Le Plan Secret d’Hitler pour Détruire Paris _ La Ville Menacés par les Nazis _ 1

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En 1944, alors que le Troisième Reich s'effondre, Hitler donne des ordres détaillés concernant la destruction de Paris. Il veut que les monuments et tous les ponts soient minés et que la ville soit réduite à un « tas de décombres ».
Le général von Choltitz, dernier commandant nazi en charge de Paris, a prétendu avoir sauvé la Ville Lumière.
Mais que s'est-il réellement passé ? Nous menons l’enquête.

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Transcript
00:00En août 1944, alors que Paris est sur le point d'être libérée après quatre longues années d'occupation,
00:09Hitler donne l'ordre de détruire la ville en minant les ponts et les monuments.
00:15La légende raconte qu'un général allemand commandant de Paris, Dietrich von Schultitz,
00:24aurait délibérément désobéi au Führer pour sauver cette cité millénaire
00:29qu'Hitler voulait rayer de la carte.
00:35Cette version du sauvetage de Paris nous est racontée par ce général,
00:39dans ses mémoires écrites dès 1950.
00:43Ce récit, célébré par la littérature et le cinéma, a bercé l'imaginaire de plusieurs générations de Français.
00:51Il faut dire qu'elle est belle cette histoire.
00:55Peut-être un peu trop belle.
00:57Quels étaient les plans secrets d'Hitler ?
01:00Pour rechercher la vérité historique, il faut s'immerger dans le mythe,
01:04mener une enquête et exhumer des archives oubliées,
01:08les preuves de ce qui s'est vraiment passé en cette fin d'année 1944.
01:27Juin 1940. La France a perdu la guerre. Le retentissement est mondial, Paris est tombée.
01:54Déclarée ville ouverte, Paris a été livrée sans combat à l'ennemi pour éviter les destructions.
02:05Le 14 juin, à l'aube, les Allemands entrent dans la capitale et la Croix-Gamée flotte au sommet de la Tour Eiffel.
02:1921 ans après l'humiliation du traité de Versailles en 1918, l'Allemagne prend sa revanche.
02:26Hitler vient à la fin du mois de juin admirer sa nouvelle conquête, Paris.
02:32Une visite est claire. En deux heures et demie, le Führer va de monument en monument dans une ville presque déserte.
02:43Paris le fascine. Mais quel sort lui réserve-t-il ?
02:49Dans Mein Kampf, c'est un sentiment de haine et de mépris qu'il exprime à l'égard des Français.
02:56L'ennemi mortel, écrit-il. Un peuple léger, superficiel, qui s'est montré incapable de gagner seul la guerre en 1918.
03:05En un mot, l'ennemi qu'il faut abattre.
03:10Aux yeux du Führer, Paris ne peut être que soumise ou détruite. C'est ce qu'il ordonnera quatre ans plus tard.
03:21Pour appréhender le mythe de la destruction annoncée de Paris, c'est par les mémoires d'un général allemand qu'il faut commencer.
03:30Nous sommes en août 1944. Pour les nazis, la situation a bien changé depuis la visite d'Hitler en juin 1940.
03:40Les soviétiques ont avancé vers l'ouest jusqu'au centre de la Pologne. Les alliés ont débarqué en Normandie et marchent vers l'est.
03:51Hitler nomme un général inconnu, commandant du Grosse Paris, au début du mois d'août. Il s'appelle Dietrich von Schultitz.
04:00Mais qui est cet officier ? D'où vient-il ?
04:08Von Schultitz, c'est vraiment un officier prussien, presque caricatural.
04:15Il est d'une famille d'officiers. Son père était colonel pendant la Grande Guerre. Il est d'une famille de propriétaires terriens.
04:22Donc c'est un officier de carrière de l'infanterie.
04:27Von Schultitz a toute la confiance d'Hitler. Et début août 1944, c'est important.
04:35Le Führer vient d'échapper deux semaines plus tôt à un attentat organisé par des officiers de la Wehrmacht qui souhaitaient l'éliminer pour renverser le régime nazi.
04:45Depuis, il vit replié sur lui-même et a plus que jamais la mainmise sur les opérations militaires.
04:53L'armée était un des piliers du régime parce que c'était l'instrument qui allait permettre les guerres, qui allait permettre les conquêtes, qui allait permettre d'arriver aux objectifs des nazis.
05:05Et là, c'est fini. Il a complètement perdu toute confiance en l'armée.
05:12L'épuration qui suivra cet attentat manqué fera plus de 5000 victimes.
05:18Le général en place à Paris, impliqué dans le complot, finira pendu à un gros de boucher.
05:25Dietrich von Schultitz est nommé pour le remplacer par Hitler en personne. Il n'a pas conspiré contre le Führer. C'est un général fidèle et discipliné.
05:36Il était en Russie à partir de 1941. On sait que depuis début 1942, les nazis avaient décidé une politique de destruction des Juifs d'Europe.
05:46Et l'armée, l'armée régulière, a été largement impliquée dans la mise en place de cette politique.
05:54Il n'y avait pas que des SS qui se livraient aux massacres puis aux déportations.
06:06Von Schultitz n'a en effet pas le profil d'humaniste que la légende lui prête.
06:12C'est un homme parfaitement zélé et qui va se révéler sans pitié.
06:16Lieutenant-colonel en 1940, il viole la neutralité de la Hollande en attaquant Rotterdam.
06:23Il détruit totalement le centre-ville alors que les Hollandais ont déjà capitulé.
06:35En 1942, au siège de Sébastopol, il causera la mort de dizaines de milliers de civils
06:41et ordonnera l'utilisation du mortier Karl, la plus grosse pièce d'artillerie jamais construite.
06:50Il ne laissera que des ruines.
06:57C'est à cet homme sans scrupules qu'Hitler donne les pleins pouvoirs du Grosse Paris.
07:03Ce sera sa première rencontre avec la capitale.
07:06Il n'était jamais venu à Paris alors que le voyage à Paris était aussi un petit peu comme le voyage en Italie,
07:13une sorte d'étape initiatique pour ces milieux un peu cultivés allemands dont il faisait partie.
07:23Et on sait que dès 1944, lorsqu'il était prisonnier des Alliés, il a expliqué aux services américains
07:31à quel point il détestait la France, il détestait Paris, il détestait les Français.
