SMART BOURSE - BCE : la discussion est ouverte !

  • il y a 6 mois
Vendredi 8 mars 2024, SMART BOURSE reçoit Nathalie Benatia (Macroéconomiste, BNP Paribas Asset Management) , Sebastian Paris Horvitz (Directeur de la recherche, LBPAM) et Nicolas Goetzmann (Responsable de la stratégie Macroéconomique, Financière de la Cité)
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00:00 *Musique*
00:10 Trois invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète.
00:13 Marché, Nathalie Benatia est à nos côtés.
00:15 Macroéconomiste chez BNP Paribas Asset Management.
00:17 Bonsoir Nathalie.
00:18 Bonsoir.
00:19 Merci d'être là. Merci à Nicolas Gottesman de nous accompagner également.
00:21 Bonsoir Nicolas.
00:22 Bonsoir.
00:23 Vous êtes responsable de la stratégie macro à la financière de la cité.
00:25 Et Sébastien Parissorwitz est à nos côtés également.
00:27 Bonsoir Sébastien.
00:28 Bonsoir.
00:29 Ravie de vous retrouver.
00:30 Vous êtes directeur de la recherche de LBP AM.
00:32 La banque centrale européenne à la une.
00:34 24 heures après la communication de Christine Lagarde, la poussière est un peu retombée.
00:38 Donc je voulais vous demander vos commentaires un peu à froid.
00:41 Nathalie, la subtilité des banquiers centraux est une source d'émerveillement permanent.
00:49 Et j'ai retenu cette petite phrase de Christine Lagarde.
00:51 J'aimerais bien que vous me l'expliquiez.
00:53 On a senti qu'elle est allée au bout de ce qu'elle pouvait dire pour signaler qu'il y aurait une baisse de taux à un moment cette année.
01:01 Elle nous dit qu'on n'a pas discuté de baisse de taux au cours de ce meeting.
01:04 Par contre, nous avons entamé une discussion sur une recalibration du réglage restrictif de notre politique monétaire.
01:12 Ce n'est pas gentil de se moquer.
01:14 Non mais il y a une différence entre la recalibration et la baisse des taux.
01:19 Il y a une différence subtile. C'est-à-dire que quand on dit qu'à une réunion on a discuté de baisse de taux, c'est souvent pour dire qu'à la prochaine fois on va franchir le pas.
01:28 Donc elle n'a pas voulu dire que c'était pour la prochaine fois, mais sans doute pour la suivante.
01:32 C'est ce qu'on dit d'autres personnes du board après.
01:37 D'ailleurs, elle a beaucoup prononcé le mot "joint" pendant sa conférence de presse.
01:42 On se demandait si elle n'allait pas craquer finalement.
01:45 Mais ça n'a pas été le cas. Le message est assez clair.
01:49 C'est que la Banque Centrale Européenne envisage fortement une première baisse des taux pour le mois de juin.
01:54 Qu'est-ce qui sous-tend effectivement la possibilité de prendre cette décision le 6 juin prochain en l'occurrence, Nathalie ?
02:02 Toujours la même idée. Que la BCE se focalise comme toute banque centrale normalement constituée sur l'inflation.
02:10 On a eu des chiffres en début d'année à peu près en ligne avec les attentes.
02:15 Pas non plus faramineux quand il s'agit de se dire "ah formidable l'inflation ralentit"
02:21 puisque l'inflation dans les services dans la zone euro est toujours quand même élevée.
02:24 On a eu 3 trimestres à 4%, on est passé à 3,9% donc c'est pas un mouvement très significatif.
02:31 Donc une inflation dans les services à laquelle il faut toujours faire attention.
02:34 Ce qui en général retient l'attention sur les réunions des banques centrales c'est une fois par trimestre, mars, juin, septembre, la publication des prévisions.
02:44 Donc on a eu un nouveau jeu de prévisions en mars, on en aura un en juin.
02:49 Et si tout permet de conclure que l'inflation est bien sur cette tendance baissière
02:56 qui va l'amener doucement d'une façon durable et soutenable vers 2%, comme le dit aussi la Fed,
03:03 ça permettra d'entamer la baisse des taux.
03:05 Dans les nouvelles projections du staff de la BCE, là on arrive à lire un scénario qui est conforme à l'idée que la BCE pourra baisser ses taux au mois de juin ?
03:14 A peu près oui. Alors après il faut se méfier, rien n'est jamais certain.
03:19 Il faut aussi se méfier parce qu'en fait les projections pour le mois de décembre c'était ce qu'ils appellent l'eurosysteme,
03:26 c'est-à-dire les différentes banques centrales, cette fois-ci c'est le staff de la BCE, la fois prochaine ce sera à nouveau.
03:31 Donc cette tendance parfois vise un peu à brouiller le message ou en tout cas à le rendre moins direct.
03:37 Mais effectivement l'idée dans ces prévisions c'est d'être vers 2% voire légèrement dessous.
03:43 Mais on parle de l'horizon, de la fin 2025.
03:47 Pour la première fois en moyenne sur 2025, ils affichent 2% d'inflation globale.
03:52 Alors que les projections précédentes il fallait attendre décembre 2025 pour voir 2% arriver.
03:57 Donc il faut être prudent, on n'a pas encore la certitude d'y arriver.
04:01 Elle nous dit aussi Nicolas, on en saura un peu plus en avril et beaucoup plus en juin.
04:08 Qu'est-ce qu'on saura un peu plus en avril et beaucoup plus en juin qu'on ne sait pas encore aujourd'hui ?
04:14 Alors on a eu aujourd'hui l'implication du PIB en zone euro avec l'intégralité des données.
04:18 On aura une donnée supplémentaire d'inflation mais c'est tout ce qu'on aura.
04:22 Donc on n'aura pas grand-chose pour avril et même pour le mois de juin.
04:25 Ce qui est amusant c'est qu'en fait elle nous dit qu'on va avoir les données complètes.
04:28 Sauf que le 6 c'est la publication, enfin la conférence de presse et le 7 la publication des données.
04:34 Donc on peut considérer qu'ils ont peut-être les données en avance mais j'en suis pas sûr.
04:37 Mais donc on n'aura même pas les données à ce moment-là.
04:39 Et donc ce qu'ils voudraient avoir c'est les données sur les salaires du premier trimestre 2024.
