Retrouvez William Leymergie entouré d’experts, du lundi au vendredi en direct dès 12h30, pour une émission dédiée aux problématiques de notre quotidien.
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00:00 *musique*
00:04 Et même, il y a plusieurs catégories. Il y a de la vieille phobie,
00:07 la phobie du "ouh" et puis la phobie d'aujourd'hui.
00:10 La néophobie, c'est ça ?
00:13 Exactement.
00:15 Quand on parle de phobie alimentaire, c'est pas un peu fort comme expression ?
00:19 Vous allez voir que c'est pas si fort que ça.
00:21 Quand on parle de phobie, bien sûr, on parle de peur.
00:23 Alors là, bien sûr, je vais pas vous parler de la peur des araignées ou des fantômes,
00:26 mais bien des aliments, donc ça peut paraître un peu curieux.
00:28 Mais vous aviez raison de le préciser, il y a une nouvelle formule aujourd'hui,
00:33 on parle de néophobie.
00:34 Et donc la néophobie, ça englobe la phobie, donc le fait d'avoir peur,
00:37 mais aussi le fait d'être particulièrement récalcitrant à manger certains aliments.
00:42 Alors on le voit très bien chez certains enfants.
00:44 Moi, j'ai découvert ça en consultation.
00:47 Un jour, j'ai un patient qui est venu me voir
00:49 en m'expliquant qu'il mangeait toujours de la même manière,
00:52 depuis qu'il était tout petit, et il n'a jamais changé.
00:55 Il prenait des gâteaux au petit-déjeuner, des gâteaux pour enfants,
00:58 au déjeuner purée jambon et en dessert des pizzas.
01:02 - Dessert des pizzas ? - Pardon, en dîner des pizzas.
01:06 Et donc depuis toujours, il fonctionnait comme ça,
01:08 il n'avait jamais rien mangé d'autre.
01:10 Vous allez voir.
01:11 - Il a peur de grandir, c'est Peter Pan.
01:14 - C'est beaucoup plus compliqué que ça, tu vas voir.
01:15 - Oui, c'est assez incroyable.
01:18 Et en fait, lui, il avait fait plein de thérapies d'ailleurs,
01:19 et il n'avait jamais trouvé la solution.
01:22 Vraiment, il était dans un cul-de-sac, on va dire.
01:25 Mais sauf que ses résultats sanguins commençaient à être mauvais.
01:28 Et puis, c'était assez mignon d'ailleurs, il avait plus de 50 ans,
01:31 son rêve, c'était de pouvoir emmener sa femme au restaurant.
01:33 Parce que là, en l'occurrence, il ne pouvait pas emmener sa femme au restaurant
01:36 ou alors c'était vraiment juste la pizza.
01:39 Et donc, il m'avait expliqué que c'était quand même un peu compliqué pour lui.
01:42 Et donc, on s'est dit qu'on allait faire les choses très progressivement.
01:46 Et je lui ai proposé de simplement remplacer la purée par des coquillettes
01:50 pour déjà élargir ce qu'il n'avait jamais mangé de pâte.
01:53 - C'est à peu près la même texture.
01:55 - Oui, même texture, même couleur, etc.
01:57 Donc, je n'avais pas l'impression de faire quelque chose d'extraordinaire.
02:00 Et je pense que vous êtes d'accord avec moi, ce n'est quand même pas dingue.
02:03 Eh bien, cet homme de plus de 50 ans, assez costaud,
02:07 figurez-vous qu'il s'est mis à fondre en larmes
02:10 à l'évocation de changer sa purée en coquillette.
02:14 Et donc, c'est là où j'ai découvert le terme de néophobie.
02:17 Et donc, ce n'est vraiment pas quelque chose d'anodin,
02:18 ça peut vraiment être quelque chose de très handicapant.
02:21 - Ah !
02:22 - Oui, mais enfin, à part ça, ça va, lui ?
02:25 - Oui, oui, vous allez voir.
02:26 Si, ça va mieux.
02:27 - C'est unique, c'est une personne sur mille
02:29 ou c'est fréquent de souffrir de néophobie ?
02:30 - Alors, moi, j'espère que ce n'est pas une personne sur mille.
02:32 C'est très rare chez les adultes.
02:34 C'est beaucoup plus fréquent chez les enfants.
02:36 Ça correspond à 50 à 70 % des enfants de 2 à 10 ans.
02:40 Mais justement, moi, j'ai voulu voir...
02:42 50 à 75 % des enfants souffrent de néophobie.
02:45 Alors, souffrent, on va voir qu'il y a quand même plusieurs curseurs, plusieurs degrés.
02:49 Mais justement, moi, j'ai voulu savoir un peu ce qu'il en...
