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00:00Robert Badinter est parti le 9 février dernier et nous sommes très nombreux à
00:04nous dire qu'il manque à notre pays, qu'il manque à notre époque, qu'il
00:09manque à nos cœurs et qu'il manque à notre droit aussi.
00:12Je voudrais donc, si vous en êtes d'accord, que ceux qui le peuvent et le
00:15souhaitent se lèvent et applaudissent Robert Badinter.
00:30Robert Badinter qui, rappelons-le, a présidé ce Conseil constitutionnel.
00:50Vincent, si vous voulez bien nous rejoindre, une séquence d'hommage à
00:53Robert. En l'occurrence, c'est l'extrait d'un entretien qui s'appelle
00:57« Regards sur les droits de l'homme », texte paru en 2022 dans la revue
01:00trimestrielle des droits de l'homme.
01:06Aujourd'hui, alors que le corps social est fracturé en Occident, les droits de
01:12l'homme requièrent l'affirmation de l'universalisme. Ces droits appartiennent à
01:18chacun d'entre nous, car chacun appartient à l'espèce humaine.
01:23Je suis inquiet de l'absence de solidarité universelle en matière de
01:28droits de l'homme. Notre monde occidental est riche en
01:31conventions, en lois, en promotion intellectuelle de ces droits. Mais on ne
01:38se soucie pas assez de ceux qui vivent dans ces régimes, qui les refusent ou
01:43qui emprisonnent ou même exécutent leurs militants.
01:46Or, la violation des droits de l'homme, ou ce que ce soit, nous concerne tous en
01:52tant qu'être humain. Ainsi, certains pays pénalisent encore les relations
01:56homosexuelles au nom de leurs convictions religieuses.
01:59Que faisons-nous quand les droits de l'homme sont ainsi tenus en échec ?
02:03C'est aussi une défaite des sociétés dans lesquelles les droits de l'homme sont
02:08proclamés. La République française est marquée du saut des libertés.
02:12Elle n'a pas toujours été fidèle à cet idéal, mais elle doit le maintenir face à
02:18toutes les tentations qu'entretiennent les démagogues. Le racisme secret, la
02:23xénophobie ambiante, la crise économique latente, autant de facteurs qui menacent
02:28l'équilibre de notre démocratie et l'avenir des jeunes générations.
02:32Ma recommandation première serait, soyons fidèles aux idéaux qui assurent à
02:38travers le temps la grandeur de la culture française.
02:41L'alliance entre la République française et les libertés doit être
02:46indestructible aux jeunes générations d'y veiller.
02:50Je ne suis pas plus optimiste que la plupart de nos compatriotes.
02:55Je pense que la crise économique internationale menace. Il y a une
03:00tentation secrète du recours à l'homme ou à la femme providentielle dans notre
03:05histoire. Il faut la refuser absolument. Il y a une leçon d'histoire, un
03:11dictateur ne se résout pas à perdre la face en perdant une guerre qui l'a
03:15déclenché. Il préfère s'engloutir avec son pays,
03:19causer des ravages immenses comme on l'a vu au cours du XXème siècle,
03:24plutôt que de dire je me suis trompé car l'infaillibilité est le ressort
03:29premier de son pouvoir. L'Union européenne si difficilement
03:33constituée doit témoigner de sa fermeté. Il y va de l'avenir de nos enfants.
03:45J'ai une petite question Vincent et on accueille Monsieur le Président Fabius.
03:58Robert Bannater avait dit de vous dans une émission de télévision
04:01Vincent c'est mon fils adoptif. Je voudrais en quelques mots que vous me
04:06disiez qui était Robert Bannater pour vous parce que je sais que vous l'aimiez
04:10profondément. Je ne vais évidemment pas parler de du très si talentueux
04:27avocat qu'il était, le grand homme de droit, cette personnalité française qui
04:32on peut dire un monde avec Robert Bannater c'est mieux qu'un monde sans
04:37Robert Bannater. Tout le monde sait à quel point c'était un grand homme.
04:43J'ai eu la chance de déjeuner assez souvent au domicile d'Elisabeth et Robert Bannater.
04:52Et j'allais là-bas transi de peur parce qu'il faisait penser beaucoup à la famille Lindon,
05:02à mon grand-père dont il me disait tout le temps que la première fois qu'il a plaidé dans sa vie,
05:06il a plaidé devant le magistrat Lindon et il m'a dit j'en menais pas l'arge,
05:11il savait pas à quel point moi je n'en menais pas l'arge quand j'arrivais.
05:15Donc je sonnais à la porte, quelqu'un venait m'ouvrir et on m'a amené dans le salon et on
05:21me disait monsieur Bannater va arriver. J'attendais comme ça. Il arrivait,
05:27il me disait bonjour. Un mélange de douceur et de froideur absolument incroyable.
05:33C'était très très impressionnant. Alors nous déjeunions sur une demi-table où il y avait
05:40beaucoup de dossiers qu'on avait poussés juste pour mettre deux assiettes. Nous déjeunions,
05:46je l'écoutais beaucoup et après nous passions dans son bureau et il avait cette habitude de
05:52penser que son interlocuteur était aussi intelligent que lui ou presque aussi intelligent
05:58que lui et aussi cultivé que lui. Donc mon exercice pendant les deux heures où je parlais
06:03avec lui était de jouer la comédie et d'opiner du chef car très souvent il me disait, alors
06:09évidemment comme vous connaissez cette anecdote de Napoléon avec Joséphine, évidemment vous la
06:15connaissez et moi j'étais comme ça et je faisais. Alors évidemment cet écrivain qui a écrit en 1900
06:25me donnait la main et je faisais 1917, ça me revient. Je sais que vous le savez Vincent.
06:31Voilà et donc c'était des déjeuners inouïs. Je repartais bouleversé. Je l'aimais énormément,
06:37mais vraiment énormément et souvent je me suis dit, c'est vrai, je me suis dit quand ces grands
06:45hommes ou ces grandes femmes ne seront plus là, c'est vrai que j'ai inventé une définition pour
06:51moi qui est est-ce qu'un monde avec telle personne est mieux ou moins bien et un monde
06:56sans verbal interne, c'est pas tous les jours facile. Voilà merci.

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