Ecoutez l'interview du président des Jeunes agriculteurs.
Regardez L'invité de RTL du 23 janvier 2024 avec Amandine Bégot.
Regardez L'invité de RTL du 23 janvier 2024 avec Amandine Bégot.
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin
00:06 RTL 7h43, excellente journée à vous tous qui nous écoutez. Amandine Bégaud, vous recevez ce matin le président des jeunes agriculteurs
00:12 Arnaud Gaillot. Les jeunes agriculteurs, on le rappelle, c'est l'organisation syndicale qui regroupe les agriculteurs de moins de 38 ans.
00:18 J'ai découvert ça, je ne savais pas que la barrière de l'âge était à 38 ans. Vous êtes vous-même
00:22 Arnaud Gaillot, producteur de lait près de Besançon, du lait pour fabriquer du comté et du morbier.
00:28 Vous étiez hier soir donc avec le président de la FNSEA à Matignon, réunion A4, avec le premier ministre et le ministre de l'agriculture
00:34 à la sortie. Arnaud Rousseau, le patron de la FNSEA, a déclaré
00:38 pas de lever des actions tant qu'il n'y aura pas de décisions concrètes. Ça veut dire quoi ? Que les actions vont s'intensifier ?
00:43 Alors elles sont en train de s'intensifier.
00:46 Beaucoup de nos collègues sont en train de sortir sur le territoire.
00:49 Oui, pour l'instant on ne lèvera pas les barrages tant que le premier ministre n'aura pas fait des annonces très concrètes.
00:56 Comme l'a rappelé Arnaud, on n'est pas là dans la mesurette, on n'est pas dans le temps de la belle parole, il faut de l'acte concret.
01:02 On va parler de ces décisions concrètes, mais vous donnez quoi ? Combien de jours ? Jusqu'à la fin de la semaine ? Jusqu'à vendredi ? Jusqu'à dimanche ?
01:07 Nous ce qu'on y a rappelé c'est qu'on n'a pas intérêt que le mouvement
01:10 dure dans le temps et s'enlise. Je veux dire c'est l'intérêt de personne. Les agriculteurs ont des fermes à faire tourner.
01:16 Ils ont autre chose à faire et je pense qu'ils préfèrent être au chaud vers leur famille. Donc voilà, nous on y a donné
01:20 deux trois jours maximum parce qu'à un moment donné on ne va pas attendre et puis après il y a d'autres mesures qui sont quand
01:26 même sur le temps long et là on y a dit maximum le salon de l'agriculture.
01:29 Cette mobilisation est en train de s'intensifier.
01:31 Le sud-ouest, ça c'est depuis plusieurs jours. La Drôme ce matin sur l'autoroute A16, il y a l'Oise, la Bretagne,
01:37 une partie du Grand Est aussi. Ça peut aller jusqu'où ? Jusqu'à bloquer Paris ? C'est ce que vous dites au premier ministre ce matin ?
01:43 On l'a déjà fait.
01:45 Le but ce serait pas d'y arriver parce que ce qui est dramatique c'est que s'il faut en arriver là ça va devenir usain dans
01:50 ce pays. S'il faut toujours être en train de
01:52 bloquer un pays. Sauf que s'il le faut, vous le ferez ?
01:55 Si il le faut, potentiellement on y réfléchira et on le fera. Mais on concertera notre réseau parce que c'est notre réseau qui est en action,
02:01 qui est sur le terrain. On verra avec eux. Mais s'il faut en arriver là, oui on l'a déjà fait donc on peut le refaire.
02:06 La détermination en tout cas elle est bien réelle sur le terrain ?
02:08 Et puis je pense que plus que jamais, moi je ne l'ai jamais vu à un niveau aussi élevé. Jamais ? Non.
02:12 Jamais ? Par le passé ? Non, là honnêtement on a une vraie crise profonde.
02:16 Les mecs malheureusement ont pour certains plus rien à perdre.
02:20 Donc en fait c'est leur survie qui est en jeu. Leur survie de leurs entreprises, leur famille.
02:24 Donc voilà il y a des gens déterminés qui ne lâcheront rien. Le risque disent certains c'est une
02:29 gilet jaunisation de ce mouvement. C'est ce que vous redoutez ?
02:32 On peut toujours le redouter. Après moi j'ai confiance en nos agriculteurs qui sont des gens responsables, qui sont des chefs d'entreprise.
02:39 Mais la colère elle est là ? Oui la colère est là. Il faut aussi qu'on fasse attention à pas qu'il y ait des gens qui profitent
02:44 du mouvement pour venir s'y raccrocher.
02:46 Penser à certains politiques ? Oui.
