Judith Beller reçoit Claire Koç, journaliste et auteure
"Destins de Femmes" nous raconte les parcours des femmes extraordinaires qui tissent le lien de notre République. Nous explorons des thèmes universels tels que la lutte pour l’Egalité des genres, la liberté d’expression, la diversité culturelle, le droit à disposer de son corps. Emission tirée du livre de Valérie Perez-Ennouchi, "Destins de Femmes", sorti chez Ramsay, prix Edgard Faure 2021.
Une émission de Judith Beller.
Merci au Groupe Connect Travail Temporaire !
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##DESTINS_DE_FEMMES-2023-12-30##
"Destins de Femmes" nous raconte les parcours des femmes extraordinaires qui tissent le lien de notre République. Nous explorons des thèmes universels tels que la lutte pour l’Egalité des genres, la liberté d’expression, la diversité culturelle, le droit à disposer de son corps. Emission tirée du livre de Valérie Perez-Ennouchi, "Destins de Femmes", sorti chez Ramsay, prix Edgard Faure 2021.
Une émission de Judith Beller.
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00:00 Le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
00:04 Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout en France.
00:08 Le groupe Connect présente...
00:10 Sud Radio, Destin de Femmes, Judith Beller.
00:14 Bonjour, bonjour les copines et les copains.
00:16 Heureuse de vous retrouver pour Destin de Femmes, l'émission qui œuvre pour que le combat pour le droit des femmes devienne une cause commune.
00:22 Inspirée du livre au même titre de Valérie Pérez-Enouchi, sortie chez Ramsey.
00:27 Aujourd'hui, vous êtes en compagnie de la journaliste Claire Coche,
00:30 une journaliste qui incarne un engagement englobant,
00:33 qui explore les nuances et les complexités de l'identité et de la cohabitation culturelle et religieuse en France.
00:38 Claire Coche, vous nous venez aujourd'hui avec votre livre,
00:41 "Le jour où je me suis convertie", qui est sorti chez Albain Michel.
00:44 Et vous nous invitez...
00:45 Pardon, chez Plon, j'ai mélangé les deux.
00:48 Et... parce qu'il y en a un autre aussi.
00:50 Et vous nous invitez à une réflexion sur la diversité des identités spirituelles en France.
00:54 Bienvenue sur Sud Radio et bienvenue dans Destin de Femmes.
00:56 Merci, Judith, je suis très très honorée d'être là.
00:58 Merci pour l'invitation.
00:59 Avec un grand plaisir.
01:00 Sud Radio, Destin de Femmes, Judith Beller.
01:03 Alors Claire Coche, on va y arriver, décidément.
01:06 Je vais vous poser les quatre questions auxquelles doivent répondre toutes les invitées de Destin de Femmes.
01:12 Alors c'est parti.
01:13 Quel destin de quelle femme vous inspire le plus ?
01:16 C'est une très très bonne question.
01:19 Je dirais, je ne sais pas si c'est en tout cas une femme en chair et en os,
01:24 mais je dirais que c'est Marianne, le symbole de notre République française.
01:29 Pourquoi ?
01:30 Pour moi, elle incarne la beauté, l'intelligence, la femme libre et émancipée.
01:36 Pour moi, en plus, qui vient de l'étranger et surtout d'une famille
01:40 où la femme n'était pas rien, mais pas grand chose.
01:44 C'est un symbole très fort, Marianne.
01:48 Et je dirais même, alors s'il faut parler d'une personne en chair et en os,
01:52 je dirais même Brigitte Bardot.
01:53 D'accord.
01:54 Je trouve que je suis retombée récemment sur une archive
01:58 dans laquelle elle était invitée à une émission de télévision.
02:02 C'était Jean-Pierre Elkabach qui animait cette émission, je crois que c'était en 1974.
02:07 Et elle m'a époustouflée parce que je l'ai trouvée sans filtre.
02:12 Elle en avait rien à faire.
02:13 Il n'y a pas de surmoi.
02:15 C'est exceptionnel parce que en même temps, toute sa pensée est construite, est intelligente.
