• il y a 9 mois
Certains le connaissent grâce à sa célèbre pancarte “Mom i’m fine”, slogan créé par Jonathan, un jeune homme ayant voulu partir à la découverte du monde sans inquiéter sa mère. À sa grande surprise, ce qui devait rester un message rassurant est devenu une véritable marque de fabrique.

Mais en réalité, Jonathan n’a pas toujours été si "fine" qu’il a pu le prétendre à travers son compte Instagram. Il est venu nous raconter son aventure la plus dangereuse, vécue en Bolivie, celle qui aurait pu lui coûter la vie.

Merci à @JonathanKubben pour sa confiance et pour son partage d'expérience !

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Voyages
Transcription
00:00 Et là, l'histoire part en sucette.
00:02 Il faut savoir qu'il fait -15°C.
00:03 Ton système digestif ne fonctionne pas.
00:05 Il y a tellement peu d'oxygène
00:06 que l'oxygène va seulement pour le cœur et pour les poumons.
00:10 Beaucoup moins pour le cerveau,
00:11 beaucoup moins pour les autres organes.
00:14 Je n'ai pas de force et je sens que je commence à pouvoir pas bien
00:18 et je commence à tomber.
00:18 Je suis Belge d'origine mexicaine
00:20 et il y a à peu près 7 ans, j'ai décidé de tout quitter.
00:23 Vendre ma voiture, de laisser mon boulot.
00:25 Et l'idée c'était de... Je voulais voyager.
00:28 Donc du coup, j'ai décidé de créer un concept
00:30 qui s'appelle "Mom on Find" pour ceux qui connaissent.
00:32 L'idée c'était simple, c'est que je voulais voyager à travers le monde,
00:34 dire à ma mère que j'allais bien,
00:35 dans des situations un peu folles.
00:36 Donc en sautant d'un avion, avec l'armée colombienne,
00:39 avec des requins, avec des crocodiles, enfin un peu tout.
00:44 Je commence par Cuba et justement l'idée est un peu venue
00:47 du fait qu'à Cuba, il n'y a pas d'Internet.
00:49 Ils vendent un peu ça comme de la drogue en fait.
00:51 C'est-à-dire que dans la rue, ils font "pss pss pss pss".
00:53 Ils donnent un code.
00:54 Je ne sais pas si c'est toujours comme ça,
00:55 mais à l'époque, c'était comme ça, il y a 6-7 ans.
00:57 Et le contexte est le suivant.
00:58 C'est pour rappeler, je crois que c'était 14 euros le megabyte.
01:01 Je crois qu'une photo, ça le mettait dedans.
01:03 Donc je m'étais dit, je vais payer un Wifi à un gars
01:07 dans un parc sombre,
01:09 puis on pouvait se connecter.
01:11 Et à partir de là, je pouvais poster une photo.
01:14 Et je m'étais dit, je vais dire à ma mère que je vais bien.
01:16 Je suis arrivé en Bolivie et là, c'était l'aventure la plus folle de toute ma vie.
01:19 Et en fait, il y a un moyen de rester avec des tribus locales.
01:23 Ils avaient plein de rituels.
01:25 Je ne sais pas si vous avez entendu parler de la fourmi bullet ants.
01:28 C'est la fourmi balle.
01:30 Donc en fait, c'est la morsure la plus puissante, je pense qu'il y a.
01:33 Donc il y a une échelle de douleur.
01:34 Là, pardon, là, c'est une opinion, ce n'est pas un fait.
01:36 Je ne me rappelle pas exactement comment ça fonctionne,
01:38 mais en fait, il y a une échelle de douleur.
01:40 Et si je me rappelle bien, il faudra vérifier.
01:43 C'est que je crois qu'avoir un enfant, je crois que c'est 6.
01:46 Je crois que cette morsure, c'est 9.
01:48 Et donc, ils ont un gant qu'ils mettent avec plein de ces fourmis.
01:52 Les gens tombent dans les pommes.
01:54 C'est assez fou.
01:55 Donc en fait, lorsque tu mets ce gant,
01:57 c'est un rituel pour montrer que tu es un homme.
01:59 Et donc, tu passes dans l'âge adulte, il y a plein de rituels comme ça.
02:02 Il y en a où tu dois sauter, je crois, je ne sais plus, 20 mètres sur ton ventre.
02:07 Il y en a où je crois que tu dois donner une claque à un grizzly ou un lion.
02:10 Enfin, à travers le monde, il y a plusieurs tribus qui ont des rituels qui sont complètement fous.
