Ça vous regarde - Agriculteurs : quelles mesures pour éteindre la colère ?

  • il y a 8 mois
Grand témoin : David Foenkinos, écrivain, auteur de « La vie heureuse » (Gallimard)

GRAND DÉBAT / Agriculteurs : quelles mesures pour éteindre la colère ?

« Le chrono de Blako » par Stéphane Blakowski

C'est dans le Sud de la France que tout a commencé mi-janvier 2024 : blocage total de l'autoroute 64 par les agriculteurs. Moins d'une semaine plus tard, les manifestations du secteur agricole, qui avaient déjà pris de l'ampleur en Pologne ou encore en Allemagne, se sont étendues sur une grande partie du territoire français. Outre les nombreux blocages de routes, la préfecture d'Agen est devenue, mercredi 24 janvier 2024, le théâtre de la colère des paysans, avec notamment des pneus enflammés et des jets de lisier. Au centre de ces actions de protestation figurent entre autres les revendications pour une rémunération plus importante ainsi qu'une simplification des normes européennes et nationales. Par ailleurs, selon un sondage d'« Odoxa-Backbone Consulting », 83% des Français estiment que le Président de la République ne soutient pas suffisamment les agriculteurs. Comment les pouvoirs publics pourront-ils apaiser les esprits échaudés du secteur paysan ?

Invités :
- Louis Margueritte, député Renaissance de Saône-et-Loire,
- Grégoire de Fournas, député RN de Gironde,
- Emmanuel Vandame, agriculteur biologique sur le plateau de Saclay et porte-parole de la confédération paysanne Île-de-France,
- Emmanuelle Ducros, journaliste à l'Opinion,
- Par Skype : Franck Sander, agriculteur et vice-président de la FNSEA.

GRAND ENTRETIEN / David Foenkinos : assister à ses propres funérailles pour revivre ?

Après avoir gravi les échelons chez Décathlon, Éric Kherson est contacté par une ancienne camarade de lycée qui lui demande de la rejoindre au cabinet du commerce extérieur. Il accepte ce changement professionnel et devient un allié précieux. Au milieu d'un voyage professionnel à Séoul, Éric découvre et essaie un salon particulier proposant de vivre ses propres funérailles. Une expérience marquante lui permettant de prendre du recul sur sa vie. Lui, l'homme monotone, séparé de sa femme, remet en cause son existence et se sent renaître. Vivre sa mort, est-ce le meilleur moyen de profiter de la vie ?

Grand témoin : David Foenkinos, écrivain, auteur de « La vie heureuse » (Gallimard)

LES AFFRANCHIS

- Richard Werly, correspondant France/Europe pour « Blick »,
- Pierre-Henri Tavoillot, philosophe,
- « Bourbon express » : Elsa Mondin-Gava, journaliste LCP.

Ça vous regarde, votre rendez-vous quotidien qui prend le pouls de la société : un débat, animé par Myriam Encaoua, en prise directe avec l'actualité politique, parlementaire, sociale ou économique.
Un carrefour d'opinions où ministres, députés, élus locaux, experts et personnalités de la société civile font entendre leur voix.

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Transcript
00:00 ...
00:05 -Bonsoir et bienvenue.
00:07 Heureuse de vous retrouver dans "Ça vous regarde".
00:10 Vous le reconnaissez, David Fonkelos.
00:12 Bonsoir. -Bonsoir.
00:13 -Merci d'être notre grand témoin.
00:15 On va parler de la vie heureuse chez Gallimard,
00:18 roman tendre et surprenant.
00:20 Sur la deuxième chance, un homme assiste
00:23 à ses propres funérailles pour mieux se réinventer.
00:27 Ca se passe entre la Corée du Sud et les milieux politiques parisiens.
00:31 C'est drôle, c'est enlevé.
00:33 Comme souvent, ça raconte l'époque, comme dans beaucoup de livres.
00:36 Dans la deuxième partie, notre grand débat ce soir,
00:39 jusqu'où ira la grogne des agriculteurs ?
00:43 Le mouvement de blocage s'étend, la crise s'installe
00:46 et la pression monte sur le gouvernement.
00:48 Revenu de misère, comment répondre au ras-le-bol des paysans ?
00:52 Nous en débattons dans un instant avec mes invités.
00:56 Enfin, nos affranchis ce soir,
00:57 "Regards sur l'Europe", Richard Verly,
01:00 le billet philo, Pierre-Henri Tavoyot
01:02 et Bourbon Express, Elsa Mondin-Gava.
01:04 Voilà pour le sommaire.
01:06 David Fautenot, ça vous regarde.
01:08 Top générique.
01:09 Musique rythmée
01:11 ...
01:20 -Elle monte, la colère des agriculteurs.
01:23 Le mouvement de blocage s'étend à toute la France.
01:26 C'est bien malin, celui qui sait combien de temps il va durer.
01:29 C'est la première crise que doit affronter
01:31 Gabriel Attal à Matignon.
01:33 Le Premier ministre doit faire des annonces
01:35 dans les jours qui viennent, mais comment répondre
01:38 à une grogne hétérogène aux interlocuteurs multiples ?
01:41 Bonsoir, Louis-Marguerite. -Bonsoir.
01:43 -Bienvenue sur ce plateau.
01:45 Vous êtes député renaissance de Saône-et-Loire.
01:48 Votre département est touché par les blocages.
01:50 Vous avez rencontré les agriculteurs mobilisés.
01:53 Vous sentez remonter du terrain.
01:55 Bonsoir, Grégoire de Fournasse. -Bonsoir.
01:57 -Bienvenue à vous.
01:58 Vous êtes député Rassemblement national de Gironde,
02:01 exploitant agricole de profession.
02:03 Bonsoir, Emmanuel Vendamme.
02:05 Vous êtes agriculteur bio sur le plateau de Saclay,
02:08 où vous produisez du blé et du pain.
02:10 Vous m'arrêtez, si je me trompe ? -Oui.
02:12 -C'est ça.
02:14 Vous êtes membre de la Confédération paysanne,
02:16 qui a été reçue avec d'autres syndicats à Matignon.
02:19 Enfin, bonsoir, Emmanuel Ducrox. -Bonsoir.
02:22 -C'est un plaisir de vous retrouver.
02:24 Ancienne chroniqueuse et journaliste à "L'Opinion",
02:27 spécialiste des questions agricoles.
02:29 Vous suivez depuis le début ce mouvement,
02:31 "L'Opinion", qui s'interroge en une,
02:34 aujourd'hui, sur la nature de ce mouvement.
02:36 Les gilets verts sont-ils les nouveaux gilets jaunes ?
02:40 David Fonquinos, n'hésitez pas à interroger nos invités.
02:43 Ca n'est pas vos sujets,
02:44 mais on sait que le monde agricole intéresse les écrivains.
02:48 Sentez-vous libre quand vous voulez.
02:50 Avant de vous donner la parole, on va planter le décor,
02:53 le point sur les blocages, les revendications,
02:55 les réactions politiques.
02:57 C'est dans le récap de Valérie Brochard.
02:59 -Et bonsoir.
03:01 -Bonsoir, chère Valérie.
03:02 -Bonsoir, Myriam, bonsoir à toutes et à tous.
03:05 -On peut parler de crise.
03:06 -Oui, c'est la crise du monde agricole,
03:09 des bennes de fumier devant l'office de la biodiversité
03:12 du Loire-et-Cher, des tracteurs en plein milieu
03:15 d'une quatre-voie dans les Côtes d'Armor,
03:17 des meules de foin en Gironde.
03:19 Les agriculteurs sont en colère et menacent très sérieusement
03:22 d'aller porter leurs revendications jusqu'à la capitale.
03:26 Ecoutez.
03:27 -Ça bouge très peu.
03:28 Je pense qu'au salon, plus après les JO,
03:31 il y aura des tracteurs sur le champs-élysées.
03:35 Et là, ce sera trop tard,
03:38 parce qu'une fois qu'on est partis, on ne s'arrête plus.
03:41 -Tout a commencé dans le Tarn.
03:43 A l'automne dernier, des éleveurs, des céréaliers
03:45 retournaient les panneaux des villes pour symboliser
03:49 l'obligation de marcher sur la tête, de se tuer à la tâche
03:52 pour appliquer des normes qu'on ne demande pas
03:54 aux autres pays européens.
03:56 Aujourd'hui, 85 départements sont concernés
03:58 et la Gronde se rapproche dangereusement de Paris.
04:01 Regardez cette carte.
04:03 Les agriculteurs bloquent les autoroutes
04:05 entre Pau et Bayonne, autour de Lyon,
04:08 entre Valence et Grenoble.
04:10 Sur la rocade d'Orléans, tout autour de Strasbourg,
04:13 il y a des moissonneuses bateuses
04:15 déployées aux abords de nombreuses routes en Bretagne.
04:18 La mobilisation est générale, très suivie à la hauteur du ras-le-bol
04:22 ressenti, comme nous l'explique cette agricultrice.
04:25 -Les normes, les dossiers qu'on doit faire
04:28 pour avoir le droit de travailler,
04:31 les choses qu'on nous promet
04:34 et que jamais on ne nous donne.
04:37 Et puis, voilà, on travaille toute l'année.
04:39 Très peu d'entre nous en vivent bien
04:42 ou même en vivent tout court.
04:44 Voilà, on a tous des familles à nourrir
04:47 et personne ne veut nous rémunérer pour le travail qu'on fait
04:50 alors qu'on nourrit tout le monde.
04:52 -Concrètement, Myriam, aujourd'hui, en France,
04:55 une éleveuse ou un maraîcher doit respecter
04:57 des règles strictes d'épandage,
04:59 donc dépendre de la pluie et du vent,
05:01 planter des haies pour soutenir la biodiversité,
05:04 mais attention, interdiction de les tailler,
05:07 de les entretenir avant le 15 août,
05:09 payer la hausse des taxes sur le gazole routier,
05:12 l'essence qui fait avancer les tracteurs,
05:14 les déclarations pour la PAC, les cahiers phytosanitaires,
05:17 les carnets d'élevage, et vous savez quoi ?
