Avec Angélique Cauchy, ancienne tenniswoman de haut niveau et auteure de “Si un jour quelqu'un te fait du mal“ - Ed. Stock
Retrouvez Muriel Reus, tous les dimanches à 8h10 pour sa chronique "La force de l'engagement" sur Sud Radio.
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##LA_FORCE_DE_L_ENGAGEMENT-2024-11-03##
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NewsTranscription
00:00Agipi, association d'assurés engagés et responsables présente
00:05Sud Radio, le grand matin week-end, la force de l'engagement, Muriel Reus.
00:10Bonjour Muriel. Bonjour Jean-Marie.
00:12S'engager pour briser le silence, on va en parler avec votre invitée qu'on accueille aujourd'hui,
00:16c'est Angélique Cauchy, ancienne tennis woman et autrice de ce livre.
00:20Si un jour quelqu'un te fait du mal, c'est publié chez Stock.
00:23Evidemment, briser le silence, c'est une cause qui vous a toujours tenu à cœur.
00:27Oui, et parfois, les mots nous échappent. Face à l'horreur, à l'ampleur des souffrances endurées
00:31et infligées à des enfants, il devient presque impossible de traduire en parole ce que l'on ressent
00:36devant des récits de violences si profondes, si incommensurables.
00:39L'inceste, les agressions sexuelles sur mineurs nous confrontent à des violences
00:43qui bouleversent non seulement les victimes de manière irréparable,
00:46mais qui ébranlent aussi profondément ceux qui en sont témoins.
00:50Chaque récit, chaque témoignage de violence sur un enfant est une épreuve en soi
00:54qui dépasse notre capacité de compréhension ordinaire.
00:57Ces actes marquent de façon indélébile les victimes et leur impact,
01:01s'étant également aux proches, parents, familles, compagnons, amis,
01:05tous ceux qui n'ont pas vu, n'ont pas compris ou n'ont pas osé parler.
01:08Ces témoins portent aussi en eux une douleur silencieuse, une culpabilité.
01:13Pourquoi n'avons-nous rien vu ? Comment avons-nous pu être aussi aveugles ?
01:17Pourquoi souhaitons-nous rester silencieux et imaginer ne pas être en responsabilité
01:21pour intervenir, pour parler, pour dénoncer ?
01:24Ces questions hantent ceux qui, dans leur ignorance ou leur impuissance,
01:27n'ont pas su agir à temps.
01:29Ce fardeau est une autre forme d'indicible, un poids, invisible, un poids
01:34qui ne trouve sa raison d'être que dans l'ignorance imposée par la violence elle-même.
01:38Une violence qui isole, manipule et réduit au silence.
01:42Et pourtant, il faut dire.
01:44Il faut nommer ces violences, car c'est seulement en faisant face à l'horreur
01:47qu'on peut espérer la combattre.
01:49L'inceste, les violences sexuelles sur mineurs marquent à vie,
01:52déchirent des familles, projettent une ombre sur toute la société.
01:55En tant que témoins, nous avons un devoir.
01:57Celui de relayer ces histoires, d'écouter et de soutenir les victimes,
02:00même lorsque les mots nous manquent.
02:02Parler, partager, c'est faire un pas vers la reconstruction,
02:05c'est se réapproprier un espace que la violence a volé.
02:08Affronter l'indicible, c'est affronter nos propres émotions.
02:11C'est surtout, et aussi, briser le cycle de l'ignorance et du silence
02:15et offrir collectivement une chance de réparation.
02:18On parle avec votre invitée, qu'on accueille tout de suite sur Sud Radio,
02:21Angélique Cauchy, bienvenue à vous.
02:23Vous êtes ancienne tennis woman et autrice de ce livre
02:25Si quelqu'un te fait du mal, c'est publié chez Stock.
02:27Vous êtes l'invitée de Muriel Reuss.
02:29Bonjour Angélique.
02:30Bonjour.
02:31Alors, des livres sur les violences sexuelles, j'en ai lu beaucoup.
02:34Des histoires de viols, j'en ai écouté des dizaines.
02:37Mais ce que vous racontez, ce que cet individu vous a infligé,
02:39la façon dont il l'a fait et les mots que vous utilisez pour le décrire,
02:43révèlent des violences si crues qu'elles défient toute raison.
