• il y a 8 mois
Vendredi 5 avril 2024, SMART BOURSE reçoit Céline Piquemal-Prade (Présidente, Piquemal Houghton Investments) , Julien-Pierre Nouen (Directeur des études économiques et de la gestion diversifiée, Lazard Frères Gestion) et Yves Maillot (Président, YAM Capital)

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00:00 *Musique*
00:10 Trois invités avec nous chaque soir pour décrypter les mouvements de la planète, marcher.
00:13 Céline Picmal-Prad est à nos côtés, présidente de Picmal Auton Investments.
00:17 Bonsoir Céline.
00:18 Bonsoir Diego.
00:18 Merci d'être là. Yves Maillot nous accompagne également. Bonsoir Yves.
00:21 Oui, bonsoir Diego.
00:22 Ravi de vous retrouver. Vous êtes président de YAM Capital et avec nous également Julien-Pierre Nouan.
00:26 Bonsoir Julien-Pierre. Vous êtes directeur des études économiques et de la gestion diversifiée de Lazare Frères Gestion.
00:33 C'est le chiffre du jour, le chiffre du mois.
00:36 Le rapport mensuel sur l'emploi américain, Pauline a rappelé les détails, plus de 300 000 créations,
00:42 taux de chômage qui retombe à 3,8%.
00:44 Je crois qu'on a même le taux de participation qui réaugmente,
00:49 le nombre d'heures travaillées sur la semaine également a augmenté au cours du mois de mars.
00:54 Ça semble être une excellente nouvelle.
00:57 Est-ce que ce genre d'excellente nouvelle reste une bonne nouvelle également pour les marchés et les investisseurs, Julien-Pierre ?
01:03 Alors ça montre effectivement que l'économie américaine est plutôt sur un scénario de no landing.
01:08 Après avoir passé 2023 et hésité entre le soft landing et le hard landing,
01:12 on voit plutôt que depuis quelques mois, une réaccélération qui se confirme dans ces chiffres.
01:17 Au-delà du chiffre global de création d'emploi, on a un nombre d'heures travaillées qui remontent aussi.
01:23 Et une des inquiétudes qui avait émergé sur les deux derniers chiffres
01:27 était l'écart entre l'enquête auprès des entreprises et l'enquête auprès des ménages.
01:31 Avec une enquête auprès des ménages qui montrait des fortes destructions d'emplois,
01:35 et là on a retrouvé des créations d'emplois tout aussi fortes que dans l'enquête auprès des entreprises.
01:39 Donc clairement, ça montre que l'activité reste bien orientée.
01:43 Alors pour les marchés, ça a deux conséquences.
01:46 La première, c'est que ça nous dit que le volume d'activité des entreprises va rester bien orienté.
01:51 La deuxième question sur laquelle il y a plus d'incertitude,
01:55 c'est que se passe-t-il au niveau du marché du travail et des salaires et de l'inflation.
02:01 Est-ce que cette activité qui reste très solide va régénérer des tensions sur les salaires ?
02:08 Là, c'est vrai que le chiffre était assez modéré.
02:10 Quoique c'est un 0,3, un gros 0,3. On est à 0,35 en fait.
02:13 Sur un mois, c'est ça.
02:14 Sur un mois.
02:15 Sur la réduction du salaire horaire moyen.
02:16 Et puis il y a des effets aussi de composition.
02:18 On attendra les données de la fête d'Atlanta.
02:20 Mais pour nous, ça va être vraiment l'enjeu des prochains mois,
02:22 de savoir cette économie américaine qui ne veut pas ralentir,
02:25 est-ce qu'elle va régénérer des tensions sur le marché du travail et sur les salaires ?
02:29 Jusqu'à présent, et c'était il y a encore à peine quelques semaines je crois,
02:33 Jérôme Poel nous disait "une forte croissance du marché du travail n'est pas une raison
02:38 pour ne pas baisser les taux directeurs de la réserve fédérale américaine".
02:43 C'est à ce stade toujours l'inflation qui compte, Julien Pierre.
02:48 Oui, c'est l'inflation qui compte.
02:49 Et encore, on a vu effectivement le dernier graphique des dots,
02:53 c'est les dernières prévisions de la Fed,
02:55 nous disait toujours trois baisses de taux,
02:58 et malgré des révisions en hausse sur la croissance 2024,
03:01 une légère révision en hausse sur l'inflation 2024,
03:04 on disait que la Fed était effectivement à l'aise,
03:07 avec une activité qui reste solide,
03:10 tant que l'inflation donne le sentiment d'aller dans le bon sens.
03:15 Ça c'était vrai sans doute aussi parce que les anticipations de marché restaient bien orientées.
03:20 Si à un moment on recommence à avoir de l'inquiétude,
03:22 et c'est vrai qu'on voit des choses comme le prix de l'or qui progresse fortement,
03:27 est-ce que les marchés ne risquent pas à un moment de mettre en cause la crédibilité de la Fed ?
03:33 Il y a un éditorial du Deuxième Economiste aujourd'hui qui pose cette question.
03:38 Voilà, dans l'immédiat pas forcément,
03:41 mais c'est vrai que ça peut être le sujet des prochains mois.
03:43 Bon, est-ce que la Fed joue avec le feu ?
03:46 Je ne sais pas quelle est votre lecture de la situation du cycle américain aujourd'hui,
03:50 à travers les entreprises que vous pouvez suivre, bien sûr Céline.
03:54 Et est-ce que de voir des chiffres encore aussi forts,
03:57 est-ce que ça reste une bonne nouvelle pour les investisseurs à action, pour les actifs risqués ?
04:01 Moi ce qui me fascine c'est,
04:03 combien le marché a effacé de baisse de taux ces 3, 4 derniers mois,
04:08 sans impact sur les marchés d'actifs risqués ?
04:11 On était à 6, 7 baisses de taux anticipées,
04:13 on est peut-être plus qu'à 2 ou un peu plus de 2 aujourd'hui,
04:18 avec un démarrage qui ne se ferait plus forcément en juin ou juillet,
04:20 mais peut-être en septembre.
04:22 Et le marché semble continuer d'accepter cette idée.
04:26 Jusqu'à quand ?
04:27 Donc effectivement c'est la question du jour,
04:29 mais comme le disait à l'instant Julien Pierre,
04:32 on est quand même dans un environnement où on voit
04:35 qu'on retrouve de la tension, notamment sur le marché obligataire.
04:40 Et des taux qui sont en train de remonter vers 4,4, 4,5,
04:45 ça va finir par peser.
04:47 Là c'est des niveaux importants ?
04:50 C'est des niveaux importants, on attendait effectivement.
04:52 On a anticipé, parce que les marchés à action ils anticipent.
04:55 Donc toute l'année dernière on a eu des marchés qui ont progressé
04:58 parce qu'on anticipait les baisses de taux.
