4GOOD - Le top et flop d'Alizée Lozac’hmeur
Lundi 16 septembre 2024, 4GOOD reçoit Alizée Lozac’hmeur (cofondatrice, Makesense)
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00:00Alizé, on commence par quoi ? Le top ou le flop ?
00:06Je vous propose qu'on commence par le flop pour finir sur une note positive.
00:11Alors pour cette séquence top et flop, j'ai choisi de vous parler des tendances de consommation
00:16des Français pour rester dans le thème.
00:18Et pour le flop, malgré les efforts de Richard, malgré les efforts d'Innocente, on voit
00:23qu'aujourd'hui les industries vertueuses qui font du bien à la planète sont en berne
00:28du fait de la crise qui se profile et du fait de l'inflation.
00:31J'imagine que vous l'avez vu passer, la consommation de bio, de produits issus de
00:36l'agriculture biologique étant en décroissance de 5% en 2022 après des décennies de croissance
00:43malheureusement, et c'est aussi le cas d'autres secteurs comme le vrac par exemple qui avait
00:48pourtant bondi en 2018 et 2019 avec des croissances à deux chiffres qui aujourd'hui est en stagnation
00:55ou encore la consommation de modes éthiques et durables.
00:58Alors pourquoi ? Eh bien parce que les produits qui sont produits de façon respectueuse et
01:04pour la planète et pour les humains restent plus chers que les autres et donc en temps
01:09de crise, quand les portefeuilles se referment, eh bien évidemment on se reporte sur des
01:13produits moins chers et plus abordables.
01:15Mais la question derrière ça, c'est pourquoi est-ce que ces produits sont plus chers que
01:19les autres ? Moi j'aime à dire qu'aujourd'hui il y a dans notre économie une primovis,
01:24c'est-à-dire qu'aujourd'hui ça coûte plus cher de bien faire et ça coûte moins
01:28cher de mal faire.
01:29Aujourd'hui quand on pollue les sols par exemple, quand on délocalise sa production
01:34dans des pays éloignés où la main-d'œuvre est peu chère, eh bien on produit moins cher
01:39et donc on peut vendre moins cher alors que quand on s'assure de respecter la planète
01:45et les humains, ça nous coûte plus cher.
01:46Mais ça c'est pas une fatalité et donc on va glisser tout doucement vers le top parce
01:51qu'aujourd'hui les lois, les réglementations, les politiques publiques peuvent donner un
01:55avantage aux entreprises vertueuses et donc on peut imaginer demain des TVA qui soient
02:01différenciées par exemple pour les produits biologiques, on peut imaginer des aides publiques
02:05qui soient conditionnées à l'impact social ou écologique d'un produit et donc on peut
02:10espérer que ce flop se transforme en top dans les prochaines années.
02:14Oui c'est pas très réjouissant et c'est vrai que les acteurs de l'impact ne sont
02:19pas toujours soutenus par un cadre réglementaire qui récompense leurs engagements, c'est
02:23une raison pour tout arrêter ?
02:24Alors je serais pas là si c'était une raison pour tout arrêter, je pense fondamentalement
02:29que c'est pratique, c'est une tendance de fond et qu'il faut soutenir, qu'il
02:33faut continuer et on a quand même des belles histoires, on voit que certaines marques
02:36comme la fourche que vous connaissez peut-être, Miam, le dry-to-nu sont des marques ou encore
02:42pour demain qui commercialisent des produits qui sont en phase de conversion vers le biologique,
02:48qui fonctionnent bien et elles sont en croissance, donc je pense qu'il y a de l'espoir à
02:52la fois par les changements réglementaires qu'on peut attendre et puis en innovant
02:55aussi sur les business models, on peut s'en sortir.
02:58Et ton top alors ?
02:59Et mon top c'est que malgré ce que je viens de dire, il y a aussi des industries
03:03vertueuses qui s'en sortent bien et on voit aujourd'hui par exemple l'industrie du
03:06reconditionnement, c'est-à-dire d'acheter des produits qui ont déjà été utilisés
03:10et qui ont été reconditionnés, fonctionne très bien.
