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Ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature
Lien vers la décision :
https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2024/20241097QPC.htm

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01:01Bien, bonjour à tous.
01:03La séance est ouverte.
01:05Dans cette affaire, Mme Malbec a estimé devoir s'abstenir de siéger.
01:08Nous examinons une question prioritaire de constitutionnalité
01:13sous le numéro 2024-1097.
01:16Elle porte sur les articles 52 et 56
01:20de l'ordonnance 58.12.70 du 22 décembre 1958
01:25portant loi organique relative au statut de la magistrature.
01:31Mme Lagréfière, dites-nous où nous en sommes de la procédure d'instruction.
01:35Merci, M. le Président.
01:37Le Conseil constitutionnel a été saisi le 19 avril 2024
01:40par une décision du Conseil d'État
01:42d'une question prioritaire de constitutionnalité
01:44posée par M. Hervé Alain
01:46portant sur la conformité aux droits et libertés
01:48que la Constitution garantit
01:50de l'article 52 de l'ordonnance 58-1270
01:53du 22 décembre 1958
01:55portant loi organique relative au statut de la magistrature
01:58dans sa rédaction
01:59résultant de la loi organique numéro 2010-830 du 22 juillet 2010
02:04relative à l'application de l'article 65 de la Constitution
02:07ainsi que de l'article 56 de la même ordonnance
02:10dans sa rédaction
02:11résultant de la loi organique numéro 2001-539 du 25 juin 2001
02:16relative au statut des magistrats
02:18et au Conseil supérieur de la magistrature.
02:21Cette question relative à l'information du magistrat
02:24mis en cause du droit qu'il a de se taire
02:26dans le cadre d'une procédure disciplinaire
02:28a été enregistrée au Secrétariat général du Conseil constitutionnel
02:32sous le numéro 2024-1097 QPC.
02:35M. Pierre Decomble de Ney a produit des observations
02:38dans l'intérêt de M. Hervé Alain
02:40parties requérantes les 14 et 27 mai 2024.
02:43Le Premier ministre a produit des observations le 15 mai 2024.
02:46M. Pierre Decomble de Ney
02:49a demandé à intervenir dans l'intérêt du syndicat de la magistrature
02:52et a produit à cette fin des observations
02:54les 14 et 27 mai 2024.
02:56M. Pamela Lemasson de Nercy et M. Benoît Flamand
03:00ont demandé à intervenir dans l'intérêt de l'union syndicale des magistrats
03:03et ont produit des observations les 15 et 29 mai 2024.
03:06Seront entendues aujourd'hui l'avocat de la partie requérante
03:09les avocats des parties intervenantes
03:11et le représentant du Premier ministre.
03:13Merci Madame.
03:14Eh bien, on va suivre ce que vous nous avez dit
03:17c'est-à-dire qu'on va d'abord entendre M. Pierre Decomble de Ney
03:21qui est avocat de Barreau de Paris
03:23qui représente M. Alain, partie requérante
03:25et le syndicat de la magistrature, partie intervenante
03:28ensuite, et bien d'autres.
03:31D'abord à vous.
03:38M. le Président, Mesdames, Messieurs
03:41les membres du Conseil constitutionnel
03:43il y a quelques années
03:45je défendais un magistrat devant une juridiction pénale
03:50peu importe les faits
03:52en tout état de cause
03:53c'était après votre décision de 2016
03:56constitutionnalisant de manière très nette
03:58le droit au silence.
04:00Ce magistrat avait été convoqué pour une audition libre
04:03et faisant usage de son droit au silence
04:06il a immédiatement été placé en garde à vue
04:09et des questions lui ont été posées
04:12et ces questions me semblent exprimer
04:16ce qui est la remise en cause
04:18devant certaines juridictions
04:21devant certains policiers
04:23du droit au silence.
04:24Je veux vous en livrer deux.
04:26En tant que magistrat
04:28considérez-vous qu'il soit anormal
04:30de poser des questions dans le cadre d'une procédure judiciaire
04:33et vous considérez-vous comme la victime d'un système ?
04:36Je garde le silence.
04:38Avez-vous l'intention de conserver cette attitude hostile
04:41digne de malfaiteurs chevronnés
04:43tout au long de cette procédure
04:45et notamment lorsque vous serez face à des magistrats ?
04:48Je garde le silence.
04:50J'avais à l'époque, monsieur le président
04:52madame, messieurs, les membres du conseil de la magistrature
04:55adressé une note au ministère public
04:57pour lui dire, non, non, non, non
04:59l'usage du droit au silence n'est pas une méthode de malfaiteurs chevronnés
05:03mais un droit constitutionnellement garanti.
05:06Réponse, pas.
05:09Et je pense qu'en réalité se place ici
05:12le paradoxe auquel nous sommes confrontés
05:14dans la question du droit au silence.
05:16Voilà un droit qui est constitutionnellement garanti
05:19mais qui ne cesse d'être remis en cause.
05:21Une remise en cause d'abord de portée générale
05:24qui dépasse le cadre disciplinaire.
05:27Le droit au silence serait un droit d'origine étrangère
05:31et donc néfaste.
