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Dans Destins de Femmes, Judith Beller reçoit Armelle Carminati-Rabasse, ingénieure centralienne et fondatrice de la société d'investissements Axites-Invest


"Destins de Femmes" nous raconte les parcours des femmes extraordinaires qui tissent le lien de notre République. Nous explorons des thèmes universels tels que la lutte pour l’Egalité des genres, la liberté d’expression, la diversité culturelle, le droit à disposer de son corps. Emission tirée du livre de Valérie Perez-Ennouchi, "Destins de Femmes", sorti chez Ramsay, prix Edgard Faure 2021.

Une émission de Judith Beller.

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##DESTIN_DE_FEMMES-2024-11-02##

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Transcription
00:00Simplicicar, la vente de votre auto servie sur un plateau, avec plus de 90 concessions près de chez vous.
00:06Simplicicar.com vous présente Sud Radio, Destin de Femmes, Judith Beller.
00:12Bienvenue à toutes et à tous dans Destin de Femmes sur Sud Radio, votre rendez-vous du samedi à 13h30,
00:16inspiré du livre au même titre de Valérie Pérez.
00:20Il s'agit, vous le savez, de raconter un féminisme ici qui nous lie tout,
00:24au lieu de nous cliver, le féminisme autrement.
00:27Aujourd'hui, vous êtes avec Armel Karminati-Rabas, une pionnière et une leader incontestée dans le domaine de la mixité du capital humain.
00:35Alors, Armel, vous êtes initiatrice notamment du programme Accent sur L,
00:40où encore vous êtes auteur de plusieurs ouvrages dont Remixer la mixité et Pouvoir ES, avec le E entre parenthèses, sorti chez Erol.
00:49Erol, pardon, vous interrogez notre vision du pouvoir dans la sphère privée, professionnelle et sociale.
00:55Vous avez été directrice générale de plusieurs grandes entreprises.
00:58Bref, votre destin, vous l'avez vraiment façonné à la force de votre poignée.
01:01Bienvenue sur Sud Radio, Armel.
01:03Merci, Judith.
01:07Alors, les questions de ce début d'émission, Armel Karminati-Rabas, votre définition du féminisme ?
01:13Ma définition du féminisme, ce serait que c'est de l'humanisme appliqué.
01:18Un peu comme la différence entre les sciences appliquées et les sciences fondamentales.
01:22Alors, quelle est la différence ?
01:23En fait, quand on regarde les choses en face, l'humanisme où le monde est pour,
01:28comme tous les trucs sur lesquels on est pour, on a de l'envie, on a de l'incantation,
01:33ça n'oblige pas à grand-chose.
01:34Or, le féminisme, ça oblige à se coller à un sujet qui sont les déséquilibres pharmaum,
01:40qui sont mesurables sur tous les continents, dans toutes les sociétés, à travers tous les âges.
01:45Et si on ne réussit pas à améliorer ça, en quoi est-ce qu'on peut prétendre être humanisme pour réussir le reste ?
01:52C'est-à-dire l'égalité de chacun au bénéfice de tous.
01:55Donc, au fond, c'est s'accrocher à un sujet très concret, très clair, absolument indiscutable, mesurable.
02:03Et puis là, on voit si on avance ou pas.
02:05Donc, vous voulez dire que si on n'est pas féministe aujourd'hui, on ne peut pas faire avancer la société ?
02:10Oui, d'ailleurs, c'est un marqueur de démocratie.
02:12On le voit sur toutes les études, mais bien sûr, au niveau mondial.
02:16Là où il y a un meilleur équilibre homme-femme, un vrai travail des gouvernements, travail des entreprises, travail des familles,
02:26pour de l'équité, de l'égalité, il y a de la démocratie parce qu'il y a de la liberté.
02:31Bien sûr.
02:32Et qu'en fait, il y a de la liberté parce qu'il y a de la confiance dans l'individu.
02:36On veut équilibrer, certains métriquement vont dire des proportions de femmes et d'hommes ou des destins de femmes et d'hommes.
02:43C'est parce qu'on leur fait confiance qu'elles respectent les différences aussi.
02:48C'est même faire l'apprentissage des différences.
02:50C'est super facile à faire. Il n'y a même pas besoin de voyager, on les a là.
02:53Ça, c'est très juste.
02:55Alors, est-ce que les hommes, ils peuvent être féministes ?