02:51 Si ça concernait beaucoup de monde.
02:53 - Mais non, mais ils vont vous répondre, les enfants,
02:54 ils vont vous dire "j'aime pas".
02:55 Quand ils vont dire "pourquoi tu n'aimes pas les épinards ?
02:57 Ça n'a pas bon goût".
02:59 - Et là, on a fait mieux.
03:00 On a demandé aux adultes, on a été dans la rue
03:02 pour voir si ça les concernait ou pas.
03:04 - Allez.
03:05 - Ça sera tout ce qui est arachide.
03:11 Je n'aime pas du tout la texture sous la dent.
03:13 Ça grince un peu, ça reste dedans.
03:15 Et puis, le goût, c'est vraiment quelque chose que je n'aime pas.
03:18 - Peut-être les brocolis ?
03:21 - Ça serait le gras de viande, je trouve que oui.
03:25 - Alors, les noix, ça peut paraître bizarre,
03:27 mais c'est vraiment le goût qui me gêne.
03:29 Autant que j'aime les noisettes, les amandes, etc.
03:30 Les noix, ça passe pas.
03:32 - Alors, le foie.
03:33 La viande, tout ce qui est à bas et tout ça,
03:35 ça, j'aime pas ça du tout.
03:36 - Je déteste l'oseille, la soupe à l'oseille.
03:39 Parce que toute mon enfance, on m'a forcée à manger cette soupe
03:42 qui me donnait les hauts le cœur.
03:43 Et rien que de la voir ou de la sentir,
03:45 maintenant, c'est débitoire.
03:47 Je peux plus.
03:48 - Très bon, madame, la soupe à l'oseille.
03:51 - Vous avez vu déjà ?
03:52 - Oui, mais là, sans enfance.
03:53 - Oui, c'est ça.
03:54 On sent bien qu'il y a quand même certains degrés,
03:55 justement, de phobie dans cette histoire.
03:58 Alors, quelles sont les causes, finalement, de tout ça ?
04:02 Ça peut être, figurez-vous, génétique.
04:05 Incroyable, ça peut vraiment être génétique.
04:06 Alors, c'est plus pour les femmes que pour les hommes, d'ailleurs.
04:08 Bien sûr, il y a un facteur environnemental, on s'en doute.
04:11 Par exemple, des parents qui ont déjà cette phobie
04:13 vont avoir tendance à la transmettre.
04:15 Ou alors, l'enfant va comprendre que c'est un bon moyen
04:17 d'embêter ses parents et donc il va un peu générer cette phobie.
04:21 Ça peut aussi être culturel.
04:22 Si dans votre culture, on a peur de quelque chose,
04:24 ben voilà, vous avez tendance à le récupérer aussi.
04:26 Et puis, ça peut aussi être un traumatisme.
04:28 Par exemple, si vous avez mangé un poisson
04:30 qui avait une arête qui vous est restée entre la gorge,
04:32 vous pouvez avoir du mal à manger du poisson par la suite.
04:36 Donc, on voit qu'il y a plusieurs sources, mais que ça peut être...
04:39 - Mais quand ils viennent vous voir, ils viennent pour consulter
04:42 à cause de ça, ils vous disent, je mange toujours la même chose ?
04:45 - C'est rare.
04:46 - Ah bon ?
04:47 - Oui, c'est rare.
04:48 En l'occurrence, ce patient-là, j'en vois toute la journée.
04:50 - Parce que sinon, vous leur dites aux autres,
04:52 est-ce que vous avez déjà goûté ?
04:54 - Oui, alors bien sûr, on peut essayer d'agir sur ça.
04:57 Mais bien sûr, le plus important, c'est qu'il y a des conséquences
05:00 qui peuvent être lourdes, en fait.
05:01 - Ah bon ?
05:02 - Notamment, mon patient qui mangeait toujours la même chose.
05:05 Donc lui, il avait des problèmes de cholestérol
05:07 parce qu'il mangeait trop gras.
05:08 Il pouvait aussi avoir des carences, c'était son cas.
05:10 On peut aussi avoir des problèmes digestifs, du coup,
05:13 parce qu'on peut avoir des reflux gastro-osophagiens,
05:15 donc vraiment vers le haut.
05:16 On peut aussi avoir des ballonnements ou des intolérances.
05:22 Et puis, on peut avoir aussi une anxiété qui se développe
05:26 avec un isolement social, ce qui était le cas de mon patient,
05:29 parce que je vous le disais, il ne pouvait pas aller au restaurant.
05:30 Mais en l'occurrence, avec son travail, il fallait qu'il parte à l'étranger.
05:33 Alors là, je vous laisse imaginer à quel point c'est compliqué.
