PAROLE DIRECTE - Interview de Pauline GALLI & Jérôme PACHERAN, Ambulanciers

  • il y a 4 mois
Le 18 novembre 2023, PAROLE DIRECTE s’intéressait au métier d’Ambulancier.
Pauline GALLI Ambulancière diplômée d'état et Jérôme PACHERAN Auxiliaire Ambulancier à Pays Basque Ambulances, ont répondu à quelques questions.

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Transcript
00:00 *musique*
00:13 Pauline, Jérôme, bonjour. Merci beaucoup à vous d'avoir accepté mon invitation.
00:19 Bonjour !
00:20 Alors expliquez-moi ce qui vous a donné envie de devenir ambulancier.
00:25 Je n'étais pas très bonne à l'école donc j'aurais bien aimé faire dans le médical.
00:30 Depuis toujours je suis attirée par ça.
00:32 Mais finalement, je me suis rabattue. J'ai envie de dire rabattue.
00:36 Je me suis rabattue sur l'ambulancier parce que j'aime beaucoup le médical, l'urgence,
00:41 le relationnel à la personne.
00:44 Donc pour moi c'est une vocation.
00:48 Moi ça fait 18 ans que je suis ambulancière à Pays-Basque Ambulance.
00:53 Moi je suis arrivé ici, j'avais fait une formation d'électricien avion.
00:57 J'avais été embauché chez Dassault et j'ai été laissé au Portail le jour du confinement.
01:02 C'était le jour de mon embauche et ça ne s'est pas fait.
01:05 Je me suis retrouvé pas savoir quoi faire.
01:08 Et j'avais un membre de ma famille qui était malade.
01:11 Il faisait du chimeau, il était transporté en ambulance.
01:14 En parlant avec les ambulanciers, ils m'ont proposé de faire un stage.
01:18 Ça m'a plu et moi ça fait faire trois ans en juin.
01:21 Quelle formation avez-vous suivi ?
01:24 Moi j'ai passé le DEA, le diplôme d'état ambulancier.
01:28 Donc voilà à Bordeaux, c'est une formation continue.
01:33 Alors maintenant elle a dû être rehaussée avant, c'était genre 4-5 mois.
01:36 Maintenant ça doit être arrivé à 7 mois à peu près de formation.
01:41 Il y a un concours d'entrée, il faut passer des stages pour être...
01:44 Ils veulent être vraiment sûrs que tu fasses ce métier.
01:46 Parce que c'est quand même un métier de vocation.
01:48 Ils se rendent compte qu'il y a vraiment besoin d'ambulanciers, mais qualifiés.
01:53 Au début j'avais demandé le DEA, il n'y avait pas de place.
01:56 J'ai fait auxiliaire, j'étais embauché.
01:58 C'est plus simple avec ceux auxiliaires.
02:00 Dans une ambulance, il faut obligatoirement un diplôme d'état.
02:03 Et il peut y avoir un auxiliaire à côté ou deux diplômés d'état.
02:07 Et donc c'est une formation rapide qui s'est faite en 15 jours.
02:13 Moi j'avais fait un stage parce que je devais passer le DEA.
02:16 Donc j'avais quand même fait un mois d'ambulance avant de commencer.
02:19 Et après, sous la responsabilité du DEA, tu apprends le métier.
02:25 Parce qu'avec deux semaines de formation, à part les premiers secours, tu ne connais rien.
02:30 Donc voilà, moi j'ai fait une formation plus courte.
02:33 Et le DEA, je ne veux plus le passer parce qu'en fait le boulot est quasiment le même.
02:39 Il n'y a pas d'écart de salaire.
02:41 M'investir, partir six mois, payer un loyer, perdre mes heures supplémentaires, mes congés,
02:47 pour rien obtenir de plus au final.
02:50 Parce que si on travaille avec un collègue qui fait confiance, le boulot est le même.
02:55 Du coup, avoir les responsabilités pour ne pas gagner plus, ça ne m'intéresse pas.