02:57D'ailleurs, je tiens à dire que c'est un peu le sujet de votre livre, de remixer l'amixité.
03:02Donc, c'est une question qui tombe bien.
03:04Est-ce qu'ils peuvent être féministes, alors ?
03:06Mais la plupart le sont.
03:08J'allais dire, les plus travailleurs sont silencieux, c'est-à-dire les plus concrets.
03:13Ils ont peur de parler en général.
03:15Ils trouvent ça tellement naturel qu'ils ne voient pas l'intérêt de rouler des mécaniques sur le sujet.
03:20Moi, je le vois à la maison.
03:23Mon mari a élevé nos trois filles parce que c'était des enfants qui avaient du potentiel,
03:30qu'il fallait aider, qu'il fallait propulser, de la même façon que s'il avait eu des garçons.
03:35Par exemple, il y avait un sportif qui m'avait passionnée il y a 7-8 ans.
03:41C'était Andy Murray. C'était un champion de tennis américain.
03:44Pour le coup, je l'avais noté, c'était en 2017, Judith.
03:48La même année, il a recadré un journaliste de la BBC
03:52qui le félicite d'être le premier Américain à arriver au sommet du Grand Slam.
03:57Et il lui dit, attendez, vous oubliez les deux soeurs Williams.
04:01Donc, je suis le premier homme à réussir ça.
04:04Et puis, dans ces années-là, c'était quand il avait Amélie Morismo comme coach.
04:09Et là, il avait des condoléances sur le thème
04:13« tu es bien courageux d'avoir une femme coach ».
04:15Et c'est elle qui se faisait insulter quand il ne performait pas,
04:19ce qui n'était jamais arrivé avec ses coachs précédents.
04:21Et Andy Murray, c'est typique du féministe, de l'honnête homme, en vérité,
04:26que les inégalités choquent, qu'il le dit calmement
04:29et qu'il passe à autre chose sans militer.
04:31Alors, vous, dans le cadre de votre expérience,
04:35comment est-ce qu'on peut les encourager,
04:37ceux qui n'osent pas ou sont engagés ou parlés,
04:40dans la promotion de cette mixité qui est aussi importante ?
04:43Parce qu'à un moment donné, il faut quand même le dire aussi qu'ils sont engagés.
04:46Sinon, on ne les voit pas.
04:47Et puis, les autres continuent tout droit sans y faire attention.
04:49C'est ça.
04:50Alors, c'est un peu différent quand c'est au travail ou à la maison.
04:54Bien sûr.
04:55Bon, à la maison, je vais passer vite, mais il ne suffit pas de vider de lave-linge.
04:58Il faut se préoccuper que le panier est plein.
05:00De linge sale, lancer, voilà.
05:02Lancer la machine, quoi.
05:03Finir quelque chose, c'est solidaire.
05:06C'est pas mal.
05:07C'est déjà beaucoup, mais ce n'est toujours pas l'égalité.
05:09C'est prendre la charge.
05:11Au boulot, finalement, c'est au patron ou à la patronne de donner le tempo.
05:16C'est comme ça que ça se passe.
05:18Ça peut arriver par la base.
05:19Mais moi, je vois, par exemple, dans ma propre expérience,
05:22il a fallu que je sois nommée partenaire à 38 ans
05:27pour que mon patron de l'époque, mon président de l'époque
05:31nous accueille dans un comité de direction en disant
05:34« Salut les gars ! »
05:35Que j'aille le voir à la sortie en me disant
05:37« Ah, mais là, il y a un peu quelque chose qui a changé. »
05:39Et qu'il me dise « Va regarder ce sujet. »
05:42Et c'est à partir du moment où je suis sur sa demande à lui,
05:45sur son invitation à lui,
05:46à aller regarder le sujet des carrières des autres femmes
05:49que j'ai commencé à réaliser
05:51toute l'évaporation silencieuse des talents féminins,
05:54féminins, sans bagarres, sans combats, sans prud'hommes, rien.
05:58L'élégance du départ des femmes.
06:01Et qu'en six mois, j'étais féministe.
06:04Mais je ne l'ai pas été auparavant.
06:06Ou alors vous ne le saviez pas.
06:08Vous ne le formuliez pas.
06:09Je ne l'ai pas pensé.
06:10Je ne l'ai pas pensé.
06:11On était 5-7% de femmes en école d'ingénieur à Centrale.
