Tirs de Tsahal contre la Finul : «il est difficile de dire que ce n'est pas volontaire quand vous tirez délibérément sur les positions de la Finul», estime le général Trinquand

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Vendredi, samedi et dimanche dans Europe 1 Soir Week-end, Pascale de La Tour du Pin reçoit un invité au cœur de l'actualité politique.
Retrouvez "L'interview politique d'Europe 1 Soir week-end" sur : http://www.europe1.fr/emissions/linterview-politique-deurope-1-soir-week-end

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00:00Europe 1 Soir Week-end, 19h21, Pascal Delatour-Dupin.
00:05Bonsoir Général Trinquant, merci d'être avec nous en direct sur Europe 1.
00:10Merci beaucoup, vous êtes ancien chef de la mission militaire française auprès de l'ONU,
00:13expert en relations internationales et auteur de l'ouvrage
00:17« D'un monde à l'autre, comprendre les nouveaux enjeux politiques ».
00:20On a besoin de votre expertise Général, parce qu'on a du mal à comprendre
00:23ce qui est vraiment en train de se passer dans le sud du Liban.
00:25C'est-à-dire qu'il y a des forces, vous avez été, je le précise,
00:29vous avez été à la tête d'un bataillon de la Finule au Liban justement dans les années 90.
00:34Alors là, aidez-nous à y voir clair, c'est-à-dire qu'on a le sentiment
00:38qu'Israël demande aux Casques Bleus de bouger pour rayer des cibles du Hezbollah,
00:45c'est-à-dire détruire des cachettes d'armes, que sache encore,
00:49que les Casques Bleus ne veulent pas bouger.
00:52Est-ce que ce type d'incident vous surprend, ce qui est en train de se passer ?
00:57Non, alors ça ne me surprend pas du tout.
00:59À l'époque où je commandais un bataillon au sud du Liban,
01:02Israël occupait le sud du Liban justement entre l'Italie et la frontière israélienne,
01:08et donc les forces étaient imbriquées.
01:10Il n'y avait pas beaucoup d'Hezbollah à l'époque, c'était d'autres mouvements,
01:14mais il est arrivé, je ne vais pas dire fréquemment,
01:17mais il est arrivé couramment qu'il y ait des incidents avec la Finule,
01:20et moi j'ai vu même pendant ma période des soldats africains de la Finule
01:25qui avaient été tués par des soldats israéliens.
01:28Mais ce n'était pas volontaire, c'est important de le préciser,
01:31ce n'était pas volontaire, général, je pose la question.
01:33Alors écoutez, c'est difficile de dire que ce n'est pas volontaire
01:36quand vous connaissez les positions et que vous tirez délibérément
01:39sur des positions de la Finule.
01:41Il y avait même eu un incident extraordinaire où un char israélien
01:44avait été tiré dans la fenêtre du bureau du commandant d'un bataillon irlandais,
01:49et lorsque j'avais rencontré les Israéliens, ils m'avaient dit que c'était une erreur.
01:52Je leur ai dit que j'étais commandant de char, donc je connaissais,
01:55on ne fait pas d'erreur de ce type-là.
01:57Un char, ça tire dans une fenêtre d'un mètre sur un mètre, si on le veut bien.
02:01Quel serait l'intérêt d'Israël de tirer sur les casques bleus, général ?
02:04Alors dans le cas présent, il faut rappeler que la Finule,
02:08la résolution 1701 qui a été votée en 2006,
02:13avait été votée pour permettre aux Israéliens de quitter le site liban.
02:17C'était à la suite d'une opération qui avait duré 33 jours,
02:20dans laquelle les Israéliens avaient eu 200 morts et avaient eu beaucoup de mal à s'en tirer.
02:26Et en fait, une résolution avait permis le déploiement de 14 000 casques bleus,
02:30particulièrement des Italiens, des Espagnols et des Français,
02:34et avait permis le retrait donc de ces Israéliens de la zone du sud Liban.
02:40Mais la mission était de s'assurer que le Hezbollah ne prendrait pas position dans cette zone.
02:47Et pour cela, la Finule devait le faire avec l'armée libanaise.
02:50Elle n'a pas le droit d'aller visiter les maisons libanaises sans qu'il y ait des soldats libanais.
02:55Et ça, ça n'a jamais été fait.
02:57Le Hezbollah s'est installé alors que la Finule devait faire barrage.