02:14 Et là, c'est à ce moment-là où je me suis dit, je ne suis pas un homme.
02:17 Franchement, ça me va de...
02:19 Là, c'est le seul truc où je me suis dit...
02:21 Quand tu vois la douleur et à quel point...
02:24 Tu te dis bon, voilà, je vais peut-être t'éviter.
02:26 Mais il y a eu plein de trucs comme ça que j'ai fait, dont ce voyage en Bolivie.
02:30 Totalement irresponsable.
02:31 En fait, je reçois un mail de quelqu'un qui me parle en espagnol,
02:35 qui me dit, écoute, on a vu ce que tu as fait.
02:36 Est-ce que ça te dirait de faire l'ascension d'une montagne ?
02:39 Cette montagne est à 6088 mètres.
02:42 Pour les moins alpinistes d'entre nous, 6088 mètres,
02:45 le mont le plus haut d'Europe, c'est le Mont Blanc.
02:48 Et c'est 4800 mètres, je pense.
02:50 Donc tu rajoutes, je ne sais pas, trois tours Eiffel en plus,
02:54 et tu le mets au-dessus du Mont Blanc.
02:56 Et c'est à peu près ce que tu dois monter.
02:57 Moi, je suis niveau plage.
02:59 Moi, l'altitude, c'est 100 mètres.
03:00 Bruxelles, ce n'est pas très très haut.
03:02 Du coup, je devrais demander quel est le pourcentage de gens qui réussissent.
03:05 Ils me disent, bon, 50%.
03:06 Et au moment où il me dit ça, je me dis, bien, 50%.
03:10 Je me dis, j'ai un truc qui me fonctionne bien, c'est le mental.
03:13 Si je me mets un objectif, je vais me donner vraiment à fond.
03:15 Donc, je pense que si on prend la majorité des personnes,
03:18 je suis dans le premier tiers sur cette partie-là.
03:20 Donc, je me dis, j'ai plus de chance d'y arriver.
03:22 Donc, il serait quand même fou de se dire une fois, j'étais à 6088 mètres.
03:26 Il me dit, écoute, nous, on peut t'entraîner, tu peux venir,
03:27 tu peux faire tout ce que tu veux et puis tu peux commencer.
03:30 On a un petit jour d'entraînement et en fait, il me donne une combinaison.
03:33 Et moi, j'avais été au ski.
03:34 Je me disais, ça va être une combinaison de ski.
03:35 Pas du tout.
03:36 En fait, c'est la combinaison de ski avec des trucs autour.
03:39 Et là, ils me mettent des spikes.
03:40 C'est en fait des sortes de crampons, mais énormes.
03:43 Enfin, là, ça devrait être un truc comme ça.
03:46 C'est pour la glace et ils me donnent des piolets.
03:48 Et là, je me dis, attends, moi, je croyais qu'on allait marcher.
03:50 Je n'avais pas du tout le...
03:52 Et il me dit, non, non, il n'y a pas de chemin.
03:54 Tu dois te forger ton chemin pour arriver en haut.
03:56 Et la montagne change avec le vent, les conditions climatiques.
03:59 Donc, du coup, on est parti et je garde toute mon énergie.
04:03 Et il y a certaines pauses et certains moments.
04:06 Et donc, je commence à entendre ce que les autres disent.
04:08 Et la manière dont ça fonctionne, il y a quelqu'un devant qui est le Sherpa,
04:11 qui est celui le plus habitué.
04:12 Ils ont physiologiquement un corps qui est différent de nous.
04:14 Donc, ils sont adaptés à leur environnement.
04:17 Et donc, ils résistent beaucoup plus à l'altitude.
04:19 Et parfois, ils se sentent même mal quand ils sont à des niveaux proches de zéro de la mer.
04:24 Donc, ils ont leur cage thoracique.
04:26 C'est super intéressant, il y a un documentaire là-dessus qui est différent.
04:28 Ils sont plus adaptés.
04:29 Donc, lui, quasi en sifflotant, il marche tranquille.
04:33 Moi, au milieu, donc, moins expérimenté avec des cordes.
04:35 Et puis, un Anglais qui était derrière moi, qui était venu spécialement pour ça.
04:38 Et donc, en discutant avec d'autres personnes, on arrive au premier camp.
04:42 Tout le monde mange, je me tais.
04:43 Je me dis, "Moi, tu te concentres, tu ne gaspilles pas d'énergie,
04:47 tu ne rigoles pas, tu ne fais rien parce que j'aime bien parler, etc."