05:33Je le veux aussi à la lecture
05:36Je le vois à la lecture des commentaires de votre décision du 8 décembre.
05:39Un droit d'origine étrangère qui serait donc néfaste.
05:42D'abord, permettez-moi de le dire
05:44ce qui vient de l'étranger n'est pas en soi néfaste.
05:49Par ailleurs, la procédure criminelle française
05:53a été très fortement inspirée d'auteurs étrangers
05:56César et Beccaria, par exemple.
05:58Je pense qu'on ne peut pas dire que
06:00cette influence étrangère a été négative.
06:03Et par ailleurs, c'est faux, monsieur le Président,
06:06madame, messieurs, les membres du Conseil constitutionnel.
06:09Cette idée est fausse et
06:11j'en veux pour preuve, je l'ai apportée ici
06:14pour le rappeler à chacun.
06:16Depuis 1670 et la grande ordonnance de Colbert
06:21il est dans notre droit l'idée selon laquelle
06:24lorsqu'on garde le silence,
06:26ceci n'implique pas la reconnaissance de culpabilité.
06:29A l'époque, dans l'ordonnance de 1670,
06:32il était prévu que celui qui gardait le silence
06:34devait être jugé comme un muet volontaire.
06:37Daniel Jousse, dans son commentaire
06:39de cette ordonnance de 1670,
06:41disait la chose suivante.
06:42Il ne faut pas conclure de là
06:44que les faits sur lesquels l'accusé
06:46ne veut pas répondre soient censés confesser par lui
06:48comme il a été porté en l'article 4 de l'ordonnance
06:51de 1667 pour les matières civiles.
06:54Car en matière criminelle, il en est autrement.
06:56Et c'est une maxime généralement observée dans le Royaume
06:59que le silence de l'accusé ne le fait pas regarder
07:01comme un coupable des faits sur lesquels il est interrogé.
07:04C'est-à-dire qu'avant même la déclaration
07:06des droits de l'homme de 1789
07:09et son article 9 dont nous parlons aujourd'hui,
07:11ce droit au silence était reconnu
07:13comme fondamental au XIXe siècle.
07:16Le plus grand criminaliste du XIXe siècle, Faustin Eli,
07:19disait que si le refus de répondre
07:22n'est que l'exercice du droit de la défense
07:25en vertu duquel l'inculpé peut répondre
07:27ou ne pas répondre aux questions qui lui sont faites,
07:29selon qu'il le juge convenable à ses intérêts,
07:32le juge, après lui avoir adressé les observations
07:34qu'il croit utiles, doit se borner à constater son silence.
07:38Cette idée selon laquelle le droit au silence
07:40serait donc un droit étranger est totalement fausse,
07:44mais elle sert à cette remise en cause permanente.
07:46L'autre remise en cause, elle est plus spécifique
07:49à la question du droit au silence dans les procédures disciplinaires
07:52et cette remise en cause est née
07:54après votre décision du 8 décembre.
07:56Cette décision a été critiquée par certains
08:00et ces critiques ont été reprises
08:02par le rapporteur public devant le Conseil d'État
08:05et le secrétariat général du gouvernement
08:08dans ses observations.
08:10Premièrement, votre décision aurait
08:13constitutionnalisé le droit au silence
08:16dans les procédures disciplinaires
08:18par une forme d'obitair dictum,
08:21une formule en passant.
08:23Permettez-moi de m'étonner.
08:25La question qui était posée dans cette question prioritaire
08:28de constitutionnalité était précisément
08:30l'applicabilité du droit au silence
08:32dans les procédures disciplinaires des notaires.
08:35Ce n'est pas une formule en passant
08:37et je ne pense pas que la proclamation
08:39d'un principe à valeur constitutionnelle
08:41puisse être un obitair dictum.
08:43Première remise en cause, deuxième remise en cause
08:46et elle figure très nettement
08:49dans les conclusions du rapporteur public.
08:51Voici ses conclusions.
08:53La question reste ouverte de déterminer,
08:55compte tenu du déroulé et de l'ensemble
08:57des garanties propres aux procédures disciplinaires,
08:59dans quelle mesure et selon quelle modalité
09:01une notification à la personne poursuivie
09:04du droit dont elle dispose de conserver le silence
09:06est susceptible d'être exigée
09:08sans complexifier ni fragiliser
09:12à l'excès ces procédures.
09:14Vous avez jugé le 8 décembre
09:17mais il y a toujours cette réticence
09:19qui s'exprime à tirer les conséquences
09:21pourtant extrêmement nettes
09:23de votre décision du 8 décembre
09:25et cette remise en cause s'inscrit
09:28dans une difficulté qu'on a parfois
09:32devant les juridictions du Fonds
09:34ou les juridictions suprêmes
09:36à porter les débats de nature constitutionnelle.
09:38Je le dis, qu'il est difficile
09:40d'arriver jusqu'à vous
09:42Madame, Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
09:44qu'il est difficile et dans cette procédure
09:46c'est assez net, qu'il est difficile
09:48d'arriver jusqu'à vous
09:50puisque vous savez que la question dont vous êtes saisi
09:52et qui vous est transmise par le Conseil d'Etat
09:54dans un premier temps, le Conseil d'Etat
09:56avait dans cette même procédure
09:58refusé de vous la transmettre.
