Livres : les frais fixes à 3 euros pour protéger les libraires sont "une fausse bonne idée" et nuisent "à la lecture", selon le directeur d'Amazon France

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00:00Bonsoir à toutes et à tous, c'est une des plus grosses multinationales au monde,
00:08une des GAFAM Made in USA, spécialisée dans le cloud, la vidéo et surtout la vente
00:14en ligne.
00:15J'ai nommé Amazon bien sûr.
00:17Tout ce que vous voulez acheter en un clic, livré chez vous en un rien de temps.
00:22Bonsoir François Duval.
00:23Bonsoir Isabelle Raymond, Frédéric Duval s'il vous plaît.
00:25Frédéric Duval, évidemment, vous êtes le directeur général d'Amazon France.
00:30On peut trouver de tout sur Amazon, des jouets, des vêtements, souvent avec des frais de
00:36port réquiquis et même réduits à néant pour les abonnés Prime, sauf, sauf pour le
00:41livre.
00:42Et c'est une spécificité française, des frais de port de 3 euros ont été introduits
00:47il y a un an, tout juste pour protéger, dit-on, les librairies physiques.
00:51Un an après, que dites-vous ? Est-ce que ces frais ont nuit aux ventes en ligne de
00:54livres ?
00:55Bonjour d'abord Isabelle Raymond et merci de m'interroger sur ce sujet qui m'est
01:00à cœur.
01:01Ce que je peux vous dire, c'est que cette mesure des frais de port obligatoires est
01:05une fausse bonne idée.
01:06Elle pénalise les lecteurs, elle pénalise la lecture et en particulier les compatriotes
01:14qui sont dans les campagnes.
01:16Et elle pénalise Amazon ?
01:17Elle ne pénalise pas Amazon, je vous assure, Amazon va bien et l'Amazon, dans cette
01:21histoire, n'est pas le problème.
01:23Le problème c'est, est-ce qu'on a envie de pénaliser la lecture en France ?
01:27Mais ça veut dire que les ventes de livres ont baissé sur Amazon depuis un an ?
01:30Très peu.
01:31Et à nouveau, Amazon n'est pas le problème.
01:35Le problème c'est de savoir, est-ce qu'on a envie de pénaliser la lecture en France ?
01:38Est-ce que, soyons factuels, un livre qui vaut 7,50 euros, un livre de poche, dans
01:45une des communes, des 90% de communes où il n'y a pas de librairie, eh bien ce livre
01:50vaut 10,50 euros désormais.
01:52Et une enquête IFOP que nous venons de commissionner montre qu'environ 6 personnes sur 10 disent
02:01que cette mesure a affecté leur pouvoir d'achat et environ 4 personnes sur 10 disent qu'elle
02:07va réduire sa consommation de livres en conséquence parce qu'elle ne peut plus, ou tout du moins
02:13elle ne peut plus, elle n'a plus les moyens d'acheter des livres qui ont augmenté fortement.
02:18Mais ça reste, Frédéric Duval, un sondage que vous avez commandé vous-même.
02:23Est-ce que vous pouvez argumenter ce que vous dites par des chiffres ? Est-ce que les ventes
02:28ont vraiment baissé sur Amazon concernant les livres ? Est-ce que vous le constatez
02:32dans les chiffres ?
02:33Mais à nouveau, ce problème n'est pas le problème de fond.
02:35Le problème de fond, c'est à nouveau la lecture en France.
02:38Cette étude, commissionnée auprès de 12 000 Français, 12 000 Français c'est quand
02:43même beaucoup, ont répondu et 4 Français sur 10 disent se détourner de la lecture
02:52en conséquence.
02:53Pour une grande partie d'entre eux, ils se retournent vers les enseignes physiques.
02:59Alors justement, c'est pour soutenir les enseignes physiques que cette mesure a été
03:02mise en place, défendue par le Président de la République, Emmanuel Macron, pour défendre
03:06les librairies physiques et notamment indépendantes.
03:08Quand ils se retournent vers les enseignes physiques, où vont-ils ? Ils vont dans les
03:11grandes enseignes culturelles, dans les grandes surfaces, pour 70% d'entre eux.
03:16Donc ça veut dire que ça ne favorise pas les librairies indépendantes ?
03:19Très peu en fait.