04:50 Et donc là, j'entends quelqu'un qui dit,
04:52 "Ah, et toi, qu'est-ce que tu fais ?"
04:53 "Ah, moi, je fais les sept montagnes, je reviens du Kilimanjaro, etc."
04:57 Ok.
04:58 Quelqu'un d'autre qui dit,
04:59 "Ah ouais, moi aussi, j'étais à tel truc en Patagonie, etc."
05:03 Et en fait, je réalise que je suis le seul gars qui a zéro expérience, mais dit tout.
05:07 Et je commence à me sentir super mal.
05:08 Mais vraiment super mal, je me dis, "Attends, attends,
05:11 moi, je viens d'un trek, j'ai fait le Machu Picchu, je suis trop content."
05:13 Et voilà, c'était 4-5 jours, mais c'était des niveaux totalement acceptables.
05:16 Il n'y a pas de piolets, il n'y a pas de spikes, il n'y a rien.
05:18 Donc, je parle au Sherpa et je lui dis, "Écoute, tu m'as amené où, là ?
05:21 C'est tous des aventuriers de haut niveau."
05:25 Il me dit, "Non, non, ne t'inquiète pas, on est ensemble, tout va bien se passer."
05:28 Je dis, "Mais si jamais je veux abandonner, comment ça se passe ?"
05:30 Il me fait, "Ah, là, c'est tous les trois qui abandonnent."
05:33 Et je parle un peu l'anglais, il me dit, "Ouais, c'est mon rêve d'arriver là,
05:36 tu n'imagines pas, ça fait longtemps, j'ai économisé pour ça."
05:38 Et là, je me dis, "Oh là là, pression ultime,
05:43 je vais dormir, je me sens vraiment pas bien."
05:44 Donc, je me réveille.
05:46 Là, le deuxième jour, il est plus costaud.
05:49 On arrive au deuxième camp, là, tout change.
05:52 Vraiment, l'ambiance est totalement différente.
05:54 Là, je vois les gens beaucoup plus concentrés.
05:55 Et en fait, il faut savoir qu'on était à 5 000...
05:57 Quoi que je dise, bêtise, 5 300, 5 400 mètres.
06:00 Parce qu'à 5 500, en fait, il y a tellement peu d'oxygène
06:03 que l'oxygène va seulement pour le cœur et pour les poumons.
06:07 Beaucoup moins pour le cerveau, beaucoup moins pour les autres organes.
06:11 Et donc là, du coup, tu as des migraines qui sont extrêmement fortes.
06:15 En fait, il y a moins de le faire en deux jours, mais ton corps ne s'habitue pas.
06:17 Donc, les gens abandonnent beaucoup plus.
06:18 Ils pensent que c'est mieux de le faire plus rapidement, mais en fait, non.
06:21 Ton corps a besoin de s'adapter un peu plus.
06:23 Donc, je me dis, "Bon, je vais aller dormir."
06:25 Et là, mon chère femme me dit, "Non, tu ne vas pas dormir."
06:27 Et j'ai commencé, "Je ne vais pas dormir."
06:29 Elle m'a dit, "Si tu t'endors, ta fréquence de respiration diminue.
06:33 Donc, tu as encore moins d'oxygène.
06:35 Donc, tu ne vas pas bien savoir te réveiller.
06:37 On va devoir te redescendre. En fait, tu ne vas pas être bien."
06:40 Je fais quoi ?
06:40 "Tu médites. Tu te focalises sur ta respiration."
06:44 Et en fait, je ne savais pas.
06:45 Un manque d'expérience total.
06:47 Donc, en fait, tu commences vers minuit à monter.
06:50 Ça te prend quelques heures, minuit, une heure à peu près.
06:53 Et en fait, tu arrives avant le lever de soleil
06:55 pour pouvoir redescendre parce qu'en fait, les rayons de soleil tapent sur la montagne.
06:58 Et en fait, tu as des crevasses.
06:59 Donc, tu peux tomber.
07:02 Tu ne peux pas le faire à ce moment-là.
07:03 Donc, je dis, "OK, ça va."
07:05 Et là, je me prépare. Je prends mes affaires.
07:06 Il faut savoir qu'il fait -15°C.
07:08 Pour faire pipi, c'est compliqué.
07:10 En fait, pour tout enlever déjà, c'est peut-être pas super froid.
07:14 Donc, je ne vous fais pas de dessin, mais en plus, ce n'est pas ouf.
07:17 Donc, là, en fait, ton système digestif ne fonctionne pas.
07:21 Donc, ce que tu manges, ça doit être du sucre.