10:00Alors, maintenant
10:02compte tenu des termes
10:04très clairs de votre décision
10:06du 8 décembre
10:08la question est, cette décision peut-elle
10:10porter ses fruits
10:12dans le cadre de la procédure
10:14disciplinaire des magistrats.
10:16La réponse est nettement oui.
10:18D'abord, j'écarte un premier sujet
10:20qui avait été aussi évoqué
10:22par le rapporteur public devant le Conseil d'Etat
10:24qui indiquait que la procédure disciplinaire
10:26des magistrats était de nature écrite
10:28ce qui excluait le droit au silence.
10:30Deux observations rapides, la première c'est inexact
10:32le rapporteur auditionne
10:34le magistrat poursuivi, le CSM
10:36convoque et auditionne le magistrat poursuivi
10:38et puis d'autre part, par votre décision
10:40du 17 mai 2024
10:42vous avez indiqué
10:44s'agissant de la loi sur la presse
10:46le droit au silence pouvait s'appliquer
10:48à des procédures écrites.
10:50Les trois conditions
10:52qui ont été parfaitement détaillées
10:54dans le commentaire au cahier
10:56de votre décision du Conseil constitutionnel
10:58me semblent tout à fait remplies
11:00s'agissant de la discipline des magistrats
11:02je les rappelle, le cadre
11:04dans lequel la personne est interrogée
11:06en s'assurant du rôle de l'autorité compétente
11:08pour interroger cette dernière ou recueillir ses observations
11:10les conditions
11:12dans lesquelles la personne est entendue
11:14pour être amenée à s'auto-incriminer
11:16si l'audition ou la comparution s'imposent à lui
11:18devant l'une ou l'autre
11:20son de nature à lui laisser croire
11:22qu'il ne disposait pas du droit de se taire
11:24les déclarations sont susceptibles
11:26d'être portées à la connaissance de la juridiction
11:28de jugement. Nous sommes évidemment
11:30devant le Conseil supérieur de la magistrature
11:34avec ces trois conditions qui sont remplies
11:36je rappelle que l'article 52
11:38dispose de la chose suivante
11:40le rapporteur entend ou fait entendre
11:42ce que le magistrat mis en cause
11:44il n'y a pas là véritablement de libre arbitre
11:46l'article 56 prévoit que le magistrat
11:48déféré est invité
11:50à fournir ses explications et ses moyens de défense
11:52sur les faits qui lui sont reprochés
11:54donc pareil
11:56il n'y a là pas de liberté
11:58pour le magistrat poursuivi
12:00il comprend de cette formule
12:02qu'il doit répondre
12:04je précise que sur la question de la formule
12:06de l'invitation au Conseil constitutionnel
12:08c'est déjà prononcé dans sa décision du 4 mars 2021
12:10pour préciser que
12:12cette formule n'empêchait pas
12:16que la personne poursuivie puisse comprendre
12:18qu'elle était contrainte de répondre
12:20dernier
12:22sujet rapidement
12:24l'idée
12:26avait pu être portée que
12:28les magistrats ayant une connaissance
12:30particulière des règles de leur profession
12:32et des règles juridiques n'avaient pas
12:34besoin de voir cette notification
12:36faite à leur endroit
12:38je pense que c'est une double erreur
12:40la première chose
12:42tous les magistrats n'ont pas une connaissance parfaite
12:44de la procédure disciplinaire
12:46et j'ai un peu de mal à comprendre comment est-ce que
12:48la connaissance juridique pourrait
12:50conduire à priver une personne
12:52d'un certain nombre de droits
12:54si on allait là on pourrait carrément
12:56refuser le droit à l'avocat pour les magistrats
12:58poursuivis parce qu'ils connaissent bien
13:00la matière juridique
13:02dernier point et j'en aurais terminé
13:04c'est la question des effets
13:06de la décision
13:08et de son caractère immédiat
13:10donc on vous demande de déclarer
13:12ces dispositions contraires
13:14à la constitution
13:16on vous demande de reporter
13:18les effets dans le temps de cette déclaration
13:20d'unconstitutionnalité
13:22j'ai lu qu'une autre
13:24partie intervenante demandait
13:26à ce que ce report n'existe pas
13:28ça me paraît, je le dis très simplement
13:30impossible si vous déclariez 52
13:32et 56 inconstitutionnels
13:34plus aucune poursuite disciplinaire
13:36ne pourrait avoir lieu devant le conseil supérieur
13:38de la magistrature jusqu'à l'adoption d'une nouvelle
13:40loi organique
13:42je ne sais pas dans quelles conditions
13:44elle interviendrait monsieur le président
13:46monsieur les membres du conseil donc ça me paraît
13:48un peu audacieux
13:50en revanche nous vous demandons
13:52le droit d'imposer
13:54dans votre décision la notification
13:56de ce droit au silence jusqu'à la modification