05:20 Ceci n'est qu'une toute petite partie
05:22 de la longue liste des règles à respecter
05:24 pour exercer son métier.
05:26 Le président de la République,
05:28 qui voit les tracteurs se rapprocher de l'Elysée,
05:31 entend, comprend et s'est même fendu
05:33 d'un tweet adressé aux agriculteurs.
05:35 "J'ai demandé au gouvernement d'être mobilisé
05:38 "pour apporter des solutions concrètes
05:40 "aux difficultés que vous rencontrez."
05:43 Le Premier ministre a donc promis
05:44 dans l'hémicycle d'annoncer des initiatives.
05:47 En fin de semaine, dans l'entourage de Gabriel Attal,
05:50 on annonce qu'une partie de sa déclaration
05:52 sera consacrée au malaise paysan,
05:54 mais vous le savez, Miriam,
05:56 cette réponse est éminemment politique.
05:59 Personne ne veut lâcher les agriculteurs,
06:01 tout le monde veut les récupérer.
06:03 C'est pourquoi Gabriel Attal prévient
06:05 le monde agricole de ne pas succomber
06:08 aux sirènes du RN. On l'écoute.
06:10 -Parler avec nos agriculteurs,
06:12 c'est parler avec des femmes, des hommes
06:14 qui sont dans l'angoisse, et je vais y revenir.
06:17 Mais c'est aussi parler avec des femmes et des hommes lucides.
06:20 Lucides sur l'importance de l'Union européenne,
06:23 et ça a été redit par le ministre Marc Fesneau,
06:26 pour les aides de la PAC, pour nos capacités d'export.
06:29 Il y a aussi une lucidité face à ceux qui butinent
06:32 de colère en colère, en donnant le sentiment
06:34 qu'on pourrait sortir de l'Union européenne.
06:37 -Voilà pour la tacle en règle
06:39 contre le RN en France.
06:40 Pendant ce temps-là, à Bruxelles,
06:42 une autre figure de l'extrême-droite
06:44 s'est emparée du sujet.
06:46 -Vous avez raison, mobilisez-vous,
06:48 allez sur le terrain, bloquez, faites entendre votre voix.
06:51 Malheureusement, en France, et j'ai le sentiment en Europe,
06:54 c'est le seul moyen d'être entendu.
06:56 -On comprend la manoeuvre politique,
06:58 mais l'urgence, c'est d'éviter le blocage total du pays,
07:02 alors qu'au moment même où on se parle,
07:04 les grilles de la préfecture d'Agen sont en flamme.
07:07 -La tension monte à Agen notamment,
07:09 et peut-être un début de radicalisation de ce mouvement.
07:12 Je vous donne la parole,
07:13 mais on voulait prendre la température ce soir,
07:16 puisqu'il y a des nuits de blocage dans le pays.
07:19 On va rejoindre Franck Sander.
07:20 Bonsoir.
07:22 Vous êtes agriculteur et vice-président de la FNSEA,
07:25 qui est solidaire du mouvement.
07:26 Vous êtes, j'espère, avec nous. Merci d'être là.
07:29 Cette nuit, sur l'un des points de blocage sur l'autoroute
07:32 à l'entrée de Strasbourg.
07:34 Décrivez-nous ce qui se passe autour de vous,
07:37 le blocage et la détermination sur le terrain.
07:39 -Bonsoir à tous.
07:40 La mobilisation a commencé cet après-midi,
07:43 ou même ce matin, pour les plus éloignés.
07:45 Plus de 400 tracteurs se rassemblent aujourd'hui
07:48 au centre de Strasbourg pour bloquer l'autoroute.
07:51 C'est comme vous avez dit, on est parti de mouvements
07:54 qui étaient censés pouvoir faire évoluer les choses,
07:57 avec des panneaux à l'envers, on marche sur la tête,
08:00 et on voit bien que rien n'a bougé,
08:02 donc le durcissement du mouvement est en route.
08:05 La mobilisation va largement au-delà de nos attentes,
08:08 et donc il y a un moment pour revendiquer,
08:10 c'est vrai, mais sur place aussi, les agriculteurs,
08:13 nous nous sommes organisés pour passer un moment
08:16 de convivialité entre nous, c'est-à-dire de pouvoir se restaurer,
08:19 partager nos problèmes pour éviter de se retrouver seul
08:22 dans nos fermes, et donc, oui, le mouvement,
08:25 il est très suivi, et je ne sais pas si on lèvera le camp demain,
08:28 tellement les agriculteurs se sont mobilisés.
08:31 Une agricultrice me disait "Mon frère est parti manifester,
08:34 "je lui ai demandé un tracteur sur la perle,
08:37 "on est là à deux, c'est le moment où j'en ai besoin."
08:39 -Oui, autre question. On comprend que vous appelez
08:42 à amplifier le mouvement, mais pas à bloquer forcément le pays,
08:46 alors que d'autres parlent même de faire venir les tracteurs
08:49 jusqu'à Paris. Il y a deux grandes revendications,
08:52 pour les résumer simplement, les revenus,
08:54 et les normes. Vous diriez ça aussi ?
08:56 -La première des choses, déjà, c'est qu'aujourd'hui,
09:00 l'agriculteur travaille beaucoup, beaucoup d'heures,
09:03 et ne gagne pas beaucoup, et donc la première des choses,
09:06 c'est reconnaître le bienfait de nourrir les hommes.
09:09 C'est la première des choses.
09:11 Bien évidemment, le revenu est important,
09:13 mais pour avoir du revenu, il faut simplifier les choses.
09:16 Contraintes administratives, on est là pour produire,
09:19 pour être dans nos champs, dans les étables,
09:22 auprès des vaches, des animaux,
09:24 mais on n'est pas là pour être surtransposé.
09:26 Aujourd'hui, les surtranspositions vis-à-vis de l'UE,
09:30 c'est inacceptable, surtout plus président de l'Union Européenne,
09:33 c'est engagé à ce qu'il n'y en ait pas.
09:35 Ca n'est pas le cas.
09:36 Les normes, il y en a beaucoup trop dans nos exploitations agricoles,
09:40 et donc c'est un tout qui fait qu'aujourd'hui,
09:42 la France régresse.
09:43 La France, historiquement, puissance agricole,
09:46 grande puissance, a perdu plus de 20 % de sa production,
09:49 et tout ça, c'est l'importation qui prend le relais,
09:52 et surtout avec des produits dont on ne veut pas les moyens
09:55 et les méthodes avec lesquelles ça a été produit.
09:58 -Merci, on voulait prendre le pouls sur le terrain.
10:01 À l'entrée de Strasbourg, il y a de la peur, de la colère.
10:04 C'est clair. Emmanuel Ducrot,
10:05 vous connaissez bien les sujets agricoles,
10:08 vous avez beaucoup d'interlocuteurs.
10:10 Qu'est-ce qui se passe ?
10:11 Quel mouvement ? De quoi est-ce le nom ?
10:14 Ce mouvement que personne n'a vu venir, à part l'Europe,
10:17 il y a l'Allemagne, mais là, tout remonte.
10:19 -Je ne suis pas d'accord pour dire qu'on ne l'a pas vu venir.
10:23 On l'a vu venir de très, très, très loin.
10:25 Ce qu'on voit, c'est la dernière goutte d'eau d'un vase qui déborde.
10:29 -Il s'est rempli au fil du temps, avec tout ce qu'on vient d'entendre,
10:33 la règle, la norme, le tracas administratif,
10:35 les agriculteurs qui disent qu'ils passent une journée de leur vie
10:39 chaque semaine à remplir des dossiers pour la PAC,
10:42 pour les aides, pour des déclarations...
10:44 -On va y venir, d'ailleurs, dans le détail.
10:46 Il y a le côté paperasme, mais aussi les normes environnementales.
10:50 -C'est pas les normes environnementales
10:52 qui posent problème, c'est la contrainte
10:55 autour des normes environnementales.
10:57 Il faut pas confondre les deux.
10:59 Le souci de l'environnement est là.
11:01 Les agriculteurs voient bien le changement climatique.
11:04 C'est la manière dont c'est...
11:06 Comment dire ? La contrainte que ça génère
11:08 et le sentiment punitif que ça génère.
11:10 Et puis, il y a une troisième chose qui, je pense, est fondamentale,
11:14 c'est le besoin de dignité des agriculteurs français.
11:17 Ils ont le sentiment de faire une tâche
11:20 qu'on leur a demandé de faire dans l'après-guerre.
11:23 La France, au sortir de la guerre,
11:25 n'était pas indépendante dans sa façon de se nourrir.
11:27 Cette indépendance, cette souveraineté alimentaire,
11:30 c'est une construction, des années d'investissement.
11:33 Pour un euro de nourriture qu'on produit,
11:36 on a sept euros d'investissement des générations précédentes
11:39 en savoir-faire, en terre, en matériel.
11:41 Donc, ils ont fait ce travail qu'on leur a demandé de faire,
11:45 que le ministre de l'Agriculture, Pizani, a demandé de faire.
11:48 On a conquis une souveraineté alimentaire.
11:51 -Elle est menacée. -Non seulement elle est menacée
11:54 par les importations, qui ne sont pas à nos normes,
11:56 mais ce qui est scandaleux, elle est menacée aussi
11:59 par le reproche qu'on leur fait de bousiller l'environnement,
12:03 alors qu'ils ont énormément évolué, de bousiller la santé des gens.
12:06 -On les culpabilise. -On les culpabilise,
12:09 on les réprouve, on les méprise,
12:11 et on leur explique en permanence comment ils doivent travailler.
12:14 Donc, si vous voulez, tout ça, c'est ces petites gouttes d'eau...
12:18 -Ca va être compliqué, politiquement,
12:20 de répondre à tout ça, quand le ras-le-bol est si large.
12:23 -On a vu des colères locales.
