La vision agricole de Philippe Poutou, candidat du Npa

  • il y a 2 mois
Election présidentielle 2012

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00:00Comme les ouvriers d'en bas, entre guillemets, il y a de nombreux agriculteurs qui travaillent
00:09beaucoup, les agriculteurs travaillent beaucoup, pour des revenus souvent très faibles.
00:14Quelle est la solution selon vous pour justement utiliser un meilleur retour de leur travail ?
00:21Ça veut dire c'est la remise en cause du système économique, alors c'est vrai qu'on
00:25est tellement loin aujourd'hui de pouvoir espérer à la limite qu'il y ait à un moment
00:29donné une société humaine plus juste où les richesses soient partagées équitablement.
00:33C'est pour ça qu'on dit que c'est irréaliste ou utopique, c'est vrai qu'on s'en revendique
00:38de cette utopie-là, parce que les choses avancent quand il y a des gens qui espèrent
00:42autre chose et qui se battent pour autre chose, mais n'empêche qu'aujourd'hui la question
00:46de la richesse, c'est la question centrale, c'est comment elle se partage et donc comment
00:50on peut arriver à faire en sorte que des millions de gens qui soient dans l'industrie,
00:54qui soient dans les administrations, dans les services ou dans l'agriculture puissent
00:57vivre normalement décemment leur propre travail, et bien ça pose la question de la propriété
01:01et donc c'est pour ça qu'on dit qu'il faut qu'il y ait une propriété collective,
01:04ça ne veut pas dire qu'il ne peut pas y avoir de petites propriétés, mais ça veut
01:07dire que le système économique ne soit pas dominé par les grosses propriétés, par
01:11les gros capitalistes qui imposent la règle du jeu.
01:13Et le problème qu'on a c'est ça, c'est que la règle du jeu, aujourd'hui par exemple
01:16dans l'agriculture, la règle du jeu elle est imposée par les banques, elle est imposée
01:19par les distributeurs, c'est eux qui fixent les tarifs et tout ça, il y a un rapport
01:22de force qui est tel qu'aujourd'hui le petit paysan qui a sa petite propriété,
01:25il est complètement dépendant d'un marché capitaliste, il est complètement dépendant
01:29des règles qui sont fixées par les puissants et c'est ça qu'il faut qu'on arrive à
01:32faire voler en éclat.
01:33Alors après ça suppose en tout cas qu'il y ait une résistance sociale par en bas,
01:37ça supposerait qu'on arrive à s'organiser, à construire des tissus militants, des convergences
01:42et c'est vrai que le monde agricole, le monde industriel, il faudrait que les gens
01:46d'en bas puissent avoir cette conscience que c'est ensemble qu'on s'en sortira,
01:49qu'il faut qu'on se batte ensemble, de la même manière aujourd'hui qu'Arcelor
01:52qui essaie d'empêcher la fermeture, enfin qui craigne en tout cas la fermeture de l'origine,
01:57il faudrait qu'on arrive à se battre ensemble aussi pour que les paysans, les agriculteurs
02:02puissent se sentir liés à ce combat-là et poser leur problème à eux et comment
02:08il peut y avoir des solidarités et des combats communs, mais on a besoin de ça.
02:11Mais c'est plus difficile, enfin c'est plus facile de se battre pour un dossier
02:17comme ArcelorMittal que pour de nombreuses exploitations qui disparaissent chaque jour.
02:23C'est vrai que la difficulté, c'est la parcellisation ou en tout cas le fait qu'un
02:29agriculteur se retrouve souvent seul ou avec sa femme, enfin avec sa famille, mais voilà,
02:32c'est une propriété.
02:33C'est vrai qu'un ouvrier, il a ses collègues à côté et donc la question collective se
02:37pose peut-être plus facilement.
02:38Mais c'est un peu comme une toute petite entreprise, quand il y a un plan de dissenciement
02:43dans une petite entreprise, par exemple de 20 ou de 30, et bien ils ne savent pas comment
02:46répondre parce que d'abord on ne parle pas d'eux, ils sont tous seuls dans un coin,
02:49et c'est un peu, là la difficulté est comparable, c'est que plus on est petit, plus on est
02:53séparé, enfin plus on est isolé ou plus on est loin de la ville où il y a la concentration
02:59de la population, mais plus on se sent complètement faible et donc on n'imagine pas la possibilité