04:46 Mais tout en considérant que quand on regarde les projections qui ont été faites et publiées hier,
04:51 il y a une décélération notamment sur les salaires qui étaient envisagés.
04:55 Donc on va dire que ça se calme un petit peu de ce côté-là.
04:58 Mais je pense que là où c'était le plus significatif et peut-être le plus intéressant,
05:02 c'est que la dernière hausse de taux de l'ABCE date du mois de septembre.
05:05 Au mois de septembre dernier, les projections pour le headline inflation étaient déjà 1,9% à horizon 2 ans.
05:12 Mais ce qui était encore plus intéressant sans doute, c'était de voir que l'inflation 2024 était estimée à ce moment-là à 3,2% et la croissance à 1%.
05:20 Donc on peut s'imaginer que dans une configuration avec une inflation de 3,2% et une croissance de 1% pour 2024,
05:26 l'ABCE considérait qu'il était légitime d'avoir des taux à 4%.
05:29 Aujourd'hui, les projections pour cette même année 2024 sont d'une inflation de 2,3% et une croissance de 0,6%.
05:35 Mais l'ABCE considère toujours qu'il est légitime d'avoir des taux à 4%, ce qui me semble parfaitement incohérent.
05:40 Et donc il pouvait nécessiter déjà une action de baisse de taux.
05:44 Donc c'est pour ça que je pense qu'au-delà de dire qu'on est data-dependant avec l'ABCE, c'est surtout une question de majorité, de personnes.
05:53 Et on constate dans les discours qu'il y a des évolutions qui apparaissent.
05:57 On a vu que François Villeroy de Gallo notamment avait opéré un certain mouvement depuis le mois de décembre dernier,
06:03 que les arguments qui ont été développés par les plus faucons de la Banque centrale ont été contrés par François Villeroy de Gallo,
06:10 notamment la question de la nécessité d'attendre le mois de juin pour avoir les données sur les salaires,
06:14 et également la question du dernier kilomètre à accomplir, où il a dit qu'il n'était pas d'accord avec cette idée qui avait été développée un mois plus tôt par Isabelle Schnabel.
06:21 Donc il y a déjà un point. Ensuite, il y a les Italiens qui sont de plus en plus agressifs sur cette question-là également.
06:27 Et on peut noter aussi, je pense avec intérêt, le retour de Olli Rehn à la tête de la Banque de Finlande,
06:31 donc le 1er février dernier, qui avait concouru pour la présidentielle finlandaise,
06:36 qui est terminé 3e et qui revient et a publié ce matin un article en indiquant également que pour lui,
06:42 étant donné la situation en zone euro aujourd'hui, on va dire des chiffres qui ne sont pas forcément très bons,
06:49 l'avril pour lui est ouvert, ce qui donne une voie supplémentaire au camp des Pudoves,
06:58 et on arrive à une situation d'équilibre où Christine Lagarde peut faire la différence.
07:02 J'ai en tête que Olli Rehn n'était pas identifié comme une pure colombe. En tout cas, il est pragmatique.
07:08 Je pense que Olli Rehn a une personnalité assez intéressante. Les années où il était commissaire européen à l'économie,
07:14 2010-2014, il était très hauque. Ensuite, quand il est arrivé à la BCE, je pense qu'il est arrivé avec un profil très hauque aussi.
07:22 Il s'est sans préciser.
07:24 Il a considérablement évolué. Je pense qu'il a fait pas mal de tours aux Etats-Unis.
07:27 Je pense qu'il a adopté plutôt une approche qui ressemblait plus à celle de la Fed.
07:30 Ensuite, je pense qu'il a été inconfortable pendant la période de l'inflation. Il est revenu un peu sur ses pas.
07:34 Et par contre, là maintenant, il apparaît qu'il a l'air d'être un peu plus dove qu'il ne l'était.
07:39 Mais c'est intéressant de suivre qu'éventuellement, une majorité peut changer.
07:42 Et si la majorité change, ça peut aller beaucoup plus vite et plus fort qu'au prévu.
07:45 La dynamique est en cours. Ville-Roi de Gallo, ce matin, là aussi, avec la subtilité merveilleuse des banquiers centraux,
07:52 nous rappelle que le printemps, ce qu'il dit, baisse avant l'été, donc au printemps, et que le printemps court,
07:58 alors techniquement du 21 mars au 21 juin. Donc ça couvre les deux prochains meetings.
08:02 C'est bien ce qu'il a voulu dire ce matin.
08:04 Oui, je pense qu'ils essaient de mettre la pression pour s'assurer que ça arrive en juin, mais ça va être compliqué de l'avoir en avril.
08:11 Bon, ça y est, il y a quand même l'idée que ce soit le 11 avril ou le 6 juin, la BCE va baisser ses taux.
08:17 Sébastien, il n'y a plus de doute là-dessus. Il y a toujours évidemment une probabilité non nulle que ça n'arrive pas,
08:24 mais elle est quand même résiduelle désormais, cette probabilité.
08:27 Comme vous l'avez dit, les banquiers centraux, c'est des grands poètes.
08:31 Donc ils créent le bon sentiment, mais chacun peut aller de son interprétation sur le timing, jusqu'à quand, comment, etc.
08:40 Aujourd'hui, je pense que l'ensemble du marché, c'est dans les prix d'ailleurs, attendent qu'ils baissent les taux.
08:47 Si ce n'est pas en avril, ça sera en juin. Nous, on pense que ça sera plutôt en juin.
08:51 Peut-être que l'équilibre va un petit peu changer, mais objectivement, on vient d'un moment très particulier dans l'économie mondiale.
09:01 Pour les pays développés, où l'inflation était très élevée, on la voit décélérer.
09:05 Il y a toujours le sujet de « est-ce qu'il y a encore des pressions sous-jacentes ? ».
09:10 Quand la BCE a trouvé que c'était approprié de garder des taux plus élevés, de ne pas les modifier, comme l'a fait d'ailleurs,
09:18 il y a une variable qui reste un peu un mystère. C'est les salaires qui vont encore vite. Ils sont en train de décélérer.
09:25 Ils étaient presque 5 à 4,9 % à l'époque. Aujourd'hui, ils ont un petit peu décéléré sur la dernière statistique pour le quatrième trimestre.
09:35 Et ça restera un sujet. Est-ce que le plein emploi, aujourd'hui, en tous les cas, si on se réfère à notre histoire courte de la communauté européenne,
09:46 en tout cas de l'euro, on n'a jamais vu des taux de chômage aussi faibles ?