02:22 Et oui, j'ai trouvé vraiment la femme émancipée par excellence.
02:28 Oui, elle ne se soucie pas de ce qu'on pense d'elle et puis elle assume ce qu'elle est.
02:31 C'est ça qui est formidable.
02:32 Je trouve que c'est vraiment une femme...
02:33 Ce que vous aimez, c'est les femmes qui s'assument.
02:35 Oui, j'adore ça.
02:36 Et donc Marianne, elle s'assume.
02:37 Oui, absolument.
02:38 Parce que Marianne, c'est la République.
02:40 Absolument.
02:40 Et puis c'est un peu une lumière dans l'obscurité, si je puis dire,
02:45 sans faire dans le pathos ou les idées toutes reçues.
02:48 Mais je trouve vraiment que...
02:49 C'est sombre en ce moment et vous trouvez qu'elle met de la lumière.
02:52 Absolument.
02:52 Je trouve que, vous voyez, c'est un personnage central dans notre société,
02:56 mais finalement, on n'en sait pas plus sur elle.
02:58 On ne connaît pas trop de choses d'elle.
03:00 Je trouve que ça manque.
03:01 Ce serait bien qu'à l'école, notamment...
03:03 On en apprenne plus sur elle.
03:04 Oui, absolument.
03:05 Qu'on éduque les enfants, leur apprennent ce que c'est
03:08 et ce que sont les valeurs de liberté, égalité, fraternité.
03:11 Pas seulement citer ces trois valeurs,
03:14 mais expliquer ce qu'il y a derrière en plus en profondeur.
03:17 Plus d'école, d'instruction civique en fait.
03:20 Oui, absolument, parce que ça permet la tolérance.
03:24 Ça permet la tolérance d'expliquer les choses,
03:27 de connaître l'histoire, de s'instruire, de lire.
03:30 Tout ça, ça permet justement de ne pas tomber dans la pensée unique.
03:34 Pensée unique dont vous êtes issue en fait.
03:36 C'est ça que vous racontez, puisque la femme n'était pas grand chose dans votre famille.
03:39 A priori, c'était pas très détendu.
03:41 Oui, dans ma famille, on peut dire que c'était un patriarcat qui était très, très fort.
03:48 Moi, en tant que femme, jeune fille et femme,
03:52 j'avais le droit qu'à une chose, c'était d'obéir.
03:55 J'avais pas le droit à grand chose, j'avais pas le droit d'argent de poche.
03:57 J'étais pas l'égale de mes frères.
03:58 Mes frères pouvaient rêver, par exemple, mon grand frère pouvait rêver
04:02 d'être par exemple le prochain Zinedine Zidane
04:05 en allant au centre de formation dans le sud de la France.
04:08 Mais moi, j'avais pas le droit de rêver.
04:09 J'avais pas le droit de me projeter, de devenir journaliste.
04:14 Quand je suis devenue journaliste,
04:16 la première fois que j'ai présenté les journaux, télé,
04:19 pour moi, c'était une belle victoire par rapport à là d'où je viens.
04:22 Ils vous ont vus, vos parents ?
04:24 Comment ?
04:24 Ils vous ont vus, vos parents ?
04:25 Ils m'ont vue, mais ils m'ont jamais félicité.
04:27 Un jour, ma mère m'a appelée, je me souviendrai.
04:30 Un jour, c'était il y a quelques années, ma mère m'a appelée pour me demander
04:32 à quelle heure j'allais présenter à la télévision le journal
04:36 pour le signaler à ses copains et ses copines qui allaient venir chez eux.
04:40 D'accord, parce que ça fait bien, quoi.
04:42 Ça fait bien, exactement.
04:43 Ils en parlent avec beaucoup d'émotion,
04:45 ça a l'air d'être une grande peine chez vous, Claire Coche.
04:47 Oui, parce que j'estime qu'un bon parent...
04:51 Je fais pas le procès de mes parents, que ce soit bien clair,
04:54 mais j'estime que oui, c'est quelque part une blessure,
04:59 parce que j'estime qu'un bon parent, c'est quoi ?