07:23 Du sucre rapide pour que tu aies le plus rapidement l'énergie
07:26 et ne pas avoir des choses qui sont compliquées.
07:27 Donc, pas de graisse, pas de choses comme ça.
07:29 Ils te donnent des oreos et des choses comme ça.
07:30 Ils t'offrent aussi, si ça ne va pas bien, des feuilles de coca.
07:33 C'est la même chose que tu utilises pour la cocaïne,
07:35 sauf que c'est légal, c'est ce qui ouvre tes pores.
07:37 Bon, tu n'as pas tout le traitement chimique après illégal,
07:40 mais pour eux, c'est quelque chose qu'ils mettent dans des thés et qui fonctionne.
07:42 Donc là, on commence.
07:44 Et là, je commence à...
07:46 Enfin, ça fatigue.
07:48 C'est vraiment... Tu as du poids.
07:49 Tu as 15 kilos sur toi.
07:51 Tu es vive.
07:52 Plus, franchement, c'est pesant.
07:54 C'est vraiment long.
07:56 Et donc, on s'arrête à un moment donné.
07:58 Et là, l'histoire part en sucette.
08:00 Le gars, je lui dis...
08:02 "Bah, j'ai soif. Je vais boire un peu."
08:05 Donc, je me couche. Il me fait...
08:06 "Mais pourquoi tu te couches ?"
08:08 Je dis... "J'ai envie de me relâcher."
08:09 Il me fait... "Non, non, ça gaspille beaucoup d'énergie.
08:11 Tu dois relâcher ton sac et tout.
08:12 Quand tu te remontes avec tout, ça te pèse trop.
08:14 Donc, vaut mieux que tu le laisses et que tu te reposes comme ça."
08:18 "OK, ça va."
08:19 J'ouvre mon sac.
08:20 Je vais prendre de l'eau. Il me fait... "Mais qu'est-ce que tu fais ?"
08:23 Je lui dis... "Mais comment ça ? Je vais boire de l'eau."
08:24 Il me dit... "Mais tu as mis de l'eau dans ton sac ?"
08:27 "Mais moi, j'ai mis toute la vie de l'eau dans mon sac.
08:30 Moi, que je sais...
08:30 En fait, tu dois le mettre près de ton corps pour pas qu'elle gèle."
08:33 J'avais plus d'eau.
08:34 Du coup, j'ai été honnête avec lui.
08:35 Je lui dis... "Écoute, je vais être sincère avec toi.
08:37 Je crois que tu l'as capté.
08:38 Je n'ai jamais fait ça de ma vie."
08:39 Donc, il me dit... "Quoi ?"
08:41 Je lui dis... "Ouais, c'est la première fois que je fais ça.
08:44 Je n'ai pas d'expérience.
08:46 Moi, si tu veux, je sais nager.
08:47 Mais je ne crois pas que ça t'aide, tu vois.
08:48 Donc, il me dit...
08:49 Il me dit... "Écoute, franchement, ça va aller.
08:52 Ne t'inquiète pas. Je vais te partager mon eau et tout."
08:54 Et là, je commence à...
08:56 Je le sens...
08:56 C'est chaud, quoi.
08:58 Et il me fait un speech.
08:59 Mais genre, c'était un film, ce qu'il m'a fait.
09:02 Genre, vraiment, il s'est fait...
09:03 "Non, je suis sûr et certain.
09:04 Si tu prends tout ça, tu prends ces risques, etc.
09:07 Tu ne veux pas abandonner.
09:07 Comment est-ce que tu vas te sentir si tu descends, etc.
09:09 Maintenant, tu vas y aller, etc."
09:10 Je fais... "Non, je ne peux plus."
09:11 Et il me donne une claque.
09:12 Mais...
09:14 C'est fou parce qu'en fait, c'est qui qui te double la claque.
09:17 Franchement, il y a...
09:18 Moi, tu fais ça à certains potes.
09:20 Enfin, soit ils font des meubles partout,
09:22 qu'ils se cassent et ils pleurent, je ne sais rien.
09:24 Mais moi, ça m'a motivé.
09:25 Donc, on monte, on monte.
09:26 Et puis, tu dois...
09:27 Il y a des moments où tu...
09:28 Je sais pas si c'est la photo.
09:29 C'est des piolets, tu dois casser certains trucs.
09:31 On arrive et il y a le coucher de soleil.
09:33 C'est le plus beau coucher de soleil que j'ai vu de toute ma vie.
09:36 C'est genre...
09:37 Pour vous donner une idée, c'est...
09:38 Tu es dans un avion.
