Natalia Pouzyreff, députée Renaissance des Yvelines
Elle fait partie de ces députés venus de la société civile qui se sont engagés pour Emmanuel Macron en 2017. Dans sa "vie d'avant", Natalia Pouzyreff s'occupait de systèmes lasers et d'hélicoptères.
Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !
Elle fait partie de ces députés venus de la société civile qui se sont engagés pour Emmanuel Macron en 2017. Dans sa "vie d'avant", Natalia Pouzyreff s'occupait de systèmes lasers et d'hélicoptères.
Pourquoi s'engage-t-on en politique ? Comment tombe-t-on dans le grand chaudron de l'Assemblée ?
Chaque jour, Clément Méric, dans un entretien en tête à tête de 13 minutes, interroge un parlementaire sur les personnalités, les évènements - historiques ou personnels - qui l'ont conduit à choisir la vie publique.
Car on ne naît pas politique, on le devient !
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00:00 -Elle fait partie de ces députés venus de la société civile
00:03 avec Emmanuel Macron en 2017.
00:05 Dans sa vie d'avant,
00:07 elle s'occupait de systèmes lasers et d'hélicoptères.
00:10 Musique intrigante
00:12 ...
00:24 Bonjour, Nathalia Poudsireff. -Bonjour.
00:27 -En février 2023, vous êtes penchée sur les capacités de la France
00:31 à faire face à des attaques aériennes du même type
00:34 que celles subies par l'Ukraine aujourd'hui
00:36 dans sa guerre face à la Russie.
00:38 Vous avez montré une connaissance assez pointue
00:41 des systèmes de missiles français. On va voir ça en image.
00:45 -En ce qui concerne le Nazam,
00:47 ce n'est pas tout à fait le même système.
00:49 Alors, on le classe en longue portée, parfois,
00:52 parce que c'est un missile qui est plus longue portée,
00:55 mais pas plus longue portée. Au contraire, il intervient...
00:58 Il peut intercepter des cibles
01:00 plutôt à basse altitude,
01:03 ou disons moyenne altitude,
01:05 contrairement aux Patriotes et aux Samte-Mamba,
01:09 qui, eux, ont un intercepteur moyenne haute altitude.
01:14 -C'est un rapport que vous avez co-rédigé
01:16 avec votre collègue Jean-Louis Thiriot
01:18 et qui a un peu secoué le milieu de la défense
01:21 parce que vous avez pointé plusieurs failles importantes
01:24 comme Sol-Air. Ce qui m'a frappé dans votre présentation,
01:27 c'est à quel point vous semblez connaître ces différents
01:30 systèmes de missiles. Quand on se penche sur votre CV,
01:33 on comprend mieux pourquoi ces missiles,
01:36 vous avez un peu participé à leur fabrication
01:38 pendant pas mal de temps. Vous avez travaillé 17 ans
01:41 chez Thalès, c'est ça ? -17 ans chez Thalès,
01:44 8 ans chez Airbus.
01:46 Je suis ingénieure de formation, donc on se refait part.
01:49 C'est un fil que j'ai tiré jusqu'à l'Assemblée nationale,
01:52 où je siège à la Commission de la défense.
01:54 -Quand vous étiez chez Thalès, vous faisiez quoi en tant qu'ingénieure
01:58 spécialisée dans l'optique ?
02:00 -J'ai commencé dans les études,
02:02 et très vite, je suis allée sur les manipulations terrain,
02:05 les expérimentations terrain,
02:07 et ensuite, je suis passée, je dirais,
02:10 à la coopération internationale.
02:12 -Ca, c'était notamment chez EADS.
02:15 Vous avez travaillé 8 ans chez EADS,
02:18 notamment en Chine, sur le programme Eurocopter.
02:22 -Tout à fait, et donc, la coopération industrielle,
02:26 la coopération internationale,
02:28 c'est vraiment un sujet qui me passionne,
02:32 comment on rapproche, effectivement,
02:34 les différents intérêts, comment on fait converger les équipes,
02:38 tout ça dans un environnement où on est dans du biculturel,
02:42 et où il faut essayer de comprendre aussi
02:45 les ressorts de chaque partie.
02:48 -Vous faites partie, je le disais,
02:50 des personnes venues de la société civile,
02:52 qui ont été séduites par Emmanuel Macron en 2017.