05:00 Aujourd'hui maintenant on est en train d'anticiper
05:03 qu'on n'aura plus de hausses de taux,
05:05 en tous les cas que si on a des hausses de taux,
05:07 elles arrivent donc beaucoup plus tard que ce qui avait été anticipé.
05:10 Baisses de taux ?
05:11 Oui, baisses de taux.
05:13 Certains pensent qu'il y aura peut-être des hausses de taux encore.
05:16 Ce qui est important quand même c'est qu'ici on parle de finance,
05:19 et quand on fait de la finance, on calcule la valeur des actifs
05:24 en prenant en compte un taux de 1040 rate.
05:30 Et donc quand on prend un taux qui est plus élevé,
05:33 vos actifs mécaniquement doivent baisser en valeur.
05:37 Donc c'est toute la question que je me pose aujourd'hui,
05:39 donc je suis convaincue que nous allons atteindre...
05:43 Alors ce qui est très difficile avec ce type d'indicateur,
05:46 c'est qu'on ne peut pas savoir à quel moment le marché les prend en compte.
05:50 Mais ce qu'on sait, c'est que historiquement,
05:51 quand on a une augmentation du coût du crédit,
05:54 un renchérissement du coût de l'argent,
05:57 ça finit par avoir un impact sur la valorisation des actifs.
06:00 Ça a toujours été le cas, mais l'anticipation est très difficile,
06:03 et ça arrive à un moment en plus qui est très délicat,
06:06 puisque aujourd'hui, si vous regardez la valorisation
06:09 des sociétés technologiques américaines,
06:11 on est à 8,2 fois les ventes,
06:14 on est au-dessus du point haut qu'on avait eu à 8,1, 8,
06:19 avant le krach de 2022,
06:21 et on est au-dessus du 7,8 de 2000.
06:23 Donc on n'est pas en train d'arriver sur un environnement de marché
06:26 un peu plus compliqué, avec des valorisations
06:29 qui nous laissent une marge de sécurité,
06:31 comme dirait Benjamin Graham.
06:33 Donc c'est pour moi une grosse, grosse question.
06:35 Et pour finir, parce que, pour revenir sur ce point-là,
06:39 on me dit souvent "oui, mais Céline, il y a beaucoup de croissance".
06:43 - Dans la tech ? - Partout.
06:45 - Partout ? D'accord. - Mais donc ça peut justifier
06:47 - qu'on est effectivement... - Des multiples plus élevés.
06:49 Des multiples plus élevés, et là, je vous enjoins
06:53 à regarder ce qu'il se passe entre 2000 et 2024
06:58 pour une société qu'on connaît tous très bien, qui s'appelle Cisco,
07:01 qui était la plus grande société au monde en 2000,
07:04 qui se valorisait à 37 fois les ventes.
07:07 Aujourd'hui, Nvidia, c'est 37 fois les ventes.
07:10 Entre 2000 et 2024, les bénéfices de Cisco,
07:13 ils ont été multipliés par 10.
07:15 Le cours de bourse, -39%.
07:17 Donc il faut quand même un petit peu faire attention,
07:19 parce qu'on fait de la finance, on n'est pas en train juste
07:22 de vouloir trouver des sociétés qui ont de la croissance de bénéfices.
07:24 Mais c'est là où je trouve que le marché est parfaitement cohérent.
07:26 Qu'on puisse légitimement imaginer que ce soit difficile
07:29 pour la tech américaine de se payer beaucoup plus cher
07:31 avec en plus des taux qui remontent,
07:33 j'ai pas de problème là-dessus, mais ce qui a fait le marché,
07:35 en tout cas ce qui a été leader de marché sur le premier trimestre,
07:38 c'est la zone Japon, ce sont les actions européennes zone euro,
07:43 tirées par les banques, tirées par l'automobile,
07:47 tirées par l'industrie, tirées par des secteurs cycliques
07:50 à durations quand même plutôt courtes, comme on dit chez les...
07:53 - Pour remettre les choses en perspective,
07:56 Nvidia, c'est 1/5ème de la progression
08:00 des marchés boursiers mondiaux sur le premier trimestre.
08:04 - D'accord. - 1/5ème.
08:06 - Oui, oui, c'est colossal pour une seule valeur.
08:08 - C'est une valeur 20% monde. - De doutes là-dessus.
08:11 - Alors effectivement, il y a des choses en parallèle
08:14 qui se sont bien comportées, mais c'est quand même énorme.
08:17 Donc ma problématique aujourd'hui, c'est mon niveau de dépendance.
08:21 C'est juste que, effectivement, si jamais demain,
08:24 j'ai un petit blip sur l'une de ces valeurs
08:27 qui peut d'un coup représenter 20% du grand marché,
08:30 - C'est l'ensemble du marché derrière ?
08:31 - Mon problème, ça va être sur les indices.
08:33 Aujourd'hui, mon problème, c'est qu'il y a plus de la moitié
08:35 des investisseurs qui sont investis sur des trackers
08:38 et sur de la gestion indicielle.
08:40 Et donc ça, ça me pose quand même un gros problème.
08:43 Voilà. Mais on verra ce qui se passe en fin de l'année.
08:46 - Puis les résultats vont revenir bientôt, la semaine prochaine.
08:48 On va rentrer à nouveau dans la séquence micro
08:51 avec les résultats du premier trimestre.
08:53 Yves, revenons, oui, sur la dynamique du marché américain
08:57 et du marché de l'emploi américain, du marché boursier américain.
09:01 Et puis, Julien Pierre soulevait la question sur l'or.
09:05 Pourquoi l'or monte ? Et pourquoi aujourd'hui ?
09:07 Pourquoi maintenant, alors qu'on a plutôt des taux réels, d'ailleurs,
09:11 qui ont eu tendance à remonter un peu ces dernières semaines
09:14 et ces derniers mois ?
09:16 - Ça, ça peut intriguer beaucoup de gens, effectivement,
09:18 puisqu'on a connu des mécaniques totalement inverses
09:21 il n'y a pas si longtemps, où, effectivement,
09:23 la montée des taux d'intérêt était un facteur aggravant
09:26 sur le cours de l'or, ce qu'on peut expliquer.
09:28 En réalité, et pour faire le parallèle avec ce qui vient
09:32 d'être dit par Céline, on s'aperçoit depuis un an, un an et demi,
09:37 maintenant, que l'aversion risque à beaucoup chuter,
09:40 que finalement, c'est pas seulement Nvidia qui a un gros poids
09:43 au sein du marché actions, dont le prix monte,
09:46 c'est en fait tous les actifs.
09:48 Parce que malgré les politiques de durcissement,
09:52 des politiques monétaires des banques centrales,
09:54 les liquidités sont restées très abondantes.
09:56 Et le marché sait très bien, puisqu'on l'a testé il y a pile un an,
10:01 qu'en cas de problème, en cas d'émergence d'un risque,
10:04 bancaire par exemple, comme ça a pu être le cas
10:06 il y a quelques semaines, ou autre, ou facteur exogène,
10:09 les liquidités sont à disposition au moins un certain temps.