09:39 Tu as un hublot.
09:40 D'accord ?
09:40 Tu vois le coucher de soleil.
09:41 Pour ceux qui l'ont vu, c'est incroyable.
09:43 Tu es là avec ton petit truc.
09:44 Là, tu imagines, il n'y a pas d'avion.
09:46 C'est ouvert.
09:47 Tu es comme ça et tu vois le monde.
09:49 Mais tu as une sensation.
09:50 C'est vraiment comme si tu étais le roi du monde.
09:53 Enfin, je ne sais pas pourquoi.
09:54 Quand tu es là, tu l'es en bannant.
09:56 Mais tu as vraiment cette sensation de...
09:57 Waouh !
09:58 C'est oufissime.
10:00 Et j'arrive.
10:01 Je fais, je crois, la photo la plus fausse de toute ma vie.
10:04 Je dis à ma mère que j'étais bien.
10:05 Mais franchement, c'était le plus gros mensonge.
10:06 Genre...
10:07 Moi, je voulais juste...
10:09 Franchement, je voulais dormir.
10:10 Je n'en pouvais plus.
10:11 Je voulais me coucher.
10:12 Mais tu ne peux pas le faire.
10:14 C'est beaucoup trop dangereux.
10:15 Là, je dis bon, ça va maintenant.
10:17 Ça va descendre.
10:18 Et en fait, moi, c'est comme quand tu as une grande rue qui monte.
10:22 Je dis, oh, ça me fatigue.
10:23 Mais après, quand tu dis, je dois descendre, tu dis, ça va.
10:26 Et donc, je me dis, ça va être pareil.
10:27 Mais pas du tout.
10:28 Mais pas du tout, du tout, du tout.
10:30 Moi, je m'étais tellement concentré sur cet objectif de réussir
10:33 qu'en fait, il y a un truc horrible qui se passe psychologiquement.
10:35 C'est une fois que tu as réussi, tu n'as plus d'objectif.
10:37 Donc, je lui demande, il reste combien de temps pour descendre ?
10:39 Je crois qu'il me dit 4 heures.
10:40 Et le choc psychologiquement, là, c'est...
10:43 Là, il y a comme ton corps qui lâche.
10:46 Un peu comme...
10:47 C'est un exemple bizarre, mais quand tu sais que tu vas arriver aux toilettes
10:49 et que tu es tout prêt, ton corps réagit genre comme si tu étais déjà là.
10:54 C'est un peu ça, tu vois.
10:55 Je n'en pouvais plus.
10:55 Donc là, je commence à descendre.
10:57 Je commence à vomir.
10:58 Mais vomir genre...
11:00 Je n'ai même pas bien mangé.
11:01 Donc, c'est acide.
11:02 Ça brûle.
11:02 C'est vraiment horrible.
11:03 Je n'ai pas de force et je sens que je commence à vomir pas bien.
11:07 Et je commence à tomber.
11:08 Mais vraiment plus de force.
11:09 Genre, même pas mettre mes bras...
11:11 Au début, je crois que je mettais mes bras.
11:12 Après, je ne mettais même plus mes bras.
11:13 Je tombais comme ça.
11:14 Bon, tu as un casque, mais tu te laisses tomber.
11:16 Mais ce n'est pas de la poudreuse agréable.
11:18 C'est genre...
11:20 Tu te cognes quoi.
11:21 À un moment donné, le Sherpa dit au gars,
11:23 écoute, garde la corps tendu parce qu'il va tomber tout le temps.
11:26 Donc, comme ça, essaye de, au moment où il tombe, de retenir un peu sa chute.
11:30 Et je commence à paniquer.
11:31 Mais vraiment, je sens que je ne suis pas bien.
11:33 Et à un moment, il y avait vraiment un endroit qui descendait bien.
11:36 Et je me dis, vas-y, je fais de la luge.
11:38 Mon corps, c'est de la luge.
11:39 Vas-y, descends.
11:40 Et là, il me dit, non, écoute, tu ne sais pas ce qu'il y a en dessous.
11:42 Donc, tu peux tomber genre de 20 mètres dans un trou.
11:44 Et c'est horrible.
11:45 Donc...
11:46 Et en fait, il t'explique plein de techniques que tu dois savoir.
11:48 De comment mettre ton piolet pour ne pas qu'il rentre dans ta jambe.
11:50 Comment tu dois marcher en serpentin pour ne pas...
11:53 Parce que tu ne peux pas descendre droit.
11:54 Parce que sinon, tes mollets ne supportent pas le poids que tu mets à chaque fois dessus.