13:58et enfin nous vous demandons
14:00d'appliquer immédiatement
14:02cette décision y compris
14:04aux procédures en cours et ce pour deux
14:06raisons. D'abord parce que
14:08si vous ne le faites pas
14:10ça occasionnerait une distinction qui est
14:12injustifiée. Votre décision
14:14du 8 décembre
14:162023 s'applique à toutes les autorités
14:18réglementaires et
14:20la procédure disciplinaire à l'exception
14:22de celle des magistrats est de nature
14:24réglementaire. Donc en réalité
14:26aujourd'hui votre décision du
14:288 décembre a conduit
14:30les juridictions administratives
14:32déjà à faire appliquer
14:34le droit au silence sur les procédures en cours
14:36j'en ai cité un certain
14:38nombre d'observations. Je cite la dernière
14:40décision 28 mai
14:422024 conseil d'état
14:44numéro 49 25 24
14:46référé suspension
14:48suspension de la décision
14:50pour les
14:52dans le cadre de la discipline des formatiens
14:54en raison de l'absence de notification
14:56du droit au silence. Donc si vous ne le
14:58faites pas monsieur le président
15:00madame, messieurs, si vous ne
15:02reportez pas dans le temps
15:04les effets de votre déclaration
15:06enfin si vous
15:08n'appliquez pas
15:10immédiatement, excusez-moi
15:12cette
15:14nouvelle règle et bien on va se retrouver
15:16dans une situation dans laquelle seuls les magistrats
15:18ne pourront pas faire état de cette
15:20de ce nouveau droit
15:22dans leur procédure disciplinaire et en tirer des
15:24conséquences sous l'angle de la nullité
15:26tandis que toutes les autres professions elles
15:28pourront le faire puisque votre
15:30principe constitutionnel c'est bien normal puisque vous
15:32ne pouvez pas faire autrement, vous ne l'avez pas
15:34différé dans le temps et que les juridictions administratives
15:36ne pourront pas non plus différer dans le temps
15:38les effets de votre décision puisque personne
15:40ne peut différer dans le temps les effets
15:42de la décision
15:44du conseil
15:46imaginez bien que deux magistrats
15:48un judiciaire et un administratif
15:50confrontés rigoureusement à la même procédure
15:52pour l'un parce que c'est réglementaire pourrait
15:54valoir du droit au silence pour obtenir la nullité
15:56pour l'autre si vous ne dites pas que les
15:58dispositions sont, que le droit au silence
16:00est immédiatement applicable dans les procédures en cours
16:02lui ne pourrait pas le faire
16:04et enfin ce serait absurde parce que devant le
16:06conseil supérieur de la magistrature la plupart
16:08du temps les magistrats font l'objet
16:10d'une audition par
16:14l'inspection générale de la justice et que
16:16cette audition elle serait susceptible
16:18d'être annulée parce qu'elle est de nature
16:20réglementaire
16:22et qu'en application de votre décision elle le serait
16:24ce qui fait qu'on aurait une audition qui
16:26serait annulée avec
16:28des garanties plus élevées devant
16:30l'inspection générale de la justice
16:32mais pas devant le rapporteur du
16:34conseil supérieur de la magistrature
16:36raison pour laquelle je vous demande
16:38que les effets
16:40de votre décision soit immédiatement
16:42applicable aux procédures
16:44en cours. J'en ai terminé.
16:46Merci Maître.
16:48Alors maintenant nous allons
16:50écouter
16:52d'abord Maître Pamela
16:54le maçon de Nercy ensuite
16:56Maître Benoît Flamand qui est son
16:58avocat au baron de Rennes
17:00qui représente l'union syndicale des magistrats
17:02partie intervenante. Maître.
17:12Je vous informe que durant
17:14tout le long de ces débats vous avez le droit
17:16de faire des déclarations, de répondre aux questions
17:18ou de garder le silence.
17:20Monsieur le Président,
17:22Mesdames, Messieurs, les membres du Conseil
17:24constitutionnel, voici une phrase
17:26qu'une majorité des magistrats de France
17:28est amenée à prononcer tout au long
17:30de leur carrière dans le cadre de leur exercice professionnel
17:32Une information
17:34délivrée à chaque justiciable
17:36dès lors qu'est mise en oeuvre une procédure
17:38à caractère pénal
17:40est rappelée au début de
17:42chaque débat le droit
17:44de ne pas s'auto-incriminer
17:46un droit auquel
17:48chaque magistrat doit veiller
17:50un droit désormais évident et acquis
17:52lorsqu'il s'agit du justiciable
17:54un droit qui pourtant ne leur est
17:56pas octroyé par les textes
17:58alors qu'ils en sont les garants au quotidien
18:00Mais avant
18:02que ce droit au silence fasse partie de leur quotidien
18:04combien de décisions avez-vous du rendre ?
