SMART IMPACT - Emission du mercredi 27 mars

  • il y a 6 mois
Mercredi 27 mars 2024, SMART IMPACT reçoit Alexandre Bodin (fondateur, Logiscopia) , Clara Calipel (chercheuse spécialiste des investissements climat européens, I4CE) et Sigrid Farvacque (responsable développement commercial France, Biolectric)

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Transcript
00:00 [Musique]
00:08 Bonjour à toutes et à tous, bienvenue, c'est Smart Impact, l'émission de la transformation environnementale et sociétale de notre économie.
00:14 Et voici notre sommaire du jour.
00:16 Mon invité, c'est Alexandre Baudin, fondateur du bureau d'études de Logiscopia.
00:21 Il publie "L'habitat permacol", le guide pratique de la maison écologique et autonome.
00:26 Dans le zoom de notre émission, on verra quels investissements sont nécessaires en Europe
00:30 si l'on veut atteindre ses objectifs de réduction de 55% des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.
00:37 Et puis dans notre rubrique "Smart Ideas", la bonne idée du jour,
00:40 aller signer Biolectric avec ses micro-méthaniseurs installés dans les élevages de vaches laitières.
00:46 Voilà pour les titres, on a 30 minutes pour les développer. C'est parti !
00:49 [Musique]
00:56 L'invité de Smart Impact, c'est Alexandre Baudin. Bonjour.
01:00 Bonjour Thomas.
01:01 Bienvenue, vous êtes le fondateur du bureau d'études de Logiscopia.
01:04 Vous publiez "L'habitat permacol", le guide pratique de la maison écologique et autonome.
01:08 C'est aux éditions Erol.
01:11 Peut-être une présentation de ce livre en quelques mots pour commencer.
01:14 Pourquoi vous l'avez écrit ? A qui il s'adresse ?
01:16 Alors du coup, "L'habitat permacol", c'est une nouvelle catégorie d'habitat.
01:19 Il va se focaliser principalement, comme le nom l'indique dans le titre, sur les aspects écologiques et autonomes de l'habitat.
01:27 Donc il s'adresse principalement aux étudiants, tout type de métier qui peut être lié à l'habitat,
01:33 c'est-à-dire aussi bien des ingénieurs du bâtiment, des architectes, mais aussi des agronomes ou des paysagistes,
01:38 qui ont envie de pratiquer différemment leur métier.
01:41 Donc il s'adresse principalement à la catégorie des bifurqueurs,
01:44 en montrant qu'il est possible aujourd'hui de créer des habitats professionnels qui sont réellement écologiques.
01:49 Aujourd'hui, c'est une préoccupation qui commence à prendre de la place, qui est ultra marginale.
01:55 Comment vous la situez dans cet univers ?
01:58 Alors nous, ça fait dix ans qu'on travaille sur l'habitat permacol.
02:02 Alors clairement, c'est un habitat qui était essentiellement alternatif il y a encore une dizaine, quinzaine d'années.
02:10 Aujourd'hui, notamment depuis la période Covid, on voit qu'il y a un intérêt qui est grandissant.
02:14 La limite qu'on va trouver, clairement, aujourd'hui, c'est d'un point de vue professionnel.
02:18 On a du mal à trouver des personnes qui sont formées pour ce type d'habitat.
02:22 Donc c'est la grande raison de la publication de ce livre, c'est de donner les clés
02:26 pour justement former de nouvelles personnes à prendre leur relais sur nos activités.
02:30 Alors évidemment, les deux sont liés, mais on va détailler un peu écologique et autonome.
02:35 Si vous deviez définir une maison écologique, sur quoi ça repose ?
02:39 Qu'est-ce qui peut rendre un habitat plus écologique qu'un autre ?
02:43 Alors là, vous posez vraiment la bonne question.
02:45 Aujourd'hui, on parle d'habitat écologique, d'habitat autonome, et on ne sait pas les caractériser.
02:49 Je mets un panneau photovoltaïque sur mon toit, je suis écologique, en tout cas je suis autonome,
02:53 et je fais une isolation peut-être par l'extérieur, je suis écologique.
02:57 Donc le problème est un petit peu plus complexe, et c'est pour ça que nous, dans notre modèle d'habitat,
03:00 on travaille sur 12 axes. Et sur la catégorie de l'écologie, on va travailler sur 5 axes
03:04 qui vont être le biosourcé, qui vont être la localité des matériaux, la santé environnementale,
03:09 l'aspect climatique, les impacts climatiques, et la biodiversité.
03:13 Donc c'est avec ces 5 axes-là qu'on va pouvoir définir un degré d'écologie d'une habitation.