06:15Je ne calculais pas le monde avec un verre blanc et un verre rose.
06:18C'est toujours pareil.
06:19Sur les femmes ingénieures, il y en a très peu.
06:20On ne voit pas.
06:21En fait, on est en veugle.
06:22Parce qu'elles ne savent pas qu'elles peuvent y aller aussi.
06:23Ou quand on y est, on est bien content d'être là.
06:26Et on ne compte pas.
06:27Je pense que les jeunes filles d'aujourd'hui, c'est différent.
06:29Moi, je vois sur mes trois filles, il y en a deux qui sont passées par la filière ingénieure.
06:33Alors là, elles ont compté dès l'entrée.
06:35C'est-à-dire, elles sont passées d'une brillante terminale scientifique
06:39où elles étaient quantitativement presque plus nombreuses que les garçons.
06:43Et alors, en termes statistiques, à rafler les mentions.
06:46Et puis, le matin de la rentrée de la prépa,
06:49pschit, elles étaient 6 filles sur 45.
06:52Alors là, pour le coup, ça leur saute aux yeux très tôt.
06:55Et du coup, elles ont d'autant plus envie de se mettre en avant que votre génération.
06:59Alors, ça dépend.
07:00Je pense que c'est comme toujours.
07:03Ça dépend de l'entourage, ça dépend des discours,
07:05ça dépend de la façon dont ce choc est simplement visuel
07:08ou parfois de l'expérience quotidienne dans la classe au sens désagréable.
07:13Bien sûr.
07:14Donc, il y a toute une partie de cette génération qui n'attend pas de demander pardon.
07:21Et puis, il y en a une autre qui vont se laisser tétaniser comme d'autres.
07:25Alors, justement, puisque vous parlez de tétaniser,
07:29c'est quoi l'obstacle, selon vous, à un avancement plus rapide du droit des femmes ?
07:33Il y en a tellement.
07:35Le premier qui vous vient à l'esprit comme ça ?
07:37Je pense que l'ignorance.
07:41Voilà, c'est ça.
07:42Ne pas savoir, c'est ne pas décrypter, c'est ne pas être attentif,
07:46c'est ne pas être vigilant et passer complètement à côté du sujet.
07:49Et on peut passer une vie entière de bonne foi.
07:52Ou être féministe sans s'en rendre compte.
07:54Ou être féministe sans s'en rendre compte.
07:56Symétriquement, vous avez tellement raison, c'est exactement ça.
07:58Et en étant aveugle à ça, on peut faire son bonhomme de chemin en honnête homme ou en honnête femme.
08:05Quelqu'un peut vous faire remarquer quelque chose,
08:08mais vous n'êtes pas contagieux dans la société et ça, c'est des occasions ratées.
08:12Donc, c'est en ce sens-là que…
08:15Il faut que les hommes s'en saisissent aussi.
08:17Oui, il ne suffit pas d'y croire.
08:19En fait, c'est du travail.
08:20Et c'est là que ça devient compliqué.
08:22C'est-à-dire être pour, c'est généreux, c'est sympathique.
08:26Et qu'est-ce qu'on fait derrière ?
08:27Il faut y croire, ça c'est la moindre des choses.
08:29Et trouver ses raisons personnelles.
08:31Ça peut être parce que c'est soeur, ça peut être parce que c'est fille,
08:33ça peut être parce que c'est copine, enfin peu importe.
08:36Il faut le dire et là vous y êtes complètement.
08:40C'est-à-dire l'assumer.
08:41Parce que quand vous l'assumez, ça vous oblige.
08:44Quand vous dites quelque chose, on vous attend six mois plus tard,
08:47un an plus tard, en disant qu'est-ce qui s'est passé depuis que t'as dit que.
08:50Il faut le faire, et ça c'est une opinion de toutes les minutes,
08:55ce travail-là, puisqu'en fait c'est un travail d'amélioration du monde.
09:00L'amélioration du monde, il y a le trottoir au soleil,
09:03mais il y a aussi le contre.
09:05Contre les effets contraires, contre les vents contraires.
09:08Là, c'est compliqué.
09:09On peut lâcher l'affaire aussi, ça peut être décourageant.
09:11On fait, on dit, puis il n'y a pas de résultat.
09:14Qu'est-ce qu'on fait quand on est patron et qu'il n'y a pas de résultat tout de suite ?
09:17Ça prend du temps aussi, il faut apprendre la patience.