02:59 Quelle qualité faut-il selon vous pour le devenir ?
03:03 Moi, selon moi, bon déjà la bienveillance.
03:07 On travaille avec des gens, on ne transporte pas des paquets.
03:10 On travaille avec des personnes qui sont, certaines sont faibles, malades, ont des problèmes cognitifs.
03:18 Il faut pouvoir être amené à avoir de l'empathie pour ces personnes.
03:25 Mais après, il y a tout le reste. Il faut être solide au niveau du rythme de travail.
03:31 Il y a beaucoup de manutention, il faut porter des personnes.
03:35 Des fois, il y a des situations qui sont difficiles, même psychologiquement, avec des histoires de vie qui sont compliquées.
03:43 Après, on est deux dans une ambulance, faire des journées de 10 heures, 12 heures.
03:48 Il faut aussi savoir gérer les rapports humains entre collègues.
03:52 Moi, j'ai un problème, mais il y en a pour qui ce n'est pas simple.
03:58 Et ça, ça fait partie d'un côté très complexe du métier.
04:02 Tout à fait, c'est les rapports humains.
04:05 On est systématiquement en collaboration avec des médecins, des infirmières, des familles.
04:12 Et puis, nous n'avons pas tous la même sensibilité.
04:16 Donc, il faut vraiment s'adapter en permanence.
04:21 C'est un métier difficile.
04:23 Moi, je vais partager.
04:25 Les journées peuvent être longues, l'amplitude horaire.
04:28 Pour moi, ça va, mais émotionnellement, je comprends que ça peut être difficile.
04:32 Des fois, si vous amenez un enfant de 8 ans à Bordeaux pour faire une chigno, on peut s'attacher aux gens.
04:37 Il peut disparaître aussi.
04:39 Après, c'est facile dans la mesure où...
04:42 Moi, j'ai travaillé dans d'autres secteurs.
04:45 Il y a des boulots où on ne voit pas le jour.
04:47 Il n'y a pas une fenêtre à fermer des caissons de bouteilles ou faire de la mise en rayon.
04:51 Je veux dire, nous, on a quand même...
04:53 Oui, il y a le cadre de...
04:55 On est à l'extérieur.
04:57 Voilà, le boulot qui est quand même...
04:59 On gère notre temps de travail.
05:01 On est tout seul.
05:02 Ça veut dire que la direction, elle n'est pas venue dans l'ambulance.
05:05 Elle nous fait confiance et nous, on fait notre travail sans être tout le temps repris.
05:11 Des fois, il y a des boulots avec des contre-maîtres et tout ça.
05:14 Et après, il y a malgré tout la contrainte horaire.
05:18 Mais à côté de ça, on a une flexibilité.
05:21 Si demain, on a un rendez-vous urgent à 10h où il faut absolument aller chercher un enfant à l'école,
05:25 on peut quand même moduler les horaires.
05:28 C'est quand même un inconvénient, on a un avantage derrière.
05:32 Donc, c'est pour ça que moi, je dis oui et non.
05:35 Mais oui, les principales difficultés du métier, c'est quand même, comme je disais tout à l'heure,
05:39 c'est un métier quand même où on porte du poids.
05:42 Donc, on peut être amené à se blesser.
05:44 Il y a la fatigue.
05:46 On conduit toute la journée.
05:48 On ne travaille jamais à chaud aussi.
05:50 C'est-à-dire que tu vas passer deux heures assise dans ton ambulance sur l'autoroute
05:54 et d'un coup, on va te demander de monter quelqu'un au troisième étage.
05:58 Ton corps, il n'est pas chaud.
06:00 Ce n'est pas comme si tu étais maçon en activité du matin au soir.
06:03 Du coup, on peut se faire mal.
06:06 Mais bon, après, si on travaille bien, on peut...
06:09 Le salaire, ben...
06:11 C'est le SMIC et un peu plus pour les DEA.
06:14 On revient toujours au problème de même la nuit.