11:58 Et là, on descend et j'en peux plus.
12:02 Et en fait, j'entends une phrase horrible.
12:04 J'entends l'anglais derrière moi qui me dit, je ne me sens pas bien.
12:07 Et là, ce moment-là, c'est...
12:11 Et je demande au serpent, je lui dis, qu'est-ce qui se passe dans le cas où on n'est pas bien ?
12:14 Il me dit, je suis obligé de vous laisser ici.
12:16 Et d'aller chercher de l'aide en bas parce que je ne sais rien faire.
12:19 Mon cœur, à ce moment-là, un shot.
12:21 Mais je ne sais pas, c'était de la drogue.
12:23 C'était un truc, ce n'est pas possible.
12:24 C'est...
12:25 J'ai commencé à pomper.
12:26 Et là, c'est moi qui parle à l'anglais, qui lui dit, gros, on va y aller.
12:32 Tu sais quoi ? Oublie toutes les règles.
12:34 Maintenant, on descend tout droit.
12:35 Il n'y a plus de...
12:36 On va se niquer les jambes, tant pis, mais on se rapproche.
12:39 On y va et je sens mes jambes qui...
12:43 Tu n'as plus de force.
12:44 Tu viens de marcher pendant trois jours et en plus en ascension.
12:47 Et là, en fait, ma chaussure pousse sur mes ongles.
12:51 Et je ne sais pas, il doit y arriver.
12:54 On marche, mais je te promets, tous les films où tu vois ceux qui escaladent et qui vont mourir,
13:00 je me voyais comme ça et je me disais, ça va être une mort pourrie.
13:02 Je n'ai pas annoncé à mes amis que j'ai fait ça.
13:04 Je n'ai pas annoncé à ma mère parce qu'elle allait s'inquiéter.
13:06 Je dis, je vais mourir.
13:07 Là, ils n'ont même pas mes papiers, ils n'ont rien.
13:08 Quelle mort horrible !
13:09 Donc du coup, là, je descends et on arrive, mais à 200-300 mètres.
13:16 Là, les gens viennent nous chercher.
13:18 Enfin, on tombe, on est...
13:19 J'ai tellement mal aux pieds.
13:21 Je sens que je ne sens pas bien mes pieds.
13:23 Et on enlève mes chaussures et tout est rempli de sang.
13:25 En fait, mes ongles avaient trop poussé et donc j'ai commencé à saigner.
13:30 Mais genre, j'ai perdu mes ongles depuis.
13:32 Là, je les ai.
13:33 Maintenant, tout va bien.
13:34 Mais à ce moment-là, c'était horrible.
13:36 Moi, je pensais que c'était fini, que là, c'est bon, je vais rentrer, tout va bien aller.
13:39 En fait, mon système immunitaire a mal réagi.
13:42 Donc, quand je suis arrivé à l'hôtel, j'ai essayé de manger, mais tout...
13:47 Enfin, ton corps ne fonctionne plus très bien et c'est plus donné ou...
13:50 Enfin, je ne sais pas si c'est comme ça pour les autres.
13:52 Mais en fait, j'ai mangé, je suis tombé malade.
13:54 Après, mais malade, pas malade en France.
13:58 Malade, un truc bactériste et super saïen.
14:01 Il y avait un truc, ce n'était pas possible.
14:03 J'ai pris tous les médicaments, il n'y a rien qui faisait quoi que ce soit.
14:05 J'ai perdu 8 kilos.
14:06 J'ai dû aller à l'hôpital.
14:07 On a dû m'injecter.
14:08 Là-bas, typiquement en Amérique latine, ils injectent.
14:10 Franchement, c'est bien.
14:11 Ça fait mal à la fesse, mais c'est vraiment bien, ça fonctionne beaucoup mieux.
14:14 Je me suis senti mieux.
14:15 Je pensais que ça allait mieux.
14:16 Et puis pendant des années, j'ai eu des problèmes d'intestin
14:20 qui avaient changé à cause de ça.
14:21 Donc, cette histoire en particulier, incroyable.
14:24 Tout ce que j'ai appris sur moi-même, sur les limites.
14:26 Il y a plein de fois où je me dis "Oh, je n'en peux plus".
14:28 Et je me rappelle de cette fois-là, je me dis "Non, s'il te plaît encore".
14:30 En fait, tu n'imagines pas tout ce que tu as encore comme réserve
14:34 et tout ce dont ton corps est capable.
14:35 C'est vraiment hallucinant.
14:36 Tout ce que le corps fait pour pouvoir t'aider, même si toi, tu ne veux pas.