02:55 Au-delà de vos compétences dans le secteur de la défense,
02:58 qu'est-ce que vous pensez avoir apporté à la politique
03:02 qui fait souvent défaut aux élus qui sont passés
03:05 par un parcours militant un peu plus classique ?
03:08 -Alors, je crois qu'en tant que femme, déjà,
03:12 avec cette conscience aiguë qu'il ne faut pas laisser la place
03:16 qu'aux hommes dans les lieux de pouvoir,
03:18 ça, c'était déjà un accomplissement.
03:20 -C'est quelque chose que vous avez pu vivre
03:23 dans le secteur où vous avez travaillé ?
03:25 -Un milieu d'hommes dans lequel on peut se faire sa place,
03:28 mais il faut toujours se battre et insister
03:31 pour que les femmes soient dans la place où se décide le pouvoir.
03:34 Donc, la politique, c'est bien sûr l'endroit idéal
03:37 pour faire entendre sa voix.
03:39 Et puis, sinon, venant de la société civile,
03:44 mais je suis qu'une maman, j'ai trois enfants,
03:46 j'ai été déléguée de parents d'élèves pendant longtemps,
03:50 donc je pense que j'apportais aussi à ce qu'il fait ma personne.
03:53 J'ai vécu à l'étranger.
03:55 -Il y a une phrase, le soir de votre élection,
03:57 qui m'a interpellée. "Nous avons envie d'avoir des élus
04:00 "qui nous ressemblent." C'est pour ça que j'ai été élue,
04:03 parce que je suis comme vous.
04:05 Les élus plus classiques, on va dire,
04:07 ils ressemblent moins à leurs électeurs.
04:10 Il y a une déconnexion qui peut se faire
04:12 au fil du temps ?
04:13 -Alors, déconnexion, je ne suis pas très critique là-dessus.
04:17 Il était impératif que l'on ait un véritable renouvellement
04:20 du visage de la politique, à ce moment-là.
04:22 C'est ce qu'a apporté Emmanuel Macron.
04:25 Ne serait-ce que de faire entrer 50 % de femmes
04:28 à l'Assemblée, disons, au moins au sein du parti
04:32 La République en marche, à ce moment-là,
04:35 nous étions 50 %.
04:36 C'était fondamental d'avoir autant de femmes,
04:39 une parité en politique,
04:41 et c'est une valeur que nous avons portée.
04:43 Et puis un renouvellement aussi de génération,
04:46 de très jeunes députés qui ont été élus,
04:49 et aussi de la mixité, de la diversité.
04:52 -En 2019, vous vous êtes présentée
04:54 pour devenir présidente de la Commission de la Défense.
04:57 Vous avez les compétences là-dessus,
04:59 il n'y a pas de doute, sauf que vous n'avez pas été élue.
05:03 Est-ce que ce n'est pas le point faible
05:05 des élus venus de la société civile
05:07 quand il s'agit de faire de la politique,
05:09 comme on dit, c'est un peu plus compliqué ?
05:12 -Alors, je pense que ça, c'est lié à ma campagne,
05:15 qui n'était pas forcément très bonne.
05:17 Je me remets plus en question.
05:19 -Pas très bonne, pourquoi ? Par manque d'expérience, justement,
05:22 par rapport à ceux qui ont enchaîné des mandats ?
05:25 -Voilà. D'avoir peut-être un peu plus de difficultés
05:29 à aller vers, à faire de la retape, voilà.
05:32 -A faire de la politique. -C'est vrai, c'est vrai.
05:35 Je reconnais que c'est un...
05:38 Dans mes traits de caractère,
05:40 où je suis peut-être moins dans la communication que d'autres.
05:43 -Alors, l'Assemblée compte, je crois,
05:46 plus de 150 groupes d'amitié avec d'autres pays
05:48 et vous présidez aujourd'hui le groupe France-Russie.
05:52 J'ai bien dit "groupe France-Russie"
05:54 car je crois que vous avez retiré le mot "amitié".
05:56 -Voilà. Lors de l'instauration de ce groupe,
06:00 effectivement, les événements du 24 février 2022
06:03 s'étaient déjà produits et pour moi, c'était clair.
06:06 Il faut choisir son camp et, bien sûr,
06:09 nous sommes en soutien à l'Ukraine
06:12 et nous dénonçons l'invasion brutale
06:15 par la Russie.