03:19 Sachant que chaque projet d'habitat répond à des besoins individuels,
03:24 et qu'il n'y a pas une manière de faire de l'écologie, mais toute une panoplie.
03:28 Ah oui, ce que je comprends, c'est qu'en fonction du projet, on va pouvoir être plus ou moins efficace
03:34 sur tel ou tel des piliers dont vous parliez, c'est ça ?
03:36 C'est ça, notamment, on va travailler beaucoup sur la rénovation.
03:39 Donc quand on part d'un existant, on va avoir des contraintes.
03:41 Donc l'objectif, ça va plutôt être le cheminement, on va voir d'où on part,
03:45 on va voir le gain réel qu'on va pouvoir obtenir, plus que la cible en elle-même.
03:52 C'est vraiment le chemin parcouru qui va nous importer.
03:55 Et alors si on prend justement des exemples de maisons anciennes
04:00 sur lesquelles vous allez intervenir avec un projet de rénovation écologique et autonome.
04:06 Ça dépend de la maison, ça dépend du département dans lequel elle est.
04:13 Vous voyez ce que je veux dire ? Comment vous travaillez le projet ?
04:16 Alors ça dépend de beaucoup de choses.
04:18 La première chose, comme vous le dites, ça va être d'ancrer l'habitat dans son territoire.
04:21 Donc chaque territoire va avoir des contraintes et des spécificités particulières.
04:25 Donc bien sûr, on va avoir une méthode qui va s'adapter au territoire.
04:29 Est-ce qu'on est à la montagne ? Est-ce qu'on est proche de la mer ?
04:31 Est-ce qu'on est dans un climat qui va être très sec ?
04:33 Est-ce qu'on va avoir peut-être trop d'eau, etc. ?
04:35 Donc on va vraiment faire du sur-mesure.
04:37 On va présenter une méthode globale de conception et de réalisation.
04:40 Mais on va forcément faire du sur-mesure.
04:42 On ne peut pas faire un modèle d'habitat qui soit écologique et dupliquable comme des petits chevaux à l'infini.
04:51 Sur l'aspect autonome, quels sont les piliers finalement d'un habitat autonome ?
04:56 Alors nous, on travaille avec deux catégories principales d'autonomie.
04:59 La première catégorie, qu'on va appeler l'autonomie individuelle,
05:02 c'est vraiment ce qu'on peut mettre en place soi-même.
05:04 Donc globalement, quand on construit sa maison, on va pouvoir travailler sur l'autonomie en eau,
05:08 l'autonomie en énergie, voire l'autonomie alimentaire et l'autonomie technologique.
05:12 Sur des projets un petit peu plus complexes,
05:15 puisqu'ils vont porter une activité ou des projets d'habitat collectif ou participatif,
05:19 on va développer une autre catégorie d'autonomie,
05:21 qui va être la catégorie d'autonomie collective,
05:24 où là on va prendre en compte les besoins sociaux, les besoins en compétence,
05:28 et une catégorie qu'on appelle la permacircularité,
05:31 qui va être à quel point l'activité économique qui va être sur place va être régénérative.
05:36 En milieu urbain, c'est possible aussi ?
05:39 C'est un peu la démonstration qu'on fait dans le livre.
05:41 Nous, clairement, on a commencé plutôt dans un milieu qui était rural.
05:45 C'est beaucoup plus simple de faire de l'autonomie, notamment alimentaire et en eau, en milieu rural.
05:49 On a beaucoup travaillé ces dernières années aussi sur le milieu urbain.
05:54 Et on peut travailler… En fait, le modèle, il va s'adapter à partir de 50 m² de terrain.
05:59 Je montre dans le livre des projets qu'on a réalisés.
06:01 Alors, bien sûr, l'autonomie et le réel impact écologique de l'habitat en milieu hyper urbain
06:08 sera différent du milieu rural.
06:11 Mais comme je disais au début, l'important, ce n'est pas à quel point il va être écologique ou autonome,
06:15 c'est le gain qu'on va pouvoir obtenir.
06:18 Dans votre livre, vous utilisez le terme aggradation.
06:21 C'est la dégradation. Aggradation, c'est quoi l'aggradation ?
06:25 C'est très lien, c'est clairement un antonyme.
06:27 C'est un concept qui nous vient de la permaculture.
06:29 L'aggradation, historiquement permaculture, c'est le fait de transformer un terrain
06:34 pour le faire gagner en fertilité et développer la biodiversité.
06:37 Donc, à partir du moment où on vient aggrader, c'est-à-dire qu'on va prendre…
06:40 C'est l'inverse du dégradé, tout simplement.