02:47Aux 12 et 18 ans, Angélique, vous avez été l'avenir du tennis français,
02:51double championne de France universitaire,
02:52dans le top 5 des meilleurs français de votre catégorie.
02:55Il vous a fallu 15 ans pour trouver les mots,
02:5810 ans encore pour pleinement mesurer les impacts de ce que vous avez vécu.
03:02Qu'est-ce qui a déclenché votre capacité à verbaliser ce vécu
03:06et à écrire si un jour quelqu'un te fait du mal ?
03:09Alors, à le verbaliser, je crois que ma prise de conscience,
03:12elle s'est faite au moment où je rentrais pleinement dans cette vie d'adulte,
03:15où je passais de l'autre côté, où j'allais être réellement dans le présent
03:18et plus dans la projection de l'adulte que j'espérais devenir.
03:21Et ce moment, c'est à mes 27 ans, lorsque je suis professeur de PS
03:25et que tous les jours devant moi, j'ai des enfants de 12 ans que je vois
03:28et je me dis, c'est tellement petit, 12 ans, et en même temps,
03:31je me dis quel genre d'adulte je vais être si je ne suis pas capable de parler
03:34et d'essayer de les protéger.
03:36Et puis ensuite, écrire, ça m'a pris 10 ans de plus.
03:39Et finalement, le deuxième déclic, c'est lorsque je sors de cette commission
03:43sur les défaillances des fédérations sportives à l'Assemblée en septembre dernier
03:47et où je mesure l'impact de la libération de la parole sur la société,
03:51où je dois recevoir 3000 messages, où il y a 8 millions de vues
03:54sur une caméra plan fixe, prise par LCP.
03:57Et je mesure à ce moment-là l'importance du message,
04:01de faire changer la société, parce que je sens que la société est prête.
04:05Et c'est à ce moment-là que je décide d'écrire.
04:08Vous êtes extrêmement suivie à chaque fois que vous prenez la parole.
04:11C'est incroyable quelque part, on peut le dire, 10 millions de vues.
04:14Là, vous avez fait une interview dernièrement, c'était aussi un nombre considérable de vues.
04:19Pourquoi cette histoire, elle touche encore plus que toutes les autres ?
04:25Déjà, personnellement, ça me touche énormément, mais ce n'est pas du tout le sujet.
04:30Peut-être que c'est ma façon d'en parler, peut-être parce que j'en parle simplement
04:34et que j'ose dire les mots et les nommer, même si c'est l'innommable.
04:39Parce que je pense qu'on ne peut pas vraiment comprendre le sujet si on nomme pas bien les choses.
04:44Et ce n'est pas moi qui l'avais dit.
04:46Il y a quelques années, un grand écrivain avait dit qu'il fallait nommer les choses
04:51sinon on participait au mal de ce monde.
04:53Donc je pense qu'il y a une partie de ça.
04:56Et puis peut-être que mon hypersensibilité, mon hypermnésie,
05:00aide aussi le fait que j'arrive à contextualiser et à décrire chaque scène,
05:04fait que peut-être on arrive à s'identifier plus chacun de nous.
05:07Et finalement, je suis aussi une adulte et une citoyenne banale.
05:12Et peut-être que ça aussi, ça fait prendre conscience à chacun que ça peut nous arriver à nous.
05:17Cette hypermésie, elle est incroyable, parce qu'elle vous permet de qualifier
05:21et de compter le nombre de viols que vous avez subis.
05:23Vous les estimez à 400.
05:25Oui, je ne les ai jamais comptés un par un en tenant une réelle calendrier.
05:29D'ailleurs, j'ai lu un article sur ça, sur le fait qu'aucun enfant ne se disait
05:34violer tant de fois, etc.
05:35Mais c'est une question qui m'a été posée au cours de la procédure.
05:38Et ça n'a pas été très difficile de faire le calcul, puisque c'est deux ans,
05:43donc c'est 750 jours.
05:44Et que sur les 750 jours, il y a 3-4 fois par semaine où je dormais chez lui.
05:48Et qu'à chaque fois que je dormais chez lui, ça arrivait.
05:50Et que ces 15 jours à la baulle, c'est arrivé trois fois par jour.