12:25 Ca a commencé dans le sud-ouest de la France,
12:27 où une maladie frappe les vaches, les affaiblit,
12:30 il y a eu la grippe du canard. Ca a commencé là.
12:33 Chaque région a ses propres revendications,
12:35 et puis on a la grande revendication du mépris,
12:39 de l'écrasement, en fait.
12:40 Le paysan est en bout de chaîne de la norme,
12:43 mais il est écrasé. -Et les salaires aussi.
12:45 Quand on regarde les revenus... -La rémunération, c'est...
12:48 -18 % des agriculteurs sont du seuil de pauvreté,
12:51 à 1 080 euros, donc ça fait beaucoup.
12:54 Je vais vers le syndicaliste que vous êtes,
12:56 Emmanuelle Van Damme. La Confédération paysanne
12:59 a été reçue, mais elle n'est pas à l'initiative,
13:02 directement, puisqu'au fond, c'est un mouvement
13:04 un peu qui surgit. On parle de la coordination rurale,
13:07 on découvre un peu les choses.
13:09 Vous vous retrouvez quand même dans ce ras-le-bol ?
13:12 Vous êtes solidaires ?
13:14 -C'est une évidence qu'on est solidaires,
13:16 des éleveurs, par exemple, qui travaillent 16 heures par jour
13:20 et qui ne vivent pas de leur métier,
13:21 qui, ici, sur ce plateau, seraient d'accord
13:24 pour travailler 14 heures par jour et gagner 800 euros par mois,
13:27 mais ça ne gêne personne au niveau gouvernemental,
13:30 puisqu'on continue dans ce système.
13:32 Les maraîchers, quand ils font des légumes,
13:35 ils arrivent toujours plus chers que les légumes
13:38 qu'on importe de Sicile, par exemple, ou d'Espagne,
13:42 qui sont fabriqués par des gens qui sont,
13:44 bien souvent, des immigrés qu'on ne paye pas,
13:47 qu'on ne loge à peine.
13:48 Tout ça, c'est accepté, c'est accepté par notre société.
13:51 Et du coup, oui, évidemment...
13:53 -Le malaise est très profond pour vous.
13:56 Même s'il n'y a pas une étincelle, en Allemagne,
13:58 c'est vraiment le prix du carburant,
14:00 là, il y a un ensemble de choses.
14:02 -Le prix du carburant, comme vous dites,
14:05 c'est une étincelle, mais le feu, qui dure depuis 20 ans,
14:08 c'est qu'on ne paye pas les denrées alimentaires en France
14:11 au prix qu'elles valent.
14:13 C'est quand même hallucinant.
14:15 Essayez d'aller acheter n'importe quel smartphone
14:18 à la moitié du prix qui est proposé,
14:19 vous ne l'aurez pas.
14:21 Mais en France,
14:22 quelle que soit l'exploitation
14:24 dans laquelle un agriculteur peut travailler,
14:27 à l'issue, la vente de son produit,
14:29 elle ne le paye pas.
14:31 C'est quand même fou.
14:33 Il y a 15 ans, il y a eu un grand mouvement
14:35 vers la conversion à l'agriculture biologique,
14:39 avec l'État qui était derrière.
14:41 15 ans après, le blé bio vaut quasiment moins cher
14:46 que le blé conventionnel.
14:48 Et que fait le gouvernement actuel ? Rien.
14:51 Il a soutenu énormément la haute valeur environnementale
14:54 ou la haute qualité environnementale.
14:57 Les gens se sont dit qu'il fallait aller sur ce créneau-là,
15:00 car apparemment, c'est mieux respecter la nature, etc.
15:03 C'est absolument faux.
15:05 Les critères pour faire ça, c'est juste de mettre une haie,
15:08 de mettre un peu de jachère,
15:10 mais en aucun cas de diminuer les pesticides.
15:12 On tombe complètement en haut.
15:15 Tous les gens qui ont investi sur l'agriculture bio,
15:17 tous ces gens qui sont allés sur ce créneau-là,
15:20 pas pour faire de l'argent,
15:22 parce qu'ils croyaient vraiment à un respect de la nature,
15:25 aujourd'hui, il y en a qui se déconvertissent
15:27 pour aller vers l'agriculture conventionnelle.
15:30 On tourne en haut.
15:31 -Aujourd'hui, quels que soient les syndicats,
15:34 la Confédération périsane est engagée
15:36 dans les questions écologiques, soutient le mouvement.
15:39 C'est compliqué, là, pour vous.
15:41 On voit que la tension monte.
15:43 On a vu les images à Agen.
15:45 On a l'impression que vous retardez un peu les réponses.
15:49 L'idée, c'est quoi ? Il faut laisser passer,
15:51 laisser s'exprimer cette colère ?
15:53 C'est ça, la stratégie ?
15:55 -C'est un cri de détresse, qui vient du coeur,
15:57 et ce n'est pas des revendications d'aujourd'hui.
16:00 On n'a rien fait depuis, mais à l'évidence,
16:03 on n'a pas fait assez et pas assez de façon puissante.
16:06 Alors, il faut quand même quelques jours
16:09 pour que, au plus haut niveau de l'Etat,
16:11 les choses soient dites, soient exprimées,
16:14 il faut une réponse rapide.
16:15 Le Premier ministre parle de quelques jours.
16:18 -Sur quoi, précisément, la réponse peut être française ?
16:21 Il y a des leviers, c'est décidé en Europe.
16:24 -Il y a beaucoup de choses.
16:25 D'abord, la stricte et peut-être plus dure
16:28 application d'Egalim et d'Egalim 2.
16:30 -La loi Egalim, précisée pour ceux qui le regardent.
16:33 -C'est une loi qui, dans la précédente mandature,
16:36 a permis de garantir un prix aux producteurs.
16:39 Il faut expliquer une chose simple.
16:41 On ne peut pas avoir un prix bas pour le consommateur,
16:44 voire un prix qui diminue, et un prix qui doit être celui
16:47 qui doit correspondre au prix de revient,
16:49 au coût de revient. -Dans ce contexte d'inflation,
16:52 est-ce que, par exemple, les producteurs de lait
16:55 ont profité de la hausse des prix ou ça ne marche pas ?
16:58 -Un peu, mais pas assez.
16:59 Ca dépend, en plus, parce que certains sont en coopérative,
17:03 mais il faut regarder dans le détail.
17:05 C'est là où on a une difficulté.
17:07 Il y a beaucoup de revendications, vous l'avez dit.
17:10 -Si on reste sur le revenu,
17:11 parce que ça, c'est essentiel, 18 % des agriculteurs,
17:14 1 sur 5, vivent sous le seuil de pauvreté,
17:17 1 083 euros par mois pour un agriculteur
17:19 qui bosse parfois 70 heures par semaine.
17:21 Vous avez fait bien de le rappeler,
17:23 c'est un revenu qui a chuté de 40 % en 30 ans.
17:26 Vous répondez, la loi Egalim, il faut faire respecter mieux la loi.
17:30 -Quitte à aller plus loin, je suis ouvert à cette question.
17:33 Par contre, ce qui rend dingue nos éleveurs et à raison
17:36 nos agriculteurs, c'est lorsqu'ils voient
17:38 que sur les étals de grande surface,
17:40 il y en a dans ma circonscription,
17:42 on a un produit, ça peut être un fruit,
17:45 ça peut être parfois de la viande,
17:47 qui est produit à 1,10 euro, par exemple, le kilo de pommes,
17:50 alors qu'à 10 ou 15 kilomètres de cette grande surface,
17:53 on a le prix à 2, 2,50 euros.
17:55 Et ça, c'est terrible.
17:57 Là-dessus, il faut qu'on travaille,
17:59 qu'on ait des réponses précises et fortes.
18:01 -Grégoire de Fournasse,
18:03 qu'est-ce que propose le Rassemblement national
18:06 sur les revenus des producteurs ?
18:08 Est-ce qu'il y a une question d'application de la loi,
18:11 de mettre la pression sur la grande distribution,
18:14 sur les industriels ?
18:15 -Tout d'abord, je peux pas laisser M.Marguerite
18:18 nous dire qu'ils n'ont pas assez fait.
18:20 La vraie question, c'est le mal qu'ils ont fait.
18:23 Au centre des revendications des agriculteurs,
18:26 vous avez la question des traités de libre-échange
18:29 que vos députés européens ont votés au Parlement européen.
18:32 -On va en parler, mais ce qui m'intéresse,
18:34 c'est ce qu'on peut faire en France.
18:37 -Est-ce qu'il faut mieux faire appliquer la loi ?
18:39 Si vous étiez aux affaires en France,
18:41 que proposeriez-vous sur le revenu ?
18:44 -Sur la question des lois EGalim,
18:46 ces lois ne sont pas appliquées.
18:48 M.Le Maire a annoncé qu'il allait envoyer 100 inspecteurs
18:51 pour vérifier si les lois EGalim étaient bien appliquées.
18:54 Pourquoi ces inspecteurs n'ont pas été envoyés plus tôt
18:57 pour vérifier ?
18:58 -100 agents de contrôle supplémentaires.
19:01 -Ca consiste à faire voter des lois.
19:03 On a eu EGalim 1, EGalim 2, EGalim 3.
19:05 Il n'y a aucun suivi de ces lois.
19:07 J'ai été au tribunal de commerce avec un véticulteur
19:10 dans ma circonscription qui a mis deux négociants
19:13 au tribunal sur la base de la loi EGalim 1.
19:15 Le ministère de l'Economie pouvait se présenter
19:18 avec ce véticulteur pour le soutenir
19:20 et demander une amende auprès de ces négociants.
19:23 Le ministère était absent du tribunal
19:25 parce que les lois EGalim ne sont pas suivies sérieusement.
19:28 -Donc, coup de pression supplémentaire
19:31 sur la grande distribution, les marges et les contrôles.
19:34 C'est vrai, il faut le souligner.
19:36 Emmanuelle Ducroix, sur les revenus,
19:38 il y a les moyens de la faire respecter.