06:16 Donc, il s'agissait quand même de garder, si possible,
06:20 un lien avec la société civile,
06:23 si tant est qu'il y en ait une en Russie,
06:25 à travers les contacts que je peux avoir
06:27 avec les journalistes en exil.
06:29 -A quoi sert ce groupe dans le contexte de cette guerre ?
06:32 Maintenez-vous des liens avec les institutions russes,
06:35 avec le Parlement russe ?
06:37 -Avec les institutions russes,
06:39 nous avons parfois des échanges de courrier,
06:41 mais je dirais que c'est un dialogue de sourds.
06:44 Les liens diplomatiques n'étant pas rompus,
06:47 effectivement, la Douma nous adresse des courriers
06:50 et nous...
06:52 En tout cas, personnellement,
06:54 je sollicite parfois les institutions russes
06:57 pour qu'elles libèrent les prisonniers politiques.
07:00 Mais la situation est compliquée.
07:02 En plus, nos homologues sont sous sanction,
07:05 donc on n'a pas prévu de faire un déplacement
07:08 ou de rapprocher forcément les points de vue.
07:10 -Votre travail consiste en quoi ?
07:12 -On interpelle les institutions,
07:14 sinon, voilà, soutenir les journalistes russes en exil,
07:17 c'est-à-dire qu'il faut qu'on leur accorde
07:20 un statut sécurisant et qu'on leur permette de travailler.
07:23 C'est important de lutter contre la propagande du Kremlin.
07:26 C'est dans ce sens-là qu'on leur apporte un soutien.
07:29 -Là, on vous voit avec... -Oui,
07:31 aussi avec Anna Colin-Lebedev et Tatiana Jean,
07:34 qui sont des chercheuses
07:37 de l'université de Nanterre
07:39 et à l'IFRI.
07:41 Et donc, si vous voulez, c'est important
07:43 de rester toujours éclairés sur ce qui se passe en Russie.
07:47 Donc, c'est ce que propose ce groupe,
07:49 c'est de recevoir, d'auditionner des personnalités
07:53 qui peuvent nous renseigner sur la situation politique en Russie.
07:57 -Vous êtes avec une journaliste russe qui a fait parler d'elle.
08:01 -Qui a fait parler d'elle, Marina Ossiannikova,
08:04 qui a porté sur un plateau en plein direct
08:07 le panneau "No war",
08:09 "Non à la guerre",
08:11 et qui a dû fuir l'armée en catastrophe.
08:14 -Vous portez un nom et un prénom à consonance russe.
08:18 Vous avez des racines russes ?
08:20 -Tout à fait. Donc, mon grand-père était un Russe blanc
08:24 qui a émigré en 1920,
08:28 21 après quelques années très difficiles de guerre civile,
08:33 qui a émigré en France.
08:36 Et donc, voilà, j'ai un attachement,
08:40 bien sûr, sur la Russie,
08:42 mais sans fantasme,
08:43 parce que j'ai eu l'occasion d'y voyager
08:46 assez souvent dans les années 90,
08:48 et je sais à quoi m'en tenir.
08:50 -Depuis 2017, vous ne vous êtes pas seulement investie
08:54 sur les questions de défense ou les sujets liés à la Russie,
08:57 vous êtes aussi attaquée à un problème
08:59 qui se posait dans votre circonscription,
09:02 vous avez été rapporteure d'une proposition de loi
09:05 qui a été adoptée en 2018.
09:06 C'est une loi qui est souvent citée
09:08 comme un exemple de co-construction législative.
09:11 Pouvez-vous expliquer ce que c'est que la co-construction ?
09:15 -Absolument. C'était une innovation,
09:17 c'était la première proposition de loi
09:19 vraiment issue des parlementaires,
09:22 qui était confrontée à ces problématiques,
09:24 que ce soit dans la ruralité ou en ville.
09:27 Et nous avons alerté le ministère de l'Intérieur,
09:31 le ministère de la Justice.
09:32 On n'a pas eu de réponse tout de suite,
09:35 mais au bout de deux, trois mois,
09:37 on a vu que le sujet était un marqueur assez fort,
09:40 et on a pu travailler, co-construire
09:42 cette proposition de loi véritablement,
09:44 parce qu'il y a des aspects.
09:46 -Co-construire, c'est donc le Parlement et le gouvernement,
09:49 le législatif, l'exécutif,
09:51 qui travaillent main dans la main pour élaborer un texte de loi.