05:01 C'est un parent qui fait de son mieux pour accompagner les choix de ses enfants.
05:05 Et de ne pas accompagner ses enfants, même sur le plan professionnel,
05:11 c'est dur, on a envie.
05:12 Je pense qu'on soit un garçon ou une fille d'entendre des encouragements.
05:17 Si vous aviez un truc à leur dire à vos parents, tout de suite, qu'est-ce que ça serait ?
05:20 Alors, mon père, paix à son âme, est décédé du Covid
05:23 quelques jours avant la sortie de mon premier livre,
05:26 qui était un pont vers eux.
05:28 Je tendais la main, je voulais...
05:31 Il parlait pas français, j'espérais que quelqu'un lui traduise le livre.
05:34 J'avais envie qu'ils disent "mince, je suis passée à côté de tellement de choses".
05:39 Ma maman, après le décès de mon père, je l'ai appris par SMS,
05:45 par une tante en Turquie,
05:47 qu'on m'a même pas appelée, j'étais même pas au courant du décès de mon père.
05:51 Donc j'ai appelé, je sais pas, au moins...
05:54 Sans exagérer, au moins une centaine de fois ma mère.
05:58 Elle m'a jamais rappelée.
06:00 Je pense que j'estime, enfin, j'estime, c'est pas moi qui estime,
06:03 je pense qu'elle...
06:07 que je suis à ses yeux coupable, même là, du décès de mon père.
06:10 J'en suis persuadée.
06:12 Puisque tout m'était reproché, tous mes choix étaient les mauvais choix,
06:15 parce que j'allais pas dans leur sens,
06:16 je ne faisais pas les choix qu'ils voulaient pour moi,
06:18 puisque en tant que femme, je devais épouser l'homme qu'ils avaient choisi pour moi,
06:23 je devais avoir le destin qu'ils avaient décidé,
06:26 c'est-à-dire de vivre...
06:27 - Ils étaient musulmans, vos parents ?
06:29 - Ils sont à Lévis, c'est une minorité religieuse en Turquie,
06:31 c'est la deuxième croyance en Turquie,
06:33 et ils ont une pratique différente de l'islam.
06:36 Par exemple, mes parents, ma mère allumait des cierges le jeudi soir
06:39 pour demander à Dieu de nous protéger.
06:42 - Donc c'est un peu comme les adventistes, ils ont tout mélangé.
06:45 - En fait, c'est une forme d'animisme, de chamanisme,
06:49 et puis il y a des références à l'islam aussi.
06:52 Mais comme moi, je n'ai pas reçu d'éducation religieuse,
06:54 je ne suis pas du tout une spécialiste de cette foi,
06:56 donc je ne saurais pas en dire plus dans les détails,
07:01 mais en tout cas, j'espérais qu'elle...
07:08 Moi, je pensais qu'elle avait peur de mon père,
07:09 et que c'est pour cette raison qu'il m'avait reniée.
07:11 - Et le fait d'avoir découvert que ce n'était pas le cas,
07:13 ça a dû être un peu violent.
07:14 - Oui, c'est encore plus dire.
07:15 Je me souviens, en fait, depuis le début,
07:16 c'était son souhait de me traiter si durement.
07:23 Et si j'avais un message à leur faire passer,
07:28 c'est que j'aimerais qu'ils soient plus tolérants, qu'ils acceptent...
07:31 - Eh bien, sois plus tolérante, maman.
07:34 Quel a été votre plus grand succès, Claire Coche ?
07:37 - Ma rencontre avec mon mari.
07:39 - Oui, pourquoi ?
07:41 - C'est un homme extraordinaire.
07:45 Je crois que, sans exagérer, c'est ce que la France fait de mieux.
07:50 - S'il vous écoute, il doit être content.
07:52 - Non, mais c'est un homme brillant, qui aime la France,
07:56 qui aime son pays, qui est intellectuellement incroyable.
08:02 Moi, je mesure tous les jours la chance que j'ai d'avoir épousé cet homme.