05:53Donc ça fait déjà rien qu'à ces 15 jours-là, 50 viols.
05:56Donc effectivement, 400, c'est certainement peut-être même encore minoré.
06:00Mais pour dire que finalement, c'était mon quotidien.
06:03Oui, vous avez entre 12 et 14 ans.
06:05Et les violences, c'est chez lui, dans sa voiture, dans les clubs,
06:08plusieurs fois par jour.
06:09Comment la petite fille que vous étiez à cette époque-là,
06:1412 ans, c'est très très jeune.
06:16J'invite les auditeurs à se projeter sur une petite fille de 12 ans.
06:19Comment la petite fille que vous étiez a-t-elle trouvé la force de survivre
06:23et de garder cette détresse uniquement pour elle à cette époque ?
06:27Il y a trois choses qui rythmaient vraiment ma volonté de m'en sortir.
06:32Je crois que la première, c'était que je ne voulais pas
06:34que le mal emporte sur le bien.
06:36Et je me battais pour ne pas qu'il gagne.
06:38Ensuite, parce que je savais que c'était le match le plus long de ma vie
06:41et qu'elle a défaite peut-être encore plus que j'aime la victoire.
06:45Et enfin, parce que je ne voulais pas faire de mal à mes parents
06:48et je savais que si je choisissais de ne pas me battre et de mourir,
06:52c'était eux qui allaient en souffrir.
06:54Cet individu, on va le nommer Andrew, votre entraîneur,
06:58dès votre première rencontre, il va vous dire très vite
07:00« Tu es un diamant brut et je vais te polir ».
07:02Est-ce que cette phrase, qui est une phrase je trouve très forte,
07:06très dominatrice, est-ce que cette phrase, c'est ça qui a marqué
07:09le début du pouvoir sur vous ?
07:11Est-ce que ça a créé une stupéfaction telle que finalement
07:13tout le reste s'est enchaîné et que l'emprise a commencé ?
07:16Complètement, d'autant que c'est vraiment un moment qui m'a beaucoup marquée.
07:19C'était le troisième entraînement seulement que j'avais avec lui,
07:21donc j'ai trouvé que c'était une phrase...
07:23Et il avait scénarisé vraiment tout ça.
07:25Il m'avait fait m'asseoir, c'était pas quelque chose qu'il avait dit
07:28rapidement entre deux portes.
07:30Il avait pris le temps, il avait pas du tout le même ton,
07:32il s'était placé à un endroit particulier.
07:34Et moi, jusqu'à ce moment-là, j'avais pas du tout pour ambition
07:37d'être une joueuse de haut niveau.
07:39Donc quelque part, à ce moment-là, il me marque.
07:42C'est comme un tatouage où il me dit « Je vais faire de toi
07:45ce que j'ai envie que tu deviennes ».
07:47Et peu à peu, il va accaparer tout votre espace.
07:49Vous dites qu'il ne reste plus rien d'autre que lui,
07:51lui et l'école, lui et le tennis.
07:53Devant des chairs, il vous impose même de dire qu'il est votre père.
07:56Il va même jusqu'à vous dire « Ce serait bien que tes parents meurent
07:59comme ça, j'aurais pour moi ».
08:01Il va mettre votre photo sur sa table de nuit.
08:03Dans cet univers où la pression de bien faire, de gagner,
08:06d'être la meilleure était constante, vous devenez sa chose.
08:09Oui, exactement. Et finalement, ça se fait tellement vite
08:12que je deviens à la fois sa joueuse, à la fois sa fille
08:16soi-disant adoptive, à la fois sa marionnette
08:19qui fait faire ce qu'il veut.
08:22Et puis très rapidement, son excessuel.
08:24Et tout ça se mélange.
08:26Et finalement, pour moi, c'est cette banalisation de la violence
08:29qui fait qu'avec le recul, je me dis que c'est vraiment terrible.
08:32Parce qu'à ce moment-là, très rapidement,
08:35on ne prend plus la mesure de ce qui est très grave,
08:38de ce qui ne l'est plus, parce que tout est mis sur le même plan.
08:41Oui, dans l'échelle des violences, l'audience se banalise complètement.