07:40La mission de Von Schultitz est de la plus haute importance.
07:46Paris est un nœud vital de communication.
07:49Depuis Rouen, tous les ponts sur la Seine ont été démolis par les bombardements alliés après le débarquement.
07:56Ce qu'il lui a demandé, c'est de faire en sorte que Paris reste sûr,
08:01parce que Paris est un lieu de passage pour l'évacuation des troupes qui viennent de Normandie.
08:12Von Schultitz prend ses quartiers le 9 août à l'hôtel Meurisse,
08:16un palace situé rue de Rivoli en face du jardin des Tuileries.
08:20Dès son arrivée, il constate que l'ambiance dans la capitale risque de compliquer sa mission.
08:27Quand Schultitz arrive à Paris, il est dans une ville dont les habitants, depuis pratiquement un mois,
08:34ne cessent de manifester, d'une manière ou d'une autre, leur hostilité à l'occupant.
08:42Il y a toute une agitation qui fait qu'il a une image...
08:46Il a très vite une perception négative des Parisiens.
08:58Cet été 44 a fait l'objet d'autres mémoires que celle de Von Schultitz,
09:03comme celle qu'a laissée un diplomate, alors consul de Suède à Paris, Raoul Nordling.
09:09Le mythe fait de lui l'homme qui a su persuader le général d'épargner la capitale.
09:17Écrite juste après la guerre, mais publiée dans les années 2000,
09:21les mémoires de Raoul Nordling conduisent à deux pas de l'hôtel Meurisse, au cercle suédois.
09:27Le consul en était le président et il y rencontrait le tout Paris.
09:32C'est un homme d'affaires avisé. Il a incarné l'adresse tout à fait conséquent,
09:37aussi bien auprès d'hommes d'affaires, puisque ce sont ses collègues, on pourrait dire,
09:43mais également du pouvoir politique, des autorités allemandes.
09:46Mais il a aussi des contacts avec, finalement, certains responsables de la résistance,
09:53quelqu'un qui connaît beaucoup de monde.
09:58La neutralité de son pays dans le conflit mondial donne à Nordling une position unique
10:03et fait de lui un témoin précieux. Dans son récit,
10:07il rencontre de l'état d'esprit des Parisiens à l'arrivée du général.
10:11D'un côté, il y a une aspiration sans aucun doute à la libération,
10:16mais avec une inquiétude qui est d'être certes libéré, mais en vie.
10:22Et on le sait, on est là au début août 44, que des villes ont été détruites ou rasées
10:30et largement bombardées en Normandie et que le sort de Paris n'est pas du tout joué.
10:36Les échos du débarquement, des victoires des Alliés en Normandie,
10:40mêlées à la pénurie et à l'angoisse des représailles,
10:43vont peu à peu semer un esprit de révolte parmi la population.
10:48Le désordre s'installe.
10:52Le 19 août, dix jours après l'arrivée de Von Schultit,
10:55les gaullistes et la résistance communiste lancent un appel à l'insurrection.
10:59En voyant le drapeau tricolore flotter sur la préfecture de police face à Notre-Dame,
11:03les Parisiens comprennent que la situation a basculé.
11:07Les événements se précipitent.
11:17Un peu partout dans la ville, des résistants prennent d'assaut des bâtiments publics.
11:22Dès lors, les Parisiens, élèves et enfants,
11:25s'affrontent.
11:31Des toits, des porches, des fenêtres, au détour des pâtés de maisons,
11:35des tirs se font entendre, des combats éclatent.
11:39L'insécurité est partout.
11:45Dans les rues, les barricades se multiplient,
11:48dressées par une population déterminée.
11:51L'armée allemande, à ce moment-là, ne sait pas encore très bien comment réagir.
11:55Il va y avoir des représailles.
11:57Mais surtout, on va s'apercevoir assez vite
12:00que le rapport de force reste défavorable à l'insurrection.
12:05Le risque est réel que Von Schultit donne l'ordre
12:10de représailles massives envers la population.
12:14En Normandie, l'armée allemande s'effondre face à l'offensive des Alliés.
12:19Pressé par l'état-major de la Résistance et le général Leclerc,
12:23le Haut-Commandement américain a accepté de modifier ses plans
12:27et de laisser les Alliés se défendre.
12:29Mais l'armée allemande n'est pas encore prête.
12:32Elle n'est pas encore prête.
12:34Elle n'est pas encore prête.
12:36Elle n'est pas encore prête.
12:38Elle n'est pas encore prête.
12:40Le Haut-Commandement américain a accepté de modifier ses plans
12:43et de laisser la 2e Division blindée française foncer vers la capitale.
12:51À ces nouvelles de France,
12:53Hitler entre dans une de ses colères légendaires.
12:56Von Schultit reçoit de nombreux coups de téléphone
12:59du quartier général du Führer.
13:01On le somme de rétablir l'ordre.
13:06On raconte que le 23 août, à 11h du matin,
13:09un télégramme crypté venant directement de l'état-major du Führer
13:13arrive à l'hôtel Meurisse.
13:15C'est un ordre sans appel.
13:17Paris ne doit pas tomber entre les mains de l'ennemi
13:20ou alors que ce soit un champ de ruines.
13:31Si un original de cet ordre existe,
13:34c'est au-delà du Rhin qu'il faut aller le chercher.
13:40Les archives militaires allemandes sont conservées à Fribourg-en-Brisgau,
13:44dans le sud-ouest de l'Allemagne.
13:48Cinq bâtiments, 55 km linéaires d'archives,
13:51y conservent l'histoire militaire prussienne et allemande
13:55depuis le milieu du XIXe siècle.
14:02L'historien Bernard Croner va conduire cette recherche de preuves
14:06parmi les centaines de milliers de rapports, de registres,
14:09de plans indexés dans les travées.
14:18Après une fouille minutieuse, l'ordre d'Hitler apparaît enfin.
14:23Il est sans équivoque sur les intentions du Führer.
14:29À l'intérieur de la ville,
14:31il faut intervenir avec les moyens les plus énergiques
14:34contre les premiers signes de soulèvement.
14:36Le dynamitage de pâtés de maisons,
14:39l'exécution publique des meneurs,
14:41l'évacuation de quartiers menacés.