10:13 Et que par conséquent, ces liquidités sont restées très présentes
10:18 par effet de capilarité, une fois que le risque est bien retombé,
10:25 on commence à s'investir, c'est d'abord concentrer cet argent
10:29 sur les sociétés avec les plus gros potentiels,
10:33 Nvidia, Semi, Tech, etc.
10:37 Et depuis 5-6 mois, ce percole sur l'ensemble des secteurs,
10:44 tant et si bien qu'aujourd'hui, et sur les autres classes d'actifs,
10:47 tant et si bien qu'aujourd'hui, on a plutôt ces dernières semaines
10:51 une surperformance de valeurs industrielles, cycliques, bancaires,
10:55 qui prennent le relais de ce qu'il y a effectivement.
10:57 En Europe, les banques sont à +20 depuis le début de l'année,
10:59 c'est mieux que la Tech, en Europe.
11:01 Voilà. Donc la situation, en fait, l'argent est abondant, malgré tout.
11:06 On parle quotidiennement, on tergivère sur l'amplitude,
11:10 le calendrier des baisses de taux, etc.
11:12 Et c'est vrai que c'est une importance dans le calcul de rentabilité,
11:15 du capital, du coût du capital, du calcul de la prime de risque.
11:18 On est bien d'accord là-dessus. Conceptuellement, c'est implacable.
11:23 Simplement, il y a eu beaucoup d'entorses à cette mécanique financière
11:27 ces dernières années, puisqu'implicitement, on a tous appliqué
11:29 des primes de risque très élevées quand les taux étaient à zéro.
11:32 Donc on s'accommode bien, finalement, d'une situation asynchrone
11:38 entre les mouvements de taux et la valorisation des actifs,
11:41 pour peu que la confiance soit là et que les liquidités soient là.
11:44 C'est ce qu'on appelle le momentum.
11:46 Oui. Alors, ce qui se passe en ce moment, c'est qu'effectivement,
11:48 on sent qu'on peut avoir un report un peu plus fort que prévu
11:52 de la baisse des taux et donc du prix de l'argent,
11:54 que prévu il y a quelques mois.
11:57 Simplement, c'est pour l'instant, en tout cas, sous farce au goût,
12:00 d'une situation presque idéale, puisqu'on n'a pas la récompense
12:03 tout de suite, mais on sait qu'on va l'avoir.
12:05 Et donc, finalement, c'est presque mieux que le moment où elle tombe.
12:09 Moi, je pense que la psychologie des marchés, c'est un peu ça en ce moment.
12:13 Si on reporte le calendrier des baisses de taux,
12:15 c'est aussi parce qu'on a encore une économie en croissance
12:19 avec une croissance nominale très forte encore pour l'économie américaine.
12:22 Exactement. Donc, jusqu'à présent, en termes de marché,
12:25 j'allais dire tout va bien.
12:27 Maintenant, c'est vrai que des valorisations ont beaucoup progressé.
12:32 On a une expansion de la hausse sur tout un ensemble de valeurs.
12:37 Et donc, va se poser le problème, j'allais dire,
12:41 de point de jonction où là, on sait que vraiment,
12:43 le prix de l'argent va baisser.
12:45 Eu égard aux valorisations qui sont vraiment tendues depuis un certain temps.
12:49 À moins qu'on ait de nouveau un game changer, un signal plus fort.
12:52 Et puis, on sait qu'on est en année électorale,
12:54 que l'argent, de toute façon, est abondant.
12:56 Quand ce n'est pas la politique monétaire, c'est le budget.
12:58 Quand ce ne sera plus le budget, ce sera de nouveau, peut-être,
13:02 des politiques monétaires plus incitatives.
13:04 Et tout ça, pour l'instant, finalement, porte la valeur des actifs.
13:08 Et on sent...
13:10 Je préfère, intuitivement, je préfère, comme vous dites,
13:12 un rallye qui se diffuse, une participation à la hausse beaucoup plus large,
13:16 que simplement concentrer sur 3, 4 valeurs,
13:19 aussi performantes soient-elles, aussi belles soient-elles, etc.
13:23 Oui, absolument.
13:24 Pour terminer, il y a au moins quelque chose de cohérent de ce point de vue-là.
13:27 Néanmoins, tout a une fin.
13:29 Au moins ponctuelle, sur un cycle.
13:31 Et moi, ce que je décède dans les outils que j'utilise,
13:33 c'est qu'il y a une poursuite de la diffusion.
13:35 Mais on n'était peut-être pas loin du moment où, réellement,
13:39 la diffusion aurait été quasi généralisée sur le marché.
13:43 Parce qu'on a, simultanément, quelques petits signes, quand même,
13:46 d'un marché qui se dit stop à la baisse de la version au risque.
13:51 Donc, on n'est pas loin d'avoir des signaux un peu contrariants,
13:53 vous dites, peut-être, de ce point de vue-là.
13:55 Et comme en termes de saisonnalité, dans le calendrier annuel du marché,
13:59 on a eu un excellent premier trimestre.
14:02 On sait très bien qu'il y a toujours un point, comme ça,
14:05 de prise de consolidation avril-mai, jusqu'où on peut aller,
14:08 porté, après, par les versements des dividendes.
14:10 Et on sait que l'été, début de rentrée de septembre,
14:14 là, c'est la situation dangereuse sur les marchés.
14:17 Quand il y a secousse, quand il y a correction forte.
14:20 Voilà un petit peu la situation, par rapport à ce panorama américain et monétaire.
14:26 Ah oui. Julien Pierre, je reviens à parler du marché du travail américain.
14:33 Si on peut estimer que les hésitations ou les doutes du côté des banquiers centraux américains
14:38 sur l'idée de baisser les taux dès le mois de juin sont légitimes,
14:41 qu'en est-il pour la Banque Centrale Européenne ?
14:43 On a vraiment l'impression que là, il y a un chemin ou deux chemins
14:46 qui sont en train de s'écarter.
14:48 Est-ce que la BCE, j'allais dire, comme une grande banque centrale,
14:52 avec un peu plus de 20 ans d'existence maintenant,
14:54 peut prendre ses responsabilités dans un contexte économique en zone euro
14:59 qui pourrait le justifier, sans attendre la Fed ou en s'affranchissant
15:04 du calendrier de la Réserve fédérale américaine ?
15:06 Est-ce que le marché est prêt à ça ?
15:08 Est-ce que ça peut générer, je ne sais pas, des frictions, des tensions ?
15:10 Qu'est-ce que ça peut générer comme mouvement de marché ?
15:13 Comme l'a rappelé un des gouverneurs de la BCE,
15:15 la BCE n'est pas le 13e district du système de la Réserve fédérale.
15:19 Ah, je ne l'ai pas entendu, celle-là.
15:21 Effectivement, on a des situations économiques qui sont très différentes.
15:25 Aux États-Unis, on a une économie, on l'a dit, un peu de no landing.