08:07 Merveilleux, parce que quand j'ai une question, quand j'ai...
08:11 Vous voyez, je suis une autodidacte de la France, de la culture française,
08:15 de la foi chrétienne à laquelle je me suis convertie avec amour.
08:18 Et je l'ai choisie, ma foi.
08:22 Quand j'ai une question de culture générale,
08:27 je lui pose plein de questions,
08:29 et je pense que je lui pose énormément de questions, comme un enfant.
08:32 Et c'est merveilleux d'avoir quelqu'un qui a autant de connaissances,
08:35 parce qu'il m'accompagne dans cet amour de la France.
08:40 Et je pense que l'amour, ça se transmet...
08:43 C'est bête ce que je vais dire, mais l'amour, ça se transmet par l'amour.
08:46 En fait, il aime la France, et moi, je lui pose plein de questions.
08:49 Et il me montre les belles choses de la France que moi, j'ai envie de voir aussi.
08:54 - Alors la question d'après, c'était votre plus grande déception,
08:55 mais je pense qu'on l'a déjà dite. - Oui.
08:57 - Voilà. Quelle est votre plus grande joie, Claire Coche ?
08:59 - Ah, ma plus grande joie...
09:01 C'est la naissance de mon fils.
09:04 Il a 5 ans aujourd'hui.
09:06 Il est merveilleux.
09:08 C'est marrant parce qu'un enfant, ça vous aide à grandir aussi.
09:14 Il m'apprend plein de choses.
09:16 Il me ramène un petit peu à la réalité de la vie aussi.
09:20 Il est très naturel dans ses réactions, ses réflexions, ses réflexes même.
09:27 Oui, je trouve ça merveilleux. C'est ma plus grande joie.
09:30 Je suis très fière de mon fils.
09:31 - Alors, on va parler très rapidement de votre livre avant la coupure,
09:33 et puis on va continuer après quand même.
09:36 Votre livre, il s'appelle donc "Le jour où je me suis convertie".
09:38 Il est sorti chez Plon et non chez Albert Michel.
09:41 Dans ce livre, vous nous racontez votre conversation au catholicisme.
09:44 Votre conversation, c'est joli.
09:45 Votre conversion au catholicisme en explorant les questionnements et les tensions
09:49 qui entourent aussi la pertinence des croyances tant républicaines que religieuses.
09:54 Et vous mettez les deux au même niveau que l'ercoche, la république et la religion.
09:57 C'est la même chose pour vous ?
09:58 Enfin, la religion catholique en l'occurrence.
10:00 - Oui. Pour moi, il y a une continuité.
10:03 C'est-à-dire que c'était un accomplissement pour moi tout d'abord de devenir française
10:07 puisque je suis arrivée en France à l'âge d'un an.
10:10 Et en fait, j'ai mis 30 ans à passer le cap de la conversion pour justement cette identité.
10:18 Donc ça n'engage que moi. C'était ma vision, évidemment.
10:21 Je ne juge personne et je ne dis pas que tout le monde doit faire comme moi.
10:24 On peut bien entendu être pleinement français avec une religion différente ou une origine étrangère.
10:29 - Ou en étant athée aussi.
10:30 - Ou en étant bien évidemment athée, sans croyance, évidemment.
10:34 Moi, je suis très tolérante.
10:35 Et en fait, pour moi, oui, c'est un accomplissement.
10:40 Et c'était comme ça que je voyais mon horizon, en tout cas, français et catholique.
10:46 - Vous vous êtes convertie au catholicisme aussi pour vous intégrer dans une norme française, en fait.
10:49 - En fait, c'est marrant parce que je pensais pouvoir...
10:54 Parce que comme je venais d'une...
10:55 - C'est la foi ou c'est la norme ? Pardon, je vous coupe, mais...
10:58 - La foi. - Qui vous a donné envie de vous convertir.
10:59 - Ah non, c'est la foi. - C'est la foi.
11:01 - Ça, c'est quelque chose d'assez extraordinaire.
11:03 C'est-à-dire que j'avais six ans quand je rencontre la Vierge Marie.
