Serge Faubert.

  • il y a 2 mois
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00:00Là, on rentre dans une période où on doit, en quelque sorte, enfourcher le tir.
00:05Merci à tous ceux qui ont formulé des encouragements au gouvernement.
00:09Il en a bien besoin.
00:11À votre décharge, le président de la République ne vous aide pas.
00:13Ce n'est pas une exonération totale de responsabilité pénale.
00:17Pour l'adoption 80 contre 89, le Sénat n'a pas adopté.
00:22Robinson, quand le naufrage est là, il ne se prend pas les mains dans la tête
00:27en essayant de faire une grande théorie du naufrage.
00:29Le président de la République qui multiplie les interventions télévisées
00:32est sans livre de sa propre parole.
00:34On en parle tout de suite dans le numéro 76 du P'tit coup de Bourbon.
00:38Bientôt déconfiné.
00:45Mais que lui arrive-t-il ?
00:46Depuis le 1er mai, Emmanuel Macron s'est adressé aux Français à quatre reprises.
00:50Avec le confinement, on va finir par croire qu'il habite à la maison.
00:53Le vendredi 1er mai, il nous promet le retour des cortèges chamailleurs.
00:57Avec cette volonté forte, retrouver dès que possible
01:02les 1er mai joyeux, chamailleurs parfois, qui font notre nation.
01:08Comme celui de l'année dernière.
01:18Le lundi 4 mai, il tient un point de presse au pied de l'escalier de l'Elysée
01:21pour présenter la première étape du déconfinement.
01:24Le lendemain, il visite une école élémentaire à Poissy.
01:27Et hier encore, il s'adresse au monde de la culture
01:29dans un état d'exaltation que lui envierait même Jean-Claude Van Damme pour les plus anciens.
01:33Il faut vivre la vie au jour le jour, à la seconde.
01:37Ou le rappeur Lorenzo pour les plus jeunes.
01:41Lorenzo, c'est mon fils qui me l'a fait découvrir.
01:43Exactement.
01:44On doit en faire un métier apprenant et culturel.
01:48Robinson, quand le naufrage est là,
01:51il ne se prend pas les mains dans la tête
01:53en essayant de faire une grande théorie du naufrage.
01:55Sinon d'ailleurs, nous n'aurions jamais écrit le récit de ces miracles.
02:00Il prend d'abord du jambon, du fromage,
02:02mais il a en lui cette capacité à réinventer une histoire unique.
02:07Emmanuel Macron est même allé jusqu'à faire un clin d'œil
02:10à un théoricien du fascisme, l'Italien Julius Evola.
02:14Là, on rentre dans une période où on doit en quelque sorte enfourcher le tir.
02:20Et donc le domestiquer.
02:22Il ne va pas disparaître le tigre, il sera là.
02:24La peur sera là dans la société.
02:26Elle ne va pas disparaître.
02:28Mais le seul moyen qu'il ne dévore pas, c'est de l'enfourcher.
02:31L'expression enfourcher le tigre, qui intrigue tant,
02:34renvoie à ce livre paru en 1961, Chevauchez le tigre,
02:38le livre de chevet de l'extrême droite mystique.
02:40Evola, lui-même féru d'ésotérisme,
02:42y célèbre les hommes que l'épreuve transcende,
02:45des guerriers détachés du monde qui s'accomplissent
02:48tandis que les autres, les faibles, succombent.
02:51Toute ressemblance avec un locataire de l'Élysée serait fortuite, bien sûr.
02:55Quoi qu'il en soit, occuper la Seine est devenu une obsession pour Emmanuel Macron,
02:59quitte à flinguer tous ceux qui lui font de l'ombre.
03:01À commencer, bien sûr, par Édouard Philippe.
03:03Le 28 avril, voilà ce que déclarait le Premier ministre.
03:06Nous sentons que l'arrêt prolongé de la production de pans entiers de notre économie,
03:13que la perturbation durable de la scolarisation d'un grand nombre d'enfants et d'adolescents,
03:18que l'interruption des investissements publics ou privés,
03:22que la fermeture prolongée des frontières,
03:25que l'extrême limitation de la liberté d'aller et venir,
03:28de se réunir, de rendre visite à ses proches, à ses parents,
03:32présenterait pour le pays non pas seulement l'inconvénient pénible du confinement,
03:39mais en vérité celui bien plus terrible, du risque de l'écroulement.