06:42 Donc, on va avoir une activité, alors souvent agricole ou autre.
06:45 Mais au lieu d'avoir une activité qui va dégrader, on va créer la biodiversité,
06:50 on va refertiliser les sols.
06:51 Et ce concept, en fait, on peut l'étendre globalement à l'habitat et à toute activité économique.
06:56 Ce que je comprends, c'est régénérer un écosystème par l'habitat.
07:00 Vous avez parlé de processus. Ça veut dire que ça prend du temps, forcément ?
07:04 Ça prend forcément du temps.
07:06 L'objectif, quand on s'inspire de la permaculture, c'est vraiment de créer un écosystème habité
07:12 qui va être symbiotique du point de vue des individus et du vivant.
07:15 Quand on dit symbiotique, c'est-à-dire que l'individu va prendre soin de son écosystème
07:18 et il va lui rendre, notamment, avec des éléments autonomisés.
07:21 Cet équilibre, comme tout écosystème, il va falloir le travailler.
07:25 Donc, il va prendre du temps à se mettre en place.
07:27 Il va falloir aussi jouer avec les rétroactions.
07:30 Avant d'arriver à un état stable, il peut y avoir du temps, clairement.
07:34 Ça peut prendre plusieurs années.
07:36 Est-ce qu'il y a des projets de construction neuve qui s'inspirent déjà de ces principes de l'habitat permaculture ?
07:45 Bien sûr. Nous, on a travaillé sur de l'habitat neuf.
07:48 Sur l'habitat neuf, on va avoir plus de latitude, notamment sur la partie vraiment construction.
07:53 C'est plus facile quand la page est blanche, c'est plus facile d'aller chercher les matériaux biosourcés, etc.
07:57 Voilà, on va promouvoir ce qu'on appelle le nouveau BTP, le waterpile.
08:01 On va vraiment aller travailler le plus possible sur des matériaux biosourcés, géosourcés, locaux.
08:06 Potentiellement, sur quelque chose qui va être plus un modèle d'habitat qu'on va pouvoir décliner.
08:11 C'est clairement un des objectifs aujourd'hui.
08:14 C'est que toute la construction neuve soit de l'habitat permacol.
08:18 Mais le gros travail qui reste à faire, c'est clairement la rénovation d'habitats, notamment les habitats ruraux anciens.
08:24 C'est une question très générale, mais est-ce qu'on peut encore rêver de maisons individuelles ?
08:28 Vous voyez ce que je veux dire ? Parce que la question de la densification, notamment en milieu urbain, est centrale.
08:33 Il y a un vrai sujet.
08:36 Ça peut sembler contradictoire avec la lutte contre l'artificialisation des sols, par exemple.
08:41 Nous, ce qu'on va apporter, c'est une méthode professionnelle globale.
08:45 On va être aussi bien sur le bâtiment, sur les aspects paysagers, voire agronomiques, agroécologiques.
08:52 On va privilégier clairement des logements qui vont être sobres.
08:57 Qui dit sobres, en général, c'est soit des logements qui vont être un peu plus petits
09:01 ou des logements qui vont avoir une part de participatif, de collectif.
09:06 On aime bien porter des projets d'habitat participatif,
09:09 où on va installer sur des anciennes fermes, des anciens corps de ferme,
09:13 plusieurs familles qui vont travailler ensemble pour devenir autonomes.
09:17 Après, quand on parle d'autonomie, on est autonome en fonction des besoins qu'on a.
09:23 Donc clairement, plus on va être sur du logement qui va être sobre, petit ou collectif, plus on pourra atteindre facilement l'autonomie.
09:31 Est-ce que ça veut dire, là je me place du côté de celles et ceux qui habitent dans ces logements, dans ces habitats permacol,
09:38 est-ce que ça suppose d'être engagé, est-ce que ça suppose de vivre différemment ?
09:43 Vous voyez ce que je veux dire ? Pour qu'il soit vraiment efficace cet habitat.
09:47 Oui et non. C'est ça. C'est à partir du moment où, de toute façon, on va penser l'autonomie,
09:51 on va vraiment prendre conscience de notre consommation, des ressources qu'on consomme au quotidien.
09:56 Donc le fait juste de vouloir tendre vers l'autonomie, on va automatiquement adapter ses habitudes.
10:02 Après, clairement, si ce qu'on vit, c'est une réelle autonomie et qu'on veut vraiment avoir un impact,
10:06 parce que nous, notre type, ça veut dire un impact régénératif.
10:08 C'est-à-dire le fait de vivre, d'habiter dans ce type d'habitat, on va venir endiguer les problèmes planétaires.