18:06C'est justement
18:08parce que vous avez façonné ce droit
18:10tout au long de ces années
18:12qu'aujourd'hui il est une évidence
18:14Alors si ce droit au silence
18:16est si évident en matière pénale
18:18s'il fait tant partie du quotidien des magistrats
18:20pourquoi ne s'applique-t-il pas
18:22à lui-même ? C'est justement
18:24parce que ces derniers attendent
18:26que vous l'inscriviez au rang des droits qui leur sont garantis
18:28comme vous l'avez fait à plusieurs
18:30reprises en d'autres matières
18:32C'est la voix de ces magistrats
18:34que l'USM porte dans le cadre
18:36de son intervention à l'instance sur la présente
18:38question prioritaire de constitutionnalité
18:40C'est bien parce qu'il veille
18:42aussi aux intérêts des magistrats
18:44notamment par leurs interventions régulières
18:46que l'USM est aujourd'hui le premier syndicat
18:48des magistrats et dispose à ce titre
18:50d'un intérêt particulier
18:52justifiant de son intervention à cette instance
18:54C'est la voix de ces adhérents
18:56de ces magistrats que l'USM porte
18:58la voix de ceux qui garantissent l'exercice
19:00effectif des droits et libertés au quotidien
19:02la voix de ceux qui protègent
19:04mais ne sont pas protégés
19:06Contrairement à ce qui vous est soutenu
19:08les dispositions entourant
19:10la procédure disciplinaire n'apportent pas
19:12les garanties suffisantes afin d'éviter
19:14aux magistrats poursuivis de s'auto-incriminer
19:16Car s'il a accès au dossier
19:18s'il a le temps
19:20de préparer sa défense comme tout
19:22justiciable aux demeurants
19:24il est également soumis à une obligation
19:26de loyauté inscrite à son serment
19:28et à un devoir d'obéissance
19:30hiérarchique qui est un principe général
19:32du droit et qui le place
19:34indubitablement dans une position équivoque
19:36Il en résulte que le magistrat
19:38faisant l'objet d'une procédure disciplinaire
19:40et entendu dans ce cadre
19:42respectera nécessairement
19:44ces deux principes qui s'imposent à lui
19:46au risque de se placer en contradiction
19:48avec ces derniers et ce, dès le moment
19:50où il devra rendre compte à sa hiérarchie
19:52On vous soutiendra également
19:54que dès lors que les conditions
19:56d'une audition ne placent pas la personne
19:58poursuivie dans une situation de contrainte
20:00qui lui laisserait croire qu'elle ne dispose pas
20:02du droit de se taire, alors
20:04l'effectivité de ce droit est garantie
20:06sans qu'il soit besoin de le notifier
20:08expressément
20:10Il sera prétendu que les magistrats
20:12ne se placent pas dans une situation de contrainte
20:14qui les conduirait à croire qu'ils ne disposent
20:16pas du droit de se taire
20:18Cela est faux
20:20L'application des principes de loyauté
20:22et d'obéissance hiérarchique
20:24place justement
20:26les magistrats sous le coup de cette contrainte
20:28qui n'en seront libérés qu'à la condition
20:30que le droit de se taire leur soit
20:32expressément reconnu
20:34Justement
20:36quelques mots sur le principe
20:38de loyauté qui figure au serment
20:40des magistrats et sur le poids de celui-ci
20:44Je jure
20:46de remplir mes fonctions avec indépendance
20:48impartialité et humanité
20:50de me comporter en tout comme
20:52un magistrat digne, intègre
20:54et loyal
20:56Ce serment n'est pas seulement inscrit
20:58à l'article 6 de l'ordonnance du 22 décembre
21:001958
21:02Il fait partie d'eux
21:04Le texte ajoute
21:06Il ne peut en aucun
21:08cas être relevé de ce serment
21:10En
21:12aucun
21:14cas
21:16Alors si en aucun cas le magistrat ne peut
21:18être relevé de ce serment, il apparaît
21:20évident que ce dernier ne s'octroiera pas
21:22un droit qui n'est pas expressément prévu par les textes
21:24Car ce serment
21:26s'il est inscrit à l'ordonnance
21:28c'est également un fil conducteur
21:30C'est cet motif lourd de sens
21:32qui engage chaque magistrat et dont la violation
21:34outre-disciplinaire serait morale
21:36Alors non
21:38Lorsqu'il vous est soutenu que le magistrat
21:40n'est pas dans une situation de contrainte
21:42exigeant de lui rappeler le droit de se taire
21:44c'est faux. Lorsqu'il vous est soutenu
21:46qu'il dispose des garanties suffisantes
21:48afin de ne pas s'auto-incriminer, c'est faux
21:50C'est pourquoi votre décision
21:52est si attendue et c'est pourquoi
21:54il est important pour les magistrats que ce droit
21:56de se taire, composant de l'exercice
21:58des droits de la défense, figure au rang
22:00des droits qui leur sont octroyés
22:02En conséquence, monsieur le Président
22:04Mesdames et Messieurs les membres
22:06du Conseil Constitutionnel, vous abrogerez
22:08les articles 52 et 56 de l'ordonnance
22:10du 22 décembre 1958