02:49 Rassemblement national par exemple ? Oui, comme d'autres. Il y a un moment donné, moi je veux bien qu'ils nous aiment tous tant mieux mais qu'ils
02:55 le prouvent par des actes. À un moment donné les paroles ça suffit quoi. Alors justement les actes Arnaud Gaillot,
03:00 parlons-en. Vous réclamez des décisions concrètes. On va être très concret si vous le voulez bien. On va simplifier un peu aussi les choses.
03:06 Il y a deux grands problèmes. Des normes trop nombreuses d'un côté et puis le revenu des agriculteurs qui est trop faible. On va parler du
03:12 revenu d'abord si vous le voulez bien. Je voudrais rappeler deux chiffres.
03:15 18% des agriculteurs 1 sur 5 qui vivent aujourd'hui sous le seuil de pauvreté.
03:19 Ça veut dire avec moins de 13 000 euros par an, 1000 euros 83 par mois pour un agriculteur qui
03:26 bosse parfois 70 heures par semaine. En 30 ans le revenu net de la branche agricole a baissé de 40%.
03:33 Concrètement qu'est ce qu'on fait ? Qu'est ce que vous réclamez des chèques ?
03:36 Des chèques, c'est pas la solution à long terme. À un moment donné, quand on voit l'état des finances publiques de notre pays,
03:41 on va peut-être pas contribuer non plus. À un moment donné c'est nos générations qui arrivent qui vont le payer.
03:46 Non, ce qu'on dit c'est qu'à un moment donné qu'on paye le juste prix des produits.
03:49 On a des interprofessions qui se mettent autour de la table et qui
03:53 travaillent à définir un prix. Et à un moment donné il y a des acteurs
03:57 depuis des années qui ont construit un système qui ont permis de faire leur fortune, de faire leur développement.
04:03 Sur le dos des agriculteurs, des grands groupes,
04:05 des gens qui utilisent une partie de la grande distribution.
04:11 Après on les a laissés faire aussi.
04:13 C'est aussi peut-être une part de notre faute.
04:15 Mais on nous parle de cette loi EGalim qui était censée vous garantir un revenu. Elle n'est pas appliquée ?
04:19 Ils ont commencé à trouver comment la contourner. Alors s'il n'y a pas de contrat fait,
04:23 rien ne leur empêche de ne pas respecter le prix. Donc ils font rien pour signer les contrats. Et puis vous commencez à avoir certaines
04:29 centrales d'achat qui délocalisent
04:31 hors de la France. Comme ça ils ne sont pas soumis aux lois de la France.
04:34 Arnaud Gaillot, soyons très concrets. On va prendre le prix du litre de lait.
04:37 C'est ce que vous produisez. Il coûte combien à produire aujourd'hui ? Aujourd'hui on est autour de
04:42 400,
04:44 450, 490. Il va être payé à 400. Il va être payé à 400. Donc il est payé moins cher que ce que vous...
04:51 Non mais bien sûr. Mais c'est hors la loi du coup ?
04:56 Potentiellement c'est hors la loi. Sauf que vu qu'il n'y a pas de contrat qui a été signé. Parce que vu que les deux parties sont
05:01 pas d'accord et que derrière vous faites appel à un médiateur. Mais vu que le médiateur ça prend du temps et après il faudrait saisir la
05:06 justice. Ils sont entre guillemets
05:08 pas hors la loi vu qu'il n'y a pas le contrat qui a été signé entre l'organisation de producteurs et l'industriel
05:13 pour après aller proposer le prix industriel. Donc en fait ils jouent sur des lignes. Et c'est pour ça qu'on a demandé que l'ADG
05:20 CCRF renforce les contrôles. Bruno Le Maire va envoyer 100 agents supplémentaires.
05:23 Oui c'est bien qu'il le fasse. Je pense qu'il va falloir un peu plus de 100 parce que les pauvres ils n'ont pas fini de faire des
05:28 heures supplémentaires. Mais voilà il faut y aller. On est un pays qui fait de la loi sur de la loi sur de la loi mais on ne les fait jamais appliquer.
05:35 On nous a expliqué Arnaud Gaillot, de très nombreux patrons de la grande distribution, ici même des industriels aussi, que si les prix de
05:41 l'alimentation avaient bondi ces deux dernières années, +20%, c'était à cause de la flambée des prix agricoles.
05:47 Ça veut dire que vous, vous n'avez pas vu la couleur de cette inflation ?
05:50 Alors très honnêtement, 2022 on a vu commencer à avoir un rebond. Ça tendait vers le milieu. 2023 vous avez l'effet ciseau.
05:58 L'augmentation des charges dues à la guerre en Ukraine. Donc finalement les agriculteurs n'ont plus le sentiment. Et là on est en train de sentir de repartir
06:04 malheureusement à la déflation. Ça fait dix ans que l'agriculture française subit de la déflation.