03:20C'est une mesure qui est une fausse bonne idée, qui finalement affecte la lecture,
03:25qui affecte les lecteurs et qui ne répond pas à l'objectif principal qui était celui
03:30de favoriser les libraires.
03:32Et c'est pour ça que vous dénoncez cette mesure ? Un an après, ça mise en place ?
03:36Je dis qu'aujourd'hui, ce n'est pas le choix que j'aurais fait pour protéger
03:42les libraires et protéger les lecteurs.
03:44Et non pas pour protéger Amazon ?
03:45Il existe d'autres moyens qui ont été mis en place dans d'autres pays, comme un tarif
03:53spécial d'expédition des livres qui permettrait aux libraires d'expédier des livres sur
03:59le territoire à des prix réduits.
04:01C'est-à-dire que vous voudriez qu'il y ait un frais de port différent ?
04:04Exactement.
04:05Pour vous, que pour un libraire, c'est ça ?
04:07Si je peux terminer ma phrase, si un libraire expédie un livre aujourd'hui à l'étranger,
04:14à Londres, à New York, ça lui coûte 4 fois moins cher que d'expédier ce même livre
04:19en France.
04:20Mais vous savez très bien qu'il n'y a que vous, Amazon, qui allez expédier des livres
04:24à l'étranger.
04:25Pas un libraire indépendant.
04:26Mais avouez que c'est cocasse de pouvoir expédier un livre normal, un Gallimard classique,
04:33pour 1,66€ à Londres, et de ne pas pouvoir expédier ce même livre à ce tarif-là,
04:38mais de l'expédier plutôt autour de 7€ quand on l'expédie à Clermont-Ferrand
04:41ou dans une ville de province.
04:42D'ailleurs, vous avez porté cette affaire en justice.
04:46La justice administrative doit d'ailleurs encore trancher.
04:49Est-ce que vous espérez obtenir gain de cause sur les tracts du Valais ?
04:52Écoutez, on a effectivement déposé un recours parce que, sur le principe, nous sommes contre
04:57pénaliser la lecture et les lecteurs en France, un recours devant le Conseil d'État.
05:02Le Conseil d'État a demandé à la Cour de Justice de l'Union européenne qui va
05:07rendre son avis.
05:08Alors, on verra quand elle le donnera, mais en attendant, aujourd'hui, la lecture est
05:14pénalisée en France.
05:15Alors, autre actualité chez Amazon, le retour à du 100% présentiel.
05:20La fin du télétravail, ce sera à partir du 1er janvier.
05:23Est-ce que ce sera le cas pour les 24 000 salariés français ?
05:28Alors, effectivement, Andy Jassy, notre CEO, a annoncé le 16 septembre que nous allions
05:36revenir à l'organisation qui était celle d'avant la pandémie de Covid.
05:40C'est important de le dire qu'aujourd'hui, sur les 24 000 salariés français, uniquement
05:49une dizaine de pourcents d'entre eux sont concernés par cette mesure.
05:52Les autres, c'est la logistique, la livraison.
05:53Les autres viennent tous les jours sur leur lieu de travail et travaillent.
05:57En ce qui concerne cette petite catégorie, on pense que c'est important d'être ensemble
06:02pour innover, pour collaborer, pour être suffisamment connectés et vraiment adhérer
06:08à notre culture d'entreprise, pour servir les clients.
06:11C'est important.
06:12Je ferais juste un petit parallèle.
06:14Qu'est-ce qu'on penserait d'un groupe de musique qui s'entraînerait seulement à
06:18distance ?
06:19Ce n'est pas possible, ça.
06:20Un groupe de musique, il joue mieux quand il est entre eux et sur scène ensemble.
06:25Un groupe de musique, quand il compose, quand il réfléchit, il peut être à distance.
06:28C'est-à-dire que là, ce que vous allez mettre en place, c'est du 100% présentiel.
06:33Mais non, à nouveau, la chose est assez claire.
06:39Andy Jassy a expliqué qu'il y aurait de la flexibilité, mais nous souhaitons cependant
06:43revenir à la situation que nous connaissions avant le Covid.
06:47Sauf que vous avez embauché.
06:48D'ailleurs, vous continuez d'embaucher en 2024.
06:51Il y a des gens qui n'habitent pas à Paris, qui ne vont pas pouvoir venir au siège tous
06:56les jours.