14:44La destruction des ponts sur la Seine sera préparée.
14:47Paris ne peut pas tomber aux mains de l'ennemi
14:49ou seulement comme un champ de ruines.
14:58Hitler est très inquiet de cette situation
15:00parce que perdre Paris signifie aux yeux du monde
15:03que la Wehrmacht et le Reich allemand ont perdu la France.
15:15Cet ordre de Hitler, détruire la ville ou laisser un champ de ruines,
15:19laisse peu de place à l'interprétation.
15:21Il faut que toute la ville ou une partie de la ville,
15:24les monuments importants, la valeur de la ville, le symbole de Paris,
15:28soient réduits à néant, que ces quartiers soient minés, détruits.
15:34Ce type d'ordre se situe dans une logique
15:37qui est celle aussi de la fascination des nazis pour la destruction.
15:46Faire table rase, montrer qu'une fois qu'on partait,
15:50qu'une fois que l'Allemagne nazie partait,
15:52il ne restait plus rien.
15:56Ici, Hitler délaisse la perspective militaire.
15:59Et dans la dernière phrase de son ordre,
16:01on voit clairement une perspective idéologique et politique irrationnelle,
16:05ce qui montre que le régime nazi, à ce moment-là,
16:08a commencé à sombrer dans l'agonie.
16:16Dans ses mémoires, von Scholtitz raconte.
16:20Avec un zèle tout à fait louable,
16:22les sections firent les préparatifs nécessaires
16:25pour pouvoir, à leur hache,
16:27faire sauter les ouvrages.
16:32Nous dit-il la vérité ?
16:35Comment savoir ce qui, dans la capitale,
16:37était réellement miné ?
16:40Les ponts de Paris étaient-ils tous truffés d'explosifs ?
16:45Les Allemands ont-ils, comme on l'a dit,
16:47chargés de mines les flancs métalliques de la Tour Eiffel ?
16:52Malgré les heures passées à consulter et analyser
16:55les registres d'archives du site de Fribourg-en-Brisgau,
16:58il n'y a dans les documents aucun indice nous renseignant sur ce point.
17:04Où est la vérité ?
17:06En menant plus loin l'investigation,
17:08on découvre qu'après la libération de Paris,
17:11des équipes de démineurs ont quadrillé la capitale
17:14pour inspecter les édifices potentiellement minés.
17:19Ce travail a certainement dû faire l'objet de rapports,
17:22mais où les trouver ?
17:25Après des semaines de recherches,
17:27la préfecture de police confirme.
17:29Ces rapports sont en sa possession
17:31au laboratoire central de la préfecture.
17:36En 1944, cet organisme était déjà chargé
17:39des missions de sécurité relatives aux substances explosives.
17:44Il n'est pas facile de se faire ouvrir les portes
17:47de cette antenne discrète de la police.
17:49Pour cette enquête,
17:51l'historien et ancien inspecteur général, Luc Rudolphe,
17:54a été autorisé à pénétrer dans ce lieu sensible.
18:02Les archives du laboratoire abritent des documents
18:05dont certains relèvent du secret défense.
18:11Ceux de l'année 1944 ont heureusement dépassé
18:14le chiffre d'intrusion.
18:16Ceux de l'année 1944 ont heureusement dépassé
18:19le délai de restriction fixé à 60 ans
18:22et sont donc enfin accessibles.
18:24On est en déminage, 1944.
18:26D'accord, 1944.
18:29On va déjà regarder dans les rapports mensuels,
18:32voir s'il y a des choses intéressantes.
18:34Un payé, désignation des produits.
18:394 août, 7 août.
18:42Là, on n'a pas ce qui s'est passé
18:44pendant la semaine de l'allumération.
18:46C'est dans un autre rapport,
18:48mais qui, malheureusement, n'existe plus aux archives.
18:51Par contre, le R.A. 180,
18:53c'est vraiment les interventions du mois d'août.
18:56Là, c'est un résumé.
18:58Ça retrace toutes les activités du service explosif
19:01qui étaient là pour protéger la population
19:04et pour ramasser tout ce qui n'était pas explosé.
19:07A chaque fois que les Allemands partaient d'un bâtiment,
19:10ils vérifiaient si le bâtiment avait été miné ou pas
19:13pour pouvoir enlever au fur et à mesure
19:15et sécuriser les locaux.
19:17On va voir ça de plus près.
19:22Parmi ces dossiers malmenés par la guerre,
19:25c'est presque un miracle d'avoir retrouvé ce rapport
19:28daté du 9 septembre 1944,
19:302 semaines après les événements.
19:32Il est rédigé par le directeur du laboratoire lui-même,
19:36le professeur Henri Moureux.
19:38Ce document va-t-il enfin apporter la preuve
19:41de la réalité du minage de Paris ?
19:44Il y a des endroits qui ont été minés,
19:47d'autres endroits qui ne l'étaient pas.
19:50Certains étaient entre les deux.
19:52On a préparé le terrain, mais les mines n'ont pas été posées.
19:56Le palais du Sénat est très largement miné.
19:59On va y trouver beaucoup d'explosifs
20:02qui vont être désamorcés par le laboratoire municipal.
20:06Le fort de Charenton,
20:08c'est un endroit où était stocké beaucoup de munitions.
20:11Cet endroit a été miné.
20:13Si ça avait sauté, ça aurait été un désastre de grande ampleur.
20:19Au palais Bourbon, c'est l'endroit qui a été le plus lourdement miné.
20:23C'est une découverte qu'on fait dans ce document
20:26puisqu'il y a 5 grosses mines de pratiquement 500 kg chacune
20:30qui ont été installées au palais Bourbon.
20:33Et qu'il a fallu désamorcer.
20:35Donc là, on est sûr, les mines ont été découvertes.
20:38On sait que l'équipement était en place et prêt à fonctionner.
20:46En plus de ces 3 édifices,
20:48les centraux téléphoniques, le ministère de la Marine,
20:52la gare du Bourget ainsi que la porte de Saint-Cloud étaient minés.
20:56Et ce que nous apprend ce rapport ne s'arrête pas là.
21:00Il semble que d'autres bâtiments aient été préparés
21:03dans le but de recevoir des explosifs.
21:06Il y a ce qui a été préparé pour recevoir des mines.