03:03de réagir.
03:04Et dans l'agriculture, c'est certainement ça qui se passe, c'est comment on peut se
03:09retrouver avec l'autre, comment on peut discuter, comment on peut… et le système
03:13est fait de telle manière que tout va dans ce sens-là, comment on peut isoler les gens,
03:17comment on peut les diviser.
03:18Et donc je pense qu'il faut qu'on arrive à reconstruire des liens, alors il y a des
03:23syndicats y compris du côté des agriculteurs, heureusement, mais bon ça ne suffit peut-être
03:26pas.
03:27Il y a un milieu associatif, c'est à travers tout ça qu'il faut qu'on arrive à mettre
03:30en avant des solidarités, à ne pas laisser quelqu'un tout seul, et puis cette conscience
03:34de classe, je veux dire conscience de classe de l'opprimé, de se dire qu'on a intérêt
03:39à se battre ensemble, à se défendre ensemble, et que face aux capitalistes ou aux banquiers,
03:44il faut savoir que notre camp c'est celui d'en bas, mais on n'a pas encore trouvé
03:48l'outil pour arriver à répondre collectivement.
03:52Vous parliez des syndicats à l'instant, avez-vous le sentiment que les agriculteurs
03:57sont aujourd'hui bien défendus par leurs syndicats ?
03:59Non je ne pense pas, mais on pourrait presque dire que c'est un peu pareil pour le monde
04:04ouvrier.
04:05On a des gros problèmes avec les directions syndicales, alors après il y a des syndicats
04:09qui sont moins connus et qui sont plus près des gens et qui sont effectivement avec une
04:13politique honnête en tout cas, mais on a le problème des grosses bureaucraties syndicales
04:18qui mènent une politique qui est plus qu'ambiguë et qui ne s'affronte pas au gros, qui ne
04:23s'affronte pas au capital, et je pense que, je ne suis pas un spécialiste, mais je pense
04:26que dans le milieu agricole il y a aussi cette question qui se pose, la FNSEA, puis on voit
04:31des choix politiques qui sont faits, les interventions, c'est des choses qui sont très discutables
04:35et on s'aperçoit que malheureusement ils subissent la pression sociale, ils subissent
04:41la pression du plus gros et donc du coup les syndicats deviennent des outils qui ne sont
04:44pas forcément un outil de défense des plus petits et là c'est un problème qui est largement
04:49partagé.
04:50Mais les gros syndicats entre guillemets ne sont pas adaptés à la défense syndicale
04:54plus réelle ?
04:55Oui parce que les syndicats se sont complètement intégrés d'une certaine manière au système
04:58capitaliste, intégrés à la structure de pouvoir, intégrés aux institutions et donc
05:02il n'y a plus cette indépendance-là qui a dû et qui a existé en tout cas du côté
05:06des syndicats ouvriers à un moment donné, mais même nous les grosses centrales syndicales
05:09ont une indépendance très relative, d'ailleurs quand on discute du financement des syndicats
05:15on s'aperçoit bien que l'apport des cotisations et la petite part des revenus pour les syndicats
05:22et ça, ça pose des problèmes parce que quand la publicité finance les syndicats,
05:25donc la publicité c'est des entreprises, quand tout ça c'est disproportionné, on
05:30se retrouve avec un problème d'indépendance politique et donc de structures qui sont censées
05:34défendre les plus petits qui se retrouvent intégrées dans quelque chose et donc après
05:38il n'y a pas de surprise, c'est une politique qui est ambiguë, c'est une politique qui
05:41fait du compromis et ça on le paye très cher aujourd'hui, on a besoin et c'est ce
05:45qui nous manque à tous les niveaux donc des outils qui permettent aux gens d'en bas de
05:50s'organiser, de discuter ensemble, de débattre des perspectives, de comment on peut faire,
05:54comment on peut résister à ça et puis avoir les débats politiques et sociétaux sur la
05:58question de l'agriculture, sur la question de l'écologie, comment on produit, le productivisme,
06:02on a besoin d'en discuter mais forcément ces choses-là se discuteront en rupture avec
06:08la logique économique actuelle donc il y a besoin d'une indépendance.

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