10:13 L'objectif étant de rentrer dans les limites planétaires. Donc ça se fait forcément avec des compromis.
10:18 Après, on peut par contre vivre dans un habitat permacol avec tout le confort, le mode de vie actuel.
10:23 C'est juste que notre impact réel sera moins important.
10:26 Est-ce que dans le cadre de votre bureau d'études, logiscopia, vous voyez affluer les demandes ?
10:34 Vous voyez ce que je veux dire ? Entre une période où vous le disiez vous-même tout à l'heure,
10:38 c'était un peu décalé par rapport aux préoccupations des Français.
10:43 Est-ce qu'aujourd'hui, il y a de plus en plus de gens, un, qui viennent se renseigner,
10:46 deux, qui disent "mais nous, c'est comme ça qu'on veut construire à l'avenir".
10:49 Alors, l'intérêt, il est là depuis le début. Il a vraiment explosé après la Covid.
10:55 Avant, on avait plus de demandes de formation. Aujourd'hui, on a vraiment des demandes de réalisation.
11:00 C'est pour ça qu'on a écrit le livre. On reste un tout petit bureau d'études.
11:04 On est une association qui fait la promotion de ce modèle d'habitat.
11:08 Clairement, on n'a pas la capacité aujourd'hui de répondre aux demandes.
11:12 Le but de ce livre, c'était de dire "on part d'un habitat qui peut sembler alternatif".
11:17 Nous, on l'a totalement professionnalisé. C'est-à-dire qu'on est maître d'oeuvre,
11:19 on a une garantie décennale. On s'engage vraiment sur les résultats, comme tout professionnel.
11:23 C'est vraiment pour montrer que, on en parlait tout à l'heure,
11:26 c'est un habitat qui doit être ancré dans son territoire.
11:29 On doit vraiment gérer énormément de particularités.
11:31 L'objectif étant de développer le même type de bureau d'études que j'ai pu monter
11:37 à différents endroits du territoire. Et à ce moment-là, le livre permet de dupliquer ce modèle et de l'adapter.
11:43 J'ai gardé la question qui fâche pour la fin. Est-ce que c'est forcément plus cher ?
11:46 Ce n'est pas forcément plus cher. Globalement, on est sur la fourchette moyenne des prix de la construction, de la rénovation.
11:55 Bien sûr, on peut avoir des cas où, si on veut du low standing, on aura forcément des prix plus chers.
12:00 On a une particularité, nous, on vient du chantier social et solidaire.
12:04 Donc on fait du chantier participatif, du chantier école.
12:07 Quand on veut clairement des choses qu'on ne trouve pas sur le marché,
12:10 on a une grosse pénurie aujourd'hui d'artisans sur certaines pratiques écologiques.
12:14 Elles ne sont pas encore diffusées, elles se diffusent progressivement,
12:16 notamment la construction de paille, mais c'est compliqué.
12:18 Nous, on peut aussi inclure le maître d'ouvrage, le propriétaire, les personnes qui font les travaux dans les travaux.
12:25 À ce moment-là, on va faire ce qu'on appelle du chantier participatif.
12:28 On va pouvoir réduire les prix. L'objectif n'étant pas de réduire les prix sur la main d'œuvre,
12:34 mais vu qu'on ne trouve pas cette main d'œuvre-là, on va pouvoir avoir du logement moins cher en faisant participer les propriétaires.
12:40 Merci beaucoup Alexandre Bodin.
12:42 Votre guide pratique de la maison écologique et autonome est publié aux éditions Erol.
12:47 Le Zoom de ce Smart Impact.
12:49 Tout de suite, on parle des objectifs européens de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
12:54 Le Zoom de ce Smart Impact avec Clara Kalippel.
13:10 Bonjour.
13:11 Bonjour.
13:12 Bienvenue. Vous êtes chercheuse spécialisée dans les investissements climat européens
13:15 au sein de l'Institut de l'économie pour le climat.
13:17 Vous avez co-écrit une étude sur ce thème publié le mois dernier en février 2024.
13:22 Je vais poser vraiment une question de base pour commencer.
13:24 De quoi on parle ? C'est quoi un investissement climat ?
13:27 Un investissement climat, c'est un investissement dans un capital,
13:31 par exemple une usine éolienne, des infrastructures ferroviaires ou ce qu'on appelle des biens durables,
13:37 les voitures électriques, les pompes à chaleur, tout ce qui a un impact dans l'économie pendant plus d'un an,
13:42 qui vont venir réduire nos émissions de gaz à effet de serre.
13:45 Globalement, voilà ce qu'est un investissement climat.