14:40 Il te dit "Non, mais gros, tu n'as pas le choix".
14:42 La deuxième, c'est qu'est-ce que ça fait de se dire "Je suis en vie"
14:46 et qu'est-ce que ça fait de se dire "Je peux perdre cette vie".
14:50 Je le souhaite aux gens, vraiment de manière "safe".
14:53 Mais juste se dire "Tiens, j'ai quelque chose de tellement précieux que je peux perdre".
14:57 Et après ça, j'ai voyagé.
14:58 Donc, quand je me suis senti mieux en Bolivie, j'ai eu une expérience incroyable.
15:02 Aussi, qui m'a remis des idées en place.
15:03 Mais il y a une mine en Bolivie.
15:05 Il y a plein de mines en Bolivie.
15:06 C'est le pays le plus pauvre d'Amérique latine.
15:08 Et donc, en fait, il y a des conditions sur place
15:10 que je ne savais même pas qui étaient encore possibles au 21e siècle.
15:14 Vraiment, je pensais que ça n'existait plus.
15:15 Donc, en fait, on a la possibilité, on signe une décharge
15:19 de pouvoir vivre comme un mineur en Bolivie.
15:21 L'idée, c'est de suivre des mineurs dans leur journée.
15:25 Ça commence tout le matin.
15:26 Il y a un marché où on vend des choses que je ne comprends même pas.
15:31 Ils vendent de la dynamite pour pouvoir travailler.
15:33 Ils vendent les feuilles de coca dont je parlais avant.
15:36 Et moi, je pensais que c'était pour l'énergie, mais c'est à une autre raison.
15:38 Les gens n'ont pas assez d'argent pour pouvoir s'acheter une montre.
15:41 Ils doivent savoir combien de temps est-ce qu'ils travaillent.
15:42 Donc, ils font des boules qu'ils mettent, qu'ils mâchent.
15:45 Et quand il n'y a plus de goût, vraiment plus de goût,
15:47 c'est quatre heures qui sont passées.
15:49 Ils le font deux fois, ils ont travaillé huit heures.
15:50 C'est assez fou.
15:51 Donc, ils expliquaient ça.
15:53 On rentre dans la mine, la hauteur, c'est ça.
15:55 Donc, ton dos, il prend cher.
15:57 C'est genre...
15:58 Moi, je suis plus grand que la moyenne, clairement, des habitants de Bolivie.
16:02 Mais de toute manière, même pour eux, ils doivent se courber.
16:04 Et donc, tu rentres avec ton matériel.
16:06 Au moment où tu rentres, tu as une bouffée de gaz.
16:09 Mais ce n'est pas le gaz chez toi.
16:14 Ce sont des gaz ultra toxiques qui t'agressent, ton nez, tes yeux, tout.
16:19 Ils n'ont pas de masque.
16:20 Ils n'ont rien.
16:21 C'est pour ça que tu saignes une décharge.
16:22 J'ai essayé de physiquement travailler là.
16:25 Et ce n'est juste pas possible.
16:27 J'ai essayé de sourire.
16:28 Et quand je souriais, parce que je suis quelqu'un de sourire de manière générale,
16:31 j'aime bien sourire.
16:31 C'était horrible parce que je me sentais coupable de ce...
16:35 Je me sentais coupable de sourire.
16:39 C'était un truc de fou.
16:40 J'avais...
16:40 Bon, je n'arrive pas à croire que ça m'aimait encore maintenant.
16:42 Je me rappelle d'un gars où il était super gentil avec moi.
16:46 Il m'offrait un truc.
16:47 Et je me rappelle, j'essayais de sourire.
16:50 Et il était à côté de moi.
16:51 On était dans une nuit comme ça, dans le noir, avec les gaz et tout.
16:55 Et j'avais les larmes aux yeux.
16:56 Je suis sorti en pleurant, mais vraiment pleurant, pleurant.
16:59 Maintenant, j'essaye de ne pas le faire parce que...
17:01 Je me suis dit, comment est-ce qu'on peut...
17:04 Comment c'est possible ?
17:05 Parce qu'on entend tous les histoires de mines au Congo
17:09 et de ceux en Indonésie qui portent le soufre et les pires conditions.
17:13 Mais de toi-même le vivre et te dire qu'au final,
17:16 tu as juste eu de la chance de naître dans un autre pays,
17:18 mais si tu étais né là, probablement tu serais là.
17:20 Et de se dire qu'en fait, avoir des inégalités à ce point-là, c'est hallucinant.