21:10Le pont de Neuilly, le pont de Joinville,
21:13le pont de Saint-Cloud, le pont Alexandre III, les Invalides.
21:17Il y a eu des travaux préparatoires qui ont été faits.
21:20Donc tout était en cours pour mener à terme
21:23l'installation de mines dans ces endroits-là.
21:26Des centres du pouvoir politique, des gares, des ponts.
21:30Mais l'autre révélation de cet archive est qu'aucun des monuments
21:34pour lesquels on a tremblé a posteriori,
21:37en pensant qu'ils auraient pu disparaître, n'a été miné.
21:41Une des légendes, c'était que la tour Eiffel était minée.
21:45On a même parlé de la...
21:47Comme quoi l'hôtel de ville était miné. Ce n'est pas le cas.
21:51On a trouvé dans tous ces documents,
21:54c'est écrit très clairement dans le rapport du professeur Moureux,
21:58on a trouvé dans ces bâtiments des munitions.
22:01Mais dans tous les endroits où sont passés les Allemands,
22:05on a retrouvé des munitions qu'il a fallu neutraliser par après.
22:09Mais en aucun cas, ces endroits n'ont été minés.
22:13Que doit-on comprendre de ce minage aléatoire et partiel ?
22:17L'impression qu'on retire de tout ça, c'est quoi ?
22:20C'est que ces gens ont été pris par le temps.
22:23Effectivement, cette volonté initialement
22:26de miner un certain nombre de lieux sensibles de Paris existait
22:30et qu'elle n'a été abandonnée que pour une raison très précise
22:34qui m'apparaît à moi, mais qui apparaît également au professeur Moureux
22:38quand il a rédigé ce document.
22:40C'est-à-dire que nos occupants ont été pris par le temps
22:43C'est probablement faute de temps, conséquence immédiate
22:46de l'action efficace de harcèlement des forces françaises de l'intérieur,
22:50que le feu n'a pas été mis partout aux charges explosives.
22:57À partir du 22 août, plus de 600 barricades
23:00entravent les mouvements des occupants
23:02qui doivent se retrancher sur leur position.
23:05Il n'est plus question pour eux ni de continuer le minage
23:08ni de s'approcher des ouvrages minés pour en déclencher la mise à feu.
23:12Ça demande beaucoup de moyens de détruire une ville
23:15et de raser une ville, de transformer une ville en champ de ruines.
23:18Soit par le bombardement aérien, mais là, il n'en est évidemment pas question.
23:22La Luftwaffe n'a plus ces moyens-là.
23:24Soit par l'explosif, mais là, ça demande beaucoup d'hommes.
23:27C'est-à-dire qu'il n'y a pas d'armes,
23:29c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'armes,
23:31c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'armes,
23:33soit par l'explosif, mais là, ça demande beaucoup d'hommes,
23:36beaucoup de moyens d'explosifs et ça demande du temps.
23:40Von Schultitz a arrêté le minage, un petit peu contraint et forcé,
23:44parce que les rues de Paris n'étaient plus suffisamment sûres pour ses troupes
23:48pour aller miner tel ou tel endroit de la capitale.
23:54C'est l'insurrection qui a empêché le forfait de se commettre, tout simplement.
24:04Mais il existe une preuve plus accablante encore des mensonges du général.
24:09Elle démontre sa réelle volonté de piéger les ouvrages importants de la capitale.
24:14Un document qui atteste que Von Schultitz n'a cessé de demander des renforts
24:19jusqu'au dernier moment pour détruire Paris.
24:26Ces documents devant moi sont des transcriptions de coups de feu.
24:30Ces documents devant moi sont des transcriptions de conversations téléphoniques
24:34entre le commandant du secteur du Grosse Paris, c'est-à-dire Von Schultitz,
24:38avec le commandement des armées de l'Ouest, le général Model.
24:43Von Schultitz dit clairement, je ne peux pas appliquer les ordres du Führer
24:47avec les moyens dont je dispose.
24:49Je ne pourrai agir que si je reçois les chars et l'artillerie que j'ai réclamée.
25:01On peut s'imaginer que si ces ouvrages n'étaient pas protégés,
25:05la résistance aurait pu saboter le matériel.
25:08Il fallait protéger ses opérations de minage.
25:11Et il lui était impossible de sécuriser ces lieux piégés
25:14avec le peu de moyens humains qu'il avait à sa disposition.
25:20Le général Von Schultitz manque de soldats.
25:23Il dispose en théorie d'une garnison de 15 à 20 000 hommes dans Paris et sa banlieue,
25:28mais tous ne sont pas opérationnels au combat.
25:31Des états-majors, des militaires âgés, des services administratifs
25:35et beaucoup de personnel féminin les sourigrisent.
25:41Les renforts réclamés par Von Schultitz n'arriveront jamais.
25:44Les alliés sont aux portes de la capitale.
25:48Il veut obéir et il se justifie en disant,
25:50si je ne peux pas réaliser cet ordre, ce n'est pas de mon fait.
25:53Ce n'est pas que je ne veux pas, c'est que je ne peux pas.
25:58Dans ses mémoires, Von Schultitz affirme
26:01qu'il a tenté l'impossible pour sauver Paris de la destruction.
26:05Désormais, la preuve est faite.
26:07En réalité, c'est le soulèvement des Parisiens
26:10et le manque de moyens humains et matériels
26:13qui l'ont empêché de faire de Paris un champ de ruines.
26:22Pour sa part, le consul de Suède Raoul Nordling,
26:26qui a souvent rencontré le commandant du Grosse Paris,
26:29n'évoque jamais dans son récit
26:31les conversations qu'on leur prête
26:33sur la nécessité de sauver la Ville Lumière.
26:37Ce qui est peut-être surprenant dans les mémoires de Raoul Nordling,
26:40mais qui est à mon avis un éclairage important,
26:43c'est que pour lui,
26:47la question de la destruction de Paris
26:49ne se pose pas réellement dans leurs discussions.
26:51Ce n'est pas pour ça qu'il intervient.
26:53Manifestement, Nordling ne croit pas
26:55que Scholtitz puisse raser Paris,
26:57que ce soit dans ses projets.
26:59Donc ce n'est pas le sujet prioritaire pour Nordling, loin de là.