08:44Mais on va parler un peu quand même de la responsabilité
08:47de l'entourage et des clubs qui ont trouvé normal
08:50que tout tourne autour de lui, qu'il soit omniprésent, omniscient.
08:53Comment est-ce qu'on a pu accepter qu'il insulte des jeunes de 10 ans,
08:56qu'il rase la tête d'un enfant de 14 ans dans le club house
08:59sans que personne n'intervienne ?
09:01Pourquoi y a-t-il eu un tel aveuglement à son égard ?
09:04Parce que cet homme, ce n'est quand même pas un homme extraordinaire,
09:06ce n'est pas un homme de pouvoir. Qu'est-ce qui s'est passé en fait ?
09:09C'est un pouvoir qu'il a réussi à obtenir dans cet écosystème
09:13qui était le tennis, mais ce n'était pas du tout quelqu'un
09:16qui avait du pouvoir dans un autre environnement.
09:19Mais dans cet environnement-là, il avait réussi à être cet homme omnipotent
09:24parce que certains le craignaient, parce que certains pensaient
09:27que sans lui, le club ne serait plus numéro 1,
09:30parce que c'était son caractère et que finalement,
09:34on pouvait lui laisser tout passer parce que c'était comme ça,
09:37comme une fatalité. Et à aucun moment, on s'est placé
09:41du côté de la déontologie ou du côté des enfants pour se dire
09:45est-ce que réellement, il respecte déjà le droit des autres individus ?
09:51L'emprise, c'est aussi toutes les phrases qu'il va prononcer
09:54tout au long de ses années. Les gens ne peuvent pas comprendre.
09:57Tu sais, c'est parce que c'est toi, tu es différente, extraordinaire, intelligente.
10:01Il ne faut pas que tu en parles, parce que si tu en parles,
10:04j'irai en prison, parce que les gens ne vont pas comprendre qu'on s'aime.
10:07Si tu en parles, je ne pourrai plus t'entraîner
10:10et tu ne deviendras jamais une championne.
10:13Vous avez 13 ans quand il vous dit tout ça.
10:15Il vous a mis en mode automatique, en mode pilote automatique ?
10:18Oui, mais à l'intérieur de toutes ces phrases, il y a justement
10:21tous les ressorts psychologiques qu'un manipulateur utilise.
10:24Il y a à la fois la culpabilisation, il y a à la fois le fait que moi,
10:30je veuille protéger ma famille, mais aussi le protéger lui,
10:32parce que quelque part, je ressens une sorte d'amour au début pour lui,
10:36parce qu'il devient cet entraîneur qui se dit être mon second père.
10:41Finalement, il me faut quand même quelques mois pour réaliser
10:45que ce n'est ni de l'amour, ni de l'affection, mais que c'est de la destruction.
10:49Et puis, vous voulez protéger votre famille.
10:51D'ailleurs, le titre de ce livre, c'est un titre de protection de votre père,
10:54parce qu'il vous avait toujours dit, si quelqu'un un jour te fait du mal,
10:56je prendrai un fusil et tant pis si je vais en prison.
11:01Il y avait aussi cette forme de protection vis-à-vis de votre famille.
11:04Oui, cette phrase, c'est terrible, parce qu'il le dit,
11:08comme beaucoup de parents, en pensant protéger son enfant,
11:11en pensant faire une preuve d'amour.
11:13Et en fait, c'est tout l'inverse.
11:15L'enfant, la première chose qu'il veut, c'est protéger sa famille.
11:17Et donc, ça crée le silence.
11:19Et c'est pour ça que j'ai choisi ce titre, parce que ce livre,
11:22je le veux pédagogique et j'espère qu'il fera prendre conscience à tous les parents
11:25qu'il faut juste changer cette phrase et à la fin dire,
11:28si un jour quelqu'un te fait du mal, nous, les adultes, nous te croirons,
11:31nous t'écouterons et nous te protégerons.
11:33Quel est l'impact sur votre famille ?
11:35Votre soeur, qui est quelqu'un de très important pour vous,
11:38d'ailleurs, vous dites que le moment de sa naissance,
11:41c'est elle qui a, quelque part, déclenché votre mémoire
11:44et cette mémoire absolument extraordinaire que vous avez.
11:47Quel a été l'impact sur votre famille ?
11:49Il avait cette emprise aussi sur votre famille ?