11:06 J'entre dans une église par hasard, les portes sont ouvertes.
11:09 Je suis loin de savoir le symbole que ça représente.
11:13 J'ignorais ce symbole des portes ouvertes de l'église.
11:17 J'ai six ans, j'entre dans cette église, je lève les yeux, je fais quelques pas, je lève les yeux,
11:21 je vois le visage de la Vierge Marie.
11:23 Elle ne m'a pas quittée depuis ce jour-là.
11:24 J'en ai 40 aujourd'hui. - C'est beau.
11:26 - Oui, et merci.
11:28 Et c'est le mystère de la foi.
11:30 C'est quelque chose d'irrationnel, la foi.
11:32 - Et de très personnel aussi. - Absolument, tout à fait.
11:35 - Eh bien, on est bien sur Sud Radio avec vous, Claire Coche.
11:37 Et vous, chers auditeurs, j'espère que vous êtes bien aussi.
11:39 Vous restez avec nous, Destins de Femmes, aujourd'hui, vous l'aurez compris,
11:42 c'est en compagnie de la journaliste et écrivaine Claire Coche.
11:45 Partez pas trop loin, on reste là avec vous, évidemment, tout de suite.
11:47 - Le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
11:51 Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout en France.
11:56 Le groupe Connect présente...
11:58 - Sud Radio, Destins de Femmes, Judith Beller.
12:02 - Sud Radio, c'est Destins de Femmes, évidemment.
12:04 L'émission consacrée aux femmes extraordinaires qui fondent notre République française.
12:08 Aujourd'hui, vous êtes avec Claire Coche et son dernier livre,
12:11 "Le jour où je me suis convertie", qui est tout juste sorti chez Plon.
12:14 Bienvenue à vous qui nous rejoignez.
12:17 Alors, Claire Coche, justement, dans ce livre, en partageant ce témoignage,
12:20 vous aspirez à ouvrir un dialogue sur une réalité complexe de la laïcité aussi en France.
12:26 C'est une réalité complexe pour vous, puisque votre réflexion,
12:30 elle est plus nuancée sur la diversité religieuse et philosophique.
12:33 Alors, je voulais comprendre de quelle nuance, justement,
12:36 voudriez-vous accompagner cette dite laïcité ?
12:38 Vous pensez qu'elle manque de nuance, la laïcité ?
12:40 - Pas du tout. Je pense que ce n'est pas la laïcité qui manque de nuance,
12:44 mais certains élus ou certains militants associatifs
12:47 qui vont malmener la laïcité,
12:50 qui est une laïcité qu'ils ont mal comprise,
12:53 ou en tout cas qui va à chaque fois être...
12:56 qui va se retourner chaque fois contre le christianisme.
12:59 On va vouloir déboulonner des statues au nom de la laïcité.
13:02 C'est toujours... On va vouloir, par exemple, remplacer le mot "Noël" par "fête d'hiver".
13:08 C'est toujours contre le christianisme.
13:10 - Mais ça, c'est la cancel culture en général, quoi.
13:12 - Oui, c'est la vulga twook.
13:15 C'est la vulga twook.
13:17 Comme je dirais, dans la vulga twook, l'amour, c'est disruptif.
13:22 Les règles, l'autorité, c'est disruptif, tout ça.
13:25 Et en fait, mon livre, il aurait pu...
13:28 C'est un peu l'histoire de Marie, Marianne et moi.
13:30 Ce que j'ai essayé d'expliquer, c'est qu'aujourd'hui,
13:32 il est possible, beaucoup l'ignorent ou pas, je ne sais pas,
13:36 mais être croyant et laïque, c'est possible.
13:39 Moi, je suis croyante et laïque. Je respecte la République française.
13:42 - Mais la laïcité n'a rien à voir avec la foi, hein.
13:44 On a le contraire. - Absolument. Surtout en France.
13:46 - La laïcité, c'est quand même le lieu où on a le droit de pratiquer sa foi
13:50 du moment qu'on dérange pas son voisin.
13:52 - Absolument. Qu'est-ce qu'elle nous dit, la laïcité ?