17:25 Et là, je me rappelle de tous les discours de...
17:27 Vas-y, c'est dans la tête.
17:29 Tu peux réussir ce que tu veux dans le monde.
17:31 Il suffit de travailler.
17:32 Les gars, ils travaillent 10 fois plus que n'importe quelle personne dans le monde
17:36 et ils sont enfermés dans cette prison à vie.
17:39 Il n'y a pas de solution.
17:40 Et en fait, j'essaye de sortir le côté positif.
17:43 Et le côté positif, c'est ce que j'ai maintenant.
17:45 C'est un sentiment de gratitude énorme.
17:47 Mais énorme, énorme, énorme.
17:48 C'est vraiment de se dire, oublions les voyages ou ce que je...
17:51 N'importe.
17:51 Ça m'aide vraiment à relativiser.
17:53 Quand j'entends, par exemple, que la France est le pays le plus pessimiste au monde,
17:55 je crois qu'il y a pas mal de gens qui devraient faire un voyage là-bas.
17:59 Vraiment, vraiment.
17:59 Et je le dis avec tout l'amour et le respect, et pas du tout.
18:02 Mais je crois qu'une fois que tu vis ça, après, tu relativises vraiment ce qui se passe.
18:05 Et tu as cette possibilité de pouvoir le faire, de travailler là.
18:08 Il y a plein d'endroits qui sont fermés ou c'est interdit.
18:10 Et tu peux même pas passer tout près parce que sinon, t'as des problèmes.
18:13 Là, une fois que tu le fais, c'est...
18:15 Après, ce qui s'est passé, j'ai des centaines de milliers de personnes qui regardent le compte.
18:18 J'ai une responsabilité.
18:19 Qu'est-ce que je veux faire avec ce compte ?
18:21 Donc, on a créé une association qui s'appelle "Moment Fine Project".
18:24 Donc du coup, je voulais avoir ma propre association.
18:27 Et l'idée, je ne savais pas quoi faire.
18:28 Je voulais faire quelque chose pour l'environnement et pour l'éducation.
18:31 J'étais entre les deux.
18:32 Donc, j'ai fait les deux ensemble.
18:33 L'idée, c'était de construire une école faite de plastique recyclé
18:36 pour les enfants défavorisés au Mexique.
18:37 Et on a créé la première école.
18:39 On veut en faire plus maintenant.
18:40 Ça a fonctionné.
18:41 Je suis super content d'ailleurs de la manière dont ça s'est fait.
18:44 Parce qu'on voulait le faire sans l'aide de marque, sans l'aide de partis politiques.
18:46 Juste la communauté qui croit en ce qu'on fait.
18:48 Et on s'est tous réunis.
18:49 Il y a eu 200 équipes d'architectes qui ont participé.
18:52 Il y a eu des gens qui ont fait le terrain.
18:53 Tout s'est mis en place et c'est incroyable.
18:56 Le projet est vraiment ouf.
18:56 Et il y avait un problème.
18:58 C'est que parmi les valeurs, il y avait le positif.
19:00 Et le problème, c'est que le positif, c'est que tu ne peux pas parler des choses
19:03 comme ce qu'il y avait dans la mine ou la montagne ou toutes ces expériences
19:06 parce que tu dois toujours parler en bien des choses.
19:08 Et donc là, j'ai voulu faire un autre projet.
19:10 Je vais parler à mon futur enfant, donc Noah,
19:12 pour lui raconter ce qui se passait à cette époque.
19:14 J'ai envie de le faire de manière très ouverte
19:16 et de pouvoir m'exprimer et lui dire vraiment comment ça se passait.
19:19 Parce que Mound Find, c'est juste un panneau ou quelque chose d'écrit,
19:21 mais il n'y avait pas de substance, il y avait moins de fond que ce que je voulais faire.
19:25 C'est un peu une prison créative.
19:27 Et là, maintenant, du coup, je vais pouvoir faire sur YouTube.
19:30 J'aimerais faire une chaîne où je partage ça
19:32 et je lui cacher des choses dans le monde réel, etc.
19:35 Ça va être un truc un peu faux pour qu'il le trouve plus tard.
19:37 Et donc, il ne saura pas.
19:39 Et il faudra qu'il fasse une sorte de recherche à travers le monde
19:42 pour comprendre toute la vie et toute l'expérience qu'il a eue.
19:44 Ça va être assez fou.
19:45 Et donc, du coup, peut-être qu'il y aura des anecdotes
19:47 qu'il faudra qu'il trouve via ce média-là.
19:49 [Générique]

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