11:52Ils ne l'ont pas vue ? Personne ne l'a vue ?
11:54Mon père a vu des choses, mais ce n'était pas lui dans la famille
11:57qui prenait les décisions et donc il avait aussi perçu ça.
12:00Il avait perçu la dynamique familiale, à savoir que c'était ma mère qui décidait
12:04et donc il fallait qu'il ait d'abord ma mère dans la poche.
12:07Ce qui a été le cas puisqu'il se voulait être ce grand frère,
12:11ce copain très gentil et parce qu'il savait comment se rendre indispensable,
12:17à savoir que ma famille n'avait ni beaucoup de moyens financiers
12:20ni beaucoup de temps parce que ma petite soeur faisait aussi du tennis
12:23et donc il a joué sur ces deux tableaux pour pouvoir avoir une emprise sur la famille.
12:28Oui, parce qu'en fait vous dormiez chez lui
12:30parce que votre père s'occupait aussi de votre petite soeur
12:32et qu'évidemment ils ne pouvaient pas être à deux endroits à la fois.
12:34Pour les gens qui se poseraient des questions
12:36sur pourquoi est-ce qu'elle dormait chez son entraîneur, c'est la raison.
12:39Oui, mon papa travaillait de nuit, il s'était mis à travailler de nuit
12:42justement pour pouvoir nous emmener aux entraînements
12:44mais il fallait bien qu'à un moment donné il aille travailler
12:46et moi les tournois de tennis, pour ceux qui ne connaissent pas très bien
12:49le milieu du tennis, les tournois c'est tout le temps et c'est le soir.
12:52Et donc c'est après l'école, donc je finissais parfois les matchs à 22h, 22h30
12:56et mon papa il commençait à travailler à 20h45.
12:58Donc à ce moment-là je n'avais personne pour me ramener.
13:01C'était cet entraîneur qui s'était proposé et qui me ramenait
13:05et puis après il a fait culpabiliser mes parents
13:07en disant que ça lui faisait faire beaucoup de route
13:09et que ça serait plus pratique que je reste dormir chez lui.
13:11Et donc c'est comme ça que mes parents ont fini par me laisser dormir chez lui
13:15alors que c'est une famille, je suis dans une famille
13:17qui ne fait pas confiance facilement
13:19et qui ne m'avait jamais laissé dormir nulle part avant ça.
13:22À 27 ans vous allez porter plainte.
13:24Vous avez découvert qu'il y avait d'autres victimes.
13:27C'est la raison pour laquelle vous avez porté plainte ?
13:30Oui, ça a été un élément important
13:32parce qu'Astrid, qui m'appelle à ce moment-là,
13:35est à 4 jours de la prescription
13:36parce qu'on a la chance qu'elle ait une connaissance de la loi
13:39parce qu'elle a fait Sciences Po
13:40et qu'elle sait qu'il y a prescription pour elle dans 4 jours.
13:42Et je sais aussi à travers ce livre,
13:44c'est aussi un message à toutes les victimes
13:46pour leur dire que ce livret est pour elles
13:49mais aussi pour qu'elles aient une meilleure connaissance de la loi
13:52pour qu'elles puissent parler tant qu'il est encore temps.
13:54Et donc je porte plainte en même temps que mes deux co-victimes
13:59parce que je n'ai pas été là pour elles au moment où c'est arrivé
14:02parce que j'ai décidé de garder le silence.
14:04Je me devais d'être là à 27 ans
14:06pour essayer que le dossier soit plus solide
14:08parce que je savais que plus on était nombreuses,
14:10plus ça allait avoir du poids
14:11parce que je connais aussi les statistiques
14:13qui ne sont pas en faveur des victimes au niveau de la justice
14:15et parce que je savais que moi, enfant de 12 ans,
14:18ça n'allait pas avoir le même impact que des jeunes filles de 17 ans
14:21alors qu'elles ont vécu exactement la même chose.
14:23Alors, lors du procès, il est condamné en appel
14:25à 18 ans de réclusion criminelle
14:27assortie d'une interdiction d'exercer, heureusement.
14:30Il y a une profession en contact avec des mineurs
14:33et cette interdiction d'exercer,
14:35c'est pour les quatre agressions sexuelles
14:37commises sur des jeunes filles âgées de 12 à 17 ans.