15:29 On reste sur une croissance assez forte.
15:32 Des sujets d'inflation ne sont pas totalement éteints.
15:35 Zone euro, la situation est un peu différente.
15:37 En termes de croissance, on a quand même eu deux trimestres à zéro moins en fin d'année.
15:42 Les données d'activité sur le premier trimestre sont faibles.
15:44 Ce matin, on a eu les ventes au détail.
15:46 Les chiffres de production industrielle aussi ne sont pas très bons.
15:48 C'est tout ça très lesté par l'Allemagne, mais globalement, ça reste assez mou.
15:52 On commence à avoir un peu de mieux sur les enquêtes,
15:55 mais ça reste quand même beaucoup plus mou.
15:57 On passe de zéro moins peut-être à zéro plus.
16:00 Ce n'est pas le grand décollage.
16:02 En termes du marché du travail, on reste sur un taux de chômage qui est très bas.
16:06 La bonne nouvelle, c'est peut-être sur l'inflation,
16:08 ou si on exclut les prix des services.
16:10 On sait que les prix des services sont importants pour la durée des chocs inflationnistes.
16:18 Or, on a une évolution qui est plutôt favorable.
16:22 Et puis, on le sent, lorsqu'on écoute tous les gouverneurs de la BCE,
16:26 même les plus faux cons se sont ralliés à l'idée d'une baisse en juin.
16:30 La question, c'est après.
16:32 C'est vrai que la croissance est plus faible.
16:34 Le marché aujourd'hui est sur trois ou quatre baisses.
16:40 Ce qui est intéressant, c'est qu'on est sur trois ou quatre baisses.
16:43 Aux États-Unis, on parle peut-être de trois.
16:46 Peut-être une, trois ou zéro.
16:48 Pour l'instant, il y a quelque chose qui a assez peu réagi à tout ça.
16:52 C'est l'euro/dollar.
16:54 L'euro/dollar qui reste autour de 1,08.
16:57 On pourrait penser que ça sera peut-être déclenché par une matérialisation de ce différentiel.
17:05 Voir un dollar qui s'apprécierait face à l'euro sur les prochains trimestres.
17:09 Oui, d'accord.
17:11 Mais vous n'avez pas de doute sur l'idée que la BCE sera mûre en juin ?
17:15 Pas la semaine prochaine, mais pour le meeting du mois de juin,
17:18 pour attaquer et entamer un cycle de baisse de taux.
17:21 Ils ont fait tout le travail de préparation.
17:23 Ils ont dit quels indicateurs ils vont regarder.
17:25 Donc, sauf surprise sur ces fameux indicateurs du coût du travail,
17:29 il est très probable qu'ils baissent à ce moment-là.
17:35 Ce que ça peut déclencher, c'est un problème sur l'euro/dollar.
17:39 Est-ce que ça peut avoir un gros effet sur l'inflation dans la zone euro ?
17:43 Sachant qu'aujourd'hui, c'est beaucoup l'inflation des services,
17:45 donc plus domestiques qui tirent l'inflation.
17:47 Je pense que c'est un peu de second ordre.
17:49 Comment vous réfléchissez à ce que ça peut apporter au marché ?
17:53 On peut avoir cette perspective de baisse de taux dans certaines zones.
17:57 On peut débattre de la Fed.
17:59 En zone euro, ça semble plutôt écrit pour 2024.
18:03 Dans les grands pays émergents, ça a déjà commencé.
18:06 Céline, comment ça impacte le fonctionnement du marché ?
18:10 Et vous, dans vos choix d'investissement, quelle place est-ce que ça représente ?
18:15 Ce qui est intéressant, c'est qu'on peut avoir une certaine dichotomie
18:19 entre ce qui va se passer de part et d'autre de l'Atlantique,
18:22 qui pourrait pour une fois être plutôt favorable à l'Europe
18:25 et aux pays en dehors des États-Unis.
18:27 C'est quelque chose d'intéressant parce qu'effectivement,
18:30 les marchés en dehors des États-Unis n'ont pas fait grand-chose depuis 15 ans.
18:35 Voir la valorisation du marché en dehors des États-Unis,
18:39 au moins en price-to-book, n'a pas bougé depuis 2000.
18:42 Donc, ça vous dit qu'il y a peut-être des choses à refaire,
18:46 ou des pierres à retourner, ou des dossiers à regarder.
18:50 Alors qu'effectivement, comme on le disait tout à l'heure,
18:52 sur le marché américain, il y a beaucoup de pierres qui ont été retournées
18:55 et des valorisations qui sont quand même très tendues.
18:57 Donc, ça laisse des potentiels de surprise qui sont intéressants,
19:01 et ça laisse des dossiers qui sont potentiellement des dossiers
19:04 qui pourraient nous porter pour les 10, 15 prochaines années.
19:08 Vous réfléchissez avec cette longueur d'horizon aujourd'hui, Céline.
19:12 Sur 15 ans, les États-Unis sont imbattables versus le reste du monde.
19:17 Il y a peut-être quelque chose d'un retournement de situation pour longtemps.
19:21 Voilà, et effectivement, c'est pour ça que tout à l'heure, je parlais de 2000.
19:25 Mais quand on a des points de rupture, on l'a eu aussi en 1972,
19:28 à la fin des Nifty Fifties, on sait que quand on a des points de rupture
19:31 comme ça sur les marchés, on a toujours des cycles.
19:36 Quand on a la fin d'un cycle, on a un nouveau leadership qui émerge,
19:39 avec une nouvelle histoire qui apparaît.
19:41 Et donc, c'est ce qu'on a eu.
19:43 En 2008, c'est quand même la chute de Lehman,
19:46 qui pouvait imaginer que, alors que les États-Unis étaient vus
19:49 comme le pays au bord du gouffre, ça serait le pays qui allait dominer
19:52 tous les marchés mondiaux pendant les 15 prochaines années.
19:54 Ce n'est pas forcément simple à le voir quand on le vit, au moment où on le vit.
19:58 Mais ce qui est intéressant, c'est qu'effectivement, à l'époque,
20:00 c'était un marché qui était complètement délaissé.
20:02 Je me souviens qu'on nous demandait toute la journée
20:04 "Vous avez quelle exposition sur l'Inde et la Russie ?"
20:06 C'était l'obsession.
20:07 On était obsédé par la croissance dans les pays émergents.
20:10 Maintenant, on est en 2024, ce n'est plus tout le même environnement.
20:13 Et pour le coup, on est devenu obsédé par ce qui se passe aux États-Unis
20:17 et on ne regarde plus du tout d'autres dossiers.
20:19 Et c'est ça qui fait que notre métier est intéressant en tant que gérant actif.
20:22 Il y a des choses à faire.
20:23 Et on parlait tout à l'heure de Total, par exemple.
20:26 Ce qui est intéressant, c'est qu'effectivement, on a des leaders en France
20:29 qui sont exposés au monde entier et qui profitent de l'environnement actuel.