03:02Elle devait faire barrage. Encore une fois, elle n'avait pas un mandat exécutoire.
03:06Ça veut dire que c'est l'armée libanaise qui devait les accompagner
03:09et elle devait appuyer l'armée libanaise.
03:11Et elle ne l'a pas fait.
03:13Mais pour quelles raisons, Général ? On dit les choses, pour quelles raisons selon vous ?
03:18Écoutez, parce qu'une partie de l'armée libanaise était connivante, j'allais dire, avec le Hezbollah.
03:25Il faut rappeler que le Hezbollah s'appelle au Liban sur toute cette époque-là le parti de la résistance
03:31et qu'il y a un certain nombre de soldats libanais qui sont chiites
03:35et qui n'avaient pas envie de s'opposer.
03:37Parce que le Hezbollah n'a pas envie de partir donc ça pouvait se terminer par des combats.
03:40Et l'armée libanaise n'avait pas envie d'entamer le combat contre les Hezbollah.
03:44Raphaël, à quoi sert encore aujourd'hui la finule ?
03:47Alors, premier point, la finule qui est là-bas est là pour marquer la présence internationale
03:54et le fait que la résolution 1701 reste la dernière résolution
03:58et que si aujourd'hui un accord survenait avec un départ des Israéliens de la zone sud,
04:06ça pourrait se faire avec un renforcement de cette résolution.
04:09Avec peut-être une volonté plus marquée et plus sur le terrain.
04:13Il y a quand même 10 000 soldats aujourd'hui bien finis.
04:16Dont 700 français.
04:18Alors, dont 700 français qui ont une mission particulière
04:21parce que les soldats français qui sont là-bas, c'est la réserve du force commandeur.
04:25C'est-à-dire qu'ils ne tiennent pas des positions, ils sont prêts à intervenir.
04:29Et ils ont une particularité, c'est qu'ils disposent de radars de trajectographie,
04:35des radars COBRA, qui leur permettent d'identifier en permanence d'où viennent les tirs.
04:40Qu'ils soient israéliens ou hezbollah.
04:42Donc, très important pour la communauté internationale d'y voir clair.
04:46Parce qu'évidemment, le hezbollah dira ce qui l'intéresse et Israël pareil.
04:50Donc, c'est toujours une force d'observation, j'allais dire.
04:54Elle ne peut pas agir dans la position où elle est actuellement,
04:57mais qui permet à la communauté internationale d'avoir un regard plus neutre
05:02sur ce qui se passe dans la région.
05:04Philippe Guibert, posez une question au général Trinquot,
05:06et après je voudrais qu'on revienne sur l'actualité.
05:08Dites vos questions.
05:10En général, compte tenu de ce que semblent les intentions de l'armée israélienne,
05:14les accrochages entre la Finule et l'armée israélienne paraissent inévitables,
05:18si je vous écoute bien.
05:20Compte tenu du fait qu'ils veulent pilonner les positions du hezbollah dans le Liban Sud,
05:25et ils veulent le faire jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de hezbollah dans le Liban Sud,
05:29la Finule est dans une situation impossible.
05:32Et nos soldats avec.
05:34Elle est dans une situation très difficile.
05:37Encore une fois, ça veut dire quoi ?
05:40Ça veut dire que, puisque je rappelle que les Israéliens ont demandé
05:43que la Finule se recule de 5 km par rapport à la France...
05:45Et elle a refusé !
05:46Elle a refusé, général.
05:47Mais est-ce qu'elle a raison de refuser, selon vous ?
05:49Bien sûr, elle a raison de refuser.
05:51On ne peut pas permettre à Israël de faire n'importe quoi.
05:55Tout le monde a bien expliqué que, malgré les frappes qu'il y a eu,
05:59le hezbollah a été décapité.
06:01Mais, en revanche, l'invasion du Liban était quelque chose
06:04qui ne pouvait pas être accepté.
06:06Donc, je sais qu'en particulier le président français
06:11et le gouvernement italien ont protesté.
06:14Le problème, c'est d'arriver à faire monter ça au niveau du Conseil de sécurité
06:18avec une décision américaine.
06:20C'est toujours là que les choses se bloquent.
06:22Le ministère des Affaires étrangères a annoncé avoir convoqué
06:24l'ambassadeur d'Israël, général.
06:26Depuis hier, d'abord.
06:27Depuis les premiers casques bleus blessés.
06:30Quelles sont les marges de manœuvre que Paris a,
06:35pour, justement, au Liban ?