03:43Forelogiquement, ce mardi, à l'école élémentaire de Poissy,
03:46les deux consoeurs qui s'entretiennent avec le président lui posent la question.
03:49Réponse de celui-ci.
03:51L'écroulement économique, vous le connaissez ?
03:52Non, ce n'est pas ces grands mots.
03:53Je mesure avec vous le choc massif économique.
03:57Ces grands mots.
03:58Sous-entendu, le Premier ministre dramatise.
04:00Pour un peu, il nous dirait qu'il a peur.
04:02Un deuxième exemple de cette belle entente au sommet de l'État.
04:05Lundi, à l'Élysée, Emmanuel Macron commente la séquence qui s'ouvrira le 11 mai.
04:09Il faut l'aborder avec beaucoup d'organisation, de méthode, avec aussi beaucoup de calme.
04:16Il faut le faire avec beaucoup de pragmatisme et de bonne volonté.
04:19C'est ça l'esprit qui est le nôtre.
04:20Donc moi, je veux rassurer nos concitoyens.
04:22Le Premier ministre était il y a quelques instants au Sénat pour aussi expliquer cette stratégie.
04:27Et voilà comment le Premier ministre conclut au même moment son intervention au Sénat.
04:32Merci à tous ceux qui ont formulé des encouragements au gouvernement.
04:36Il en a bien besoin.
04:38Tout est dans ce soupir.
04:40Le président de la République qui n'écoute plus personne,
04:43ivre de sa toute-puissance dans cette séquence historique.
04:46Les Grecs appelaient ça l'hubris, la démesure, la folie des grandeurs.
04:50Et le Premier ministre qui essaie d'assurer l'intendance,
04:53tandis que le doute galope dans le pays.
04:55Toutes les enquêtes d'opinion concordent sur ce point.
04:58Même l'opposition a pitié de l'hôte de Matignon.
05:00À votre décharge, le président de la République ne vous aide pas.
05:03Au contraire, par ses prises de position pour le moins évolutives,
05:08il vous affaiblit à chacune de ses interventions.
05:11Oui, vraiment, Édouard Philippe est à la peine.
05:14Plus personne ne lui fait confiance parce que plus personne ne fait confiance au chef de l'État.
05:19À commencer par les sénateurs.
05:21Mardi, ceux-ci ont voté contre la déclaration de déconfinement du Premier ministre.
05:25Un camouflet sans conséquence puisque le plan s'appliquera.
05:28Mais un camouflet quand même.
05:31Pour l'adoption 80 contre 89, le Sénat n'a pas adopté.
05:36Je vais suspendre la séance.
05:40Dans leur élan, les sénateurs ont également détricoté le projet de loi
05:44prorogeant l'état d'urgence sanitaire qu'ils devaient examiner ce même jour.
05:48D'abord en ramenant son terme au 10 juillet.
05:51Le gouvernement voulait le prolonger jusqu'au 23 juillet.
05:54Ensuite en engadrant très strictement le dispositif de tracing.
05:57Le traçage en bon français.
05:59Des chaînes de contamination par les futures brigades sanitaires.
06:02Et puis, cerise sur le gâteau, les sénateurs ont renforcé la protection juridique des maires.
06:06En effet, 316 d'entre eux, élus en Ile-de-France, ont signé une lettre ouverte
06:11réclamant que la réouverture des écoles soit repoussée.
06:14Ils craignent d'être tenus pour responsables en cas de catastrophe sanitaire.
06:19Les sénateurs, il ne faut pas l'oublier, sont élus pour l'essentiel par les conseillers municipaux.
06:23C'est dire s'ils sont sensibles aux préoccupations des maires.
06:26Ils ont donc voté un article protégeant ces derniers des poursuites pénales
06:30que l'application des consignes de l'exécutif pourrait entraîner contre l'avis du gouvernement.
06:35Ce n'est pas une exonération totale de responsabilité pénale.
06:39Mais c'est éviter que le juge pénal puisse trouver, par l'application de la loi actuelle,
06:47le moyen d'attraire la responsabilité pénale par exemple d'un maire
06:52qui, du fait de la politique du gouvernement, aurait pris un risque.
06:56Attraire, ça veut dire traîner quelqu'un devant la justice.
07:00Le message est clair.
07:01Vous nous dites que vous voulez rouvrir les écoles ?
07:03Très bien. Mais on ne portera pas le chapeau à votre place.