20:32 On parlait de l'or également tout à l'heure.
20:34 Et ce qui est intéressant, c'est qu'effectivement,
20:35 il y a quelque chose qui se passe aujourd'hui sur les matières premières.
20:38 Il y a quelque chose qui se passe clairement sur les matières premières.
20:40 C'est aussi là où se diffuse. Ce n'est plus juste le pétrole,
20:42 c'est les métaux industriels et précieux.
20:45 Le cuivre, etc.
20:46 Mais qu'est-ce qui s'est passé ?
20:47 C'est que si vous regardez l'exploration de métaux, de gaz et de pétrole depuis 15 ans,
20:52 on n'a quasiment pas exploré.
20:53 Pourquoi ? Parce qu'effectivement, déjà, on a un peu nettoyé les écuries
20:58 parce qu'il y a eu beaucoup de bêtises qui ont été faites
21:00 justement pendant la précédente période euphorique de 2000 à 2010.
21:05 Donc, il a fallu 15 ans pour nettoyer tous les bilans.
21:08 Et puis, une fois qu'on a nettoyé tous les bilans,
21:10 on n'a surtout pas investi pour l'avenir parce que, franchement,
21:12 on avait déjà connu suffisamment de pain noir comme ça.
21:15 Donc, comme on n'investit pas, aujourd'hui, on a des niveaux de stock
21:17 pour tous les métaux qui sont au plus bas depuis 15 ans.
21:20 Et donc, quand on a des stocks qui sont bas et qu'on a un tout petit peu de croissance,
21:23 ce qu'on n'attendait plus parce qu'évidemment, on était persuadé
21:26 qu'il n'y aurait jamais de croissance,
21:27 ça fait qu'on se retrouve avec un goulet d'étranglement et des prix qui montent.
21:30 Donc, minières, producteurs d'énergie, producteurs de sas et de thèmes.
21:34 Des sociétés différentes, effectivement.
21:36 On parlait des biens manufacturiers, la demande qui s'améliore, là aussi.
21:40 Ça peut profiter à des sociétés industrielles.
21:42 Donc, oui, il y a des choses à faire.
21:43 Après, c'est dossier par dossier.
21:44 Et les banques, dans tout ça, c'est le meilleur secteur en Europe sur un trimestre.
21:48 Mais l'Europe fait mieux que le Nasdaq.
21:50 L'Eurostock 50 fait mieux que le Nasdaq grâce à un secteur comme le secteur bancaire.
21:53 Et les banques ont déjà très bien fait en 2023.
21:56 Tout à fait.
21:57 Donc, il y a effectivement...
21:58 J'avais beaucoup...
21:59 Je crois que je suis venue ici d'ailleurs pour en parler quand il y avait eu la crise.
22:03 SVB ?
22:04 Oui.
22:05 Ah, c'est possible.
22:06 Oui, bien sûr.
22:07 J'avais dit qu'il fallait prendre des crédits agricoles avec un coupon qui était très élevé.
22:10 Mais, effectivement, ça a très bien fait.
22:13 La seule interrogation que j'ai aujourd'hui sur les banques européennes, c'est sur la partie immobilière.
22:17 Parce qu'effectivement, on parlait tout à l'heure de la hausse du coût du crédit.
22:22 La hausse du coût du crédit, les banques françaises, les banques européennes ont beaucoup d'exposition à l'immobilier.
22:27 Donc, je ne sais pas à quel point elles vont être impactées.
22:29 Donc, je préférais des banques en dehors.
22:31 C'est l'idée qu'il y a un nouveau cycle, des nouveaux leaders qui vont s'installer peut-être pour longtemps ?
22:37 Parce que jusqu'à présent, quand même, effectivement, on a aussi parlé de la tech américaine.
22:41 L'un n'empêche pas l'autre.
22:43 Les banques européennes peuvent très bien performer quand la tech américaine continue de bien se comporter.
22:47 C'est ce qu'on voit d'ailleurs.
22:49 Oui.
22:50 Il faut se garder d'être trop radical dans les conclusions.
22:53 Parce que, oui, là, il y a un rattrapage de secteurs qui prennent le relais dans le mouvement qu'on décrivait tout à l'heure.
23:00 Après, est-ce qu'il faut pour autant gommer ou oublier ce qui a fait le cœur de la reprise boursière depuis quelque temps ?
23:08 Non.
23:09 Alors après, on a le frein des valorisations, comme le disait Céline.
23:13 Mais les thèmes, alors, sans parler de l'intelligence artificielle, mais on sait très bien que, à l'image des matières premières,
23:20 la cybersécurité, c'est un truc vital au jour d'aujourd'hui.
23:24 Et ça, ça ne va pas s'effacer.
23:26 Voilà. Si on regarde les choses fondamentalement, au-delà des mouvements de rattrapage.
23:30 Donc, moi, je serais moins radical dans la conclusion.
23:33 C'est des choses qu'il faut savoir mitiguer, mélanger dans un portefeuille, pour avoir un bon équilibre.
23:45 Sur l'or, vous ne m'avez pas totalement répondu.
23:48 Oui, j'ai même oublié parce que j'étais parti dans...
23:50 Pourquoi l'or monte et pourquoi maintenant, quand les taux réels se mettent à remonter un peu ?
23:56 Absolument, ce n'est pas du tout intuitif.
23:58 Et il semble... En fait, l'or a longtemps été, jusqu'en 1971, en tout cas, ça l'a été pendant plus d'un siècle et demi,
24:11 l'outil, en fait, une monnaie, une référence.
24:15 Et quand on essaie de regarder ça à travers le temps, on voit que l'or a défendu le pouvoir d'achat.
24:20 Alors, c'est difficile de l'estimer quand on remonte à l'art romantique,
24:23 mais on a quand même une approche qui montre que... Ce qui n'est pas le cas de nos grandes devises.
24:29 Ça a apporté une stabilité ?
24:31 Ça permet de défendre le pouvoir d'achat.
24:33 Alors, quand on me rétorque "oui, mais ça ne procure aucun cash flow",
24:36 par définition, une monnaie, ça rapporte... C'est pas fait pour ça, une monnaie.
24:39 C'est un moyen de transaction. C'est un étalon.
24:43 Voilà, ça peut être une réserve de valeur pour transférer la valeur dans le temps,
24:47 pour peu qu'il n'y ait pas trop d'inflation, c'est-à-dire pas trop de dévalorisation de sa monnaie.
24:51 Là, les banquiers centraux ont depuis des années un objectif, qu'ils avaient atteint d'ailleurs,
24:55 c'est de dire que c'est 2%. L'inflation.
24:58 2%, ça veut dire que votre dollar ou votre euro perd 2% de pouvoir d'achat chaque année.
25:03 Et c'est pas le cas de l'or.
25:05 L'or peut être soumis à des variations aussi.
25:08 Ça peut monter, ça peut baisser aussi.