22:12en tant qu'ils ne garantissent pas aux magistrats
22:14poursuivis disciplinairement le droit de se taire
22:18Merci
22:20Nous écoutons maintenant
22:22Maître Flaman
22:28Jugez
22:30C'est déjà accusé. Était-il nécessaire
22:32pour autant de transformer l'accusateur
22:34en inquisiteur ? Rien n'en est moins sûr
22:36Monsieur le Président
22:38Mesdames et Messieurs les membres du Conseil Constitutionnel
22:40Les magistrats poursuivis
22:42disciplinairement doivent être informés
22:44qu'ils ont le droit de se taire. Cette carence
22:46de leur statut vous a été démontrée
22:48L'USM, au soutien de son intervention
22:50vous a saisi d'un grief additionnel
22:52qui porte sur l'étendue de la saisine du CSM
22:54statuant en matière disciplinaire
22:56Pas
22:58de poursuite sans saisine. Ce grief est en lien
23:00avec le champ matériel de la QPC qui vous saisit
23:02et de cet HF recevable
23:04votre jurisprudence vous permettra de l'examiner
23:06Le grief
23:08en tant que tel est relativement simple
23:10Théoriquement, les articles 52
23:12et 56 de l'ordonnance du 22 décembre
23:141958 prévoient que le CSM
23:16soit saisi pour que les magistrats répondent
23:18des faits qui lui sont reprochés
23:20Théoriquement toujours
23:22Cela suppose que des faits précis
23:24lui soient reprochés par le ministre
23:26ou par un justiciable
23:28Mais ce n'est pas l'interprétation
23:30qu'en donne le Conseil d'Etat qui juge avec
23:32constance que le Conseil supérieur
23:34de la magistrature peut connaître
23:36de l'ensemble du comportement du magistrat
23:38concerné et n'est pas tenu de limiter son examen
23:40aux seuls faits qui ont été initialement portés
23:42à sa connaissance
23:44Le CSM applique
23:46également cette règle et l'a
23:48réaffirmé selon ses propres termes
23:50dans sa décision CSM-Siege du 18 janvier
23:522023
23:54La seule contrainte de cette extension
23:56réside dans le respect des droits
23:58de la défense
24:00qui n'inclut pas aujourd'hui au demeurant
24:02le droit de se taire
24:04La théorie penchée
24:06pour une saisine in rem
24:08et jurisprudence
24:10en a fait une saisine in personam
24:12et c'est la constitutionnalité
24:14de cette interprétation jurisprudentielle
24:16constante de ces dispositions
24:18qui est contestée aujourd'hui devant vous
24:20En effet
24:22le CSM dans ce cas
24:24va cumuler les fonctions d'autorité de poursuite
24:26et d'autorité de jugement, ce que votre jurisprudence
24:28refuse
24:30Ceci méconnaît l'article 16 de la déclaration
24:32des droits de l'homme et du citoyen
24:34et vous le sanctionnez à la fois
24:36car ce cumule via l'exigence d'indépendance
24:38de l'autorité qui sanctionne mais aussi
24:40parce qu'il porte atteinte à son impartialité
24:42Vous exigez
24:44une séparation nette des fonctions
24:46de poursuite et de jugement
24:48et la sanction encourue à la nature
24:50de punition
24:52de punition
24:54comme en matière disciplinaire, vous l'avez jugée
24:56à plusieurs reprises et pour la dernière fois
24:58le 8 décembre 2023
25:00Cette indépendance des autorités
25:02de poursuite et de jugement, vous l'avez imposée
25:04pour la commission bancaire, pour l'ARCEP
25:06Vous franchirez aisément
25:08le cas, le pas pardon
25:10pour le CSM qui dans ce cas
25:12poursuit, instruit, sanctionne
25:14seul
25:16et c'est même pire en réalité que ce que vous avez eu
25:18à connaître. En effet, l'action
25:20disciplinaire peut être mise en oeuvre par le justiciable
25:22particularité de leur statut
25:24même pour des faits non fondés
25:26mais le CSM pourra ensuite élargir
25:28sa saisine et sanctionner au final
25:30qu'importe les faits, pourvu qu'on ait l'insonction
25:32Alors il vous faut
25:34protéger ces magistrats
25:36contre les attaques de toute nature, garantir leur indépendance
25:38et ceci les surexpose
25:40les affaiblit
25:42La méconnaissance de ce principe d'indépendance des autorités
25:44de poursuite et de jugement aujourd'hui n'a jamais été aussi
25:46dangereux. Cette saisine
25:48in personam viole également le principe
25:50d'impartialité
25:52Ce principe qui s'oppose à ce qu'une juridiction
25:54se saisisse seule des faits, lorsque
25:56l'instance a pour objet le prononcer de sanctions
25:58ayant le caractère de punition
26:00L'inquisition n'est pas constitutionnelle
26:04D'ailleurs
26:06en suivant ce principe, la chambre criminelle
26:08de la cour de cassation veille à ce que
26:10les juridictions répressives ne s'écartent pas
26:12de la saisine in rem.
26:14L'injusticiable ne peut donc pas être poursuivi
26:16lui in personam, lorsqu'il encourt une sanction
26:18Les magistrats y veillent
26:20Devrait-il en aller
26:22autrement lorsqu'ils sont poursuivis ?