27:04Si Nordling rencontre à cinq reprises
27:06le général à l'hôtel Meurisse,
27:08c'est pour l'exhorter à ne pas commettre
27:10de représailles contre la population.
27:14Les massacres de Villeneuve-Dasque
27:16ou d'Oradour-sur-Glane,
27:18perpétrés quelques semaines plus tôt,
27:20sont connus des Parisiens
27:22et font craindre le pire.
27:25Nordling, en lui montrant bien
27:27que pour lui, il ne fait plus aucun doute
27:29que l'Allemagne va être battue,
27:31et qu'en ne passant pas massivement
27:33à l'offensive contre les Parisiens
27:35et à la destruction,
27:37il se préserve quand même une chance d'avenir.
27:41C'est un des arguments majeurs
27:43que va utiliser Nordling.
27:45L'idée que vous allez être jugé,
27:47allez-vous devoir rendre des comptes
27:49pour avoir massacré
27:51des centaines, des milliers,
27:53voire plus de Parisiens ?
27:55Et là, l'idée que le sort des armes
27:57est en des faveurs
27:59et qu'il faut commencer à avoir
28:01une sorte de garantie pour l'avenir,
28:03germe probablement
28:05dans l'esprit de von Scholtz.
28:07Von Scholtz n'avait pas
28:09comme principal but
28:11de sauver Paris,
28:13mais il avait comme principal but
28:15de sauver sa peau.
28:17Von Scholtz n'aura pas
28:19à hésiter très longtemps.
28:21Un jour après l'ordre d'Hitler,
28:23le général Leclerc fait son entrée
28:25avec la 2e division blindée
28:27par la porte d'Orléans.
28:29Le massacre des Parisiens n'aura pas lieu.
28:33Von Scholtz capitule
28:35après un dernier combat pour l'honneur
28:37à l'hôtel Meurisse.
28:41Il est conduit à la préfecture de police,
28:43dans ce qui sont encore aujourd'hui
28:45les appartements privés du préfet.
28:51C'est dans cette pièce,
28:53conservée à l'identique,
28:55qu'il s'est retrouvé avec le général Leclerc,
28:57les officiers de la résistance
28:59et les membres du gouvernement provisoire
29:01pour signer, sur cette petite table,
29:03son acte de reddition.
29:07On a quand même l'impression
29:09que von Scholtz est arrivé à ses fins.
29:11Il se retrouve ici,
29:13vivant.
29:15Il est prisonnier, certes,
29:17mais comme le dira un peu plus tard Leclerc,
29:19c'est quelqu'un qui a l'air bien content d'être ici.
29:21En effet, il est content d'être là,
29:23mais comme la plupart des soldats allemands
29:25qui ont été faits prisonniers à ce moment-là.
29:27Ils étaient prisonniers,
29:29donc ils n'étaient pas morts.
29:31Oui, il est arrivé à ses fins.
29:35Cette réunion s'est déroulée à huis clos,
29:37sans journaliste ni photographe.
29:39Pourtant, une photo est présentée
29:41par les ouvrages, les journaux,
29:43comme étant la photographie de cet événement.
29:45Il ne s'agit pas du tout
29:47de la signature de la reddition,
29:49mais d'une réclamation,
29:51parce qu'à l'hôtel Meurisse,
29:53quand il était parti,
29:55on lui avait volé
29:57des effets personnels
29:59dans sa cantine militaire.
30:01C'était le grand jeu des Parisiens
30:03ce jour-là,
30:05de faucher tout ce qui rappelait
30:07un petit peu les Allemands.
30:11Je trouve qu'elle est quand même
30:13significative, cette photographie.
30:15Lorsque l'on sait ce qu'il signe,
30:17nous sommes le 25,
30:19en fin d'après-midi.
30:21Il y a encore quelques combats
30:23qui sont meurtriers dans la ville.
30:25Il y a tombé certaines placeforts,
30:27notamment à Vincennes,
30:29et l'on découvre des charniers
30:31de personnes qui ont été tuées
30:33récemment par ces soldats.
30:35Et lui, il s'inquiète
30:37parce qu'il a perdu son pyjama.
30:43Prisonnier des Alliés,
30:45Dietrich von Scholtitz
30:47ne sera jamais jugé
30:49pour crime de guerre.
30:51On le libérera
30:53après deux années de captivité
30:55durant lesquelles
30:57il commencera à écrire
30:59sa propre légende.
31:01Von Scholtitz est parvenu à écrire sa légende
31:03et à s'en sortir quand même assez bien
31:05puisque finalement son livre
31:07est plutôt bien accueilli,
31:09traduit en français,
31:11et l'idée qu'il a vraiment
31:13contribué à sauver Paris
31:15prend forme, comme si c'était un acte
31:17humanitaire de sa part.
31:21Paris sort miraculeusement intact
31:23d'une semaine d'insurrection
31:25et de combat, dans une guerre
31:27qui a martyrisé les villes
31:29comme jamais.
31:35On aurait pu imaginer
31:37que la libération de Paris allait réduire
31:39à rien les désirs de destruction d'Hitler.
31:43Pourtant, il n'en est rien.
31:45Bien au contraire.
31:53Contrairement à ce qui est resté dans les mémoires,
31:55la menace qui plane sur Paris
31:57depuis un mois ne s'est pas volatilisée
31:59avec le défilé du général De Gaulle.
32:05Alors que le rage commence à l'antagonie,
32:07détruire Paris reste, pour le Führer,
32:09une obsession.
32:13Les archives vont nous révéler que par trois fois encore,
32:15il va tenter de l'anéantir.
32:17Trois tentatives
32:19que l'histoire ne retiendra pas.
32:25Les recherches effectuées aux archives militaires de Fribourg
32:27ont permis d'exhumer un document
32:29inédit, révélant une nouvelle menace,
32:31inconnue jusqu'alors.
32:33Dépêchez-vous
32:35de préparer certaines positions
32:37qui sont à l'est de la Somme.
32:39Orientez vos rampes de lancement V1
32:41vers Paris.
32:43Signalez-nous quand vous serez prêts à tirer.
32:47On s'aperçoit que juste après
32:49la libération de Paris, de nouvelles mesures seront prises.