09:19Ça prend du temps, c'est le tango.
09:21On avance de deux pas, on recule d'un.
09:23Ne jamais se reposer parce que ça reculera.
09:27Mais tout de même, il faut se le dire, savourer le résultat.
09:31Et honnêtement, savourer le résultat, moi je l'ai vu,
09:34parce que j'ai démarré ça comme M. Jourdain ou Mme Jourdain.
09:36Comme je vous le dis, j'ai un patron qui me tape sur l'épaule,
09:38qui me dit, va regarder, je vais regarder.
09:41Les chiffres me montrent la disparition.
09:43Les interviews de ceux qui étaient partis me montrent des histoires récurrentes
09:47qui se ressemblaient.
09:49Et finalement, savourer les résultats,
09:55c'est pas simplement voir que finalement,
09:58certaines trouvent leur place,
10:00que votre couche de managers est un peu plus attentif
10:03à repérer les talents singuliers, différents,
10:06et s'en trouve tout à fait bien,
10:08mais c'est aussi le rayonnement.
10:10Le rayonnement, il faut quand même le dire,
10:12c'est le rayonnement pour l'entreprise qui avance,
10:14c'est le rayonnement personnel,
10:16parce qu'à un moment donné,
10:18vous êtes regardé avec gratitude.
10:20Vous n'avez pas que des résultats.
10:22Et ça, c'est une nourriture inouïe.
10:24Allez, vous restez avec nous sur Sud Radio pour Destins de Femmes,
10:27avec Carmel Carminati-Rabas,
10:29qui est auteure,
10:31et dont je vous recommande les livres
10:34et remixer la mixité, c'est chez Hérole aussi.
10:36Co-auteure.
10:38Jamais seule.
10:40Évidemment, parlons-en.
10:42Allez, à tout de suite, parlons de reste sur Sud Radio.
10:48Femmes, vous le savez, c'est l'émission du féminisme.
10:50Autrement, vous êtes en compagnie aujourd'hui
10:52de Carmel Carminati-Rabas,
10:54auteure incontestée de chez Hérole.
10:57Alors, co-autrice de ces très très bons livres,
10:59si ça vous intéresse,
11:02et puis, remixer la mixité.
11:04Je vous les recommande.
11:06Alors, Carmel, vous me disiez que sur Andy Murray,
11:08on s'était trompé tout à l'heure.
11:10Oui, parce que j'y connais strictement rien au tennis.
11:12Donc, en fait...
11:14Murray, Maurice Mou, j'en suis sûre.
11:16Le fait, effectivement, qu'il ait été interpellé par la BBC,
11:18j'en suis sûre aussi.
11:20Mais alors que c'était le premier champion américain ou écossais,
11:22moi, je laisse les experts dire.
11:24Donc, à priori, il est écossais.
11:26Par contre, son courage, son flegme, oui, ça pourrait bien être britannique.
11:28On adore.
11:31Alors, Carmel, une avancée, en fait.
11:33Quelque chose qui fait que la condition des femmes
11:35s'est vraiment améliorée depuis quelque temps.
11:37Qu'est-ce que ça serait pour vous ?
11:39Je dirais au moins trois étapes.
11:43La liberté à disposer de son corps.
11:45On entend beaucoup parler aux Etats-Unis,
11:47dans la campagne américaine.
11:49C'est Simone Veil, 1974.
11:51Merci, Madame Veil.
11:53Et puis, l'inscription dans la Constitution, l'année dernière.
11:55Merci le gouvernement, dans ce moment.
11:57Parce que là, ça ancre encore plus.
11:59Je dirais, moi, la deuxième étape,
12:01et je l'ai complètement vécue,
12:03c'est la puissance des réseaux
12:05et donc la sororité.
12:07Alors, c'est vrai, parmi les premiers actes
12:09que j'ai pu faire dans l'entreprise,
12:11quand mon patron m'a dit,
12:13vas-y, regardez ce qui se passe, pourquoi t'es la seule.
12:15Vous étiez déjà chez Accenture, notamment, je le dis quand même.
12:17J'étais partenaire, voilà, c'est ça.
12:19Et la première femme.
12:21C'est pas n'importe quoi.
12:23Et effectivement, j'ai monté un réseau,
12:25enfin, j'ai ouvert un réseau
12:27où j'ai invité des femmes
12:29parmi nos clientes
12:31et les femmes de l'entreprise
12:33qui commençaient à grandir.