06:39C'est quoi nos marges de manœuvre ?
06:41Écoutez, moi je me réfère simplement à ce qui s'est passé,
06:44c'est-à-dire l'histoire de 2006.
06:46Donc, il faut attendre le développement de ce qui se passe aujourd'hui.
06:49En 2006, je rappelle qu'Israël était rentré.
06:51Il avait fait la guerre.
06:53Et puis, c'est un peu embourbé au sud du Liban.
06:56Et en fait, ça avait permis de sortir cette résolution
06:59dans laquelle les Israéliens étaient sortis.
07:01Parce qu'ils savaient que la finule allait être renforcée.
07:05Et les Libanais avaient ainsi obtenu le retrait de l'armée israélienne.
07:12Donc, aujourd'hui, ça fait une semaine qu'Israël est rentré au Liban.
07:17Ils ont déjà perdu un certain nombre de soldats.
07:20Il va falloir qu'ils évaluent leur capacité, effectivement,
07:24de remplir leur mission ou pas.
07:26Je sais que c'est une situation difficile à accepter.
07:29Mais si vous voulez, d'abord, on ne retire pas d'une soldat comme ça d'un coup de plume.
07:33Ça prend beaucoup de temps, c'est très compliqué, c'est très dangereux.
07:36Parce que les soldats, là, sont dans des abris.
07:39À partir du moment où ils se retiennent, ils ne sont plus dans des abris.
07:42Donc, je pense que la communauté internationale
07:44essaye de faire pression sur Israël
07:46pour qu'il arrête ses attaques au sol au Liban.
07:50Raphaël Stainville.
07:51Oui, la présence de la finule ne favorise-t-elle pas, finalement, le Hezbollah sur place ?
07:57C'est une question...
07:59C'est une très bonne question, Raphaël Stainville.
08:01C'est vrai, parce que finalement, les casques bleus protègent le Hezbollah,
08:03pour l'interrogation générale.
08:05Non, alors, les casques bleus ne protègent pas le Hezbollah.
08:07Sans le faire exprès, bien sûr.
08:09Mais vous avez raison que la présence des casques bleus
08:13limite, d'une certaine façon, les actions des Israéliens,
08:17parce que nous ne le rompons pas.
08:19Bon, ils tirent parfois sur des positions.
08:21Il y a des blessés, ce qui est inadmissible, bien sûr.
08:23Mais ils sont limités dans leurs actions par la présence des casques bleus.
08:28Donc, vous avez raison, d'une certaine façon.
08:31Il va falloir que la situation s'inverse.
08:33Alors, non pas comme M. Netanyahou l'a dit au Libanais,
08:37parce qu'il a été très maladroit en disant
08:39« Débarrassez-vous du Hezbollah, reprenez-le. »
08:42Tout le monde le souhaite.
08:44Mais ce n'est pas à M. Netanyahou de le dire aux Libanais.
08:47Parce que les Libanais, à ce moment-là, vont s'appuyer sur le Hezbollah
08:50en disant « C'est le parti de la Résistance, on est envahi. »
08:53Il faut rappeler que l'Israël et le Liban sont toujours en guerre,
08:56depuis des dizaines d'années.
08:58Raphaël Saint-Gilles ?
08:59Oui, c'est un peu le prolongement de ma question.
09:01C'est-à-dire que, finalement, la finule,
09:03est-elle parvenue à limiter l'expansion du Hezbollah ?
09:07Vous aviez déjà partiellement répondu à cette question.
09:12Mais c'est là où je pense que les Israéliens, aujourd'hui,
09:15sont dans leur bon droit de vous opposer,
09:19ou d'opposer aux responsables politiques
09:23qui s'opposent au retrait des forces de la finule.
09:27Mais la finule a échoué, d'une certaine manière,
09:29à maintenir, à contenir l'expansion du Hezbollah.
09:33Premier point, la finule a réussi, au départ,
09:38à permettre le départ de l'armée israélienne.
09:41Il faut le rappeler, quand même.
09:42Sinon, ils auraient été dans la panade, en 2006.
09:45Ensuite, vous avez raison,
09:47la finule n'a pas réussi à empêcher le Hezbollah,
09:50parce que les mandats du Conseil de sécurité
09:55sont très difficiles à appliquer, dans ce cas-là.