25:10 Là, on parle tendanciellement.
25:12 Quand on regarde ce qui s'est passé depuis 20 ans, moi je pratique un exercice,
25:16 je sais pas beaucoup de gens le font, qui est très instructif,
25:20 mais c'est de retraduire l'évolution des classes d'actifs et des marchés...
25:23 En or.
25:24 En or plutôt qu'en euro ou en dollar.
25:26 Et là, on est très surpris du constat qu'on tire sur une période.
25:29 On n'est pas du tout dans un boule marquée.
25:30 C'est pas la même performance.
25:31 Sauf peut-être un peu le Nasdaq.
25:33 Et du coup, là, on inverse les propositions et on s'aperçoit que psychologiquement,
25:37 ça modifie beaucoup d'attitudes.
25:39 Et mes analyses récentes et contacts, etc.
25:42 montrent quand même qu'il y a un certain nombre de gens qui,
25:44 on parlait de crédibilité des banquiers centraux, de leur politique,
25:47 donc de la monnaie,
25:48 commencent à se poser pas mal de questions.
25:50 Simultanément, on voit émerger un nouvel or numérique,
25:54 dont on parle, qui est le bitcoin.
25:56 Et on voit que, alors c'est pas synchrone, mais en tandem,
25:59 on a une appréciation de ces deux actifs,
26:03 de ces deux classes d'actifs,
26:04 qui répondent à cette histoire-là.
26:07 On est là dans des monnaies qui sont, si ce n'est des flationnistes,
26:11 enfin des actifs, hein,
26:12 beaucoup de gens ne veulent pas appeler ça une monnaie,
26:14 comme on dirait, en tout cas, très faiblement inflationniste.
26:17 Donc voilà, alors, il y a probablement une prise de conscience
26:20 à un moment donné,
26:21 où le dollar reste la monnaie centrale, la monnaie de réserve,
26:25 mais perd un petit peu quand même.
26:27 Et un moment où des conflits géopolitiques montrent
26:29 qu'il y a d'autres systèmes alternatifs qui se dessinent.
26:32 Donc quelque part, il y a des questions qui se posent,
26:35 qui ne se posaient pas il y a 20 ans, 30 ans.
26:37 Voilà.
26:38 - De toute façon, on verra, je crois que le Zimbabwe lance une monnaie dollar...
26:42 Alors, ils ont connu de l'inflation à quatre chiffres,
26:44 au Zimbabwe, donc voilà.
26:45 - C'est pour les années records.
26:47 - Oui, c'est ça.
26:48 Ça reste un cas d'école, ce point de vue-là.
26:49 - Il y en a d'autres, mais eux, ils sont pas mal.
26:50 - Et donc, ils lancent un dollar baquet, adossé sur l'or, justement.
26:54 On verra ce que ça donne.
26:56 Sur l'or, je ne sais pas, quel est le message un peu macro,
26:58 même que vous retirez, ou monétaire, je ne sais pas,
27:01 vous retirez de la hausse de l'or, aujourd'hui, en ce moment, Julien Piat.
27:05 - Ce soir, on a pas mal parlé, effectivement, d'histoire.
27:08 Et c'est vrai que c'est intéressant, parce que, grosso modo,
27:10 depuis le début des années 70, on est dans un domaine,
27:13 dans un système financier dominé par le dollar et le crédit.
27:17 Est-ce que tout le monde est heureux avec ce système aujourd'hui ?
27:20 On a l'impression qu'il y a un certain nombre de banques centrales,
27:22 du côté, on peut penser, une grande banque centrale du côté de l'Asie,
27:25 qui verraient bien un autre système monétaire à l'échelle de la planète.
27:30 Et on voit, dans les facteurs de force de l'or sur les derniers mois,
27:35 il y a pas mal d'achats de la part de ces banques centrales.
27:37 Donc, on a parlé un peu de géopolitique.
27:40 Tout ça pourrait, dans les années à venir, évoluer.
27:45 - Pour asseoir la crédibilité d'un autre système monétaire,
27:48 ou d'un système basé sur des devises différentes que le dollar ?
27:54 - Certains peuvent faire l'analyse que les régulations financières
27:58 qu'on a eues à partir des années 70, la forte croissance du crédit,
28:01 a généré pas mal de crises.
28:03 Et donc, un autre système pourrait être plus stable.
28:06 Alors, il aurait aussi ses défauts, comme on l'avait connu auparavant.
28:10 Mais certains pourraient, voilà, ça peut être partie des éléments
28:14 qui amènent certains acteurs à acheter de l'or.
28:17 - Juste un petit commentaire. - Bien sûr, bien sûr.
28:19 - Mais concrètement, c'est vrai que ça fait déjà pas mal de temps
28:22 que la Banque de Chine fait des achats réguliers, massifs, d'or physique.
28:27 - C'est pas la seule, mais oui, bien sûr.
28:29 - Et essayent, à mon sens, un peu de, comment dirais-je, d'optimiser ces achats.
28:33 Parce qu'on a un cours de l'or qui, finalement, n'a pas énormément bougé,
28:36 malgré tout, depuis quelques années. - Ah non ?
28:39 - Là, on a une phase, quelque part, à mon sens, de rattrapage.
28:42 Mais on sait que ce sont des acheteurs réguliers.
28:44 Bon, la Chine, qui est, d'un autre côté, en même temps, une économie hyper léfrégiée,
28:49 très endettée aussi.
28:51 Donc, tout ça est assez compliqué à comprendre.
28:54 Mais on a des acheteurs, effectivement, importants du métal.
28:59 - Bon, en tout cas, il y a les minières derrière.
29:01 Céline, si vous voulez réagir, bien sûr.
29:03 - Oui, non, non, mais effectivement, ce qui est important de voir,
29:06 c'est que je crois que depuis 1945, c'était 40% des réserves des banques centrales
29:11 qui étaient en or, en moyenne, et on est tombé à 15.
29:14 - D'accord.
29:15 - Et donc, effectivement, on est en train de remonter vers les 20,
29:17 mais on est loin des 40 qu'on avait en moyenne.
29:20 Et effectivement, c'est très massivement une demande qui vient des pays émergents.
29:23 Enfin, émergents.
29:24 Qui représentent maintenant, si on prend les BRICS,
29:28 enfin, les BRICS élargis, on doit être à 37% du PIB mondial.
29:31 Donc, en fait, effectivement, aujourd'hui, ils sont en train de nous envoyer le signal
29:35 que peut-être qu'ils n'ont pas besoin d'avoir notre devise,
29:37 surtout à un moment où, géopolitiquement...
29:39 - En même temps, quand on vend des produits aux États-Unis, on récupère...
29:43 - Oui, mais c'est vrai que le message qui a été envoyé à la Russie, il était très clair.
29:47 - Ah, ça, oui.
29:48 - Voilà, donc, effectivement...
29:49 - Ah, bien, un an après.
29:50 - Ben, voilà.