09:50 Donc il reste le sujet. C'est quoi les pressions salariales qui persistent ?
09:54 Alors la BCE a voulu développer ses propres indicateurs pour suivre l'évolution des salaires.
09:59 Et là-dessus, vu la façon dont on négocie les salaires en Europe – c'est d'ailleurs la statistique qu'utilise la BCE, les salaires négociés –,
10:07 ils ont fait tout un travail statistique. Ils s'aperçoivent que les tensions salariales pourraient persister sur deux ans.
10:14 Alors évidemment, plus vous allez d'un champ de tige dans l'histoire, plus le champ de tige est petit. Donc il reste ce sujet.
10:20 Il n'empêche, comme on l'a dit, la croissance. Ça fait un an et demi qu'on n'a pas de croissance en Europe.
10:25 On se dit quand même que pas de croissance, ça doit quand même soulager un peu les tensions ici et là.
10:30 Donc l'Europe est plutôt bien placée pour commencer à retirer un peu le caractère restrictif de la politique.
10:39 Et donc moi, je suis assez d'accord qu'il faut la soulager plus vite que trop tard.
10:44 Et juin me paraît, pour Mme Lagarde, politiquement, peut-être la meilleure façon de faire, de façon à avoir l'ensemble du Bloc.
10:52 – Oui, c'est ça. Un consensus. – Un conseil de gouverneur qui va dire…
10:56 – Elle doit souhaiter que cette décision soit prise à l'unanimité quand même.
10:59 J'imagine que pour une première baisse de taux, c'est quand même bien d'avoir l'ensemble du Conseil derrière soi.
11:05 – Et encore une fois, c'est vrai qu'il faut objectiver les choses.
11:09 Et aujourd'hui, on a pas mal d'éléments pour dire que c'est raisonnable d'ajuster les taux d'intérêt qui sont à 4 %
11:16 vu notre croissance potentielle, etc., vu où est l'inflation, qui certes n'est pas à 2, mais qui décélère,
11:24 d'ajuster un peu le caractère restrictif, si on regarde les taux réels, à la situation de désinflation qu'on constate déjà.
11:34 Donc économiquement, pour les économistes, ça fait sens.
11:37 Pour la Banque centrale, qui veut s'assurer qu'on a cette tendance, prendre du temps.
11:43 – Il y a les salaires évidemment, et c'est un déterminant central de l'inflation endogène, il n'y a aucun doute là-dessus.
11:49 Christine Lagarde le souligne à nouveau dans la conférence de presse.
11:52 Elle met également dans la discussion, à nouveau, les marges, les profits des entreprises.
11:58 Est-ce qu'on peut estimer qu'une partie de l'augmentation des salaires, des coûts salariaux,
12:04 puisse être à un moment quand même absorbée par les marges des entreprises,
12:07 plutôt que d'être passée éternellement aux consommateurs et aux clients finales ?
12:12 Et puis il y a aussi la question de la productivité.
12:14 Alors je sais que la productivité, croissance nulle, gain de productivité zéro aujourd'hui en zone euro,
12:20 mais ce qu'on observe aux Etats-Unis, je ne dis pas d'observer une croissance de la productivité en Europe
12:26 dans l'ampleur de ce qu'on observe aux Etats-Unis, mais est-ce qu'on peut imaginer quand même, là aussi,
12:31 quelques gains de productivité à un moment qui détendraient ces coûts ?
12:36 C'est possible que le modèle sous-jacent soit un modèle très vertueux dans lequel les gains de productivité
12:44 permettent de protéger les marges.
12:46 Alors dans tous les cycles passés, le point c'est que là on vit, on a vécu un phénomène qu'on n'avait pas vu depuis très longtemps,
12:53 un phénomène inflationniste, une partie liée à des chocs d'offres qui ont obligé les entreprises à monter leurs prix
13:02 parce qu'il y avait une pression de demande forte.
13:04 Et un choc de demande qui a rendu la demande encore plus forte.
13:08 Et il se trouve dans tous les épisodes passés, les entreprises, celles qui peuvent, ici il y en avait plus,
13:14 essayent de monter leurs prix plus vite que tous les autres coûts de façon à...
13:20 Là il se trouve que certaines, effectivement, ont augmenté leurs marges de façon considérable.
13:25 On regarde ça aux Etats-Unis comme en Europe.
13:27 Donc certains disaient "ah ben les entreprises sont très méchantes, attention, on ne peut pas les laisser faire ça".
13:32 Mais en général quand on monte ses marges, c'est qu'il y a de la demande.
13:36 C'est-à-dire que sinon on n'achète pas leurs produits, on ne peut pas monter les prix s'ils ne la demandent pas.
13:40 Les prix, vous savez, sont un facteur de détruction de demande.
13:43 Donc on l'a eu.
13:45 Est-ce qu'on va voir les marges se calmer ?
13:49 On commence à le voir si on regarde toute la période des résultats.
13:55 On voit que les analyses sont en train de réviser à la baisse les résultats des entreprises européennes.
14:00 Et notamment les marges commencent un peu à se réduire.
14:03 C'est un phénomène qu'on voit pour l'instant un petit peu aux US, mais un peu moins.
14:07 - Et du point de vue de la BCE, c'est un phénomène qu'elle a envie de voir se poursuivre.
14:10 - Oui, je pense. Mais je pense que c'est un mauvais argument.
14:13 Parce qu'on dit style, c'est comme dire Grégoire, c'est pas bien de monter les salaires parce que ça crée de l'inflation.
14:20 Non, c'est vrai que les marges, c'est un mécanisme économique.
14:25 C'est vrai que si les marges décélèrent, a priori les entreprises, s'ils veulent le protéger,
14:30 ça va se traduire par moins d'emplois, etc.
14:33 Et c'est un cercle qui peut s'avérer vertueux, mais il ne faut pas trop demander à cela.
14:39 Et si ça la baisse, ça doit être un facteur positif.
14:42 - En tout cas, elle en reparle. Qu'est-ce que vous pensez de ces idées ou de ces hypothèses ?
14:46 L'idée que les coûts unitaires pourraient être absorbés en partie par les marges,
14:49 et un peu de productivité peut-être devant nous ?