03:13J'imagine que la plupart des auditeurs connaissent les téléphones ou les ordinateurs reconditionnés,
03:21ça fait des décennies que des entreprises reconditionnent notre matériel informatique,
03:27on peut citer par exemple Ecodair ou Envie qui font ça depuis des décennies sur nos
03:32territoires et puis évidemment il y a la start-up Backmarket qui a démocratisé l'achat
03:38de téléphones reconditionnés et qui en a fait quelque chose même d'attractif et
03:43aujourd'hui c'est un marché qui pèse quand même un milliard d'euros en France
03:47et qui est suivi par d'autres marchés, le reconditionnement dans l'électroménager,
03:51dans le matériel de sport, le vélo, les trottinettes et donc on a de plus en plus
03:55de marques qui s'y mettent et qui tirent ce marché, donc par exemple Decathlon ou
04:00encore Castorama qui se mettent sur ce positionnement et donc aujourd'hui il y a 42% des Français
04:06qui ont déjà acheté du reconditionnement et 40 autres pourcents qui se disent intéressés.
04:10On n'est pas loin de toucher un marché véritablement majoritaire et donc je pense
04:15que ça c'est encourageant de montrer que quand on arrive à créer de l'envie, des
04:20marques fortes et à le diffuser au plus près des consommateurs, on arrive à faire
04:25naître des industries vertueuses.
04:27Alors c'est une industrie qui n'est pas dénuée d'enjeux, il y a pas mal de problématiques
04:33notamment comment est-ce que toutes ces marques vont avoir accès à la matière et aux objets
04:38usagés et puis aussi un vrai enjeu de compétence mais qui pour moi est aussi une tendance
04:43pertinente, c'est-à-dire que demain il va y avoir des milliers d'emplois à pourvoir
04:48sur la réparation, c'est des métiers d'avenir qui sont non délocalisables, qui sont partout
04:52sur les territoires et donc c'est aussi prometteur pour ces marques qui se lancent.
04:57Nicolas, une réaction ?
04:59Moi j'adhère complètement à l'ensemble des commentaires, c'est vrai que faire des
05:05produits vertueux ça coûte plus cher, c'est une économie différente, pour ce qui nous
05:11concerne ça fait partie de notre raison d'être donc on a fait ce choix-là, on le fait de
05:17cette façon-là ou on ne ferait rien et on sortirait de ce type d'industrie mais en
05:22effet ça coûte beaucoup plus cher et la crise qu'on vient de vivre et qu'on continue
05:26à vivre d'ailleurs détourne malheureusement pas mal de consommateurs de ces types de vertus
05:31donc il y a le déclaratif, oui ça m'intéresse et je suis prêt à y aller et puis il y a
05:35l'acte d'achat quand on est face à un linéaire, face à une décision importante où finalement
05:39on oublie les bonnes intentions et on peut basculer sur des achats qui sont moins intéressants
05:47d'un point de vue environnemental, d'un point de vue santé et ça c'est vraiment dommage.
05:51Maintenant on commence à voir, nous on est très influencé par ce qui se passe dans
05:55les pays anglo-saxons et on voit bien que c'est toujours un peu avant-gardiste par
06:01rapport à ce qui va arriver sur l'Europe continentale, on commence à voir en Angleterre
06:05notamment de nouvelles tendances, il y a eu deux ans, trois ans où les gens étaient
06:08complètement focalisés sur le porte-monnaie et ils sont en train de revenir progressivement
06:13à des préoccupations plus essentielles, environnementales, santé etc. et ça c'est
06:19un très bon signe pour la suite donc on a quelque chose d'intéressant qui est en train
06:21de se dessiner. Après sur toute la réutilisation je pense que c'est un phénomène qui est
06:27parti donc qui a démarré et qui ne va pas s'arrêter, qui va s'accélérer. Maintenant
06:33pour réutiliser il faut qu'il y ait déjà une matière disponible donc il est important
06:37d'avoir aussi des produits qui rentrent dans le système pour qu'on puisse ensuite avoir
06:43un deuxième usage, troisième usage, quatrième usage, ça ne peut pas être justement et
06:46uniquement de la réutilisation. Si on parle des iPhones par exemple, il y a pas mal de
06:52modèles successifs qui sont arrivés. Aujourd'hui certains sont démodés, absolument inutilisables
06:58donc on ne peut pas simplement les reconditionner. Il faut simplement trouver une façon de récupérer
07:02les pièces pour en faire autre chose mais le téléphone lui-même ne sera pas réutilisable
07:06donc il y a à chaque fois encore une fois cette nécessité de remettre de la matière
07:10vierge, neuve pour faire tourner le système. On passe à l'interview.