13:47 On est venu regarder dans plusieurs secteurs de l'économie, énergie, transport, bâtiments,
13:52 quels sont les investissements qui peuvent venir réduire les émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne.
13:58 On y reviendra sur le contenu de cette étude, mais peut-être le constat,
14:03 un rappel pour commencer la loi européenne sur le climat qui prévoit cet objectif
14:08 de réduction d'au moins 50% des émissions de gaz à effet de serre dans les 27 pays de l'Union d'ici 2030.
14:16 On en est où aujourd'hui ? Est-ce qu'on le sait ? Est-ce qu'on en est très loin de cet objectif ?
14:21 Alors aujourd'hui, je crois qu'on est à peu près à -30% de réduction d'émissions par rapport à 1990 dans l'Union européenne.
14:27 Donc il faut aller jusqu'à -55%, ce qui est quand même un gap, puisqu'on a fait -30% depuis 1990.
14:35 Donc il y a quand même un gap significatif à faire.
14:38 Ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas y arriver, puisqu'on voit quand même la baisse des émissions globales d'année en année qui augmente.
14:43 Donc on peut y arriver, mais c'est assez conjoncturel comme indicateur de regarder,
14:47 puisque par exemple cette année, on pourra voir si les émissions vont réduire.
14:52 Mais on a eu un hiver très doux, donc ça, c'est un impact aussi sur la baisse des émissions.
14:56 Nous, c'est pour ça qu'on va regarder les investissements,
14:58 puisque les investissements qu'on fait aujourd'hui, c'est la baisse des émissions de demain.
15:01 Et pour le coup, ce qui est fait aujourd'hui, il est vraiment fait aujourd'hui et il a un impact durable.
15:06 On parle d'une obligation légale, c'est une loi européenne. Est-ce qu'il y a des sanctions liées à cette obligation légale ?
15:12 Alors pour l'instant, l'Union européenne s'est fixée cet objectif, c'est une obligation légale.
15:17 Elle n'a pas prévu elle-même de sanctions sur elle si jamais elle ne respecte pas en 2030 cet objectif.
15:24 Ça n'empêche pas que les ONG peuvent se saisir de la Cour européenne de justice en 2030 par exemple,
15:30 si elles estiment que les objectifs de l'Union européenne, qu'elle-même s'est fixée, n'ont pas été atteints.
15:35 Alors vous avez donc co-écrit cette étude "Déficit d'investissement climat européen, une trajectoire d'investissement pour l'avenir de l'Europe"
15:43 qui a été publiée le mois dernier en février. Qu'est-ce qu'il faut en retenir ? S'il y a une idée principale, c'est quoi ?
15:49 Alors, si il y a une idée principale à retenir, c'est que sur les investissements climats, l'Union européenne n'est pas à la masse.
15:55 On voit une véritable augmentation des investissements, 9% en 2022, +15% en 2021.
16:02 Donc vraiment on voit une très bonne croissance. On est aujourd'hui à 407 milliards à peu près d'investissements climats,
16:08 mais il faudrait doubler ces investissements dès demain et jusqu'en 2030 si on veut respecter nos objectifs climats.
16:16 Donc on voit une bonne augmentation. Si on continue le rythme d'augmentation des investissements qu'on observe depuis quelques années,
16:22 on va y arriver, mais rien n'est dit. Il faut quand même doubler d'ici 2030.
16:27 Ce sont des décisions, pardon de poser la question de Béossien, mais qui sont prises année après année ou c'est quand même un plan décennal ?
16:37 Alors nous, ce qu'on prône, c'est qu'il faudrait un plan décennal en fait, pour être certain de donner déjà de la visibilité aux investisseurs
16:44 sur combien l'Union européenne est prête à mettre sur la table, combien les Etats membrent, combien les collectivités,
16:49 qu'est-ce qu'ils attendent pour que l'argent privé soit généré, qu'est-ce qu'il faudrait faire, donner une vraie visibilité aux acteurs,
16:55 un peu comme ce qui est arrivé aux Etats-Unis où ils ont mis en place l'Inflation Reduction Act,
17:00 qui est un plan de subvention sur le long terme en fait, qui donne de la visibilité aux investisseurs,
17:05 et on a vu un bon désinvestissement suite à ça.
17:08 Ça a même attiré des projets qui étaient prévus en Europe qui sont allés vers les Etats-Unis.
17:13 Donc un plan de long terme, ça nous semble être une solution qui permet effectivement de combler ce défi.
17:19 Est-ce qu'il y a des secteurs qui sont en retard par rapport aux autres ? Vous voyez ce que je veux dire ?
17:23 Est-ce que, je ne sais pas, l'éolien est à la peine ? Est-ce que le photovoltaïque est en avance ?