14:51 - Alors la productivité, c'est déjà un enfer à mesurer, alors à prévoir, c'est encore plus compliqué.
14:56 Sur les marges et le comportement des entreprises, ça dépend aussi du comportement des consommateurs.
15:01 On est vraisemblablement dans la phase sur la consommation et sur la perception de l'inflation
15:08 où on se souvient encore des prix passés avant que l'inflation monte.
15:13 - Ah oui, il y a la réminiscence d'avant.
15:15 - Et donc, payer 40 euros quelque chose qu'on payait 35, ça devient difficile.
15:21 On se dit "ça va, je vais peut-être arrêter de payer 40 euros".
15:24 Donc pendant un petit moment, peut-être que la demande va baisser.
15:27 Et puis, c'est un phénomène qui dure, je ne sais pas si c'est documenté,
15:30 mais on peut imaginer que ça dure deux ou trois ans.
15:32 Et puis après, 40 euros, c'est le prix normal.
15:34 - Oui, ça devient la référence.
15:36 - Donc ça remplace le 35 d'avant.
15:38 - Donc cette phase de transition, ça peut jouer sur les marges.
15:41 Et on avait vu, alors ce n'est plus tellement le cas, mais dans certaines enquêtes,
15:44 les entreprises commençaient à s'interroger si, oui ou non,
15:48 elles allaient avoir la capacité de passer les coups au consommateur final
15:53 ou à leurs partenaires dans le cas d'autres entreprises.
16:01 - Oui, du B2B, j'entends.
16:03 - Je cherchais une façon française de dire B2B, mais ça n'existait pas.
16:07 - Oui, donc bon, mais ce n'est pas là-dessus pour qu'on peut construire
16:12 une confiance sur le retour de l'inflation à 2%.
16:18 - Après, c'est vraisemblablement, oui, c'est le modèle qui doit être construit comme ça.
16:22 Est-ce que ça vaut le coup d'insister tellement dans les commentaires
16:24 sur ces aspects des conclusions du modèle ?
16:26 Ce n'est peut-être pas certain non plus, mais le fait est,
16:29 c'était déjà le cas à la conférence de presse de janvier,
16:32 c'est un sujet sur lequel Christina Agard était très conclue.
16:34 - Oui, qu'elle remet régulièrement sur la table, effectivement.
16:38 Est-ce que la BCE et, comment dire, est-ce que l'ombre de la Fed pèse,
16:44 autant qu'on le dit sur la Banque Centrale Européenne,
16:46 en matière de calendrier de timing ?
16:48 Pour l'instant, le marché est sur un calendrier absolument coïncident
16:53 entre une première baisse de taux Fed en juin
16:55 et pareil pour la Banque Centrale Européenne.
16:57 On en discutera peut-être.
16:59 Jamais ce calendrier-là n'était compliqué pour la Réserve fédérale américaine.
17:03 Christina Agard rappelle que rien ne dit que la BCE
17:07 est dépendante de décisions d'autres banques centrales.
17:10 - Oui, je pense qu'ils l'ont déjà montré par le passé.
17:13 Ils ont quand même la capacité de pouvoir agir sans l'autorisation de la Fed.
17:17 Je pense que c'était compliqué.
17:19 C'est sans doute un argument qui était développé par les faucons
17:22 pour justifier aussi le fait de ne pas bouger.
17:25 Ça devient de plus en plus compliqué.
17:27 Ce qui me dépasse dans cette histoire,
17:31 c'est de voir ce différentiel qui peut exister
17:34 sous-jacent de l'économie entre États-Unis et zone euro.
17:38 Parce que là, ça devient assez effrayant.
17:41 Si je regarde depuis la première hausse de taux,
17:43 c'est-à-dire au Q3 2022 en zone euro,
17:45 la croissance zone euro a augmenté de 0,06%.
17:48 C'est 3,74% aux États-Unis.
17:51 Mais si je regarde même sur le plus long terme,
17:53 j'avais pris l'Allemagne parce que c'était quand même un cas intéressant.
17:56 Et si je regarde ce qu'on appelle le PIB core,
17:59 c'est-à-dire je prends uniquement la consommation des ménages
18:02 et l'investissement des entreprises.
18:04 Donc vraiment, c'est le secteur privé domestique qui est en cause.
18:07 L'Allemagne est revenue 0,2% en dessous de son niveau du Q4 2017.
18:11 Ça nous fait une stagnation totale de 6 années.
18:13 Et on entre aujourd'hui dans la 7e année.
18:16 Les déboires de l'Allemagne commencent avant même la pandémie.
18:20 Pour vous donner une idée d'où on se trouve en Allemagne.
18:24 Si je regarde les États-Unis, c'est +15,3% sur la période.
18:27 Sur ces 6 ans 2017-2020.
18:28 C'est un décalage qui est absolument gigantesque.
18:30 Donc à partir de là, ça devient compliqué.
18:32 C'est pour ça que quand on parle de salaire élevé en Europe,
18:35 ça devient un peu compliqué de le comprendre.
18:37 Parce que si on prend la compensation par salarié en Europe
18:40 et que vous l'ajustez de l'inflation, on est à -3,1% par rapport à la fin 2019.
18:43 C'est-à-dire que la perte de pouvoir d'achat est quand même conséquente.
18:45 Si je regarde en Allemagne, la perte de pouvoir d'achat,
18:48 c'est depuis fin 2019 par tête.
18:51 La consommation par tête en Allemagne, c'est -4%.
18:54 Par rapport aux États-Unis, c'est +9%.
18:56 Donc quand on essaie de comparer les dynamiques d'inflation
19:00 aux États-Unis ou en zone euro,
19:02 en disant "ah ben attention, il peut y avoir de la demande",
19:04 c'est une plaisanterie de pouvoir faire cette comparaison-là.
19:07 Parce que la demande est extraordinairement forte aux États-Unis.
19:10 Et malgré cette demande très forte, on voit cette décélération dans l'inflation.
19:13 Et donc de voir des banquiers centraux justifier cette prudence actuelle
19:17 par le risque d'avoir une demande qui serait trop forte en zone euro,
19:21 alors qu'on est en stagnation totale,
19:23 et avec un pays majeur qui est lui en stagnation totale depuis plus de 6 années,
19:27 c'est un petit peu difficile à avaler.
19:29 Parce que la dynamique des salaires dépend peut-être de facteurs un peu différents en Europe.