12:35Et...
12:39J'ai vu la sororité en action.
12:41Et ça, c'était en 2000-2001.
12:43On est 23 ans plus tard.
12:4523 ans plus tard, c'est toujours là.
12:47D'ailleurs...
12:49Quand ça marche, ça marche, quoi.
12:51Quand ça marche, ça marche.
12:53Pas plus que la fraternité.
12:55Pas plus que la fraternité.
12:57C'est-à-dire, ce procès
12:59en manque de sororité entre femmes,
13:01les crépages de chignons et tout ça,
13:03je trouve que c'est...
13:05C'est aussi macho, en fait.
13:07Ça existe, mais de même que les affrontements
13:09d'une violence inouïe,
13:11complètement disproportionnée entre hommes existent.
13:13Bien sûr.
13:15La lutte entre hommes existe.
13:17La rivalité entre hommes existe.
13:19Sinon, le monde serait merveilleusement pacifique.
13:21Et puis,
13:23je pense que la dernière avancée,
13:25elle n'est pas facile.
13:27Mais c'est les violences, c'est MeToo.
13:29C'est le procès des viols de Mazan en ce moment.
13:31C'est l'incroyable Gisèle Pellicot.
13:33Incroyable.
13:35Quelle force.
13:37Qui choisit non seulement de subir ce procès
13:39pendant 10 mois,
13:41mais en plus d'être celle qui nous invite
13:43à regarder cette violence larvée
13:45en face. Et c'est pas drôle.
13:47Non, mais c'est magnifique.
13:49Et même pour nous. Qui a envie de regarder
13:51les travers ?
13:53Mais c'est extrêmement nécessaire.
13:55Elle est en train de nous faire gagner un temps fou.
13:57Donc ça, c'est la troisième avancée,
13:59mais matérielle et sur un des sujets.
14:01Je pense que c'est l'ultime sujet difficile.
14:03Alors Simone de Beauvoir,
14:05elle nous disait, vous savez,
14:07dans le second sexe, on ne n'est pas femme, on le devient.
14:09Est-ce que vous savez, quand vous êtes devenue femme,
14:11vous voir Malcarminati ?
14:13Elle le disait de mémoire,
14:15parce que c'est quand même deux pavés,
14:17parce qu'elle disait que c'était
14:19les codes sociaux qui nous
14:21formatent et qu'à un moment donné,
14:23on finit par se conformer.
14:25On peut s'appliquer chacune dans notre intimité.
14:27Ou chacun.
14:29Oui. Devenir homme ?
14:31Bien sûr.
14:33Mais évidemment.
14:35Alors expliquez-vous.
14:37Oui, parce que
14:39devenir femme,
14:41il faut bien un référentiel
14:43pour dire je le suis, je le suis pas assez,
14:45je le suis moins, ou je me fais reprocher
14:47de l'être trop différemment, etc.
14:49C'est pareil chez les hommes.
14:51C'est viril.
14:53Je ne suis pas sûre que ce soit exactement pareil.
14:55C'est une conversation qui prendrait
14:57quelques heures.
14:59Je pense qu'il y a plein de masculinités différentes.
15:01De même qu'il y a plein de féminités différentes.
15:03Par contre, le carcan
15:05de la virilité,
15:07il s'impose à beaucoup.
15:09Il faut être courageux pour être un homme
15:11en s'en éloignant et en s'en
15:13affranchissant.
15:15Et je pense que c'est courageux aussi pour certains hommes.
15:17D'accord.
15:19Mais aimer la danse classique, c'est pas si simple
15:21à assumer au milieu des copains qui aiment le foot.
15:23Alors comment ?
15:25Pas à pas.
15:27Je pense que
15:29mes parents, qui sont d'extraction
15:31d'immigration italienne, m'ont appris
15:33à moi, à mon frère,
15:35à ma sœur, que finalement
15:37il fallait travailler
15:39pour creuser sa voie et que c'est
15:41par ce chemin-là qu'on avait de la liberté
15:43et de la possibilité.
15:45Je pense que mon mari,
15:47un homme merveilleux que j'ai rencontré il y a plus de 40 ans,
15:49il m'a laissé
15:51de l'espace, de la liberté
15:53et le droit d'être égoïste.
15:55C'est-à-dire le droit de faire ce que je ressens de bien
15:57pour moi. C'est absolument inouï.