26:24Non
26:26Il n'est pas ici question de reconnaître plus
26:28de droits que d'autres, simplement de ne pas
26:30en reconnaître moins
26:32Pourtant, le CSM
26:34par cette interprétation juridicprudentielle
26:36constante, s'affranchit de ces principes
26:38et l'autorise
26:40Le fait de cesser cette anomalie
26:42La saisine in personam du CSM
26:44doit disparaître
26:46L'action disciplinaire doit porter sur des faits
26:48précis, ne pas se muer
26:50en une inquisition inquiétante
26:52L'exercice de la fonction de jugé doit être
26:54entouré de la sérénité qu'elle nécessite
26:56C'est pourquoi
26:58vous abrogerez de ce chef également
27:00les articles 52 et 56 de l'ordonnance du 22 décembre
27:0258
27:04C'est une abrogation en tant que de ne pas
27:06qui vous est demandée
27:08L'abrogation pourra être immédiate
27:10s'appliquer aux instances en cours
27:12Elle aura pour seule conséquence au final
27:14de contraindre le pouvoir disciplinaire
27:16à reprendre les procédures engagées
27:18en méconnaissance de ces principes et avec des garanties
27:20qui auraient toujours dû exister
27:22C'est pourquoi
27:24l'USM vous demande d'abroger
27:26les articles 52 et 56 de l'ordonnance du 22 décembre 1958
27:28en tant qu'il ne prévoit pas
27:30que le magistrat poursuivi disciplinairement
27:32ait le droit de se taire
27:34et en tant qu'il n'impose pas
27:36la présigne du CSM en matière disciplinaire
27:38s'effectue une reine
27:40Je vous remercie
27:42Merci
27:44Alors
27:46Nous allons maintenant écouter
27:48pour le gouvernement, pour le Premier Ministre
27:50Monsieur Canguilhem
27:52Merci Monsieur le Président, Madame, Messieurs
27:54les membres du Conseil Constitutionnel
27:56La procédure disciplinaire des magistrats du siège
27:58est régie par la section 2 du chapitre 7
28:00de l'ordonnance du 22 décembre 58
28:02portant loi organique relative au statut de la magistrature
28:04Le conseil supérieur de la magistrature
28:06peut être saisi d'une procédure disciplinaire
28:08par le garde des Sceaux
28:10par les premiers présidents de cour d'appel
28:12ou par un justiciable
28:14Dans ces grandes lignes, la procédure prévue
28:16par les articles 52 et 56 de cette ordonnance
28:18et qui sont l'objet de la présidence du PC
28:20est la suivante
28:22Le magistrat poursuivi est entendu au cours de l'enquête
28:24il peut alors être assisté
28:26et la procédure doit être mise à sa disposition
28:28à chaque fois au moins 48 heures
28:30avant chacune des auditions
28:32Dans la procédure disciplinaire, le magistrat est invité
28:34à fournir ses explications et moyens de défense
28:36sur les faits qui lui sont reprochés
28:38Il est fait grief à ses dispositions
28:40cela a déjà été dit
28:42de ne pas prévoir la notification
28:44au magistrat poursuivi de son droit au silence
28:46à l'occasion de son audition
28:48devant le rapporteur
28:50comme devant le conseil de discipline
28:52Avant de répondre à ce grief
28:54vous devrez écarter
28:56ce qui est présenté dans l'intervention
28:58de l'union syndicale des magistrats
29:00dans son mémoire en intervention
29:02comme un nouveau grief tiré de la méconnaissance
29:04de l'article 16 de la déclaration de 1789
29:06L'union syndicale des magistrats soutient
29:08qu'il résulte de la jurisprudence constante
29:10du conseil d'état
29:12que le conseil supérieur de la magistrature
29:14lorsqu'il se prononce en matière disciplinaire
29:16est légalement saisi de l'ensemble
29:18du comportement du magistrat
29:20et non pas uniquement des seuls faits
29:22qui ont été portés à sa connaissance
29:24par l'acte de saisine
29:26Il est exact, comme le fait remarquer
29:28dans la déclaration écrite de la partie intervenante
29:30qu'une question prioritaire de consécutivité
29:32peut porter sur l'interprétation
29:34d'une jurisprudence constante du conseil d'état
29:36et la jurisprudence constante du conseil d'état
29:38est celle qui est évoquée par l'USSR
29:40En revanche, un mémoire en intervention
29:42s'il peut soulever un nouveau grief
29:44ne peut porter que sur les dispositions
29:46dont vous avez été effectivement saisi
29:48par l'arrêt de renvoi
29:50Et en l'espèce, la question
29:52qui se rattache à une incompétence négative
29:54porte sur l'absence dans les dispositions contestées
29:56de la mention selon laquelle le magistrat
29:58poursuivit disciplinairement doit se voir
30:00notifier son droit de se taire
30:02Or, ce qui est présenté par l'Union syndicale
30:04des magistrats dans son mémoire en intervention
30:06comme un nouveau grief est en réalité
30:08une nouvelle question prioritaire
30:10de constitutionnalité
30:12qui porte sur l'interprétation
30:14jurisprudentielle de l'étendue
30:16de la saisine du CSM
30:18et qui, si vous aviez été
30:20effectivement saisi de cette QPC
30:22se rattacherait non pas
30:24aux compétences négatives mais aux mots citations
30:26et sur les faits qui lui sont reprochés