19:36 La construction des salaires, elle se fait dans une relation...
19:39 Elle se fait dans le pan, bien sûr.
19:41 Au sein de l'entreprise, entre des syndicats, une direction, etc.
19:45 Il y a quelque chose de plus libre, pour dire les choses,
19:48 sur le marché du travail américain de ce point de vue-là, peut-être ?
19:51 Alors, peut-être, mais quand on regarde encore une fois le marché...
19:53 Et donc pour la BCES, c'est un risque d'ancrer, effectivement, le risque de boucle ?
20:01 Ça me paraît encore une fois assez compliqué.
20:04 Encore une fois, si on prend...
20:06 Le cas de l'Allemagne est vraiment intéressant.
20:08 Si vous regardez l'emploi en Allemagne, il a un peu progressé depuis la fin 2019.
20:12 Si vous regardez les heures travaillées dans le secteur privé,
20:14 on est revenu au niveau de 2014, et même au niveau de 2007.
20:18 Ça nous fait, on va dire, 15 ans ou 16 années de totale stagnation
20:21 dans les heures travaillées totales dans l'économie allemande.
20:25 Ça vous donne un peu une idée de où ils en sont actuellement.
20:27 Et quand on parle d'hommes malades de l'Europe, je pense que c'est effectivement un petit peu le cas.
20:31 Ce qui est intéressant, c'est que quand on regarde la réaction du marché
20:34 sur la communication de la Banque Centrale Européenne,
20:38 on voit d'une part que le marché augmente un petit peu son pricing de baisse de taux.
20:44 On était plus proche de 3, ce n'est plus proche de 4 aujourd'hui, à compter du mois de juin.
20:49 Et dans le même temps, l'euro/dollar, jump, jusqu'à 1,0950.
20:54 On a eu une séquence, d'abord Christine Lagarde qui parle,
20:57 et une demi-heure après, Powell parle, en disant que la baisse de taux était...
21:00 Donc c'est l'effet dollar plutôt qui a...
21:02 D'accord.
21:03 Et vous regardez sur vos télégraphies, vous avez d'abord l'euro qui chute,
21:05 et à partir du moment où Powell prend la parole, on retourne dans le sens.
21:09 D'accord.
21:10 Bon, bah, évoquons la partie américaine.
21:13 Évidemment, donc Jérôme Pouel nous dit "on n'est pas loin", notre phare.
21:18 Le rapport mensuel sur l'emploi qui a été publié, là, pour le mois de février,
21:21 est-ce qu'il valide cette hypothèse que oui, la Fed est proche d'une première baisse de taux ?
21:28 Le rapport lui-même, les économistes vont voir des choses positives et des choses négatives.
21:36 Mais finalement, ce qui importe, c'est ce que dit le marché,
21:40 et la façon dont la Fed interprète la direction qu'on a prise.
21:44 Et je pense qu'à la Fed, il y a de plus en plus cette conviction
21:49 qu'il faut quand même ajuster la politique monétaire à la baisse, les taux à la baisse.
21:54 Tous sont pas dans ce camp, Pouel depuis toujours.
21:59 Et c'est lui qui va sûrement faire basculer les choses.
22:02 Et la raison est la suivante, c'est que ce rapport, en tous les cas, nous dit une chose,
22:08 ça ralentit un petit peu.
22:09 C'est-à-dire que le marché de l'emploi est en train, enfin, de s'ajuster un petit peu,
22:16 mais il reste élevé.
22:17 Et pour parler de la croissance, et c'est le sujet pour la Fed,
22:21 certes les salaires sont élevés, ils continuent à croître,
22:24 même si là on a un chiffre un peu plus faible des progressions des salaires,
22:27 c'est le plus mauvais chiffre, le plus mauvais stat, en termes de qualité,
22:30 pour suivre les salaires aux États-Unis.
22:32 Il n'empêche qu'ils se tassent.
22:33 Et le sujet pour la Fed, c'est que la croissance reste quand même très solide.
22:39 Et une des raisons, et ça, une des raisons de l'exceptionnalisme américain,
22:43 c'est que la dépense publique n'est pas du tout comparable à ce que nous on a fait.
22:49 C'est-à-dire que les Américains, pendant le Covid, ont dépensé beaucoup plus que nous,
22:53 ils ont continué à le faire en 2023, et ils continuent à le faire.
22:57 Et c'est un soutien qui, quand même, est important.
23:00 On l'a vu dans les créations d'emplois, c'est plus de 50 000 fois encore.
23:03 Donc c'est une vraie différence.
23:05 Donc une partie de l'enfant malade de l'Europe, c'est-à-dire l'Allemagne,
23:10 ou de vieux malades en Europe, c'est que la dépense publique allemande,
23:16 où il y a beaucoup de choses à faire, ils ont beaucoup d'idées,
23:18 mais ils ne dépensent pas.
23:19 Il évoque aussi les flux migratoires positifs depuis quelques années à nouveau,
23:23 qui sont venus ajouter de la croissance, il l'a dit devant le Congrès.
23:27 Donc pour les Américains, il y a plus de croissance, et c'est un petit peu le sujet.
23:34 Est-ce qu'on a un vrai soft landing, c'est-à-dire ce miracle d'atterrissage,
23:39 sans que l'emploi se détériore ?
23:44 Là, on est à 3,9 de taux de chômage,
23:46 on va dans la bonne direction, et je crois que le plus probable,
23:51 c'est que la Fed va baisser ses taux en juin.
23:54 C'est un moment qu'ils ont déterminé comment étant,
23:58 on aura les bonnes statistiques pour décider,
24:03 et ils croisent des doigts pour que les salaires continuent à décélérer,
24:06 et que le taux de chômage peut-être monte un petit peu,
24:09 là où ils le voyaient, eux, vers 4 et quelques, à 4,1, je crois que c'était leur objectif.
24:13 On n'ira peut-être pas là, mais je crois que c'est ça qu'ils attendent.
24:18 Et Powell, de façon, dans la deuxième déclaration qu'il a faite,
24:23 prestation qu'il a faite au Sénat, la thèse est claire, c'est juin,
24:27 où on va baisser les taux, mais les étoiles s'alignent un petit peu,
24:32 mais on ne sait pas pourquoi on arrive là.