07:08Et puis cette semaine, comme chaque semaine depuis deux mois et demi,
07:11on a parlé des masques. Comment pourrait-il en aller autrement ?
07:15Le 29 avril, les enseignes de la grande distribution
07:17ont annoncé qu'elles vendraient des masques à partir du 4 mai.
07:20Des masques en tissu, grand public, mais aussi des masques chirurgicaux.
07:24Émotion légitime des personnels de santé en apprenant la nouvelle.
07:28Le lendemain, sept ordres de professionnels de la santé publient un communiqué ravageur.
07:34Toute guerre à ses profiteurs.
07:35Comment s'expliquer que nos soignants n'aient pas pu être dotés de masques
07:39quand on annonce à grand renfort de communication tapageuse
07:42des chiffres sidérants de masques vendus au public par certains circuits de distribution ?
07:47Où étaient ces masques quand nos médecins, nos infirmiers, nos pharmaciens,
07:51nos chirurgiens dentistes, nos masseurs-kinesithérapeutes,
07:54nos pédicures podologues, nos sages-femmes,
07:57mais aussi tous nos personnels en prise directe avec la maladie
08:01tremblaient et tombaient chaque matin ?
08:03Interpellé le ministre de la Santé Olivier Véran,
08:05puis le Premier ministre démente l'existence de tous stocks,
08:08comme la Fédération du Commerce et de la Distribution.
08:11Mardi, à l'Assemblée, lors de la séance des questions au gouvernement,
08:14la députée France Insoumise Mathilde Panot revient à la charge.
08:18Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des Solidarités et de la Santé, lui répond.
08:22Les chiffres avancés par la grande distribution que vous évoquiez,
08:25de l'ordre de plusieurs centaines de millions de masques chirurgicaux,
08:28ne correspondent pas à ce qu'il y a en stock aujourd'hui,
08:31mais aux commandes qui ont été passées il y a de cela plusieurs mois
08:35et qui aujourd'hui arrivent en rayon pour le bien et la protection de nos concitoyens.
08:40Les entreprises privées, comme les collectivités locales d'ailleurs,
08:43dont je salue ici le travail, ont le droit d'importer des masques de type chirurgical
08:48depuis le 21 mars dernier.
08:50Elles sont toutefois tenues de déclarer toute commande supérieure à 5 millions de masques
08:53sur les trois mois glissants, vous le savez.
08:55Mais il n'y a donc pas de stock caché. Cette polémique n'a pas lieu d'être.
08:58Commander depuis des mois.
09:00Tiens, tiens, cette affirmation est surprenante.
09:03Si les grandes enseignes peuvent importer des masques depuis le 21 mars,
09:06l'autorisation de les vendre, en revanche, n'a été accordée que le 24 avril.
09:11Comment la grande distribution aurait-elle pu savoir, il y a des mois,
09:14c'est ce que nous dit Adrien Taquet, qu'elle serait autorisée à vendre des masques ?
09:18D'autant qu'il y a des mois, il fallait être sacrément fortiche
09:21pour parier sur une vente massive de masques.
09:23La communication du gouvernement, c'était ça.
09:26Les Français ne pourront pas acheter de masques dans les pharmacies
09:28parce que ce n'est pas nécessaire quand on n'est pas malade.
09:31On est principalement contaminés par gouttelettes.
09:34C'est la raison pour laquelle les autorités sanitaires considèrent
09:37qu'il n'y a pas lieu de porter en continu et en population générale un masque de protection.
09:42Alors quelqu'un ment dans cette affaire.
09:44Ou bien Adrien Taquet, ou bien les enseignes de la grande distribution.
09:48Le 11 mai, c'est dans quatre jours.
09:49Mais le déconfinement a déjà fait sa première victime.
09:52La députée du Barin Martine Vauner a été exclue hier matin
09:55du groupe parlementaire de La République en marche.
09:58Son crime, avoir voté contre le plan de déconfinement du gouvernement le 28 avril.
10:02Du coup, Martine Vauner s'apprête à quitter le mouvement.
10:05Avec cette exclusion, le groupe de La République en marche ne compte plus que 296 députés,
10:10y compris les apparentés.
10:11La majorité absolue à l'Assemblée nationale est à 289 voix.
10:16Dans l'une de ses récentes interventions,
10:18le président de la République a appelé les Français à se réinventer.
10:22Visiblement, ses propres troupes sont loin du compte.
10:25Le jour d'après pour eux, c'est le retour de l'Inquisition.
10:35Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org