30:28qui figurent à l'article 56
30:30de l'ordonnance du 22 décembre 1958
30:32Ces dispositions
30:34ces éléments ne sont pas
30:36l'objet de l'arrêt de renvoi
30:38ils ne vous ont pas été transmis
30:40par cet arrêt
30:42cette question est donc irresolable
30:44Venons-en donc au grief unique
30:46du mémoire QPC
30:48qui va vous conduire à appliquer
30:50les principes que vous avez dégagés dans votre décision
30:521074 QPC
30:54par laquelle vous avez élargi à toute
30:56sanction ayant le caractère d'une punition
30:58et donc à la procédure disciplinaire
31:00l'exigence de notifier son droit de se taire
31:02à la personne poursuivie
31:04exigence qui était
31:06initialement et dans votre jurisprudence antérieure
31:08circonscrite à la matière pénale
31:10En la matière, le commentaire
31:12de votre décision 492
31:14d'essai du 2 novembre
31:162004
31:18en page 24 précise ceci
31:20nous citons
31:22ni l'article 9 de la déclaration de 1789
31:24ni aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle
31:26ne fait obstacle à ce qu'une personne
31:28reconnaisse sa culpabilité si elle le fait volontairement
31:30consciemment et librement
31:32c'est à dire en dehors de tout chantage
31:34de tout marchandage
31:36de tout malentendu et de toute contrainte
31:38en conséquence
31:40et ainsi que cela a été très récemment rappelé
31:42dans le commentaire de votre décision
31:441074 QPC
31:46vous vous êtes fondé dans plusieurs
31:48décisions antérieures donc à cette décision
31:50492 d'essai
31:52sur le fait que les conditions de l'audition
31:54peuvent être de nature à laisser croire
31:56à l'intéressé qu'il ne disposait
31:58pas du droit de se taire
32:00vous voyez par exemple les points 8 de vos décisions
32:02886 QPC
32:04et également point 8 de votre décision 935 QPC
32:06Or les caractéristiques
32:08de la procédure disciplinaire
32:10concernant les magistrats du siège
32:12ne placent pas ces derniers dans une
32:14situation de contrainte qui les conduirait
32:16à croire qu'il ne dispose pas du droit
32:18de se taire
32:20en l'absence de tout risque d'auto-incrimination
32:22l'effectivité
32:24du droit de ne pas s'accuser soi-même
32:26ne suppose pas que le droit de garder
32:28le silence leur soit expressément notifié
32:30au cours de la procédure
32:32alors il a été opposé à cet argument
32:34la circonstance
32:36que le devoir de loyauté du magistrat
32:38le place dans une situation de contrainte
32:40morale envers l'autorité
32:42qui l'interroge, cet argument
32:44ne vous retiendra pas pour une raison
32:46très simple, c'est que le magistrat n'est tenu
32:48d'aucun devoir de loyauté envers
32:50le rapporteur ou envers les membres
32:52du conseil supérieur de la magistrature qui
32:54par ailleurs ne constituent pas ces autorités
32:56hiérarchiques
32:58si vous deviez toutefois estimer que
33:00les dispositions contestées sont contraires
33:02à la constitution, il vous serait demandé
33:04de reporter dans le temps les effets
33:06de votre décision d'abrogation
33:08dans les mêmes conditions que celles retenues
33:10dans vos précédentes décisions relatives
33:12à l'exigence de notification du droit de se taire
33:14en l'espèce une abrogation
33:16immédiate des dispositions contestées
33:18aurait des conséquences manifestement
33:20excessives car effectivement
33:22comme cela a été rappelé
33:24elle priverait le magistrat
33:26à déférer de pouvoir présenter ses explications
33:28et moyens de défense sur les faits qui lui sont reprochés
33:30il y aurait ainsi lieu de
33:32reporter les effets de votre décision
33:34d'accorder au législateur un délai
33:36lui permettant de remédier à cette
33:38inconstitutionnalité, par ailleurs
33:40et également ainsi que vous l'avez décidé
33:42dans vos précédentes
33:44décisions sur ce point, il y aurait
33:46lieu de préserver les effets passés des dispositions
33:48en cause en prévoyant que les mesures prises
33:50sur leur fondement ne pourront pas être
33:52contestées en invoquant leur inconstitutionnalité
33:54cela
33:56concerne en l'espèce onze procédures
33:58disciplinaires en cours ainsi que
34:00trois sanctions qui ne sont pas encore
34:02devenues définitives
34:04à ce jour, je vous invite ainsi à déclarer
34:06à titre principal les dispositions des articles 52
34:08et 56 de l'ordonnance du 22 novembre
34:1022 décembre 1958 conformes
34:12à la constitution.
34:14Merci monsieur Corguilhem. Alors, on a entendu
34:16les arguments de part et d'autre
34:18est-ce que tel ou tel membre du
34:20conseil souhaite des explications
34:22supplémentaires ? Non ?
34:24Vous êtes suffisamment éclairé ?
34:26Parfait, donc
34:28nous allons
34:30examiner
34:32tout cela de très près
34:34et rendrons notre
34:36décision publique
34:38dans huit jours, le 26 juin
34:402024. Vous pourrez en
34:42prendre connaissance en vous connectant
34:44sur notre site internet.
34:46L'audience est levée, bonne journée.