17:27 Comment on peut situer ça en matière d'investissement ?
17:30 Effectivement, l'éolien est assez à la peine depuis quelques années.
17:34 En 2022, ils ont connu une vraie baisse. Ils étaient à leur niveau d'investissement le plus bas depuis, je crois, 2005.
17:41 Ils ont connu vraiment une baisse d'investissement, donc ils sont vraiment à la peine,
17:45 alors que pour autant, il y a des objectifs très ambitieux de déploiement de l'énergie éolienne au niveau européen.
17:50 Par contre, les panneaux solaires, on voit une très bonne augmentation des investissements depuis plusieurs années.
17:55 Pareil sur les véhicules électriques. Les pompes à chaleur, elles ont fait fois deux en deux ans en termes de vente.
18:01 Donc on voit, il y a certains secteurs en effet qui ont une bonne trajectoire et d'autres qui peinent un peu.
18:06 Quand je reviens sur l'éolien, comment vous l'expliquez ?
18:11 Ce n'était pas forcément l'objet de l'étude, mais est-ce que, par exemple, la question de l'acceptabilité des projets
18:17 peut freiner certains investisseurs ? Comment vous expliquez le retard de l'éolien aujourd'hui ?
18:23 A priori, ce n'était pas forcément l'acceptabilité, c'était plutôt les conditions de marché qui se sont dégradées ces dernières années.
18:29 L'augmentation des taux d'intérêt qui ont fait que les projets étaient moins rentables,
18:34 et la augmentation aussi des matières premières pour fabriquer l'énergie eolienne qui ont beaucoup augmenté ces dernières années,
18:39 qui font qu'en fait les investisseurs sont plus frileux à venir investir dans les énergies renouvelables
18:45 plus que la durée des permis ou l'acceptabilité sociale.
18:50 Pourquoi cette étude, elle est importante ? Est-ce qu'on manque finalement de visibilité ou de données pour piloter ces plans d'investissement ?
18:59 Non, pas complètement, on manque beaucoup de données. Nous, on n'a couvert que trois gros secteurs, transport, bâtiment, énergie.
19:05 On n'a pas couvert l'industrie ni l'agriculture qui sont quand même deux secteurs essentiels pour la décarbonation,
19:10 tout simplement parce qu'il n'y a pas de données, voire parfois pas d'objectif clair aussi de l'Union européenne sur ce qu'il faudrait faire.
19:17 Donc c'est un premier point, oui, on a un manque de données publiques pour voir où on en est, tout simplement,
19:23 et prendre des décisions de manière éclairée sur les politiques publiques.
19:27 Et puis, ce travail de collecte et de calcul des investissements, ça permet aussi aux institutions européennes de voir combien elles devraient investir,
19:37 où est-ce que l'argent public européen est utile, par exemple sur les infrastructures de réseaux électriques, transfrontaliers,
19:43 l'argent européen est très utile puisque c'est pour connecter l'Europe entre elles, entre les réseaux électriques.
19:50 Donc c'est aussi voir où est-ce qu'ils ont besoin de mettre l'argent, où est-ce que l'argent peut être mis par le privé, par les états membres, etc.
19:57 – C'est un peu effrayant ce que vous dites, c'est-à-dire que comment piloter sans avoir les données de départ ?
20:03 Je pense à ça par rapport à la décision qui a été prise, par exemple, sur l'interdiction des voitures thermiques en 2035,
20:11 de la vente des voitures thermiques neuves en 2035.
20:13 Il n'y a pas vraiment d'étude d'impact avant que cette décision ait été prise.
20:18 Donc il y a une prise de conscience au niveau européen que la connaissance de ces données,
20:25 ça devrait être quand même le point de départ de toute décision ?
20:27 – Oui, complètement, ils en sont totalement conscients et ils commencent à travailler là-dedans.
20:32 Nous, on est beaucoup en contact avec les équipes de la Commission européenne, la Direction générale de l'énergie,
20:37 pour voir comment on peut, nous, venir apporter une aide.
20:41 Mais bon, on est qu'un institut au niveau français, il faudrait en fait collecter des données,
20:45 à la fois au niveau européen mais aussi au niveau national, voire local.
20:49 Donc ça c'est un travail un peu titanesque à faire.
20:51 L'idée c'est de dire, c'est bien, maintenant vous avez pris des objectifs au sein du Green Deal, du pacte vert européen,
20:59 maintenant il faut le mettre en œuvre et comment vous comptez le faire ?
21:02 Et ça c'est vraiment l'enjeu de la prochaine mandature européenne après les élections du 9 juin.