06:18 Quand on fait du travail de nuit, on travaille 24 heures sur 24.
06:21 Travailler de nuit, qui est quand même un des seuls métiers
06:24 où la nuit, on est payé pareil que la journée.
06:26 Normalement, de nuit, tu dois être payé.
06:29 Et encore, le métier s'est amélioré.
06:32 Ça a été très dur.
06:34 En fait, par rapport aux contraintes que le métier demande,
06:37 c'est-à-dire travailler des week-ends, avoir des plannings qui changent tous les mois,
06:41 on ne sait pas quelle heure on commence le matin ni à quelle heure on finit.
06:44 Tout ça, ça fait partie du métier.
06:46 Mais je pense que tout ça, toutes ces contraintes,
06:49 malheureusement, elles devraient être monnayables, en fait.
06:54 Dans tous les métiers, quand il y a des contraintes,
06:56 tu prends quelqu'un qui travaille sur une plateforme pétrolière,
06:59 c'est un métier difficile, il parle longtemps, il y a des risques,
07:02 et il est payé en conséquence.
07:04 Et nous, on ne peut pas être payé moins.
07:06 C'est pas possible.
07:08 Pour Mdva, c'est à peine plus que le SMIC,
07:11 mais il y a un diplôme d'État,
07:13 et aux SIGAR, c'est quasiment le SMIC.
07:16 Et en fait, moi, je trouve que le boulot qu'on fait vaut plus qu'un SMIC.
07:20 C'est un métier d'utilité publique.
07:22 Sans ambulance, c'est pas possible.
07:25 La société, elle ne peut pas fonctionner.
07:28 Moi, je pense que pour 39 heures,
07:30 si on avait 2 000 euros net par mois,
07:33 sans les repas, ça serait un beau métier.
07:36 Oui, parce qu'on parle en taux horaire.
07:38 Le taux horaire, pour le DEA, il est de combien ? 11 euros.
07:44 Un truc qui est sûr, c'est qu'on est payé énormément par prime.
07:48 Et les primes, c'est quelque chose qui ne rentre pas dans le salaire
07:52 pour la retraite, ou des choses comme ça.
07:55 Normalement, notre taux horaire devrait être quand même assez...
07:58 Voilà, 2 000 euros net pour un DEA, c'est normal.
08:00 C'est la base. Mais c'est pas le cas.
08:03 Vous êtes amené à réaliser des interventions d'urgence
08:08 à la demande du SAMU.
08:11 Est-ce que c'est pas une contrainte pour vous
08:14 que l'ambulance ne soit pas considérée
08:17 comme un véhicule prioritaire à 100% ?
08:20 Le manque de connaissances des gens
08:23 par rapport au véhicule prioritaire, c'est impressionnant.
08:26 Nous, on est très, très, très régulièrement d'urgence SAMU.
08:32 On a des week-ends, quasiment tous les week-ends,
08:35 on peut être d'urgence SAMU.
08:37 Il faut savoir qu'une ambulance est assez souvent prioritaire sur la route.
08:43 Mais en temps normal, ici dans cette région, ça va hors heure de pointe.
08:49 On se débrouille, la ville de Bayonne nous laisse emprunter les voies de bus.
08:55 Donc c'est normal qu'on soit un véhicule en temps normal.
09:00 Quand il y a une urgence SAMU, il faut vite libérer l'ambulance
09:06 pour qu'elle soit de nouveau disponible.
09:09 On met les gyrophares et tout ça.
09:11 Oui, elle a un numéro de SAMU, on est attitré au SAMU.
09:14 C'est une règle.
09:16 Il faut réglementer ça, sinon ça serait la porte ouverte à n'importe quoi.
09:20 Tout à fait. Et il y a des ambulanciers qui en abusent.
09:22 Ils prendraient encore plus de boulot, ils se diraient qu'ils vont mettre les bleus,
09:25 du coup on serait surchargés, ça serait n'importe quoi sur la route.
09:28 Donc je pense que la réglementation existe.