15:59C'est très échoué parce que c'est rare.
16:01Et mes patrons, en tout cas
16:03ceux dont j'ai un souvenir
16:05plein de gratitude, c'est ceux qui m'ont
16:07laissé de l'espace.
16:09Après, il fallait le remplir.
16:11Après, il fallait le nourrir.
16:13Et donc à chaque fois,
16:15je pense que je me suis affermée
16:17dans être vraiment qui je suis.
16:19Être bien en tant que femme.
16:21Vous avez l'air bien en tant que femme, en tant que vous
16:23en fait. Et ça, c'est venu
16:25quand ?
16:27Votre bien-être ?
16:29C'était très progressif, Judith.
16:31Est-ce qu'il y a un moment où tout d'un coup vous avez fait
16:33ça y est, j'y suis ?
16:35Le moment où je...
16:37Je pense que
16:39quand j'ai quitté le CAC 40,
16:41quand j'ai quitté une direction générale,
16:43que j'ai dit stop, c'est bon,
16:45j'adore les entreprises. C'est pas du tout de la haine
16:47de ce genre d'entreprise. D'ailleurs,
16:49j'ai continué à m'engager
16:51auprès du MEDEF parce que j'ai du respect
16:53pour les chefs d'entreprise et les entrepreneurs.
16:55Mais quand j'ai pris ma liberté,
16:57là, pour le coup,
16:59j'ai respiré. Mais là, physiquement,
17:01le diaphragme s'est libéré.
17:03Mais je ne suis pas très précoce.
17:05Je ne suis pas très précoce.
17:07Ça n'a rien à voir.
17:09Chacun a son temps, justement.
17:11Et donc, en fait,
17:13vous parlez aussi,
17:15dans Remixer la mixité,
17:17du fait que le pouvoir
17:19s'exerce aussi dans la relation
17:21et qu'il faut que, de manière privée
17:23ou professionnelle, ça évolue.
17:25C'est-à-dire que le pouvoir,
17:27il n'est pas forcément toujours masculin non plus.
17:29Déjà. Et puis, il y a le pouvoir
17:31de et le pouvoir sur.
17:33Donc, tant qu'on est sur le pouvoir,
17:35sur l'objet, la possession,
17:37ses troupes, ses chiffres,
17:39sa boîte, ses équipes,
17:41là, pour le coup,
17:43on est dans un contrôle.
17:45Et là, pour le coup, c'est pas épanouissant pour grand monde.
17:47Par contre,
17:51traverser des échelons,
17:53grandir, avoir le pouvoir de...
17:55Moi, je l'ai vu en devenant dirigeante.
17:57C'est en devenant dirigeante que j'ai commencé
17:59à avoir du temps pour aller chez le coiffeur en semaine.
18:01Sinon, vous pouvez pas.
18:03C'est en devenant assez
18:05top manager que j'ai pu
18:07prendre des fins d'après-midi pour aller
18:09voir
18:11la petite compétition de fin
18:13d'année au cours de danse de mes filles, ou pour aller
18:15accompagner une sortie scolaire sans
18:17essayer de le faire en clandestin.
18:19Et d'ailleurs, quand vous devenez dirigeante,
18:21puisque cette liberté, elle est là,
18:23il faudrait qu'on le raconte.
18:25Une des raisons pour lesquelles ni les femmes
18:27aujourd'hui, et de moins en moins certains
18:29hommes aujourd'hui n'ont en vie des positions
18:31de pouvoir, c'est parce que ça fait pas en vie,
18:33et c'est parce qu'on n'en rend compte que la moitié.
18:35Parce qu'ils se rendent pas compte
18:37que plus ils montent, plus ils sont libres.
18:39On raconte l'effort, on raconte la charge,
18:41le stress, l'angoisse
18:43de la mauvaise décision,
18:45le temps consacré à ça qui fait que vous n'avez plus
18:47beaucoup de temps pour le reste. Mais on ne raconte
18:49pas l'immense liberté
18:51que ça donne. Et d'ailleurs,
18:53je le vois, moi, dans mes entreprises,
18:55quand mes
18:57top managers ou les dirigeants
18:59à côté de moi devenaient papas,
19:01j'allais les chercher par la cravate en lui disant
19:03si tu prends ton congé patte,
19:05dis-le. Fais pas une croix
19:07sur un temps d'agenda avec ton assistante
19:09qui raconte partout que t'es en déplacement. Non !