14:40Mais il n'a reconnu que les faits partiellement,
14:43notamment pour les victimes de plus de 15 ans
14:45en prétendant qu'elles étaient consentantes.
14:47Vous avez vécu comment cette reconnaissance partielle ?
14:50Alors, effectivement, pour mes trois co-victimes,
14:53comme elles avaient plus de 15 ans,
14:55j'ai tout de suite dit qu'ils ne niaient pas la matérialité des faits
14:58mais qu'elles étaient consentantes,
14:59que c'était une relation d'amour et que c'était leurs petites amies.
15:02Pour moi, il s'est positionné différemment
15:04parce que j'avais moins de 15 ans
15:06et donc il a nié les viols
15:10et il a dit qu'il y avait eu des agressions sexuelles.
15:13Il s'est raccroché à ce qu'il pouvait raccrocher.
15:15J'en attendais pas énormément de sa part
15:17parce que j'accordais pas beaucoup de crédit à sa parole en tant qu'adulte
15:21alors qu'il avait été la parole absolue pour moi en tant qu'enfant.
15:24Et c'est aussi quelque chose de pouvoir se reconfronter à son agresseur
15:28après tant d'années pour changer un peu la perception qu'on avait
15:31et le prisme que j'avais sur lui.
15:33Et puis, après, il a quand même, au cours du procès,
15:38avoué qu'il avait effectivement fait tout ce qui lui était reproché
15:42mais qu'à l'époque, il n'en avait pas conscience
15:44et il s'est toujours raccroché à ça,
15:46au fait qu'à l'époque, il n'avait pas conscience que c'était des viols.
15:49Et les chiffres des violences atomineurs sont effrayantes.
15:52Il y a un enfant violé toutes les 3 minutes en France.
15:54Dans le milieu du sport, c'est un enfant sur 7 qui est concerné
15:56et ce chiffre grimpe à 1 sur 3 parmi les sportifs de haut niveau.
15:59Vous avez aussi co-créé une association, l'association Robon.
16:03Quel est le rôle de cette association ?
16:06Cette association, on l'a créée en cours de procédure
16:09parce qu'on s'est rendu compte à quel point c'était dur,
16:11à quel point c'était long et à quel point on se sentait seule
16:14parce que même nos familles, même nos amis
16:16n'étaient pas en capacité de comprendre ce qu'on était en train de traverser
16:19et on aurait aimé avoir des associations
16:21qui pouvaient être là pour nous soutenir.
16:23Et donc on voulait être là pour toutes les prochaines
16:25et aussi quelque chose de positif,
16:27ce qui nous est arrivé.
16:29Et puis, avec cette association,
16:31aujourd'hui, je suis à plein temps sur l'association.
16:34Je ne suis plus professeur de PS depuis juin.
16:37Et on fait à la fois de la sensibilisation
16:39sur tous les publics, les dirigeants, les entraîneurs,
16:42les jeunes et les parents.
16:43Parce que finalement, c'est un problème de société.
16:45Il faut tous, en tant que citoyens,
16:47sensibiliser à ça à travers différents projets
16:50qui peuvent soit amener à l'art,
16:52soit amener à la prise de parole avec des concours d'éloquence,
16:55avec des expos ou avec des ateliers de sensibilisation
16:59et des tables rondes.
17:00Il y a plein de formes différentes.
17:01Et puis aussi des tournois qu'on organise
17:03pour que justement des bonnes valeurs soient prônées.
17:06Et puis aussi, évidemment, de l'aide et du soutien de victimes
17:08avec des week-ends de reconstruction,
17:10de l'aide juridique et de l'aide psychologique.
17:12Merci Angélique.
17:13Il faut absolument lire.
17:14C'est un jour quelqu'un te fait du mal aux éditions Stock.
17:17Et on peut rappeler le site internet de l'association rebond.
17:20C'est www.assorebond.com
17:23Voilà, comme ça c'est facile à trouver.
17:25Merci à vous Angélique Cauchy.
17:26Je rappelle que vous êtes ancienne tennis woman.
17:28Merci à vous également Muriel Réus.
17:30A bientôt dans La Force de l'Engagement.
17:31A dimanche.