24:35 Je pense que personne ne sait comment ça se fait qu'aux États-Unis,
24:39 on ait réussi ce soft landing, et sachant que dans l'inflation,
24:45 comme vous le savez, Grégoire, on a toujours les services,
24:48 les "core-core", comme on dit, qui continuent à progresser à 4%,
24:53 et on ne voit pas encore des vrais signes que ça décélère beaucoup, hors logement.
25:00 Mais ce miracle, Powell y croit, il a envie de montrer que c'est bien,
25:05 et il doit baisser les taux, parce que l'inflation baisse,
25:09 et les taux réels resteront de toute façon restrictifs.
25:12 Est-ce que l'économie américaine et la Fed sont mûres pour,
25:16 effectivement, une recalibration de la politique monétaire à l'horizon du mois de juin ?
25:20 Qu'est-ce que vous en dites chez BNP Paribas Asset Management, Nathalie ?
25:23 Sachant, comme le rappelle Sébastien, c'est encore un débat assez vif.
25:27 J'ai rappelé de nombreuses fois le call qui a été fait par le chef économiste
25:31 d'Apollo Global Management la semaine dernière, je crois, Thorsten Slocke.
25:34 Évidemment, on peut en sourire, mais c'est quand même une personnalité qui compte,
25:39 qui est écoutée, qui a des arguments pour dire que la Fed ne sera peut-être pas en position
25:44 de baisser ses taux cette année, contre toute attente, encore une fois.
25:47 Il ne faut pas du tout en sourire, parce que là, tout s'est bien passé.
25:50 Cette fois que le marché a joué le pivot, depuis 2022, donc effectivement.
25:55 Ce rapport sur l'emploi était parfait pour avoir un vendredi tranquille et bien débuté le week-end.
26:00 Ça, on peut déjà s'en féliciter. La semaine prochaine, on a les chiffres d'inflation.
26:04 Ça veut dire quoi, rapport parfait, Nathalie ?
26:06 Écoutez, en janvier-février, il y a 250 000 créations d'emplois en moyenne.
26:10 Les salaires ralentissent un petit peu, le taux de chômage remonte un petit peu, mais pas trop.
26:14 Voilà, encore une fois, ça valide l'idée d'un soft lending.
26:19 Mais imaginons que la semaine prochaine, les chiffres d'inflation, pour une raison X ou Y,
26:24 qu'elles soient liées aux fameux coûts du logement ou à un autre facteur, remontent très fortement.
26:30 Eh bien, on risque de basculer, enfin, le marché risque de basculer vers un autre scénario.
26:35 Alors, pour le moment, ça évolue plutôt entre ce soft lending idéal où l'inflation décélère miraculeusement
26:42 et puis un scénario un petit peu moins favorable où l'inflation serait un petit peu plus persistante.
26:49 Là, on repousse, dans ce scénario, la première baisse des taux.
26:54 Et puis, il y a deux scénarios extrêmes.
26:56 Finalement, le marché du travail n'est pas en train de se rééquilibrer doucement.
27:00 Il va vers une dégradation marquée pour une raison X ou Y.
27:03 Ou alors, au contraire, on a une économie qui est en train de réaccélérer.
27:08 Pour le moment, c'est très peu pricé dans les marchés, c'est très peu pricé par les économistes.
27:12 Mais voilà, on tourne entre ces quatre scénarios, encore une fois, concentrés plutôt pour les deux.
27:18 Mais voilà, deux chiffres d'inflation particulièrement...
27:21 Oui, le chiffre de janvier, le CPI de janvier a réveillé un peu le marché, on va dire.
27:26 Exactement, et d'autant plus que le bureau de labor statistique a précisé que ce n'était pas simplement
27:31 le changement de méthodologie autour de ce fameux coût du logement qui expliquait la hausse.
27:37 Il y a eu beaucoup de bruit quand même sur les dernières statistiques.
27:40 Toujours, les statistiques américaines ne sont pas d'une qualité exceptionnelle.
27:44 Non, non, non.
27:46 Oui, oui, oui, oui, oui, oui, oui.
27:48 De manière générale, je crois qu'il y a un problème de fiabilité de la statistique aujourd'hui.
27:53 Des taux de réponse d'enquête qui ont considérablement chuté, etc.
27:57 Il y a effectivement ce phénomène. Ce n'était déjà pas exceptionnel avant.
28:00 Puis, capter des changements de comportement des agents économiques,
28:03 ce n'est pas forcément évident avec des indicateurs qui restent pour la plupart les mêmes.
28:08 Bon, Join, ça semble se confirmer.
28:11 Dans l'esprit de Jérôme Poel, est-ce que c'est suffisant pour que ce soit le calendrier qui se matérialisera ?
28:18 Et puis après, j'ai la question quand même, comment les banques centrales vont communiquer
28:21 une fois qu'elles auront délivré ces premières baisses d'autos ? Nicolas.
28:25 Alors, pour la Fed, effectivement, je pense que la donnée d'inflation la semaine prochaine va quand même être très importante.
28:30 Parce qu'en fait, on était quand même parti, à partir du 15 novembre dernier, avec une tendance qui était…
28:38 On était plus ou moins convaincu que la désinflation était plus ou moins acquise.
28:41 Et donc, tout le marché a commencé à anticiper des baisses de taux assez conséquentes pour cette année.
28:45 Et tout cela a été invalidé au fur et à mesure, notamment par la publication des chiffres dans l'inflation.
28:49 Et tout en sachant qu'il y avait des gros risques de voir des chiffres inconfortables pour le Q1.
28:55 Donc, c'est exactement ce qui est arrivé avec des… Notamment, il y a plein d'items qui ont eu des effets un peu curieux.
29:02 Et donc, on a eu une communication depuis un mois par le BLF, qui est aussi assez intéressante.
29:07 Et en fait, ce qui était intéressant, c'est de voir que le premier sujet sur lequel ils ont communiqué, en fait, s'est révélé plutôt être faux.
29:13 Et on a quand même une situation aujourd'hui où, en fait, on a une inflation totale aux États-Unis, qui est donc à un niveau trop élevé,
29:20 mais qui intègre – on va dire – 33% de son indice. Ça concerne l'immobilier.
29:24 Et l'immobilier est pris en compte. Vous prenez en gros les nouveaux enzôtrants sur le marché. Il vous prenait le stock.
29:30 Et ce qui fait que vous incorporez au fur et à mesure seulement les nouveaux loyers dans cet indice-là.