09:55 Ca semble relever du bon sens,
09:57 sauf qu'en France, c'est pas si fréquent que ça.
10:00 Est-ce que vous l'expliquez ?
10:01 -Justement, ça peut être un regret.
10:04 Je sais que je pousse toujours pour cette co-construction.
10:07 Il faut que les ministres s'emparent bien de cette idée
10:12 que les parlementaires,
10:14 dans leur vie ici, à l'Assemblée,
10:16 mais aussi sur le terrain,
10:17 sont des relais tout à fait utiles et pertinents
10:20 pour porter des sujets...
10:22 -Il y a un manque de confiance de l'exécutif
10:24 dans le législatif ? -Ca dépend des ministères.
10:27 Je sais qu'on a des réponses
10:30 ou des non-réponses variables,
10:32 mais voilà.
10:34 Ca dépend beaucoup des personnalités
10:36 qui sont à la tête du ministère et de leur cabinet.
10:39 Je peux dire qu'à travers les différents ministres
10:42 qui sont succédés au ministère de l'Intérieur,
10:45 il y a toujours eu une grande écoute.
10:47 -Il y a un autre point intéressant sur cette loi.
10:50 Au bout de deux ans, vous avez fait un bilan
10:52 avec votre collègue Robin Reda pour voir ce qui marche
10:56 et ça, les Français le savent pas toujours,
10:58 mais ça fait partie du travail des députés.
11:00 -Bien sûr. L'évaluation des lois
11:02 est quelque chose d'essentiel,
11:04 parce que nous n'avons pas la prétention
11:06 d'avoir fait une loi parfaite au départ,
11:09 et donc il faut voir si l'arsenal législatif
11:11 est suffisant, si l'outil convient,
11:14 voir s'il n'y a pas des impasses,
11:16 et ça nous a permis de l'améliorer au fil de l'eau
11:18 lorsqu'il y avait des lois sur la sécurité
11:21 qui se présentaient, en proposant des amendements.
11:24 -Des mesures complémentaires.
11:25 Et nous avons été à l'écoute des professionnels,
11:28 savoir ce qu'ils en pensaient,
11:30 et ça, c'est un retour qui est essentiel.
11:33 On ne va pas légiférer en aveugle, personne ne le fait,
11:36 mais c'est bien, après trois ans, de faire un bilan.
11:39 -On va terminer avec notre quiz habituel.
11:41 Vous allez devoir compléter les phrases
11:44 que je vais vous proposer. On y va.
11:46 Si tous les députés se mettaient au yoga...
11:48 -Ah ! Je serais ravie.
11:51 Je suis moi-même une grande adepte de yoga.
11:54 -Ca changerait l'ambiance dans l'hémicycle ?
11:56 -Je pense, et j'aimerais bien,
11:58 parce que je trouve que les débats sont parfois trop agités
12:01 et que l'on perd ses nerfs et qu'on est dans l'immédiateté.
12:05 C'est pas seulement une question de respect, de brouhaha,
12:08 c'est une question de se recentrer sur ce qui est important.
12:11 -Recentrer.
12:13 On sent la pratte, celle qui fait du yoga.
12:16 Quand on a été prof en lycée, siégé dans l'hémicycle...
12:20 -Eh bien, écoutez, je trouve que...
12:23 -Vous avez été prof en lycée
12:25 pendant quelques temps. -En professeur.
12:27 J'ai été prof de sciences physiques pendant quelques années.
12:31 Je trouve que c'est plus difficile d'être enseignant que député.
12:34 -Pel hommage aux enseignants.
12:36 Enfin, comme on dit en Russie...
12:38 Je vous laisse compléter. Vous parlez un peu le russe ?
12:41 -Ah, немножко.
12:43 "Oshin plora". On dit "do svidaniya" ou...
12:46 -Ca veut dire "au revoir".
12:48 J'ai révisé les mots. Avant, j'ai pas compris.
12:50 -Je parle très mal le russe.
12:52 -D'accord. Bon, quand même. Ca fait son effet.
12:55 Merci beaucoup, Nathalia Puzirev, d'être venue dans "La politique et moi".
12:59 -Merci.
13:01 SOUS-TITRAGE : RED BEE MEDIA
13:04 Générique
13:05 ...
13:21 [SILENCE]