05:35 - Parce qu'en plus, ce n'était pas n'importe quelle pizza
05:37 et pas n'importe quel gâteau, j'imagine.
05:38 - Exactement, il y avait un espèce de rituel.
05:40 Et donc, c'était vraiment hyper handicapant.
05:42 - Il était monomaniaque, quoi.
05:44 - En fait, c'était vraiment de la phobie.
05:46 Il y avait une peur de l'aliment.
05:48 - Du changement, quoi.
05:49 - Non, c'est même pas...
05:51 C'est l'aliment en lui-même, les aliments qui étaient autres
05:53 que les aliments...
05:54 - C'est ça, les aliments.
05:55 - C'était plus les aliments que...
05:56 - On dirait une fausse histoire.
05:57 - C'est ça, on en sort.
05:58 - C'est vraiment vrai.
05:59 - Des phobies comme ça, on en sort.
06:00 Il y a beaucoup de gens qui sont atteints de phobies alimentaires.
06:04 - Ils mangent des carottes.
06:05 - Cette personne, du coup, pour soigner ça,
06:07 il y a plusieurs traitements.
06:08 Alors, bien sûr, vous vous en doutez,
06:09 c'est ce que j'ai compris avec mon patient.
06:11 La solution, elle n'est pas tant alimentaire que psychologique.
06:15 - Oui, oui.
06:16 - La première chose qu'on peut faire,
06:17 c'est ce qu'on appelle le TCC,
06:19 c'est la thérapie comportementale cognitive.
06:21 Ça se soigne, en fait, comme le trouble obsessionnel compulsif,
06:24 comme un TOC.
06:25 Donc, on va vraiment travailler sur la peur de la personne
06:29 et l'approche de l'aliment en lui-même.
06:31 On peut aussi, et c'est ce qu'on a fait pour mon patient,
06:33 faire une exposition progressive.
06:35 Donc, il a été voir un spécialiste
06:36 qui l'a mis dans des situations...
06:38 Alors, ça peut être soit visuellement, déjà,
06:40 une image ou une vidéo,
06:41 ou alors on le met dans un contexte,
06:43 ou alors on va travailler sur la peur en elle-même.
06:45 Et puis, il y a l'hypnose aussi,
06:46 qui fonctionne pas mal pour ce genre de choses,
06:48 parce qu'on va travailler sur le subconscient
06:50 et puis on va essayer de modifier, en fait, la réponse,
06:52 parce qu'en fait, il y a des associations d'idées qui se font.
06:55 Et donc, l'hypnothérapeute va pouvoir aller directement
06:57 sur le subconscient, donc ça peut bien fonctionner.
06:59 - Non, mais pour les enfants qui sont victimes de ça,
07:01 de phobie alimentaire...
07:02 - Alors, bon, on a tous peut-être un peu des phobies.
07:05 Il y a quelques erreurs à éviter,
07:07 notamment, c'est une tendance actuelle
07:09 qui s'appelle le "candifruit".
07:10 Je sais pas si vous avez déjà entendu parler de ça.
07:12 - Non. - Ah oui, oui, c'est horrible, ça.
07:14 - C'est des fruits qu'on transforme en bonbons.
07:15 - Je t'ai vue. - Effectivement.
07:17 J'en ai un petit peu parlé.
07:18 C'est des fruits qu'on va mettre dans du sucre,
07:20 dans des alimentifs...
07:21 - C'est une pomme d'amour, mais avec tous les fruits, quoi.
07:23 - Mais bien plus sucrés et bien plus...
07:26 Mauvaise pour la santé que des pommes.
07:28 Et donc, ça, c'est une mauvaise idée.
07:30 L'idée, ça va plus être de trouver des associations parallèles.
07:33 Si, par exemple, votre enfant aime bien les gratins,
07:35 vous lui mettez le gratin avec l'aliment dont il a un peu peur,
07:37 mais peut-être pas en visuel tout de suite, des couleurs,
07:39 on essaie d'associer les couleurs, etc.
07:40 Donc, on n'est pas obligés tous de consulter quelqu'un.
07:42 - Mais on s'en sort, quoi, rassurez-moi.
07:44 - Oui, oui. Et mon patient va beaucoup mieux.
07:46 - Ah ! - Oui, oui.
07:47 - Il se fait des pâtes tailles et des potos fous, je peux te dire.
07:49 - Ah, peut-être pas.
07:50 - Il aurait peut-être pas mis le curry en numéro 1 de ses aliments, mais...
07:53 - Non, mais moi, je me souviens des épinards.
07:55 Ça va mieux, je vous remercie.
07:56 - Ah ! - Je suis contente.
07:57 - Bien.
07:58 [Musique]