19:40 Le prix du lait coûte 450, 480 euros à produire.
19:44 Il est payé 400. C'est hors la loi.
19:47 -Le problème, c'est que toute cette surnormation
19:50 de la relation commerciale, qui dure depuis 30 ans...
19:54 J'ai fait le décompte de toutes les lois
19:56 qui ont été créées pour encadrer les relations
19:59 de la grande distribution avec ses fournisseurs.
20:02 C'est du délire.
20:03 Le fait qu'on contractualise chaque année
20:05 dans des dates encadrées, ça n'existe qu'en France.
20:08 Cette chose-là, elle est génératrice
20:12 de tensions, de frustrations, d'inadaptations.
20:14 On voit bien qu'on est en train de courir après l'inflation.
20:18 On a couru dans un sens quand elle était en train de monter,
20:21 là, elle reflue, on recourt dans l'autre sens.
20:24 -Des négociations continuelles ?
20:25 -Oui, parce qu'il y a des cours mondiaux
20:28 pour certaines choses, on ne les suit pas,
20:30 on les suit avec retard, ça fait des trous de trésorerie.
20:33 Ce truc-là est insensé.
20:34 On encadre quelque chose qui ne devrait pas être encadré.
20:38 Plus on a essayé de protéger le monde agricole,
20:40 plus on l'a piégé dans des indices de construction des prix
20:43 qui sont incompréhensibles.
20:45 C'est très compliqué.
20:47 -Il y a un modèle à suivre, à l'étranger ?
20:49 -Je n'ai pas de solution parfaite,
20:51 mais à un moment, il faut peut-être
20:53 se poser la question de savoir si on doit régler
20:56 par la loi les erreurs de la loi.
20:58 Vous voyez ? C'est absurde.
20:59 C'est vraiment absurde.
21:01 On en rajoute des couches sans déconstruire
21:03 ce qu'il y a eu avant.
21:05 C'est vraiment... C'est dément.
21:06 Pour le revenu, oui, il y a des vraies questions.
21:09 On a des indices de construction des prix,
21:12 mais là, on peut pas se régler.
21:13 Un ministre de l'Economie dit qu'il a fini l'inflation alimentaire,
21:17 elle a augmenté de 20 % en deux ans, c'est terminé.
21:20 À l'autre bout de la chaîne, les producteurs disent
21:23 qu'ils continuent à payer l'électricité plus chère.
21:26 Vous avez demandé à ce qu'on renchérisse les salaires,
21:29 et les salaires de nos employés aussi se sont renchéris.
21:32 Ils se retrouvent avec des charges qui augmentent.
21:35 On dit aux consommateurs qu'ils ne paieraient pas.
21:37 Il faut qu'on admette que, collectivement,
21:40 on a tous accepté de payer l'alimentation trop peu chère
21:43 par rapport à sa valeur.
21:46 En fait, on refuse de payer la valeur du travail.
21:50 -Il va falloir accepter de payer plus cher
21:52 les produits agricoles français. -On est des enfants députés
21:56 de la nourriture. -Non, vous dites.
21:58 -On a fait cette analyse.
21:59 Que l'alimentation coûte moins cher pour les ménages
22:02 aujourd'hui qu'en 1950,
22:04 quand on voit tous les progrès technologiques
22:06 qu'ont fait l'agriculture, l'industrie,
22:09 c'est normal que l'alimentation coûte moins cher.
22:11 -C'est une chaîne. Il y a un problème ?
22:14 -Les carences des lois Egalim, c'est qu'elles refusent
22:17 de s'attaquer aux marges des intermédiaires,
22:19 en l'occurrence de la grande distribution
22:22 et de certains gros industriels. -Quel que soit le bord politique,
22:26 vous êtes d'accord pour dire qu'il faut réduire ces marges,
22:29 changer de méthode ? On parle des normes.
22:31 -J'aurais bien répondu là-dessus. -Je voudrais qu'on avance.
22:34 -Pour rappeler que l'Assemblée dans la précédente mandature
22:38 n'a pas voté les lois Egalim 1 et Egalim 2,
22:40 c'est le premier élément.
22:42 J'ai dit pas que c'est parfait. -On était 6 députés
22:44 et Marine Le Pen avait expliqué que c'était pour la distribution.
22:48 -Elle le dit en 2017 et en 2022, mais dans les mêmes phrases.
22:51 Il faut baisser le prix au consommateur.
22:54 -Peut-être que vous serez d'accord sur la bureaucratie,
22:57 sur la paperasse. Je reprends l'expression
22:59 d'Emmanuel Ducrot dans "L'opinion",
23:01 c'est Kafka sur un tracteur. Explication, Marco Pommier.
23:04 Musique rythmée
23:07 ...
23:08 -On nous impose toujours plus de normes,
23:11 mais comment on fait pour appliquer ces normes ?
23:13 -On est prêts à se lever pour faire notre travail,
23:16 mais aujourd'hui, on a une surcharge administrative
23:19 qui fait que ce travail-là, il a perdu de son sens.
23:23 -Sur les barrages routiers partout en France,
23:25 à chaque fois, la même exaspération,
23:28 dans le viseur des agriculteurs, notamment,
23:30 l'inflation des normes.
23:32 Ici, en Charente, cet agriculteur devait semer du blé
23:35 en décembre, après le maïs l'année dernière.
23:38 C'est une réglementation européenne
23:40 qui lui impose cette rotation des cultures,
23:43 mais la météo de ces derniers mois en a décidé autrement.
23:46 -La terre, c'est comme de la pâte à modeler.
23:48 Implanter de la céréale dans ces conditions,
23:51 on sait qu'elle va pas lever.
23:53 -Jean-Bernard Salat ne pourra pas cultiver le blé en temps et en heure.
23:57 Il doit s'expliquer.
23:58 -C'est un document qu'on a à remplir,
24:01 où il faut que je stipule le numéro de la parcelle,
24:04 sa surface, ce que j'avais prévu d'y mettre
24:06 et ce que je vais y mettre,
24:08 et en plus, les photos géolocalisées.
24:11 -Des démarches fastidieuses,
24:12 mais obligatoires pour cet agriculteur,
24:15 au risque de perdre une partie des aides européennes,
24:18 soit 60 000 euros chaque année.
24:20 -C'est pour ça que je fais ce métier,
24:22 parce que je veux produire et vivre du prix de mes produits.
24:26 -Overdose de normes aussi pour cet éleveur de porcs en Bretagne.
24:29 Pour le confort des bêtes,
24:31 Laurent Dartois a installé un méthaniseur pour le chauffage.
24:34 Un bâtiment refait à neuf coûte l'investissement 4 millions d'euros,
24:38 mais cet agriculteur dénonce des délais trop longs,
24:41 alourdis par une administration trop tâtillonne.
24:44 -Sur le point de vue agro-environnemental,
24:46 sur le point de vue bien-être animal et plein de choses,
24:50 il faut aujourd'hui à peu près trois ans
24:53 pour que votre bâtiment voit le jour.
24:55 -Selon une enquête de l'IREF,
24:57 un agriculteur français passe en moyenne neuf heures par semaine
25:01 à remplir des formulaires.
25:02 -Emmanuelle Ducron,
25:05 on regarde dans le reportage un moment précis
25:08 d'un agriculteur qui explique la valance de normes.
25:11 -Je vais essayer d'expliquer, parce qu'il faut s'accrocher.
25:14 Quand on fait une moisson de blé en août,
25:17 corrigez-moi si je me trompe,
25:18 quand on fait une moisson de blé en août,
25:21 on n'est pas supposé laisser la terre toute nue derrière.
25:24 C'est bien, car on capte du carbone avec un couvert végétal.
25:27 On ne seme pas ce couvert végétal
25:29 si on utilise la parcelle à l'automne pour faire autre chose.
25:33 Si on attend plus longtemps, on laisse un couvert végétal.
25:36 Cet agriculteur a fait sa moisson.
25:38 Il n'a pas mis de couvert végétal,
25:40 car il semait du blé plus tard.
25:42 Sa terre est tellement détrempée qu'il ne peut pas semer son blé.
25:45 Donc, l'administration lui demande
25:47 pourquoi il n'a pas de couvert végétal sur cette terre.
25:51 Il dit qu'il devait semer là, mais qu'il ne pouvait pas.
25:54 On lui dit qu'il allait être sanctionné
25:56 car il n'a pas planté son couvert végétal en août.
25:59 Il est supposé avoir une boule de cristal
26:01 pour savoir qu'il n'a pas pu planter son blé en novembre
26:04 et qu'il aurait dû prévoir en août qu'il lui fallait un couvert végétal.
26:08 Il est en infraction, il doit remplir un document
26:11 et géolocaliser sa parcelle avec un téléphone
26:14 pour confirmer que les satellites ont bien compris le message.
26:17 -Emmanuel Vendamme, vous opinez ? -J'ai refusé.
26:20 On nous demandait d'envoyer des photos,
26:22 géolocaliser des parcelles qu'on n'avait pas semées
26:25 et surtout, d'expliquer pourquoi on ne les avait pas semées.
26:29 -Vous avez les pieds dans l'eau. -C'est juste,
26:31 au mois de novembre, pour ceux qui ne sont pas du métier,
26:34 il y a eu une pluviométrie énorme,
26:38 énorme, énorme, énorme,
26:40 et on n'a pas pu tout semer, tout emblaver,
26:42 ce qu'on devait faire, et partout en France.
26:45 Du coup, nous, c'est le désarroi,
26:47 parce que faire une rotation, une succession parcellaire,
26:50 surtout en agriculture bio, c'est compliqué.
26:52 Quand on ne peut pas la mettre en place,
26:55 il faut trouver des solutions.
26:57 Je n'ai pas les solutions pour les parcelles.
26:59 On reçoit un courrier de l'administration
27:01 qui nous demande de faire des photos géolocalisées,
27:04 de donner les relevés pluviométriques
27:06 si on en a sur la ferme,
27:08 parce qu'on a mieux des stations météo enregistrées.