29:51 - Donc, on peut, maintenant, et ça a quand même fait peur...
29:53 - On peut saisir des actifs du Banque centrale.
29:55 - Et après, il faut aussi avoir en compte que, pour l'or, on a la moitié de la demande
29:58 qui vient quand même de la joaillerie.
30:00 Donc, effectivement, il y a les trackers.
30:02 Les trackers, or, pour le coup, il n'y a aucune demande.
30:04 Donc, on voit bien que...
30:06 Alors, est-ce que ça a été remplacé par la demande dans les pays développés pour les bitcoins ?
30:10 Peut-être.
30:11 - Il n'y a pas de flux sur les trackers.
30:12 - Non.
30:13 - Donc, c'est ailleurs que ça s'achète.
30:14 - En tous les cas, on n'a pas une spéculation financière frénétique sur l'or.
30:18 - D'accord. - On a une demande de la part des banques centrales.
30:21 Et après, l'autre grand moteur, c'est le fait qu'on a de la joaillerie.
30:25 Et la joaillerie, c'est qui ?
30:26 C'est pareil, encore.
30:27 C'est les Indiens et les Chinois qui consomment massivement de l'or
30:31 comme valeur refuge lors des mariages, des fêtes, etc.
30:34 Et quand on regarde, par exemple, les chiffres du Nouvel An chinois,
30:38 je crois que la progression des ventes de joaillerie, c'est 22 % cette année, en 2024.
30:43 Donc, on a vraiment un appétit très fort dans ces pays pour l'or comme valeur,
30:48 pour transmettre de l'argent dans le temps.
30:50 Et ça, c'est culturel.
30:51 Et comme c'est une population qui est beaucoup plus importante maintenant
30:55 que la population de petits pays développés,
30:57 finalement, je crois que les États-Unis et l'Europe,
31:00 on va se retrouver à 15 % de la population mondiale,
31:03 forcément, il faut quand même regarder ce que font les autres populations
31:07 pour investir leur épargne sur le long terme.
31:09 Et donc, l'or en fait partie.
31:11 - C'est sûr que les Chinois, après l'immobilier, après la bourse,
31:15 je crois qu'effectivement l'or peut être...
31:18 - Mais il n'y a pas que eux, il y a les Indiens aussi.
31:20 - Les Indiens, historiquement, oui, la joaillerie, effectivement,
31:22 il y a une vraie utilité physique de l'or, notamment dans ces pays-là.
31:28 De l'or à la question des déficits et de la dette,
31:32 là aussi, Julien Piat, je voulais bien avoir votre éclairage.
31:35 C'est le sujet permanent d'attention.
31:37 Alors, on peut regarder les déficits américains,
31:40 on peut regarder l'Europe et la France ou l'Italie,
31:43 qui s'attend à une procédure de déficit excessif.
31:48 Le marché semble dire, pour l'instant, vous avez le temps.
31:52 Il n'y a pas de panique de marché, en tout cas sur ces sujets-là.
31:56 Même peut-être une forme de bienveillance.
31:58 - Oui, les marchés... - Comment ça s'explique ?
32:00 - Parce que la croissance reste bien orientée, que...
32:05 Voilà, et puis en Europe, les marchés se disent que,
32:08 de toute façon, à un moment, la BCE interviendra pour caper les spreads.
32:13 Donc, le sujet n'est pas là.
32:15 Mais c'est vrai que, quand on y réfléchit en tant qu'économiste,
32:19 on voit des déficits qui sont à 5, 6, 7 % suivant les pays, au plein emploi.
32:26 Donc, ça veut dire que le risque, ça sera au prochain retournement cyclique
32:32 si ces déficits prennent encore 3, 4 points.
32:36 On se retrouvera à des niveaux vraiment très importants.
32:39 Des questions sur les perspectives de croissance.
32:42 Si on est en récession, est-ce qu'on rebondira autant ?
32:45 Et là, peut-être que les inquiétudes pourraient se matérialiser.
32:47 Après, aux États-Unis, tout le monde sait qu'il y a la fête in fine.
32:51 Mais voilà, on en revient à cette question du dollar, de la confiance...
32:54 - Oui, c'est ça. Ça nous ramène à l'or.
32:56 Il y a cette défiance un peu qui se traduit à travers la hausse des...
32:59 - C'est clair qu'il y a un sujet budgétaire aux États-Unis.
33:02 - Quand on regarde les prévisions du long terme du CBO,
33:04 on peut faire discuter les prévisions de croissance,
33:07 mais on est quand même sur des niveaux qui ne sont pas soutenables.
33:09 - Comment on se positionne dans ce contexte de marché,
33:13 après un très bon premier trimestre pour les actifs risqués,
33:16 dans une gestion diversifiée ?
33:18 Quels vont être pour vous les enjeux des prochains mois ?
33:21 Et comment on s'équilibre ?
33:23 - Au sein de la poche action, ce qu'on a plutôt fait,
33:26 c'est effectivement d'aller hors des États-Unis,
33:29 parce que le marché américain, même si vous enlevez la tech,
33:32 vous êtes quand même à 18 fois des résultats prospectifs
33:34 sur des hypothèses de croissance assez fortes.
33:37 Donc, ça fait quand même cher.
33:39 Vous regardez, comparez ça aux 20 dernières années.
33:42 En Europe, on a commencé à se réexposer sur les petites capitalisations.
33:47 On peut les oublier des 2-3 dernières années.
33:51 Et on parle, voilà, cycle manufacturier,
33:53 c'est quand même des valeurs qui peuvent bénéficier dans cet environnement.
33:58 - 24 doit voir une amélioration de ce segment de marché ?
34:02 - Alors nous, nos questionnaires spécialisés sur cette classe d'actifs,
34:06 disent que les entreprises commencent à dire
34:08 qu'on peut les excès qu'on avait pu avoir,
34:12 ou les problèmes de stock sont en train d'être résolus,
34:16 et que, en tout cas, les attentes du marché sont très prudentes.
34:20 Donc ça, c'est intéressant.
34:22 Au niveau de la poche obligataire,
34:24 on a remis des protections contre la hausse des taux américains.
34:28 On a réaugmenté nos expositions au dollar,
34:30 parce que, voilà, si les taux américains montent plus qu'en Europe,
34:33 normalement, au moment, le dollar devrait s'apprécier.
34:37 - S'apprécier encore plus.
34:38 Ça va mettre de la pression, quand même, ça.
34:40 - Sur qui ?
34:41 - Je ne sais pas, sur peut-être le Yen japonais, par exemple,
34:44 sur d'autres devises.
34:45 - Oui, le Yen aussi, ça c'est...
34:46 - Un dollar encore un peu plus fort qu'il ne l'est déjà,
34:49 sur des parités qui sont déjà le Yen japonais.
34:53 Voilà, on voit que...
34:54 - Oui, le Yen, c'est aussi une des positions longues qu'on a,
34:57 parce que, voilà, en valorisation, c'est très bas.