29:35 Évidemment, donc ça vous donne un effet retard. Si vous sortez cet indice, si vous prenez l'indice des loyers qui sont sur le marché aujourd'hui,
29:41 vous êtes déjà largement à 2%. Évidemment, vous avez une hausse plus importante pendant la période de la pandémie.
29:46 Mais aujourd'hui, vous êtes déjà à 2%. Donc en dynamique, on y est déjà.
29:49 Donc tout ce qui reste, effectivement – c'est ce que vous pointiez avant – c'est en gros tout ce qui reste dans les services en dehors de l'immobilier.
29:55 Et la même chose, on a deux, trois éléments qui sont en gros plus ou moins parfaitement incohérents.
30:01 Et donc ça sera intéressant de voir si pour le mois de février, pour la prochaine qui sera publiée, on aura quelque chose qui a un retour à la normale
30:09 et qui peut donc ramener un petit peu le marché. Imaginez qu'on peut se remettre dans un recalibrage un peu plus agressif que ce qu'on avait précédemment.
30:16 Ce qui ne me semblerait pas totalement fou parce que ce qu'on constate quand même depuis un an, c'est que oui, la croissance américaine est très forte.
30:23 Oui, on voit cette réaccélération. Mais si vous regardez les choses en nominal, en fait, on est parti de 7% de croissance nominale.
30:29 Et en fait, on est en train de revenir doucement à 5%. Et 5%, là maintenant, en fait, on est en train de passer juste en dessous du taux aux États-Unis.
30:36 – Directeur. – Au taux directeur.
30:37 – D'accord. – Et donc, ça vous met dans une situation…
30:39 Quand vous regardez le graphique, quand vous passez en dessous du taux directeur, généralement après, ça se passe plutôt mal.
30:44 Et donc, c'est le moment où il faut commencer vraiment à être prudent, surveiller effectivement de très près les données sur l'emploi.
30:51 Et donc, je pense que la première validation qu'ils auront sur les chiffres de l'inflation peut modifier le discours qu'ils vont avoir.
30:58 Ensuite, je pense que ça agira plus, non pas sur le calendrier, peut-être que sans doute, quoi, devrait arriver à ce moment-là.
31:04 Mais ensuite, peut-être que la baisse sera un peu plus rapide que ce qui est imaginé par le marché aujourd'hui.
31:08 – Comment elles vont communiquer, effectivement, une fois la première baisse ?
31:12 Bon, déjà, le timing, c'est quand même important. Enfin, je veux dire, même en revenant à notre discussion sur la BCE, avril, juin,
31:19 beaucoup de gens vont vous dire « Mais qu'est-ce que ça change ? »
31:22 Bon, ça peut changer quand même pas mal de choses dans la suite de la séquence. D'accord avec ça, Nicolas ?
31:27 Et comment on peut imaginer la communication des banques centrales, « data-dependent »,
31:32 une fois qu'elles se seront quand même engagées à délivrer une première baisse de taux, et donc, sans doute, d'autres derrière ?
31:39 – Le timing, il est quand même important aux États-Unis, parce que la grande frayeur qu'ils doivent avoir,
31:45 c'est qu'à partir du moment où le marché de l'emploi se retourne, il ne se retourne généralement pas de 0,2 ou 0,3 points,
31:49 ça va très vite, très fort. Donc là, c'est mieux de ne pas se tromper.
31:52 C'est moins le 14 euros, ça va moins vite, mais aux États-Unis, il ne faut pas se tromper.
31:57 Et donc, oui, ça a une importance. Ensuite, évidemment, c'est le scénario qui va guider leur action.
32:02 Si on a une décélération, le scénario du soft-lending, on aura quelque chose qui sera relativement graduel,
32:06 il n'y a pas besoin de s'énerver et de le faire correctement.
32:09 Par contre, et c'est ce qu'on avait déjà dit la dernière fois, je crois, à partir du moment où,
32:12 si jamais le marché de l'emploi commence à être touché, ça peut être très, très brutal de la part de la Fed,
32:17 en termes de baisse de taux, parce qu'encore une fois, leur taux, le taux naturel,
32:22 il est estimé entre 2 et 2,5 là-bas. Ils ont 300 points de base à baisser avant d'arriver à ce taux neutre.
32:28 Donc il y a vraiment de la place pour faire quelque chose de brutal, si jamais il y a un danger sur la croissance américaine,
32:33 parce que là-bas, apparemment, la croissance, ça compte.
32:35 Un des arguments de ceux qui militent côté Fed pour encore beaucoup de prudence,
32:39 par exemple Raphaël Bostic de la Fed d'Atlanta, c'est de dire,
32:42 et c'est aussi un des arguments déployés par Thorsten Slogg chez Apollo,
32:45 c'est de dire, depuis 4 mois maintenant, l'assouplissement des conditions financières,
32:51 novembre, décembre, janvier, février, est un vent quand même porteur pour la croissance,
32:57 qui va entretenir encore une croissance américaine qui n'est pas en train de ralentir.
33:02 Et donc Bostic, il dit, moi je veux bien qu'on fasse une baisse de taux en juin,
33:05 mais tout de suite derrière, il faut vraiment que le marché comprenne bien que c'est une pour voir,
33:09 et qu'ensuite, on attend. Ce sera une et une pause.
33:13 Et il sait très bien, j'imagine, avec toute l'expérience qu'il a,
33:17 que le marché, une fois qu'on lui délivre une baisse de taux,
33:20 il va factoriser toutes les baisses de taux qu'il peut derrière.
33:23 Ça, ça sera une difficulté.
33:25 Oui, en termes de communication, c'est pas évident.
33:27 La première est importante. Deux points.
33:29 La première est importante et deux, il y a ce sujet dont je pense serait important
33:37 sur le fait qu'on est data-dependent.
33:40 Et je crois que, et la raison pour laquelle on était dépendant des données,
33:46 c'est qu'on sortait de quelque chose qu'on ne comprenait pas.
33:48 Et encore aujourd'hui, on ne comprend pas bien et on tapait à vue.
33:52 Et c'était normal. C'est-à-dire qu'il y a beaucoup de choses
33:54 qu'encore aujourd'hui, on ne comprend pas.
33:56 Les mécanismes qui se sont enclenchés, certains classiques, d'autres moins classiques,
34:01 dans tous ces chocs d'offres qu'on a eus, puis ces chocs de demandes incroyables aux US.
