation que je souhaiterais avoir, entre 5 et 15 euros par cercueil.
26:11 Est-ce que l'un ou l'autre pouvait confirmer ? M. vous avez des éléments là-dessus ?
26:16 Les éléments qui aujourd'hui sont malheureusement indémontrables. Le chiffre de 2 millions d'euros
26:25 annuels nous paraît largement sous-évalué, puisque nous avons fait quelques recherches
26:32 rapides, notamment dans les rapports de Chambre régionale des comptes, qui s'intéressent
26:39 notamment au budget annexe des crématoriums municipaux, et on voit bien qu'en termes
26:45 de... la valorisation est intégrée dans le cadre de ces budgets annexes. Donc on arrive
26:51 à en avoir quelques-uns. Entre 5 et 15 euros par corps, c'est là encore largement sous-évalué,
26:57 on serait plus aux alentours de 100, entre 100 et 200 euros en moyenne. Pourquoi ? Parce
27:03 qu'on retrouve à peu près 4 à 5 grammes d'or par corps, en moyenne bien entendu, qui
27:09 serait plutôt de l'or dentaire. On retrouve également d'autres métaux qui ont une valorisation
27:15 qui est supérieure à l'or, notamment dans tout ce qui va être prothèses orthopédiques,
27:20 hanches, genoux et autres, on retrouve du titane et d'autres métaux qui sont considérés
27:28 comme des métaux rares et qui font l'objet d'une valorisation très particulière. Alors
27:33 on a un gros volume. Sur ce volume, on a au final assez peu de matière valorisable, mais
27:39 c'est de la matière qui est très valorisable. Donc il y a un intérêt quand même, on est
27:43 loin des 5 à 15 euros par corps, on serait plus proche, il faut que ça aille entre 100
27:49 et 200 euros environ. Mais voilà, c'est une constatation empirique.
27:54 Merci. Monsieur Canguilhem ?
27:58 Très rapidement, à la constatation empirique, pour ma part, je m'en rapporte aux chiffres
28:05 évoqués dans les observations écrites et qui ne sont pas les miens, qui sont issus
28:09 du rapport parlementaire du 25 novembre 2021 et qui font effectivement état de, au global,
28:15 de millions d'euros annuels et par opération autour d'une dizaine d'euros.
28:19 Merci. D'autres questions ? Il n'y en a pas. Alors, nous avons regardé tout ça
28:25 et aujourd'hui nous sommes le 9 janvier, nous rendrons notre décision le 18 janvier,
28:32 donc dans 9 jours. Voilà.