06:08 On sent que la tendance est repartie. Mais parce que...
06:11 Quand on nous a dit qu'on augmentait le prix des pâtes et par exemple des paquets de gâteaux,
06:16 parce que le prix du blé augmentait, en fait à l'arrivée l'agriculteur il n'a pas touché plus ?
06:21 Un petit peu mais pas l'entièreté de ce qui était passé en rose.
06:26 Le problème aussi c'est sans doute le rôle du consommateur qui doit acheter,
06:31 en pensant d'où ça vient, acheter produits français
06:34 pour vous faire vivre justement. Sauf que on est tous consommateurs.
06:38 On entend tous les jours ce pouvoir d'achat qui pèse sur tous les ménages.
06:43 Entre une brique de lait à 1,50€ et une à 1,10€,
06:47 le consommateur il choisit celle à 1,10€. Et encore le lait à la limite on n'en importe pas beaucoup je crois.
06:52 Non on n'en importe pas beaucoup mais j'invite les consommateurs à faire les ratios quand ils achètent un litre de lait à 1,10€
06:58 et qu'à l'agriculteur il est payé à 40 centimes.
07:01 Il y a des gens juste pour l'avoir mis dans une brique et d'autres le mettent en rayon,
07:06 ils se partagent une marge à plus de 60 centimes.
07:09 C'est eux qu'il faut pointer du doigt ce matin ?
07:11 Ils ont une part de responsabilité dans le revenu des agriculteurs.
07:15 Il y a le problème du prix du revenu, il y a aussi celui des normes, on l'entend beaucoup ces derniers jours.
07:22 Elles sont trop nombreuses nous dit tous les agriculteurs, concrètement dans votre exploitation par exemple comment ça se manifeste ?
07:26 Un exemple ?
07:27 Un exemple, vous prenez l'exemple de l'AE parce que c'est ce qui...
07:30 Alors ça on l'entend cette règle, 14 normes c'est ça ?
07:33 Voilà, 14 normes,
07:34 une réglementation avec des dates entre le 14 mars et le 15 août, vous n'avez pas le droit d'y aller mais en même temps
07:42 vous avez l'Office française de la biodiversité qui va vous expliquer qu'il y a une autre loi qui dit que s'ils ont envie de décréter que les dates sont plus longues,
07:49 ils décréteront que les dates sont plus longues.
07:50 Si vous taillez des branches qui ont plus d'un an, potentiellement vous êtes amendable parce que ce n'est pas les pousses de l'année.
07:56 Si votre propriétaire qui, le terrain lui appartient, les arbres lui appartient, se dit j'ai besoin de faire du bois pour me chauffer cet hiver,
08:04 moi je vais couper l'AE, ils arrivent, vu que c'est vous l'agriculteur, c'est vous qui prenez l'amende.
08:08 Sauf que ces normes elles ont aussi du bon pour le consommateur, pour la biodiversité ?
08:12 Mais vous savez ce qui est marqué quand on loue des champs, c'est qu'il faut l'entretenir en bon père de famille.
08:16 Donc ça veut dire que vous coupez la branche qui est morte, vous coupez l'arbre qui est mort, vous faites ce qui gêne.
08:21 On n'a jamais rasé, alors oui il y a eu des excès, mais si à un moment donné dans un pays on prend des règles,
08:27 on met des mesures en tenant compte que juste ceux qui font des excès, ça va devenir compliqué.
08:33 Il y a un moment donné, on ne va pas par catégorie, parce qu'il y en a quelques uns qui font des bêtises, considérer que tout le monde fait mal.
08:40 - Arnaud Gayot, juste d'un mot, s'il y avait une mesure que le Premier ministre devait annoncer pour faire rentrer tout le monde ?
08:47 - Malheureusement il n'y en a pas qu'une.
08:50 - Ça veut dire que ça va durer ?
08:51 - Non, je pense qu'honnêtement s'ils font un choc de simplification, ils connaissent.
08:55 - Mais ça on en parle depuis des années !
08:56 - Oui mais on leur a donné sur les mesures.
09:02 - Et on peut décréter comme ça, allez hop les normes on s'en fiche, peu importe la PAC, les milliards d'euros qu'on touche.
09:07 - Alors sur une partie ça va être compliqué, c'est là que je vous dis qu'il faut aller jusqu'au salon de l'agriculture sur tout ce qui est normes européennes, mais ça on compte sur le chef de l'État.
09:14 Par contre sur la question du revenu, sur la question des normes franco-françaises, ça oui il leur suffit d'une loi.
09:19 - Et vous avez donné au Premier ministre jusqu'à jeudi ou vendredi ?
09:23 [SILENCE]