27:11 J'ai dit qu'il y en a beaucoup plus.
27:13 Si vous voulez venir vérifier, mettez des bottes.
27:15 L'administration a quand même fait marche arrière
27:18 en disant qu'on n'avait pas besoin des photos géolocalisées.
27:22 -Très intéressant.
27:23 -Ca donne la façon dont on est considéré
27:27 par l'administration française et européenne,
27:30 parce que l'administration agricole française
27:33 ne fait que suivre ce que demande
27:35 l'administration agricole européenne.
27:37 -Marguerite, on marche sur la tête.
27:39 On infantilise les agriculteurs ?
27:41 -Non, on les surveille.
27:43 C'est policier, c'est pas pareil.
27:45 C'est pas du tout pareil.
27:47 -Qu'est-ce que Gabriel Attal peut faire ?
27:49 Est-ce qu'on peut rayer d'un trait de plume,
27:51 puisque c'est du réglementaire, pas besoin de légiférer,
27:55 un certain nombre de paperas, de règles ?
27:57 -Oui. J'ai un exemple peut-être encore plus caricatural,
28:01 peut-être un peu moins extraordinaire,
28:03 mais une agricultrice de Saint-Hélène,
28:05 dans ma circonscription, me disait que quand elle a voulu
28:08 monter un petit bâtiment pour faire de la vente bio,
28:11 notamment sur de la viande bovine,
28:14 elle m'expliquait qu'il y avait plusieurs documents
28:17 qu'elle devait mettre dans le dossier,
28:19 qui devaient faire 500 ou 600 pages, neuf fois.
28:22 On demande plusieurs exemplaires pour pouvoir les répartir
28:25 à d'autres administrations, à l'heure où on peut
28:28 globalement numériser, si on l'a une fois.
28:30 C'est anecdotique.
28:31 Elle me dit qu'elle était à la Chalons-sur-Saône
28:34 pour faire la queue, dépenser 40 euros.
28:36 Ca peut paraître anecdotique, mais c'est tous les jours.
28:39 Vous allez me dire "Pourquoi vous le découvrez maintenant ?"
28:43 C'est peut-être un peu tard.
28:44 Néanmoins, cet exemple est atterrant.
28:47 Oui, on peut le faire, on prend les 30 formulaires
28:49 les plus utilisés, on divise par deux leur volume.
28:52 Je suis en charge de la simplification
28:54 sur la vie des entreprises. -Le choc de simplification.
28:57 -Il faut piloter très finement l'administration.
29:00 C'est important, d'état d'esprit, il faut être dans une administration.
29:04 On ne parle pas que sur l'agriculture.
29:06 -La question, c'est quand ? -Il faut le contrôler après.
29:09 -Et avec quel contrôle, derrière ? -A priori.
29:12 -D'accord avec ça ?
29:13 C'est du bon sens.
29:14 -Je suis véticulteur, je subis les 14 déclarations par an
29:19 pour les douanes, les dossiers PAC,
29:21 avec les mots de passe qui changent tous les six mois,
29:24 tout ça pour toucher moins de 2 000 euros de subvention.
29:27 Cet enfer bureaucratique est imposé aux agriculteurs.
29:30 M. Marguerite semble le découvrir,
29:33 mais il est vieux comme le monde
29:34 et il empoisonne la vie des agriculteurs.
29:37 -Vous allez vous retrouver là-dessus ?
29:39 -Oui, mais le problème, c'est pourquoi, en ces temps,
29:42 le pouvoir en place n'a pas réussi à avancer sur cette question.
29:46 Si vous voulez, ça ne peut pas être...
29:48 La réponse à ce qui se passe, de très profond et de très grave,
29:51 quand on parle de ces manifestations agricoles,
29:54 ça ne va pas être une petite loi de simplification.
29:57 -On en vient pour terminer à la question européenne,
30:00 pour conclure ce débat.
30:02 -Ce n'est pas une réponse aux désespoirs des agriculteurs.
30:05 -Pour terminer ce débat, qui s'achève,
30:07 il y a beaucoup de sujets dans ce dossier,
30:10 n'est-ce pas l'Europe le meilleur levier pour agir ?
30:12 Grégoire de Fournasse.
30:14 -Si vous voulez, l'Europe, c'est les traités de libre-échange,
30:18 c'est "farm to fork" avec la feuille de route
30:20 de décroissance agricole, que les macronistes ont voté
30:23 avec les écologistes.
30:25 L'Europe, c'est quand même une volonté
30:27 de décroissance agricole.
30:29 Vous avez un texte symptomatique, c'est "restauration de la nature".
30:32 C'est imposer le retour à l'état naturel
30:35 de 20 % des terres agricoles,
30:36 quand, dans le même temps, on met sur le fronton
30:39 l'enjeu de la souveraineté alimentaire.
30:42 C'est ça, l'injonction contradictoire,
30:44 c'est dire aux agriculteurs, "soyez capables de nourrir
30:47 "la population, et on va vous enlever
30:49 "des produits vitaux sans alternatives."
30:52 -Le bon niveau pour négocier des pays étrangers,
30:55 je pense particulièrement à l'Amérique du Sud,
30:58 où on a une possibilité d'importer.
31:00 -On est perdant.
31:01 On importe la moitié du poulet, la moitié des fruits et légumes,
31:04 20 % du bœuf, nous sommes perdant.
31:07 -Vous vous dites "votez pour moi aux élections européennes"
31:10 pour faire quoi ? Pour sortir ?
31:12 Pour renverser la table ?
31:13 -Il faut une inflexion de la politique européenne.
31:16 -Une profonde inflexion.
31:18 -En restant dedans, vous répondez ?
31:20 -On est dans la caricature de la récupération politique.
31:23 -Vous avez ça comme argument ?
31:25 -Allez sur le fond.
31:26 -Sur le fond, et pour conclure...
31:28 -C'est trop facile de dire ça.
31:30 -Vous n'avez pas besoin de hurler.
31:32 La France s'est opposée au traité du Humbert-Cussure.
31:35 C'est la réalité.
31:37 Point numéro deux, à l'initiative de la France,
31:39 on a interdit l'importation de viande
31:42 qui était traitée avec des antibiotiques de croissance.
31:45 Ca, c'est 2023.
31:46 -Vous avez voté le traité du Humbert-Cussure
31:49 avec la Nouvelle-Zélande.
31:50 -C'est l'initiative de la France.
31:52 Il faut aller plus loin, mais ce n'est pas vrai.
31:55 -La République, c'est la République du Rassemblement national.
31:59 -On va s'arrêter là.
32:00 Emmanuel Ducroc, juste pour apaiser en guise de conclusion,
32:03 c'est le bon niveau, mais il faut que la France pèse.
32:06 Est-ce qu'elle a les marges de manoeuvre ?
32:09 -L'Europe, c'est ce qui a construit la puissance agricole.
32:12 L'Europe, c'est notre paix alimentaire.
32:14 Après, je crois qu'il est temps qu'on se pose la question.
32:18 J'ai beau être profondément attachée
32:20 aux échanges internationaux,
32:22 je pense qu'il est temps qu'on découvre
32:24 que la nourriture doit être extraite des traités de libre-échange.
32:28 C'est un chemin que j'ai fait, et là, je me rends compte
32:31 qu'on détruit nos filières pour importer du pire,
32:34 et ça, ça ne peut pas durer.
32:35 -On va s'arrêter sur cette note-là.
32:37 Je vais vous laisser débattre,
32:39 c'est passionnant, en dehors de ce studio,
32:42 mais je voudrais que l'on garde un peu de temps pour vous.
32:45 Merci d'être venus sur LCP.
32:47 Dans une dizaine de minutes, les partis prides nous affranchissent.
32:50 Ils sont fin près.
32:52 On va revenir sur les livraisons d'armes à l'Ukraine.
32:54 L'Europe est-elle enfin à la hauteur ?
32:57 Et puis le philosophe Pierre-Henri Tavoyau
32:59 qui s'interroge sur la politique nataliste d'Emmanuel Macron.
33:02 Bourbon et presse, quel est le programme ?
33:05 -Beaucoup de députés rêvent de devenir Premier ministre.
33:08 La Première ministre, elle, elle redevient députée.
33:11 -Merci. A tout à l'heure.
33:12 Alors, on va partir, maintenant,
33:14 voyager en Corée, dans les cabinets,
33:17 on va plonger dans "La vie heureuse",
33:20 votre roman, David Funkenaus,
33:21 "Chez Gallimard", l'histoire d'Eric et Amélie,
33:24 deux camarades de lycée qui se retrouvent 20 ans plus tard,
33:27 je le disais, à la fois en Asie,
33:29 mais aussi à Paris,
33:32 de son point de vue,
33:33 le sien, le garçon,
33:35 puis le point de vue d'Amélie.
33:38 On regarde ça pour bien comprendre,
33:40 parce qu'il y a quelque chose qui se passe en Corée
33:43 qui pourrait nous arriver.
33:44 C'est signé Stéphanie Despierre.
33:46 Invitation et interview.
33:48 ...
33:51 Si on vous invite,
33:52 David Funkenaus,
33:53 c'est parce que dans votre dernier livre,
33:56 vous vous attaquez à un sujet sensible et politique,
33:59 la mort,
34:00 et parce qu'une loi est en préparation
34:03 sur la fin de vie.
34:04 Romancier, dramaturge et scénariste,
34:06 vous êtes une machine à baisse salaire.
34:08 Depuis 2009 est la parution de "La Délicatesse",
34:11 vendue à plus d'un million d'exemplaires.
34:14 En 2014, avec votre roman
34:17 sur la peintre juive Charlotte Salomon,
34:19 vous ratez de peu le Goncourt.
34:21 Vous vous consolez avec celui des lycéens
34:24 et le prix Renaudot.
34:25 Dans "La vie heureuse",
34:27 vous plantez un décor très contemporain.