32:53Après, le 25 août,
32:55Hitler va tout mettre en œuvre
32:57pour trouver d'autres moyens de détruire Paris.
33:03À l'annonce de l'arrédition du commandant
33:05du Grosse Paris,
33:07le Führer a donc décidé d'utiliser son arsenal
33:09secret.
33:11Des armes de représailles terribles,
33:13ultime tentative pour reprendre la main
33:15sur le cours de la guerre,
33:17en terrorisant les populations.
33:21Dissimulé par la végétation sur le Mont d'Elfaux,
33:23dans le Pas-de-Calais,
33:25un immense bloco souterrain,
33:27surplombé d'une coupole,
33:29fut construit à partir de 1943
33:31pour servir de base de lancement
33:33de ses nouvelles armes.
33:35Ce géant de béton
33:37est aujourd'hui un musée
33:39qui conserve la première de ses armes secrètes,
33:41le fameux V1,
33:43premier missile à longue portée
33:45de l'histoire de l'aéronautique.
33:47C'est une bombe
33:49planante.
33:51La charge militaire est à l'avant
33:53de l'ordre d'une tonne.
33:55Une bombe d'une tonne
33:57qui tombe dans un immeuble,
33:59c'est une arme
34:01qui était redoutable.
34:07Cela fait déjà plus de deux mois
34:09que l'Angleterre subit tous les jours
34:11le déluge des V1.
34:1570 s'écrasent quotidiennement sur Londres,
34:17faisant des milliers de victimes.
34:29Et c'est cette arme
34:31de destruction massive
34:33qu'Hitler ordonne
34:35de lancer sur Paris
34:37le 26 août,
34:39le jour où le général de Gaulle
34:41défile dans un Paris en liesse.
34:49Cet épisode
34:51est absolument méconnu.
34:53On en trouve juste la trace
34:55dans Invasion 44,
34:57les mémoires du chef d'état-major
34:59du groupe d'armée de l'Ouest,
35:01le général Hans Speidel.
35:07Il se trouve alors au Ravin-du-Loup.
35:11Le Ravin-du-Loup,
35:13c'est 90 km2 de zone militarisée
35:15au nord de Soissons,
35:17à Margival.
35:21475 bunkers de béton armés,
35:23dont le plus grand centre
35:25de transmission allemand.
35:33C'est une ruche de techniciens
35:35avec 600 lignes
35:37téléphoniques installées.
35:41C'est le nec plus ultra
35:43de la communication militaire.
35:47C'est là que le général Speidel,
35:49numéro 2 du groupe d'armée B,
35:51va recevoir l'ordre de Berlin.
35:53Il faut s'imaginer
35:55dans la tête de Hans Speidel
35:57ce 26 août lorsqu'il reçoit cet ordre.
35:59Son supérieur hiérarchique
36:01modèle n'est pas là.
36:03Va-t-il
36:05faire état de cet ordre ?
36:07Ou bien
36:09absence, ellipse, silence
36:11total ?
36:15Il trouve absurde stratégiquement
36:17cet ordre.
36:19Paris est déjà perdu.
36:21Et effectivement,
36:23c'est une ville, on le sait,
36:25auquel il est attaché.
36:29Dans les années 30,
36:31Hans Speidel avait été envoyé à Paris
36:33comme attaché militaire
36:35de l'ambassadeur d'Allemagne.
36:37Il y est revenu deux ans
36:39sous l'occupation.
36:41Et c'est lui qui a organisé
36:43la visite d'Hitler en 1940.
36:45Il connaît bien Paris.
36:47Et dans son propre bunker
36:49dont il dispose également
36:51à Margival, il a des vues
36:53de Paris, la Sainte-Chapelle,
36:55Notre-Dame.
37:01Il s'est passé quelque chose,
37:03une scène importante
37:05dont a dépendu le destin de Paris.
37:09Dans ses mémoires, Speidel raconte
37:11qu'il n'a pas transmis cet ordre
37:13et que Paris fut sauvé.
37:17Je pense que les mémoires
37:19de Speidel permettent
37:21de rouvrir le dossier
37:23du salut de Paris
37:25et du sauvetage de Paris.
37:29La légende se serait donc
37:31trompée de général.
37:33Le héros serait Hans Speidel
37:35et non pas Dietrich von Schultitz.
37:37Mais il faut se méfier
37:39des histoires trop belles.
37:43Cet ordre donné par Hitler
37:45était un ordre irréalisable.
37:49Le système de guidage
37:51était un gyroscope
37:53qui gardait l'axe
37:55et il fallait que ce soit très précis
37:57parce que si vous vous trompez
37:59de quelques minutes de degré,
38:01à l'arrivée, ça fait 10 km à droite,
38:03par exemple.
38:05Donc il faut le lancer
38:07exactement dans l'axe de l'objectif.
38:09Or, les rampes de lancement
38:11étaient tournées vers l'ombre.
38:15C'est un ski qui fait 50 m de long
38:17et c'est pas facile.
38:19S'il faut retourner de 90 degrés,
38:21il faut les démonter, les changer,
38:23retrouver des bons endroits
38:25parce que ça se tire pas au milieu d'une colline.
38:27Il faut des endroits plats
38:29et effectivement,
38:31il faut tout recommencer
38:33et faire des visées pour que ça arrive dans Paris.
38:35Et ça, c'est quasiment impossible
38:37à faire d'un claquement de doigts.
38:39Rien ne permet de savoir
38:41si Speidel a bien écrit la vérité
38:43dans ses mémoires.
38:45Mais qu'il ait été transmis ou non,
38:47l'ordre d'Hitler
38:49était impossible à exécuter.
38:53La capitale échappe
38:55une nouvelle fois à son prédateur.
38:59Ignorant de ces menaces,
39:01les Parisiens sont tout à l'euphorie
39:03de la libération.
39:05Une liesse qui sera pour le moment
39:07de courte durée.
39:17Ce même jour,
39:19à 23h,
39:21comme une réponse aux rumeurs de la fête,
39:23retentit soudain
39:25le son des sirènes.
39:29C'est un amalgame
39:31d'avions
39:33qui étaient stationnés
39:35dans le nord de la France
39:37et qui n'étaient pas encore libérés
39:39dans le sud de la Belgique.