09:30 Elle est normale, oui.
09:31 Une autre partie de votre profession, c'est le transport en véhicule sanitaire léger.
09:39 La législation de ce type de transport va évoluer.
09:45 Il va falloir réaliser des transports simultanés, quand l'état du patient le permet.
09:52 Quel regard portez-vous sur cette idée ?
09:56 Les restrictions budgétaires, ça va...
10:00 Quand on prend des personnes en simultané dans un VSL,
10:05 forcément, le trajet, on ne peut pas payer chaque fois un trajet, un forfait.
10:11 Là, ça diminue les coûts.
10:13 Et c'est ça, c'est la Sécu qui cherche à faire des...
10:16 Maintenant, c'est très compliqué pour nous.
10:18 Parce que du simultané, quand il y a du travail et qu'il faut aller chercher
10:21 sur une clinique, un hôpital, des personnes...
10:24 Pour nous et pour les services hospitaliers.
10:26 Parce que j'ai compris, ils devront organiser, par exemple,
10:29 deux patients qui dialysent.
10:30 Ils devront organiser la sortie en même temps.
10:32 Donc, en fait, ça va désorganiser les services hospitaliers, les ambulances.
10:36 Au final, c'est le patient qui est...
10:38 Qui en paie les pots cassés.
10:40 Qui en paie les pots cassés, oui.
10:42 Et surtout que le budget de tous les transports en France, sanitaires,
10:47 c'est 1,8% du budget de la Sécu.
10:50 Et du coup, c'est des économies de bout de chandelle, en fait.
10:53 Je ne suis même pas sûre que le transport en VSL, pour nous, ambulanciers,
10:57 apparemment, d'après notre direction, ça ne rapporte pas énormément.
11:05 Ce sont les ambulances qui demandent plus de...
11:08 Mais le VSL, comme il dit, c'est des économies de bout de chandelle.
11:12 Je pense que ça ne va pas...
11:14 Je pense que... J'ai l'impression que le VSL, le véhicule sanitaire léger,
11:18 j'ai l'impression qu'avec le temps, il sera voué à disparaître.
11:21 Il sera peut-être remplacé par des taxis, un nouveau système de déplacement,
11:26 je ne sais pas.
11:27 Dernière question pour vous, Pauline.
11:30 Vous venez de terminer, il y a quelques mois, je crois,
11:34 une formation d'aide-soignante.
11:36 Qu'est-ce qu'elle va vous apporter dans votre métier d'ambulancière ?
11:41 Ça m'aide à plus les prendre dans de meilleures conditions.
11:46 Dès qu'il y a des personnes... Je ne sais pas,
11:48 quand il faut des personnes au sol, c'est pas toujours dans les urines,
11:52 dans le sang, c'est pas toujours très...
11:55 Les pauvres se retrouvent dans des situations compliquées.
11:58 Moi, mon métier d'aide-soignante m'aide à les prendre en charge,
12:01 à les rendre plus dignes.
12:02 Ça fait un pont, ça fait une jonction entre ces...
12:05 On fait partie d'une chaîne, les ambulanciers,
12:07 mais le fait d'être aide-soignante, ça permet de donner plus d'indications
12:11 aux infirmières, aux aides-soignantes.
12:13 Ça crée une meilleure jonction entre les deux.
12:16 C'est un accord de plus à ton ordre.
12:18 Eh bien, merci Pauline et Jérôme d'avoir répondu pendant quelques minutes
12:22 à mes questions. Bon courage pour la suite.
12:25 Merci à toi, Yves.
12:27 Je remercie également tous vos collègues de m'avoir accueilli.
12:31 Ça marche.
12:32 Un grand merci également à Jean-Martin Echeverry,
12:37 le directeur de l'entreprise Pays Basque Ambulances,
12:41 d'avoir donné son accord pour que je puisse venir réaliser
12:46 votre interview dans les locaux de l'entreprise.
12:50 Un grand merci à lui et bonne fin de journée.
12:54 [Musique]

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