06:57Il y a aussi un accord d'entreprise qui a été signé en France.
06:59Comment vous allez vous accommoder de cela ?
07:01On va mettre tout ça, comme toute entreprise française, en étant absolument très, très,
07:10très clair avec les réglementations en vigueur en France et puis en discutant avec les différents
07:17partenaires pour faire en sorte qu'effectivement, on applique cette mesure.
07:20C'est-à-dire qu'à partir du 1er janvier, les personnes qui sont concernées par le
07:26télétravail aujourd'hui seront obligées de revenir au travail.
07:31Vous avez vu qu'il y a une enquête interne que s'est procurée le magazine Fortune aux
07:35Etats-Unis, qui dit que cette mesure est diversement appréciée au sein d'Amazon.
07:40Qu'est-ce que vous répondez aux salariés d'Amazon qui nous écoutent aujourd'hui ?
07:43Je dis que c'est important qu'on soit ensemble, c'est important pour inventer, c'est important
07:46pour collaborer.
07:47C'est important qu'on soit suffisamment connectés les uns aux autres pour faire en
07:53sorte que notre culture d'entreprise perdure et continue de servir nos clients.
07:57Même si les modes de travail, les modes de vie ont évolué depuis le Covid, on ne peut
08:01pas revenir à la vie d'avant.
08:02On ne peut pas revenir à la vie d'avant, mais on peut quand même avoir dans l'intention
08:07de collaborer ensemble beaucoup plus qu'on ne le fait aujourd'hui.
08:09Vous savez, comme vous le disiez, on a 24 000 salariés aujourd'hui en France, 24 000
08:14salariés et on a 400 métiers différents et on doit continuer à vivre ensemble.
08:21D'ailleurs, c'est ce qu'on va faire à l'occasion du Forum des métiers et des carrières
08:25à venir qu'on va avoir aujourd'hui le 21 octobre à la station Eiffes, qu'on fait
08:31en collaboration avec France Travail et donc avec tous nos salariés et avec tous ceux
08:35qui veulent, on va voir comment on peut intégrer nos salariés dans une démarche de progrès,
08:41de développement et on va aussi proposer plus de 200 offres d'emploi.
08:45Alors, dernière question, vous le savez Frédéric Duval, la présentation du budget est attendue
08:48ce jeudi.
08:49Il y a question de mettre pour les grandes entreprises une surtaxe à partir d'un milliard
08:55d'euros de chiffre d'affaires.
08:57Vous serez donc concerné, qu'est-ce que vous en pensez ?
09:00Écoutez, ce que j'en pense n'est pas très important.
09:04Vous avez quand même votre chiffre d'affaires s'est élevé à 10 milliards en 2022.
09:09Ce que je peux dire c'est qu'évidemment, en tant qu'entreprise française, on appliquera
09:14les décisions qui seront prises par le gouvernement quand on saura ce qu'elles seront, puisqu'aujourd'hui
09:19on ne sait pas exactement le détail de ces décisions, elles seront prises jeudi par
09:23le Premier ministre et son gouvernement.
09:24Enfin, on sait quand même qu'il y aura une surtaxe, de l'impôt sur les sociétés qui
09:29concernera...
09:30Oui, que nous appliquerons en tant que société française qui fait plus d'un milliard d'euros
09:33de chiffre d'affaires en France, nous l'appliquerons comme toutes les entreprises qui sont soucieuses
09:37du droit français.
09:38Et en revanche, ce qu'on peut être, et on l'a déjà dit, on est très attentif à l'attractivité
09:46des territoires et la fiscalité en fait partie.
09:48Et donc ça peut remettre en cause l'attractivité des territoires ?
09:50Je pense qu'on l'a démontré sur les dix dernières années, au travers de 20 milliards
09:56d'euros d'investissement, au travers d'être le premier créateur d'emplois net en France,
10:01avec plus de 24 000 salariés à la fin de l'année, au travers de notre investissement
10:06de 1,2 milliard qu'on a annoncé à Choose France et 3 000 emplois supplémentaires,
10:11qu'on était résilient et qu'on était une entreprise française bien implantée et qu'on
10:15allait continuer à l'être.
10:16Merci beaucoup Frédéric Duval, directeur général d'Amazon France, vous étiez l'invité
10:21éco de France Info ce soir.
10:22Merci.

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