34:06 Donc c'est normal qu'on soit prudent. Je pense qu'on va sortir de ça.
34:09 Et de même, la garde l'a dit, et même je pense que la Fed aussi,
34:12 pense que leur capacité à regarder l'avenir peut-être est plus "facile"
34:17 parce que les choses se normalisent. Ils restent divisibles.
34:21 Revenons aux conditions financières. C'est vrai que les conditions financières
34:24 telles qu'on peut les mesurer, si on prend rien que la bourse et les taux,
34:28 on est mieux que sur toute l'année 2023.
34:32 Et les effets de richesse aux US sont importants.
34:38 Donc une partie de la population va être aidée. Mais une autre partie, peut-être pas.
34:42 Et on le disait, c'est vrai que quand les entreprises veulent protéger leurs marges
34:47 parce qu'elles trouvent que la demande n'est pas vraiment là,
34:51 les salaires commencent à ne pas trop monter, que la inflation reste un petit peu élevée,
34:55 il faut faire attention. C'est vrai que ça peut basculer assez vite avec des entreprises
34:59 qui se mettent à licencier et ça enclenche un autre phénomène,
35:03 le risque de récession, "pits of lending", et là la Fed peut aller très vite.
35:07 Mais ça c'est peut-être le risque le plus important qui existe aujourd'hui.
35:11 Donc ce risque, plus le fait que peut-être c'est le "soft lending",
35:16 tout ça pousse à que la Fed ait à baisser les taux dès maintenant.
35:20 Est-ce qu'on peut faire le "fine tuning" à être très fin de quand exactement ?
35:25 Juin, et vu comme on aura quelques chiffres importants,
35:29 on aura les chiffres d'inflation, on aura des rapports emploi,
35:35 je pense qu'il y aura assez d'éléments si on a raison qu'on est en train d'atterrir
35:40 pour que la Fed à ce moment-là baisse les taux.
35:43 Est-ce que ça ira plus vite ? Si le prochain chiffre d'emploi est mauvais,
35:47 passer de 275 même si c'est révisé à moins quelque chose,
35:53 ça arrive, mais c'est plutôt rare, mais ça arrive.
35:57 Mais ça peut arriver en juin, donc il faut qu'ils agissent.
36:02 Donc je crois que le script est quand même écrit pour que juin soit le bon moment
36:07 si on continue à voir que ça se détend un peu.
36:11 C'est vrai que cette inflation sur les services, j'espère que les données vont être meilleures,
36:16 c'est un sujet parce qu'on voit bien que c'est des mécanismes qu'on dirait normal,
36:22 vu la croissance, vu la façon dont les salaires ont été montés,
36:26 les tensions qu'il y a encore, on a eu le rapport sur le nombre d'offres d'emploi,
36:31 par rapport aux chômeurs disponibles, il y a un sujet de tension.
36:36 Le QE tombe à 2,1 quand même.
36:39 Le calcul de la productivité, le coût du travail qu'on ressort de ce calcul,
36:50 ce n'est pas simple.
36:52 Non, je parle du QE, le taux de départ.
36:55 Ah d'accord, les gens qui sortent, qui changent de boulot, qui veulent changer de boulot.
37:01 On est tombé à 2,1, c'est quand même un signe.
37:03 Et ça c'est un signe de faiblesse du marché du travail.
37:05 Ben oui, de détente.
37:07 Il y a des gens qui quittent leur travail et en général quand ça arrive,
37:10 et il y en a de moins en moins, c'est qu'il y a une petite fragilité, c'est plus difficile,
37:14 il n'empêche que c'est en contradiction sur le fait qu'il y a encore beaucoup d'offres
37:17 par rapport au nombre de personnes qui n'ont pas de travail.
37:19 Comment on imagine la communication des banques centrales, encore une fois,
37:22 une fois que la première baisse de taux est délivrée, que le mouvement est enclenché,
37:26 face à des marchés qui ont l'habitude d'anticiper, de factoriser pas mal de choses derrière, Nathalie ?
37:31 Ce sera très certainement difficile parce que ce qu'on appelle la "forward guidance",
37:35 c'est-à-dire ces indications sur la conduite future de la politique monétaire,
37:38 c'est difficile à manier parce qu'on joue sa crédibilité sur finalement pas grand-chose.
37:44 Donc, ils vont sans doute dire qu'il n'y a pas de... qu'ils ne s'engagent à rien,
37:48 qu'on va rester "data-dependent".
37:50 Pourquoi ? Parce que...
37:52 Un des éléments, pourquoi les banquiers centraux ont tellement hésité, effectivement,
37:56 on arrive de la Lune, on voit une croissance à tonnes dans la zone euro,
37:59 une inflation qui décélère, on se dit "bah, vas-y, vas-y, baissez les taux".
38:03 Le cauchemar des banquiers centraux est sans doute assez bien réparti partout dans le monde,
38:07 enfin dans le monde développé en tout cas, c'est commencer à baisser les taux
38:10 et puis avoir l'inflation qui réaccélère après.
38:12 Christine Lagarde l'a dit d'ailleurs devant le Parlement européen,
38:17 c'est vraiment un élément sur lequel il ne va pas falloir se louper.
38:21 Et donc, une façon de limiter les risques de se rater, c'est d'y aller très très progressivement.
38:28 Mais encore une fois, sur tout ce qui concerne la forward guidance,
38:31 j'ai un peu de mal à imaginer ce qui va pouvoir être dit.
38:35 Oui, d'autant qu'effectivement, cette parole a été considérablement abîmée quand même en 2022,
38:42 au moment où il fallait basculer dans la dépendance aux données
38:46 et oublier ce qu'on avait dit parfois une semaine avant.
38:49 Bon, on s'arrêtera là pour cette fois.
38:51 Merci beaucoup à vous trois, merci d'avoir été les invités de ce vendredi très macro,
38:55 effectivement au terme d'une semaine marquée par les banques centrales,
38:58 les prises de parole de Jérôme Poel, la communication de la BCE et le rapport emploi américain.
39:03 Nathalie Benatti a été à nos côtés, macroéconomiste chez BNP Paribas Asset Management,
39:07 Nicolas Götzmann, responsable de la stratégie macro à la financière de la Cité
39:10 et Sébastien Parissorvis, directeur de la recherche de LBP AM.

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