21:07 – Oui, alors vous nous avez dit, vous n'avez pas étudié la question de l'agriculture,
21:11 mais quand vous voyez ce qui est en train de se passer sur justement le volet agricole du pacte vert,
21:16 qui est un peu en train d'être détricoté sous la pression des manifestations,
21:21 comment vous réagissez ?
21:25 Ça vous rend pessimiste ?
21:27 Est-ce que c'est le...
21:29 Moi, de mon poste d'observateur, je me dis, attention, c'est peut-être le premier détricotage,
21:34 vous voyez ce que je veux dire, par rapport à l'ambition,
21:36 qu'était l'ambition initiale du pacte vert ?
21:38 – C'est assez difficile à prévoir, on va vraiment attendre de voir les résultats des élections européennes.
21:45 Évidemment, si on a des élections qui vont un peu plus à droite dans les résultats,
21:53 il y a certains sujets qui vont être détricotés, probablement l'agriculture,
21:58 mais pas tous, l'énergie, il y a des gros enjeux quand même de l'indépendance énergétique
22:02 qui vont concerner le déploiement des énergies renouvelables,
22:05 la rénovation énergétique des bâtiments, le déploiement des véhicules électriques,
22:10 qui resteront des enjeux fondamentaux pour les prochaines années de l'Union européenne.
22:15 Sur ces enjeux-là, on est plutôt serein sur le fait qu'il y a moyen qu'ils continuent d'être développés,
22:20 mais en effet, sur d'autres, comme l'agriculture, là, on est peut-être plus pessimiste.
22:25 – Un petit peu plus pessimiste, merci beaucoup, Clara Kalippel, et à bientôt sur Bismarck.
22:30 On passe à notre rubrique Smart Ideas avec des micro-méthaniseurs à découvrir.
22:37 Justement, on va continuer de parler d'agriculture.
22:39 [Générique]
22:46 Smart Ideas avec Sigrid Farvag, bonjour.
22:49 – Bonjour.
22:50 – Bienvenue, vous êtes responsable commerciale France chez Biolectric,
22:53 entreprise qui a été fondée il y a 15 ans, qui compte 70 collaborateurs aujourd'hui,
22:58 et dont le métier est d'installer des méthaniseurs.
23:01 Je veux bien que vous nous les présentiez, quelles sont les caractéristiques de ces méthaniseurs ?
23:04 – Alors Biolectric fait de la micro-méthanisation,
23:06 elle les conçoit, elle les fabrique, elle les installe et elle les maintient.
23:10 On est vraiment focalisé sur l'agricole, sur l'élevage laitier principalement,
23:14 et donc un micro-méthaniseur, c'est en fait un outil qui va être calibré
23:19 à la taille de la ferme, de l'exploitation agricole,
23:22 et qui va aller capter le méthane dans l'élysier pour en faire de l'électricité et de la chaleur.
23:27 – Alors cette dimension-là, je la trouve très intéressante,
23:29 c'est du sur-mesure en quelque sorte, c'est ça ?
23:32 – On peut dire ça, ce sont vraiment des calibrages
23:35 qui correspondent à la taille de nos exploitations laitières.
23:38 – Uniquement des exploitations laitières, quasiment que des exploitations ?
23:41 – Pas uniquement, mais c'est notre marché principal.
23:43 – Et quels avantages pour les éleveurs ?
23:45 Pourquoi un éleveur va aller installer un micro-méthaniseur ?
23:47 – Il y a plusieurs avantages, le premier c'est l'indépendance énergétique,
23:50 ça veut dire qu'il va être en totale autonomie par rapport à son autoconsommation d'électricité.
23:56 Pareil au niveau de l'énergie thermique, il va produire de la chaleur qu'il va pouvoir récupérer.
24:01 Ensuite, il va générer un revenu supplémentaire parce qu'il va, à côté des économies,
24:06 aussi revendre le surplus qu'il va produire et donc venir renforcer le réseau en énergie verte locale.
24:13 Donc pour son image c'est très bien aussi.
24:15 Ensuite, il va produire un digestat, donc le lysier,
24:18 pendant le processus de digestion, de méthanisation, va devenir un digestat
24:22 qui a des valeurs agronomiques qui sont très intéressantes
24:25 et qui permettent de faire des économies en engrais chimiques derrière.
24:30 C'est aussi une démarche éco-responsable.
24:34 – C'est déjà beaucoup d'avantages.
24:37 On parle souvent des projets de méthaniseurs, de grands méthaniseurs,
24:43 qui sont parfois d'ailleurs un peu décriés.
24:46 Si vous deviez comparer votre solution avec les projets les plus importants, les plus gigantesques ?