09:58Si le mandat était « on fait la guerre au Hezbollah »,
10:01je ne suis pas persuadé qu'il y ait beaucoup de contingents
10:04qui soient déployés au sud-ouest.
10:06Quels sont les gouvernements qui décideraient
10:09d'envoyer leurs troupes pour faire la guerre au Hezbollah ?
10:12Pour l'instant, généralement, quand même,
10:15on tire un bilan de ce qui est en train de se passer.
10:18C'est-à-dire qu'Israël prévient qu'il va tirer.
10:22Il y a des blessés.
10:23Israël détruit les positions du Hezbollah.
10:28Et la finule se trouve là, sur les terres du Hezbollah.
10:34On ne peut pas résoudre cette affaire.
10:36Tactiquement, vous avez raison, c'est la difficulté.
10:40La question que je pose toujours,
10:42c'est si M. Netanyahou remporte des victoires tactiques
10:45avec beaucoup de pertes.
10:47C'est le cas à Gaza.
10:48C'est le cas probablement avec le Hezbollah,
10:50en particulier avec la première opération des dippers.
10:55Il remporte des victoires tactiques,
10:57mais quelle est sa stratégie ?
10:58Je n'ai toujours pas compris, moi.
11:00Comment va-t-il assurer, sur le long terme,
11:03la sécurité d'Israël ?
11:05Il ne va pas apporter la paix à Israël.
11:08Il va apporter des victoires tactiques
11:10qui feront qu'il y aura plus de volontaires
11:15pour rejoindre le Hamas dans les années qui viennent,
11:17les enfants de tous ceux qui ont été tués,
11:19et il y en aura plus au Hezbollah.
11:21La question, ce n'est pas de remporter
11:23les victoires tactiques,
11:24c'est stratégiquement,
11:26dans quelle situation de sécurité
11:28veut-il installer Israël ?
11:30Pour l'instant, je ne le vois pas,
11:32et il ne le dit pas, d'ailleurs.
11:34Une dernière question.
11:36L'État hébreu qui prépare toujours sa riposte
11:38à l'attaque de missiles qui a été lancée
11:39le 1er octobre par Téhéran,
11:41à la suite des bombardements massifs de l'Iran
11:43sur Israël, le 1er octobre.
11:45On attend toujours la riposte d'Israël.
11:47On l'attend toujours, cette riposte.
11:49Elle va intervenir.
11:50Ce sont les fêtes de Kipour.
11:52De quelle nature pourrait être cette riposte ?
11:54Alors, je pense qu'elle sera
11:56multidimensionnelle, c'est-à-dire
11:58des frappes aussi bien en cyber,
12:00et ceci a commencé aujourd'hui.
12:02Je viens d'avoir des informations sur le fait que
12:04beaucoup de sites informatiques
12:06iraniens ont été bloqués.
12:08Deuxième partie,
12:10du ciblage, comme ça a été le cas
12:12lorsque le chef du Hamas a été tué
12:14au centre de Téhéran,
12:16Israël est très bien infiltré
12:18en Iran et est capable de faire
12:20très mal directement
12:22à des responsables
12:24iraniens. Et troisièmement,
12:26probablement, des frappes très
12:28ciblées sur
12:30les sites de lancement, par exemple, pour que
12:32Israël ne soit pas frappé en retour.
12:34Je pense que ça sera une réponse
12:36multiple et ce qu'on appelle
12:38multidimensionnelle.
12:40Merci beaucoup, Général
12:42Trinquant, d'avoir répondu
12:44à nos questions, d'avoir été en direct avec nous
12:46sur Europe 1, ce soir. Merci
12:48à vous. Un rendez-vous, une annonce
12:50antenne, Pierre de Villeneuve, pour
12:52Le Grand, rendez-vous CNews, Les Echos,
12:54Europe 1, entretien sans concession, tous les dimanches
12:56en direct de 10h à 11h
12:58sur Europe 1. Pierre de Villeneuve
13:00qui reçoit demain Franz-Olivier
13:02Gisbert. A tout de suite, on va parler
13:04le journal permanent, évidemment, dans un instant
13:06et puis on va revenir sur la situation à Grenoble.
13:08Raphaël Stainville, Philippe Guybert,
13:10il y a eu des tirs,
13:12des tirs, en plein marché
13:14ce matin à 10h. Voilà, il y a un fourgon
13:16blindé qui a été attaqué en plein
13:18centre-ville. On va en reparler, on va en parler dans
13:20un instant sur Europe 1, tout de suite.

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