19:11Au contraire. Revendique-le.
19:13C'est important. Assume ça.
19:15De toute façon, ce temps-là, tu le prends. Bien sûr.
19:17Tu vas voir à quel point ça soulage de pas mentir
19:19et de pas se travestir au boulot.
19:21Et surtout à quel point ça fait du bien à la société.
19:23Et ça donne des autorisations à tout le monde, mais bien sûr.
19:25Donc en fait, finalement, la parole
19:27féministe des hommes doit se libérer aussi.
19:29C'est ça que vous dites. Mais bien sûr. On doit plus l'entendre, quoi.
19:31C'est ça. La parole
19:33féministe, la parole de liberté, ils ont
19:35envie... D'ailleurs, même sans avoir un enjeu féministe
19:37comme le congé paternité qui rééquilibre
19:39le temps à la maison,
19:41aller le vendredi en fin d'après-midi
19:43à la campette de foot du petit
19:45dernier, c'est-à-dire entre père et fils,
19:47il faut l'assumer. Quand on a un niveau
19:49dirigeant où on a cette liberté de prendre
19:51le temps, il faut le revendiquer. Parce que ça fait de vos modèles,
19:53en fait. Mais bien sûr,
19:55ça relaxe tout le monde. Ouais, c'est clair.
19:57Alors juste,
19:59on n'a plus beaucoup de temps ensemble,
20:01Armelle et Las, mais
20:03si vous aviez un petit mot de la fin, un message à faire passer
20:05aux éditeurs, aux auditrices.
20:07C'est presque un petit
20:09peu un contre-message sur la confiance en soi.
20:11Moi qui, depuis les années
20:132000, ai construit des programmes en
20:15entreprise pour aider les femmes à avoir de l'ambition,
20:17la redéverrouiller, parce qu'elles l'ont eu
20:19à un moment donné. À un moment donné,
20:21tous ces programmes, ils passent par le côté,
20:23alors là, mince, les femmes manquent de confiance, elles osent
20:25pas, elles vont pas demander une augmentation,
20:27elles sont trop sages, elles sont un peu scolaires,
20:29elles attendent la bonne note, et l'augmentation
20:31qui va avec, ça vient jamais.
20:33En fait, je pense qu'on se trompe.
20:35Je pense qu'il faut
20:37travailler l'estime de soi. C'est-à-dire
20:39savoir qui on est, savoir ce qu'on vaut,
20:41ça c'est sûr. Mais cette
20:43injonction à la confiance en soi, c'est presque
20:45une injonction au narcissisme, voire même,
20:47c'est complètement démodé. Moi,
20:49j'ai 35 ans, peut-être même 40
20:51années de carrière,
20:53je sais que pendant mes
20:5520 premières années, c'était l'enjeu,
20:57il fallait acquérir de la confiance
20:59en soi, et avec ça, les autres vous suivront
21:01avec conscience, vous êtes un bon capitaine,
21:03et voilà. Les crises ont tout cassé,
21:05ça a cassé les jouets, ça a cassé la vaisselle,
21:07et là maintenant, finalement,
21:09celui ou celle
21:11que vous avez envie de suivre, c'est celui
21:13qui admet la possibilité de l'erreur,
21:15parce que la crise, c'est quand ça casse,
21:17et donc, il est fiable.
21:19Alors, votre mot de la fin, ça sera qu'il faut
21:21admettre la possibilité de l'erreur,
21:23et par là même, être honnête
21:25avec soi-même, avec les équipes,
21:27ne pas les surstresser, viser la fiabilité,
21:29pas le narcissisme.
21:31Magnifique, merci beaucoup, Armel Carminet-Tirabas.
21:33Je vous rappelle vos deux excellents
21:35livres en co-auteurs, Remixer, L'Amixité,
21:37Femmes et Hommes, Parler et Agir Autrement,
21:39et Pouvoir ES.
21:41Les nouveaux équilibres, Femmes-Hommes,
21:43c'est sorti chez Erol. Nous, on a rendez-vous
21:45samedi prochain à 13h30 pour un nouveau Destin de Femmes,
21:47et puis demain, c'est excellent à 19h, évidemment.
21:49Sudradio.fr, vous avez tous les podcasts.
21:51Je vous fais des bisous. Merci à Juju
21:53qui réalise pour vous aujourd'hui. A plus tard.

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