39:41Ils ont réussi à mettre 120 avions
39:43en l'air cette nuit-là
39:45qui sont arrivés sur Paris
39:47dans deux axes de bombardement
39:49et qui ont fait du dégât.
39:57Toute la nuit,
39:59la Luftwaffe pilonne au hasard.
40:01Au petit jour,
40:03le moment de liberté est déjà loin.
40:05Des centaines d'immeubles détruits,
40:07l'hôpital Bichat,
40:09la Halle-aux-Vins au cœur de Paris,
40:11le quartier du Marais,
40:13les buts Chaumont,
40:15mais aussi la banlieue,
40:17Bagnolet, Pantin, Montreuil, Sceau.
40:19C'est un bombardement
40:21punitif.
40:23Le choix des bombes aussi est significatif.
40:25C'était des bombes incendiaires
40:27qui avaient pour but vraiment
40:29de détruire, d'impressionner
40:31la population.
40:33Il s'agissait aussi symboliquement
40:35de dire, vous croyez que vous nous avez vaincus,
40:37ben non, on peut encore vous faire du mal.
40:39Mais la Luftwaffe
40:41est exsangue,
40:43décimée par la bataille de Normandie,
40:45incapable de réitérer
40:47ses raids meurtriers.
40:51Malgré ses 200 morts
40:53et près de 1000 blessés,
40:55ce bombardement va disparaître
40:57de la mémoire collective.
40:59Il était difficile, peut-être,
41:01de dire que les Allemands
41:03avaient bombardé Paris
41:05et avaient fait X victimes,
41:07alors que
41:09la Royal Air Force
41:11et la 8e Air Force américaine
41:13avaient fait des dizaines de milliers
41:15de morts civiles français
41:17au cours de la période du débarquement.
41:21Donc on oublie dans l'histoire,
41:23on n'en parle plus.
41:25Dans l'esprit de tous, pourtant,
41:27le 26 août 1944,
41:29la menace de représailles
41:31est redevenue bien réelle.
41:35Deux semaines plus tard, le 8 septembre,
41:37une explosion pulvérise 60 maisons,
41:39un quartier entier
41:41de la ville de Maisons-Alfort,
41:43à moins de 10 km de Paris.
41:45Des dégâts matériels
41:47à peine croyables
41:49pour une seule déflagration.
41:51Le Figaro,
41:53qui relate l'événement,
41:55n'est plus inattendu,
41:57laissant supposer un engin supérieur au V1.
42:01Henri Moureux,
42:03le directeur du laboratoire municipal
42:05qui avait été chargé du déminage de la capitale,
42:07se rend sur les lieux.
42:09Il fera un rapport détaillé
42:11de ses observations.
42:15La recherche de ce rapport,
42:17classé secret, conduit aux archives
42:19du ministère de la Défense,
42:21au cœur du château de Vincennes.
42:23Marianne Maudjary sait où il se trouve,
42:25archivé quelque part,
42:27au milieu du dédale
42:29de ses millions de dossiers.
42:33Le professeur Moureux y décrit
42:35en détail ses impressions
42:37à la vue des dégâts.
42:41Le 8 septembre, à 11h du matin,
42:43une explosion soudaine se produisit à Charentono,
42:45Maisons-Alfort.
42:47Prévenu aussitôt par les services de police,
42:49je, Henri Moureux,
42:51j'ai fait un nombre de constatations
42:53qui me firent pressentir l'apparition d'un engin nouveau.
42:55Henri Moureux,
42:57quand il arrive sur ce site de crash,
42:59il voit tout de suite
43:01qu'il n'y a aucun lien
43:03par rapport aux dégâts
43:05qu'il voit,
43:07avec les dégâts causés par l'EV1.
43:09Il a déjà été sur des crashs d'EV1
43:11en juillet 44,
43:13ce qui fait que, tout de suite,
43:15ça le trouble.
43:17Il se dit que c'est autre chose.
43:19C'est le témoignage des rescapés
43:21qui va lui ouvrir les yeux.
43:23Il lui affirme n'avoir entendu aucun bruit
43:25ni constater le passage
43:27d'aucun avion.
43:29Le 29 août,
43:31il a rencontré des agents
43:33des services secrets américains
43:35qui lui ont dit
43:37que les Allemands avaient inventé
43:39un engin fusée.
43:41Il fait donc le lien entre
43:43ce que les Américains lui ont dit
43:45et ce qu'il voit.
43:47Du coup, pour lui,
43:49c'est une révélation.
43:51Et pour cause,
43:53la capitale de la France
43:55vient d'avoir le privilège
43:57d'être la cible
43:59du premier engin balistique
44:01de l'histoire,
44:03la fusée V2.
44:05Bernard Croner a retrouvé
44:07le premier télégramme d'Hitler
44:09concernant cette fusée.
44:11Le Führer est formel.
44:13Il ordonne...
44:15Le V2, c'est une bête
44:17qui fait 12 tonnes.
44:19Il décolle à verticale,
44:21il monte jusqu'à 95 kilomètres
44:23d'altitude.
44:25Il sort de l'atmosphère
44:27et lorsqu'il redescend,
44:29il a une portée de 350 kilomètres,
44:31320 kilomètres exactement au maximum.
44:33Il retombe sur la cible.
44:35C'est la première fois
44:37que l'on voit un engin
44:39de cette taille
44:41à partir d'une fusée
44:43sur la cible.
44:45C'est la première fois
44:47qu'on fait sortir une arme
44:49de l'atmosphère.
44:55La V2,
44:57c'est une révolution.
44:59Une fusée qui vole
45:01à la vitesse de 5000 km heure.
45:03Il ne lui faut que 5 minutes
45:05pour parcourir les 300 kilomètres
45:07qui séparent le site de tir
45:09situé en Belgique de Paris.
45:11Plus rapide que la vitesse du son,
45:13elle est totalement silencieuse.
45:15Elle est impossible
45:17à intercepter.
45:19Pour Hitler,
45:21c'est l'arme miraculeuse
45:23qui va marquer un tournant dans la guerre.
45:29Au début du mois d'octobre 1944,
45:31les tirs de V2 qui ciblent Paris
45:33reprennent et touchent
45:35de nombreuses villes.
45:37On s'aperçoit que les Allemands
45:39entre le 2 et le 5 octobre
45:41affinent le réglage des tirs.