34:30 Eric, la quarantaine, divorcé,
34:32 intègre un cabinet ministériel
34:34 du quinquennat d'Emmanuel Macron.
34:37 Il pilote les dossiers de réindustrialisation.
34:40 Lors d'un voyage d'affaires,
34:42 Eric fait une expérience qui va bouleverser sa vie.
34:45 A Séoul, il pousse la porte d'un centre
34:48 qui propose de vivre un faux enterrement,
34:51 son propre enterrement.
34:52 Votre fiction s'inspire d'un concept
34:55 qui existe vraiment en Corée.
34:57 -Mes chéries, Min-sun, Min-yo...
35:00 -Première étape pour les volontaires,
35:02 rédiger une lettre d'adieu à ses proches.
35:04 -Merci d'avoir été mes enfants
35:06 et de m'avoir donné tant de bonheur.
35:08 Je vous aime, maman.
35:11 -Puis la mort est déclarée.
35:13 Votre corps est emmené à l'hôpital.
35:16 -Après une fausse cérémonie,
35:18 les participants s'allongent dans un vrai cercueil
35:22 durant plusieurs minutes,
35:24 dans le noir total.
35:26 -Je sens le vent et c'est bon.
35:30 Vous savez ce que je ressens, en ce moment ?
35:32 Je vais profiter de tout ça.
35:34 -Quand j'ai ouvert les yeux,
35:36 c'était comme si une seconde chance m'était donnée.
35:43 -Cette mort fictive serait un remède à la dépression.
35:47 -Quand les gens font l'expérience de la mort,
35:50 leur conscience devient plus mature.
35:53 Ceux qui sont passés par là ne se suicident jamais.
35:57 -Votre roman raconte cet électrochoc
36:01 pour un retour vers une vie heureuse
36:03 et, pourquoi pas, vers une fin heureuse.
36:07 Alors, David Fuenkinaus,
36:09 doit-on pouvoir décider du jour de sa mort ?
36:13 -Le sujet est très bien.
36:14 J'ai pas besoin de faire de l'adaptation au cinéma.
36:17 C'était un film.
36:19 Mais voir les images, c'est extrêmement parlant.
36:22 -Une mort fictive peut vous aider à renaître ?
36:24 -Oui, je crois.
36:25 Ce qui était étonnant, c'est que vous avez eu
36:28 un sursaut de frayeur.
36:30 Ca paraît très particulier, ici, en France, en Occident.
36:33 -Comment vous est venue l'idée ?
36:35 -J'ai entendu parler de ce rituel,
36:37 qui est un véritable phénomène en Corée du Sud.
36:40 On parle d'un pays, le sujet l'a dit,
36:42 avec beaucoup de taux de suicide,
36:44 dépression, pression sociale,
36:46 une société difficile,
36:48 et il y a un mal-être très fort.
36:50 Cette thérapie de choc devient un phénomène.
36:52 Ca a été dit, le simple fait de vivre physiquement la mort,
36:56 de s'allonger dans son cercueil, de rédiger quelques mots
36:59 pour raconter les choses importantes de sa vie,
37:02 ça vous donne de la vitalité.
37:03 Ca vous permet... Une des femmes a dit...
37:06 Elle parle d'une seconde vie, une renaissance.
37:09 Je pense que tous les gens qui ont été malades
37:11 ou qui sont confrontés à des choses extrêmes peuvent comprendre.
37:15 -C'est ce qu'il faut dire, tout de même,
37:17 même si ceux qui vous lisent le savent bien.
37:20 Vous avez connu une expérience de mort,
37:22 après une très grave infection pulmonaire
37:25 qui vous a cloué à l'hôpital pendant des mois.
37:27 Vous-même, vous êtes parti.
37:29 Vous l'avez vu, cette fameuse lumière, ce tunnel ?
37:32 -Oui, tout à fait. -Ce sang, quoi ?
37:34 Mourir quelques secondes et on remonte ?
37:36 -J'ai été mort quelques secondes.
37:38 Ma mère, devant moi, m'a raconté.
37:40 J'ai eu l'expérience du tunnel et je suis revenu à la vie.
37:43 C'est vrai que ça a changé ma vie d'une manière miraculeuse.
37:47 Après, alors que je n'étais pas issu d'un milieu culturel,
37:50 je me suis mis à lire, à écrire,
37:52 j'ai été propulsé vers la sensibilité
37:54 et j'ai eu le sentiment d'avoir une deuxième vie,
37:57 une vie où je suis en capacité,
37:59 non pas d'être dans la joie en permanence,
38:01 mais en tout cas d'essayer d'avoir un rapport
38:04 plus apaisé aux choses de la vie.
38:06 -Après Charlotte,
38:07 sur la peintre Charlotte Salomon,
38:09 vous lui rendez hommage en la citant en exergue de ce livre.
38:12 "On devait même, pour aimer plus encore la vie,
38:16 "être mort une fois."
38:17 -C'est le slogan de ma vie,
38:19 il y a quelque chose de cet ordre-là,
38:21 en tout cas l'idée que cette étape-là,
38:23 qui peut être douloureuse, l'expérimentation de la mort,
38:27 les choses graves qu'on peut vivre,
38:29 peuvent nous propulser dans quelque chose
38:31 qui peut nous aider à aimer,
38:33 qui, en tout cas, nous permet d'avoir un rapport
38:36 plus léger aussi à certaines choses.
38:38 Mais moi, ça me permet aussi d'interroger
38:40 l'idée de changer de vie,
38:42 d'aller chercher ce qui est important ou pas
38:44 dans sa propre vie, d'aller questionner l'essentiel,
38:47 et c'est extrêmement contemporain,
38:49 on se rend bien compte de nombre de personnes autour de nous
38:53 qui vont aller interroger leur bonheur.
38:55 -C'est un roman aussi sur la relation amoureuse,
38:58 sur le bon moment, sur l'étincelle
39:00 qui fait qu'on voit l'autre à un moment.
39:02 Pourquoi votre héros, qui va pas bien,
39:04 qui est très mélancolique, qui est coupable de la mort de son père,
39:08 qui n'aime pas la garde de son fils,
39:10 qui s'engueule avec sa mère, pourquoi il ouvre la porte
39:13 de "Happy Life", cette entreprise en Corée du Sud
39:16 qui fait des faux enterrements ?
39:18 -Vous avez raison, c'est aussi une histoire d'amour.
39:21 Il y a au coeur de cette histoire le rituel coréen,
39:24 mais c'est une histoire sur 30 ans,
39:26 un chassé-croisé entre un homme et une femme
39:28 qui se croisent, qui se retrouvent, qui se ratent,
39:31 et qui vont finalement comprendre
39:33 pourquoi la vie les met en permanence l'un face à l'autre.
39:36 Lui, c'est vrai qu'il travaille chez Decathlon,
39:39 il a 40 ans, il est au bout de sa vie,
39:41 tout le monde lui dit "à fond la forme",
39:43 il est traversé par la mélancolie, il a besoin d'un électrochoc,
39:47 en tout cas, quelque chose qui va le pousser à changer de vie,
39:50 à prendre les bonnes décisions, et c'est vrai que le hasard,
39:54 avec une succession d'étrangetés qui font qu'il va se retrouver
39:57 à Séoul face à ce rituel, et finalement,
40:00 c'est quelque chose qui l'attendait et qui était nécessaire.
40:03 -C'est un repulse à nouveau dans la vie.
40:05 Vous l'avez fait, cette expérience ?
40:07 On a retrouvé la photo dans Paris Match.
40:10 -Oui, j'ai fait des photos dans un cercueil.
40:12 -On vous a mis dans un cercueil. -J'ai bien aimé.
40:15 Pour moi, c'est pas du tout morbide.
40:17 Il y a quelque chose, justement, qui fait du bien,
40:20 qui permet aussi de remettre les choses en place,
40:23 de faire un bilan sur son propre parcours,
40:25 et puis, peut-être, d'appréhender de manière plus positive.
40:29 -On n'a pas cloué, on vous a pas mis dans le noir.
40:32 -Vous nous assurez quand même. -C'est vrai que dans le rituel,
40:35 il y a le couvercle.
40:36 C'est une thérapie pour vous faire du bien,
40:39 pas pour vous angoisser.
40:40 Si vous le faites, Myriam, et que vous êtes effrayée,
40:43 on vous ouvre le couvercle, on arrête l'expérience.
40:46 Mais je pense que, dans mon livre, le rituel arrive en France.
40:50 Et alors, il y a quelques angoisses, ici, en France,
40:53 mais j'espère que ça va arriver,
40:55 parce que vraiment, c'est extrêmement positif
40:57 et ça fait du bien.
40:59 -On a compris, c'est un roman sur l'amour,
41:01 sur le bon moment.
41:02 On pense à "Harry rencontre Sally".
41:06 Vous le citez, d'ailleurs, ce film formidable.
41:09 C'est un roman un peu aussi sur la politique,
41:11 parce qu'elle est directrice de cabinet
41:15 du secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
41:18 Alors, on croise pas mal de monde.
41:20 Vous l'aimez, ce monde-là ?
41:22 -Oui, c'est pour ça. Je voulais être invité sur LCP,
41:25 donc j'ai rajouté un versant politique.
41:27 -Vous serez toujours le bienvenu.
41:29 -C'est intéressant pour moi, on l'a raconté,
41:32 il y a ce rituel qui peut paraître un peu loufoque,
41:35 extrême, mystique, et j'avais besoin de contrebalancer
41:38 avec un environnement extrêmement concret,
41:40 donc la vie professionnelle chez Decathlon,
41:43 et puis le gouvernement, pour elle,
41:45 au commerce extérieur.
41:46 D'un point de vue basique, j'avais besoin
41:48 qu'il parte à Séoul, à un moment donné.
41:51 Le monde politique me passionne, j'ai la chance,
41:53 en tant qu'écrivain, de rencontrer souvent les politiques,
41:57 de pouvoir échanger avec eux, et c'est vrai que je raconte
42:00 un petit peu les arcanes de l'ambition
42:03 et de la désillusion pour cette femme
42:06 qui a envie de gravir les échelons.