35:02 Parité de pouvoir d'achat, etc.
35:05 À notre avis, les marchés ont été un peu...
35:09 ont eu une lecture très doviche de la BOJ,
35:11 parce que, je pense, la BOJ ne voulait pas créer de secousse.
35:16 - Mais l'histoire n'est pas finie.
35:18 - Voilà, dans une optique de normalisation.
35:20 - Je crois que quelques commentaires de Kajio Ueda, ces dernières heures,
35:23 le gouverneur de la Banque centrale du Japon,
35:25 ont redonné peut-être un peu d'allant à l'idée
35:27 qu'il y aurait peut-être plus qu'une seule hausse d'auto-intérêts.
35:30 - Donc on pense que sur le Yen, on peut avoir aussi des choses intéressantes.
35:34 - Qu'est-ce qui vous intéresse en ce moment, Céline ?
35:36 - Effectivement, je suis tout à fait d'accord sur le fait
35:38 que le Yen peut être la grande surprise de l'année,
35:40 et donc que ce n'est pas idiot, par rapport à ça,
35:44 d'aller chercher des sociétés domestiques japonaises.
35:47 Parce que jusqu'à présent, on jouait le Nikkei en jouant les exportatrices.
35:52 Mais donc là, plutôt aller chercher des sociétés qui sont exposées à la consommation domestique.
35:58 - Et qui ne souffriraient pas de la hausse du Yen.
36:00 - Ah bah non, parce que si vous prenez des sociétés domestiques,
36:03 des pharmacies, des commerces de détail au Japon,
36:07 ils ne sont pas du tout exposés à ce qui va se passer.
36:09 Donc ça, ça peut être très intéressant, parce que là, vous avez des sociétés,
36:12 c'est quand même un marché, le marché japonais qui a été délaissé pendant 30 ans,
36:15 donc il y a quand même des choses à regarder.
36:17 Donc ça, ça peut être intéressant, et en plus, vous pouvez avoir la hausse de la devise en même temps.
36:21 Donc ça, ça me semble un truc intéressant.
36:23 On a parlé beaucoup tout à l'heure de l'or,
36:26 mais comme vous le savez, les mines d'or n'ont rien fait cette année,
36:29 elles sont toujours en baisse.
36:31 - Depuis le début de l'année ? - Ouais.
36:33 - Toujours en baisse, donc elles ont progressé depuis un mois,
36:35 mais il y a quand même quelque chose qui ne fonctionne pas complètement.
36:37 - Il y a un petit décalage entre la hausse des cours de l'or et le marché d'or.
36:40 - Ça semble assez facile quand même d'aller chercher ces sociétés-là,
36:43 parce que c'est évident de penser qu'il va y avoir une augmentation du cash
36:46 qui va être généré par ces entreprises,
36:48 donc ça, c'est une idée qui me semble intéressante.
36:50 Et puis après, effectivement, plutôt pareil, ce que je disais tout à l'heure,
36:54 les sociétés sur l'énergie, l'industrie en Europe et en dehors.
36:58 Et ce dont je n'ai pas parlé, oui, on parlait aussi des matières premières,
37:01 mais on n'a pas parlé des pays émergents,
37:03 mais je pense toujours qu'il y a quand même des choses à faire en dehors de l'Inde,
37:07 qui est le pays le plus cher aujourd'hui avec les États-Unis.
37:11 - Et c'est quoi en dehors de l'Inde ?
37:13 - Vous avez l'Amérique du Sud, il y a l'Asie, la Chine bien sûr,
37:18 mais aussi l'Indonésie, enfin tout l'axe asiatique qui me semble intéressant.
37:24 Donc ça, je pense qu'il y a beaucoup de choses à faire,
37:26 et c'est des pays qui étaient surexploités avec les BRICS il y a 20 ans
37:31 et qui sont aujourd'hui complètement sous-regardés.
37:34 - Oui, bien sûr.
37:35 - Donc ça me semble intéressant de les regarder.
37:37 - Yves, qu'est-ce qui peut vous paraître intéressant dans ce marché ?
37:40 On a parlé de l'or bien sûr, des matières premières,
37:43 l'idée des small and mid-cap, je ne sais pas.
37:46 - Oui, oui.
37:47 - Il y a un alignement quand même à un moment qui fait que…
37:50 - Ce qui manque, parce que c'est flagrant en fait la décroche.
37:53 - Ah ben c'est l'éléphant dans la pièce d'une carte de la valorisation.
37:56 - C'est flagrant entre ce qui se passe dans le long côté,
37:59 qui est vraiment le domaine à la mode depuis deux, trois ans,
38:01 et qui a en fait capté des flux, et qui empêche,
38:04 et qui a tiré des flux du compartiment côté, ce qui est un paradoxe.
38:08 Et donc là, il y a d'ailleurs…
38:10 - Il y a une prime d'illiquidité et une décote de liquidité sur ce segment mid-market.
38:14 - Là aussi on marche sur la tête.
38:16 Et donc il manque plus que quoi,
38:19 c'est ce qui n'arrive pas pour l'instant ou peu,
38:22 quoique on a des petits signes là aussi d'argent qui arrive
38:25 sur des produits indexés small cap,
38:28 c'est des flux, des flux qui pourraient corriger.
38:31 Il faut faire attention parce que ça peut être très rapide en fait.
38:35 - On a eu une petite répétition en fin d'année,
38:38 sur quelques semaines on a vu que ça pouvait effectivement être violent.
38:41 - On a vu dans le sillage de ce qui s'était passé sur le Russell aux Etats-Unis
38:44 à partir d'octobre-novembre, puis ça s'est estompé.
38:47 Donc ça c'est un segment intéressant.
38:49 Sinon en termes actions sectorielles, pour aller à l'essentiel,
38:52 moi je regarde les idées de croissance de long terme,
38:56 certes peut-être chères à très court terme,
38:59 je vais parler de cybersécurité, qui reste dans les domaines tech,
39:02 et puis à plus court terme, là je rejoins Céline,
39:05 c'est que, en plus on est sur une sorte de barbelle en termes de gestion actions,
39:10 avec des secteurs liés aux matières premières, au pétrole,
39:14 acteurs dans le pétrole, sur les services pétroliers,
39:17 qui montrent techniquement des signaux très intéressants,
39:20 et puis des sociétés minières, qui effectivement, pour pas mal d'entre elles,
39:24 affichent des retards assez forts par rapport aux sous-jacents en matières premières,
39:29 sur les métaux précieux, mais aussi sur d'autres valeurs minières.
39:35 - Ça fait partie des secteurs en retard.
39:37 Merci beaucoup, merci à vous trois d'avoir été des invités de Planète Marché ce soir.
39:40 Yves Maillot, président de YAM Capital,
39:42 Julien Pierre-Nouan, directeur des études économiques et de la gestion diversifiée de Lazare Frères Gestion,
39:46 et Céline Picmal-Prad, présidente de Picmal Auton Investments.

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