45:43Ils veulent attaquer Paris,
45:45mais ils n'ont pas la précision
45:47qu'on peut avoir aujourd'hui.
45:49Donc le réglage
45:51se fait et ils précisent
45:53leurs tirs pour atteindre
45:55le centre de Paris.
45:59En date du 5 octobre,
46:01les fusées sont
46:03aux portes de Paris.
46:05En 4 jours,
46:0722 communes en région parisienne
46:09sont la cible des V2.
46:11Les autorités se préparent au pire.
46:13Pourtant, les tirs vont
46:15s'interrompre brutalement.
46:17A partir du 6 octobre,
46:19plus aucun impact ne sera signalé
46:21en direction de la capitale.
46:25Pourquoi Hitler délaisse-t-il Paris
46:27alors que sa destruction est enfin
46:29à portée de main ?
46:33C'est encore une fois à Fribourg
46:35que Hitler répond dans un ordre
46:37émanant du haut commandement
46:39de la Wehrmacht.
46:41Pour des raisons politiques,
46:43tout tir contre Paris par V2
46:45sera suspendu.
46:49Cet ordre signifie
46:51que dans le quartier général d'Hitler,
46:53on s'est accordé sur l'idée
46:55que bombarder Londres
46:57aurait un effet politique et psychologique
46:59sur la population
47:01qui pousserait les autorités britanniques
47:04alors que sur Paris,
47:06un bombardement n'aurait plus eu aucun impact
47:08ni conséquence politique.
47:16Hitler semble se rendre à la raison.
47:20De plus, son haut commandement
47:22a un argument imparable.
47:24La livraison des V2,
47:26rendue presque impossible
47:28par l'avancée des alliés.
47:33Ils n'ont pas assez d'unités,
47:35ils n'ont pas assez d'engins,
47:37ça gâche des fusées,
47:39pour rien.
47:41En revanche, bombarder Londres
47:43où se trouvent des troupes alliées,
47:45bombarder Anvers
47:47où débarquent ces troupes alliées
47:49qui se dirigent vers l'Allemagne,
47:51c'est une raison.
47:53Et c'est pour ça que les tirs se concentrent
47:55principalement sur ces deux villes.
47:57Quand on voit les dégâts qu'il y a eu
47:59sur Londres et sur Anvers,
48:01surtout certains crashs très meurtriers
48:03sur Anvers,
48:05on peut dire que Paris l'a échappé bien.
48:11Avec la fusée V2,
48:13jamais dans son histoire,
48:15la Ville Lumière n'a frôlé
48:17d'aussi près le risque de destruction.
48:21Cet épisode a été rayé
48:23de notre mémoire commune.
48:27Pourquoi ?
48:29A la fin de la guerre,
48:31les alliés vont récupérer la technologie
48:33et les ingénieurs de la V2.
48:35Et ce sont ces scientifiques allemands
48:37qui développeront les programmes
48:39spatiaux des Etats-Unis
48:41et de l'URSS.
48:43La fusée V2
48:45est l'ancêtre de toutes les fusées modernes.
48:47Ce sont ces fusées
48:49qui ont envoyé Gagarin dans l'espace
48:51et Armstrong sur la Lune.
48:53Et en France, le programme Ariane a existé
48:55parce que ces ingénieurs
48:57sont venus travailler
48:59à côté d'ingénieurs français.
49:01Très peu de personnes savent
49:03que des ingénieurs allemands sont venus en France.
49:05Ils ont participé
49:07à la politique de reconstruction
49:09de l'industrie militaire française.
49:11Et donc ça a été,
49:13à mon sens, étouffé.
49:15C'est resté dans le domaine du secret.
49:25La chute du nazisme
49:27a rendu sa sérénité
49:29à la capitale.
49:31Vingt ans après,
49:33la véritable menace des fusées V2
49:35a été effacée de l'histoire officielle
49:37et l'opinion mondiale s'enflamme
49:39pour un général allemand,
49:41sauveur de Paris.
49:45Dans une villa de Baden-Baden
49:47vit l'homme qui fut du côté allemand
49:49au centre des heures dramatiques
49:51de la libération de Paris.
49:53Il y a vingt ans,
49:55cet homme, le général Von Scholtitz,
49:57était le dernier gouverneur
49:59militaire allemand du Grand Paris.
50:01Il fut celui qui aurait pu réduire
50:03la capitale en sang.
50:05Pourquoi a-t-on fait
50:07d'un fidèle parmi les fidèles d'Hitler
50:09le héros des Parisiens ?
50:11Ce qu'il faut comprendre,
50:13c'est que nous sommes dans un contexte
50:15de guerre froide,
50:17où il s'agit pour les Alliés,
50:19pour l'Ouest,
50:21pour les Américains,
50:23de réintroduire l'Allemagne,
50:25l'Allemagne de l'Ouest,
50:27dans le jeu politique international.
50:31Sur les ruines de l'Europe,
50:33les alliances se sont constituées en deux blocs,
50:35l'Ouest contre l'Est.
50:37Écartelées, au centre,
50:39l'Allemagne est un pivot.
50:41L'ennemi d'hier
50:43devient un partenaire nécessaire.
50:45Et c'est à ce moment-là
50:47qu'un travail de mémoire,
50:49d'apport de la mémoire, est fait
50:51pour changer un peu l'image
50:53qu'il y avait de l'Allemagne,
50:55qui était une image tout à fait négative.
50:57République fédérale d'Allemagne,
50:59vive l'amitié franco-allemande !
51:03C'est à ce moment-là
51:05que cette légende se met en place,
51:07ce qui est une manière pour l'Allemagne
51:09de déculpabiliser sa mémoire.
51:13Au même moment,
51:15parait la fresque exaltante
51:17de Marie Collins,
51:19Paris brûle-t-il.
51:21Elle est bâtie sur les mémoires d'un homme
51:23que les auteurs ont rencontrés
51:25et qui montre un nouveau visage
51:27de l'ennemi historique.
51:29Le best-seller sera suivi deux ans plus tard
51:31de la super-production internationale
51:33de René Clément.
51:35C'est la naissance d'un mythe.
51:37Falsification de l'histoire,
51:39reflet des enjeux
51:41d'une nouvelle carte du monde.
52:17Abonnez-vous !

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