42:08 -On croise Emmanuel Macron, qui vous fait croire
42:10 qu'il vous connaît personnellement,
42:13 qui tutoie tout le monde, et Amélie va même jusqu'à téléphoner
42:16 à Alexis Collet, le secrétaire général de l'Elysée.
42:19 Il fallait casser justement cette dimension un peu mystique
42:22 avec des figures du réel, avec presque une manière
42:25 de dépeindre un milieu, quitte un peu à s'en moquer
42:28 de façon ironique. -Je sais pas si je m'en moque,
42:31 parce que je pense que cette cruauté-là,
42:33 on peut la trouver en milieu politique
42:35 et dans d'autres milieux, mais ce qui me touchait,
42:38 c'était de voir cette femme aussi avec une ambition
42:41 extrêmement sincère de réussite, certes,
42:43 mais en tout cas, de vouloir aider son pays,
42:46 de vouloir travailler à la campagne
42:48 d'éventuelle réélection d'Emmanuel Macron,
42:51 et puis, au gré d'un remaniement,
42:54 elle ne suit pas son ministre de tutelle,
42:56 elle n'est pas intégrée dans la nouvelle équipe,
42:59 il y a quelque chose de l'ordre de la violence,
43:02 d'être délaissée, et c'est quelque chose
43:04 que même les acteurs aussi peuvent ressentir
43:07 par rapport au désir de l'autre.
43:09 -Je vais vous montrer une fleur.
43:10 Vous allez la reconnaître immédiatement, cette fleur.
43:14 Elle est rouge, elle a des longs poils.
43:16 Est-ce qu'on l'a... -Pour l'instant,
43:18 je me vois moins. -Vous la reconnaissez ?
43:20 -Oui, c'est la fleur Lycoris.
43:23 Voilà, Lycoris radiata,
43:25 c'est d'abord le mot, "lycoris",
43:27 qui me plaisait beaucoup, et c'est vrai que mon personnage
43:30 va appeler le rituel,
43:33 la version française du rituel, "lycoris",
43:35 parce que c'est une fleur qui symbolise
43:38 le passage vers l'au-delà.
43:39 Il y a toute une réflexion mystique autour de cette fleur,
43:42 et j'aime bien travailler sur les symboles.
43:45 -Vous pensez que ce rituel, s'il venait en France,
43:48 il permettrait aussi d'avoir moins peur de la mort ?
43:51 -Je crois, et puis on voit bien
43:53 toute la nouvelle génération,
43:55 avec les angoisses aussi liées au climat,
43:59 le mal-être, l'incertitude aussi.
44:02 -Vous me voyez venir, il y a un débat parlementaire
44:04 sur la fin de vie. -Complètement.
44:06 -Et c'est vrai que, entre la question de l'euthanasie,
44:10 le suicide assisté, qu'est-ce que vous, vous en pensez ?
44:13 Ce rituel, aujourd'hui, permet de renaître,
44:16 mais parfois, il faut pouvoir accepter cette mort,
44:19 peut-être la mettre en scène, y parvenir.
44:22 Qu'est-ce que vous pensez de la loi,
44:24 ce qu'il faut légiférer ?
44:25 -Je suis complètement pour, et je pense qu'il faut
44:28 qu'on avance beaucoup plus loin dans cette loi,
44:31 mais on sent à chaque fois,
44:32 c'est pas la première fois que ça va revenir
44:35 au coeur de l'actualité, on sent une crispation très forte ici.
44:38 Je reviens d'un voyage au Mexique,
44:40 quand on voit le rapport à la mort,
44:42 on fête les morts, on leur offre des cadeaux,
44:45 on voit toutes les couleurs autour de la mort.
44:48 Au Mexique, ici, c'est extrêmement difficile.
44:50 Avec le vieillissement de la population
44:53 et des cas extrêmement difficiles, comme ça, de fin de vie,
44:56 ça me paraît évident qu'il faut absolument légiférer
44:59 et avancer. -Vers la date
45:01 où tu vas mourir. -Ca a été dit par le gouvernement.
45:04 J'espère vraiment que ça va être acté.
45:06 -En tout cas, on attend, on attend toujours.
45:08 La main tremblante ! -Entre-temps,
45:10 on peut faire ce rituel. -Et on peut lire
45:13 "La vie heureuse". Merci beaucoup, David Funkinos.
45:15 C'est à lire chez Gallimard,
45:17 on va finir ce jour avec vos romans,
45:19 on va terminer avec les parties prises de nos affranchis.
45:22 On accueille nos chroniqueurs.
45:24 Pierre-Henri Tavoyau, du Collège de philosophie,
45:30 bienvenue à vous, et Richard Verly.
45:32 -Bonsoir. -Bonne année à tous les deux,
45:35 d'ailleurs, du quotidien suisse blic.
45:37 Je vous ai pas vus depuis 2024.
45:39 On commence par "Bourbon Express",
45:41 comme chaque soir, l'histoire du jour à l'Assemblée.
45:44 C'est vous, Elsa Mondingava, qui nous l'a racontée.
45:47 -On connaissait Elisabeth Borne,
45:48 Première ministre, on va la découvrir bientôt députée.
45:52 La Première ministre, je le rappelle,
45:54 a démissionné le 8 janvier dernier.
45:56 Enfin, il a fallu qu'elle démissionne.
45:58 Lors de sa passation, elle s'est dite impatiente
46:01 de venir siéger ici, à l'Assemblée.
46:03 On le rappelle, Elisabeth Borne a été élue
46:05 dans le Calvados en juin 2022.
46:07 Elle a jamais siégé, puisqu'elle a été nommée à Matignon.
46:11 Elle va pouvoir prendre son siège à partir du 9 février prochain.
46:15 Elle passe de Première ministre à députée parmi 577.
46:20 C'est pas forcément évident.
46:22 -Elisabeth Borne, qui revient à l'Assemblée,
46:24 ça va être facile pour elle ?
46:26 -La politique est une école d'humilité.
46:28 Et voilà, on peut être au summum des responsabilités
46:33 et redevenir simple mortel, si j'ose dire.
46:36 Je pense que c'est quelque chose
46:38 qu'elle a probablement tout à fait intégré.
46:40 -Comment elle le prépare, ce retour ?
46:43 -Hier, elle a rencontré le président du groupe renaissant,
46:46 Sylvain Maillard. Ils ont préparé son arrivée.
46:49 Ils ont parlé, déjà, bureau.
46:51 L'ancienne Première ministre ne va pas siéger n'importe où.
46:54 Ici, à l'Assemblée, il y a un bureau dédié
46:56 aux anciens Premiers ministres.
46:58 C'est le plus grand du palais, 30 mètres carrés.
47:01 Elle réfléchit à la commission qu'elle va intégrer.
47:04 C'est la place qu'elle occupera dans l'hémicycle,
47:07 le plus loin possible des bans de la gauche.
47:10 -C'est pas la première fois
47:11 que les anciens Premiers ministres font le chemin de Matignon.
47:15 -C'est même assez courant.
47:16 Plus récemment, Jean-Marc Ayrault,
47:18 congédié par François Hollande après des municipales ratées,
47:22 fait son retour au groupe socialiste
47:24 au Palais Bourbon le 6 mai 2014.
47:26 Voilà ce qu'il déclare aux journalistes
47:28 venus pour son retour.
47:30 -Plus libre, sûrement, mais avec le même souhait,
47:33 c'est de contribuer à la réussite de la France.
47:36 -Si Elisabeth Borne n'a pas d'inspiration,
47:38 elle pourra s'inspirer des déclarations
47:41 de Jean-Marc Ayrault.
47:42 Comme on est sympa, on a d'autres conseils pour la néo-députée.
47:45 Elle est attendue de pied ferme par les oppositions.
47:48 -Est-ce qu'on peut imaginer que vous la chahutiez un peu,
47:51 qu'elle ait le droit à un comité de l'accueil ?
47:54 -C'est pas impossible, Elisabeth,
47:56 que vous ayez quelques mois d'accueil.
47:58 Vu comme vous avez humilié le Parlement,
48:01 c'est pas impossible qu'on vous le rappelle.
48:03 -La voilà prévenue. Elle sera pas toute seule.
48:06 Il y aura d'autres ministres pour l'accompagner.
48:09 -On connaît pas encore la liste, puisqu'Emmanuel Macron
48:12 et Gabriel Attal tardent à donner la composition finale
48:15 du gouvernement, mais d'autres ministres
48:17 vont rejoindre les bancs de l'hémicycle.
48:20 Stéphane Travert nous le donne.
48:22 Il sait de quoi il parle, puisqu'il a été député,
48:24 ministre, puis député.
48:26 -Quel est le conseil que vous donnez aux ministres ?
48:29 Vous êtes des députés comme tout le monde ?
48:31 -C'est exactement ça.
48:32 Vous savez, l'humilité, ça ne gêne rien.
48:35 Et c'est pas parce que vous avez été ministre
48:38 que, lorsque vous arrivez à l'Assemblée,
48:40 c'est "poussez-vous de là que je m'y mette
48:43 "et vous allez voir ce que vous allez voir".
48:45 Non, il faut prendre sa place, faire sa place, travailler.
48:48 -Humilité, travail, les anciens ministres
48:51 et l'ancienne Première ministre sont prévenus.
48:54 -Merci beaucoup, Elsa Mondin-Gava.
48:56 Richard, l'Europe, vous nous parlez Ukraine
48:58 et vous parlez ce soir d'aide militaire.
49:01 Thierry Breton, le commissaire européen, l'affirme.
49:04 Livraison d'un million d'obus à Québec.
49:07 -Un million d'obus à Kiev.
49:08 Emmanuel Macron veut produire plus vite les matériels militaires.
49:12 Ca y est, c'est l'économie de guerre pour Kiev, enfin ?