24:52 – Il y a le mot méthanisation dedans mais ça n'a rien à voir pour le reste.
24:55 On est vraiment sur un principe en circuit court.
25:00 On va aller calibrer une machine en fonction des effluents d'élevage
25:03 qui sont disponibles sur la ferme.
25:04 Donc on ne va rien faire venir de l'extérieur,
25:06 il n'y aura pas de culture de maïs ou quoi que ce soit pour faire fonctionner la machine.
25:10 C'est vraiment un outil supplémentaire sur la ferme et à la taille de la ferme.
25:14 On ne va pas générer de trafic routier,
25:16 on ne va pas générer d'odeur parce qu'on va stocker des intrants.
25:19 On est sur quelque chose de très responsable et de très circulaire.
25:23 – Avec aussi un avantage, si j'ai bien compris, je ne suis pas un spécialiste,
25:28 mais il n'y a pas de transport du lisier.
25:30 – Non, pas du tout.
25:31 – Donc il est frais. Est-ce qu'il est plus efficace parce qu'il est frais ?
25:35 – Exactement. En fait, au moins le méthane aura eu le temps de s'échapper.
25:38 Au plus le pouvoir méthanogène du lisier va être important
25:41 et donc la production derrière d'électricité et de chaleur le sera.
25:45 En plus, il y a une démarche éco-responsable qui est absolument très importante.
25:50 On dit que dans un élevage laitier,
25:53 à peu près un tiers des émissions de gaz à effet de serre produites proviennent des lisiers.
25:57 Nous, on est capable en moyenne d'aller capter 82% du méthane de ces lisiers.
26:03 Donc un agriculteur qui s'engage dans une telle démarche
26:06 a une démarche éco-responsable extrême qui doit vraiment être soutenue.
26:10 – Vous avez signé il y a un peu moins de deux ans un partenariat avec Saudial,
26:13 qui est la première coopérative laitière française.
26:16 Qu'est-ce que ça représente pour vous ?
26:18 Quelles ambitions, quels objectifs avec ce partenariat ?
26:20 – Alors en moins de cinq ans, on est censé sortir
26:23 une centaine d'installations bioélectriques avec Saudial chez leurs éleveurs laitiers.
26:28 Ça c'est l'objectif pour 2026.
26:31 Et à ce jour, on vient de démarrer, ça a démarré l'année passée,
26:35 on en a sorti une bonne dizaine.
26:37 – Donc ça veut dire que vous allez pouvoir tenir l'objectif ?
26:39 Ça vous fait changer d'échelle en quelque sorte ?
26:41 – Non pas vraiment, on est prêt.
26:43 – Vous êtes prêt à le faire.
26:45 Je voudrais qu'on parle de rentabilité,
26:47 parce que c'est un investissement évidemment pour les agriculteurs.
26:50 En combien d'années ils peuvent rentabiliser cet investissement ?
26:55 – On est en moyenne, dépendamment de la taille du microméthaniseur,
26:59 on est entre quatre et huit ans de retour sur investissement.
27:03 Ce qui en agricole est très correct.
27:05 – C'est court ? Dans le milieu agricole ?
27:07 – Dans le milieu agricole, c'est tout à fait acceptable, absolument oui.
27:10 – Pourquoi ça ne se développe pas plus vite ?
27:12 puisqu'il y a autant d'avantages.
27:14 Est-ce que c'était un manque de connaissances ?
27:17 Il y a des a priori de certains éleveurs ?
27:20 Comment vous expliquez ça ?
27:22 – On est quand même sur un secteur d'activité
27:25 qui est relativement en souffrance, économiquement parlant.
27:28 – Bien sûr.
27:29 – Et le plus gros frein qu'on rencontre,
27:32 ce sont les financements par les banques de ce type de projet.
27:36 – D'accord, ok.
27:38 – Malheureusement.
27:40 – Malheureusement, ça devrait avancer beaucoup plus vite.
27:42 Merci beaucoup, Sigrid Farvag, d'être venue nous présenter
27:46 les microméthaniseurs de Biolectric.
27:50 Voilà, c'est la fin de ce numéro de Smart Impact.
27:52 Merci à toutes et à tous de votre fidélité à Bismarck.
27:55 Je voudrais remercier Cyrielle Chazal
27:58 qui s'occupe de préparer cette émission,
28:01 à la programmation et à la production,
28:03 la réalisatrice Alice Pitabi
28:05 et au son, c'était Héloïse Merlin.
28:08 Aujourd'hui, l'équipe 100% féminine, c'est suffisamment rare pour être signalée.
28:12 Salut à toutes et à tous.
28:13 Bravo, Girl Power !
28:14 [Musique]