49:15 -Thierry Breton a promis que le million d'obus
49:18 serait bien livré à l'Ukraine, sans doute d'ici le milieu de cette année.
49:22 Il l'a répété en Pologne, où il poursuit sa tournée
49:25 des industriels de la défense. Cette Europe de la défense
49:28 se met sur le pied de guerre.
49:30 Les industries d'armement redoublent d'efforts
49:33 pour réapprovisionner les arsenaux des 27 pays membres de l'Union
49:37 et exporter l'indispensable soutien militaire à l'Ukraine.
49:40 C'est vrai en France, où l'usine Nexter, près de Bourges,
49:43 promet de sortir deux fois plus de canons César
49:46 de ses gènes de production cette année
49:48 afin d'en livrer 78 à l'Ukraine.
49:50 C'est vrai en Norvège, où l'usine Namo de Rofos,
49:53 à 100 km au nord d'Oslo,
49:54 est en train de doubler sa capacité de production d'obus et de poudre.
49:58 On peut citer aussi l'allemand Rheinmetall,
50:01 qui construit les chars Léopard 2 A7,
50:03 la dernière version du tank le plus utilisé en Europe.
50:06 Pour l'anglais BAE Systems,
50:08 tous ces industriels n'ont qu'un chiffre sur leur carnet de commande,
50:11 155. Pourquoi ? 155 mm, c'est le calibre des fameux obus
50:16 tirés par les canons des forces de l'OTAN.
50:18 -On ne pourra plus dire trop peu, trop tard ?
50:21 -Pas tout à fait, car trois obstacles demeurent en face,
50:24 face à une Russie qui, elle, est passée en économie de guerre
50:28 en accordant la priorité aux producteurs de munitions
50:31 et de canons sur toute autre production.
50:33 Le premier obstacle pour les Européens,
50:36 c'est qu'il ne faut pas seulement aider Kiev,
50:38 il faut aussi renouveler le matériel des armées européennes
50:41 pour pallier à toute vulnérabilité stratégique.
50:44 Le Danemark, par exemple, n'a toujours pas reçu
50:47 la quinzaine de canons César qu'il avait commandés, payés
50:50 et qui ont été livrés à l'Ukraine,
50:52 où 49 de ces canons autoportés sont opérationnels.
50:56 Le deuxième obstacle, c'est l'argent,
50:58 car il faut les payer, les industriels.
51:00 Or, qui dit achat européen pour l'Ukraine,
51:02 dit dépenses supplémentaires.
51:04 Le premier ministre hongrois, proche de Vladimir Poutine,
51:07 et de son collègue slovac, Robert Fitzhau,
51:10 répètent, avant le prochain sommet européen du 1er février,
51:13 que les achats d'armes pour l'Ukraine
51:15 ne doivent pas être financés sur le budget de l'Union.
51:18 Le troisième obstacle, enfin, c'est la concurrence,
51:21 entre les industriels, qui vont se disputer
51:24 les commandes et les usines,
51:26 mais aussi concurrence entre fabricants européens
51:28 et tous ceux qui ont du matériel disponible à vendre sur étagère.
51:32 C'est le cas des Etats-Unis, mais aussi des Sud-Coréens.
51:35 La Pologne, pour mémoire, a acheté à Séoul un millier de chars.
51:39 Bref, oui, l'économie de guerre européenne est en marche,
51:42 mais dans ce type de production industrielle,
51:45 c'est différent, car cette souveraineté,
51:47 celle des armes, reste la plus difficile à partager.
51:50 -On va bientôt fêter, c'est pas le bon mot,
51:53 célébrer, je sais pas quel mot dire,
51:55 les deux ans de la guerre en Ukraine
51:58 et de l'invasion russe.
51:59 On peut encore la gagner, vous pensez ?
52:01 -Ca va être compliqué. J'ai été en Ukraine,
52:04 j'ai monté un spectacle, j'étais tout le mois de juillet à Lviv.
52:07 La vraie inquiétude, c'est la potentielle élection
52:10 de Donald Trump, dans quelques mois,
52:12 qui va peut-être lâcher l'Ukraine,
52:14 et ça sera, à mon avis, le moment de bascule.
52:17 -Vous allez réagir à cette chronique,
52:19 j'en suis sûre. Pierre-Henri,
52:21 vous vous êtes intéressé à la politique nataliste
52:24 d'Emmanuel Macron. On sait qu'elle est en baisse,
52:26 une baisse historique. Le président veut la relancer,
52:30 d'autres sont moins d'accord. -C'est le cas de Sandrine Rousseau,
52:33 dont on a parlé tout à l'heure, qui,
52:35 avec son esprit de contradiction qui le caractérise,
52:38 cite, dit la chose suivante,
52:41 "la baisse de la natalité est au contraire rassurante".
52:44 Elle justifie son propos de deux manières.
52:47 D'une part, en tant que féministe,
52:49 je la cite à nouveau,
52:50 "les utérus des femmes ne sont pas une affaire d'Etat,
52:53 "chaque femme est libre de choisir de faire des enfants ou pas".
52:57 Personne n'obligeait dans les mesures prises,
52:59 c'est une contradiction avec un propos qu'elle a tenu,
53:02 c'est qu'elle dit constamment "le privé est politique",
53:05 ce qu'elle semble dénoncer ici.
53:07 Le second argument est plus cohérent,
53:10 c'est-à-dire qu'en tant qu'économiste,
53:12 elle considère que si on a une politique de décroissance,
53:15 c'est une très bonne nouvelle.
53:17 -En revanche, c'est pas la même ligne côté président.
53:20 Même David Lyssenaar est sur la même ligne,
53:23 il faut relancer la natalité.
53:24 -Le débat est ancien sur la politique nataliste en France,
53:28 il néglige souvent ce débat, une question simple
53:31 que les philosophes adorent se poser,
53:33 pourquoi on fait des enfants ?
53:35 On peut faire l'inventaire rapide des réponses principales,
53:38 une réponse qui est une réponse biologique
53:41 défendue par les philosophes,
53:42 qui consiste à dire qu'on n'a pas le choix
53:45 et que c'est la nature qui se sert de nos passions amoureuses
53:48 pour, au fond, faire perdurer l'espèce.
53:51 Deuxième argumentation possible, plus culturelle,
53:54 qui consiste à dire qu'au fond, si nous faisons des enfants,
53:58 on va essayer de neutraliser la peur de la mort.
54:00 On en parlait. La peur de la mort, pourquoi ?
54:03 Grâce aux enfants, qui nous ressemblent,
54:05 argument d'Aristote,
54:07 il y a quelque chose de nous qui va rester.
54:09 -On va survivre. -Voilà, un peu de...
54:11 Une terre, un nom, un héritage,
54:14 c'est un ersatz d'immortalité.
54:16 Une troisième réponse, plus spirituelle,
54:18 qui vient notamment du christianisme.
54:21 Il a cette idée importante que les enfants nous sauvent.
54:24 Un enfant nous sauve.
54:25 C'est l'idée que le Dieu Tout-Puissant,
54:28 c'est ça, la spécificité, s'est manifesté aux hommes
54:31 parce qu'il y a de plus fragiles, de plus impuissants,
54:34 de plus démunis, et que cet enfant qui nous sauve
54:36 va sauver l'humanité.
54:38 On peut avoir une version laïque de cette affaire avec Rousseau,
54:41 Jean-Jacques, pas Charline. -On avait compris.
54:44 -Rousseau dit la chose suivante.
54:46 Au fond, le petit être démuni qui crie quand il vient de naître,
54:50 c'est un appel à l'aide, une vulnérabilité,
54:52 et c'est lui qui force l'humanité à se moraliser,
54:55 à se décentrer de son égoïsme naturel,
54:57 et cette vulnérabilité est comme un appel.
55:00 C'est ça qui moralise l'humanité,
55:02 c'est ça qui nous fait grandir au fond.
55:04 C'est une idée très profonde.
55:06 C'est en faisant grandir les autres qu'on grandit soi-même
55:09 et qu'on devient une grande personne.
55:12 Les enfants, ça sert pas à l'espèce...
55:14 -Mais à nous élever. -Ca nous élève.
55:16 -Cette dimension-là, vous trouvez qu'elle est en perte de vitesse ?
55:20 -Généralement. Il y a encore des enfants qui naissent.
55:23 Elle est concurrencée de manière assez rugueuse
55:25 par à la fois l'individualisme,
55:27 le côté développement personnel... -Un enfant si je veux.
55:30 -Un enfant si je veux. -Quand je veux.
55:33 -Et par le côté décroissantiste.
55:35 On considère que l'enfant, c'est un obstacle
55:37 à la libération de la femme, à la vie épanouie du couple,
55:40 au développement personnel,
55:42 c'est aussi un obstacle au salut de la planète
55:45 qui prime le salut de l'humanité.
55:47 C'est ça, l'idée.
55:48 Grandir, on pourrait dire ça aujourd'hui,
55:51 est un peu devenu suspect,
55:52 et parfois, même certains, ou certaines,
55:55 préfèrent être déconstruites.
55:57 -Une petite réaction ?
55:58 -J'ai vu qu'il y avait une très grande tendance
56:01 à ces couples qui ne font pas d'enfants
56:03 et qui le revendiquent.
56:05 Je pense que c'est important de contrecarrer aussi...
56:08 -Chacun fait comme il veut, mais...
56:10 -Ca doit rester une liberté.
56:11 Mais la politique nataliste, c'est un grand classique,
56:15 quels que soient les bords politiques.
56:17 -Ca, c'est un grand classique.
56:19 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:22 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:25 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:28 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:32 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:35 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:38 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:41 -C'est un grand classique. -C'est un grand classique.
56:44 -Voilà, on a le droit d'avoir encore l'idée.
56:47 On se laisse du temps. Merci à vous.
56:49 C'est la fin de cette émission.
56:51 Merci d'avoir suivi "Soirée documentaire",
56:54 qui commence avec Jean-Pierre Gratien.
56:56 A demain.
56:57 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
57:00 Générique
57:03 ...

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