13:54 Elle dit "chez vous, vous faites ce que vous voulez, mais dans l'espace public,
13:57 chacun est discret, c'est citoyen.
14:02 Nous sommes égaux, nous sommes libres, en fraternité et en liberté, égalité, fraternité.
14:09 Voilà, exactement.
14:11 Mais je trouve, en plus, la laïcité, c'est un héritage de notre culture judéo-chrétienne.
14:16 Donc c'est précieux. Ça sort pas de nulle part.
14:19 Ça sort pas... Ça n'a pas été désigné.
14:20 - C'était 1905, hein. C'est le 1905.
14:22 - Il y a toute une histoire derrière.
14:24 - La séparation de l'Église et de l'État, chers auditeurs, évidemment. 1905.
14:28 - Absolument.
14:29 - Est-ce que vous pensez que votre récit, dans ce livre, "Le jour où je me suis convertie",
14:35 il peut contribuer à changer certaines perceptions, certains débats, justement,
14:39 autour de l'identité de la religion, de l'intégration, puisque vous êtes issue de l'intégration.
14:45 - Bien sûr. Oui, je sais pas si j'ai cette prétention-là,
14:48 mais effectivement, je l'ai écrit dans cet état d'esprit-là.
14:52 Je veux ouvrir le dialogue.
14:54 C'est un livre sur la liberté de conscience, sur la tolérance.
14:57 Aujourd'hui, je me rends compte, en fait, que si j'ai écrit ce livre,
15:01 c'est parce que je me suis rendue compte que...
15:03 Enfin, j'ai l'impression qu'être catholique ou français, c'est mal aujourd'hui en France.
15:06 C'est terrible de faire ce constat-là.
15:08 - Pourquoi ? Pensez.
15:09 - Parce qu'en fait, quand j'ai annoncé ma conversion...
15:12 Alors, c'est quelque chose de très intime, très personnel.
15:14 J'en parle jamais.
15:16 - Et là, vous en parlez à plusieurs milliers de personnes.
15:18 - Absolument.
15:18 Parce que j'ai envie qu'on n'ait pas honte de ce que l'on est.
15:21 C'est terrible de se cacher ou d'avoir peur de la réaction de l'autre.
15:26 Moi, c'est ce qui s'est passé, en fait.
15:28 J'ai été convertie, j'ai reçu le baptême pendant le Covid.
15:32 J'étais en vacances à l'étranger, au Seychelles, au paradis, je peux le dire.
15:35 J'ai reçu le baptême au paradis, c'est exceptionnel.
15:37 Même comme histoire, c'est assez incroyable.
15:40 Et en fait, en France, tout était à l'arrêt.
15:46 Et quand on est revenus, on a tous été confinés, etc.
15:50 Et au moment du déconfinement, comme beaucoup de Français,
15:54 je pense que j'avais aussi envie de parler de choses un peu personnelles.
15:58 Ce qu'on a fait pendant ce confinement.
15:59 Beaucoup mettaient sur les réseaux sociaux leur découverte du pain.
16:04 Ils fabriquaient du pain chez eux.
16:05 Chacun s'était occupé, en fait.
16:08 Et donc, je vois une copine à qui je dis, voilà, je me suis convertie au catholicisme.
16:14 Ça a été difficile parce que comme tout était à l'arrêt,
16:16 je n'ai pas pu assister aux premières messes, etc. de jeunes convertis.
16:20 Je ne suis même pas allée jusqu'à raconter si je pratiquais, comment je pratiquais.
16:24 C'était vraiment le tout début de notre conversation.
16:27 Ma copine en face m'a dit, mais c'est une très mauvaise idée.
16:32 Et pour sourire, pour détendre l'atmosphère, je lui ai dit,
16:35 si je m'étais convertie au bouddhisme, t'aurais trouvé ça cool.
16:38 Et en ton nom de bien, j'ai rien contre les bouddhistes.
16:40 Et elle m'a dit oui, oui, ça aurait été mieux.
16:43 Mais d'une manière si glaciale que ça a coupé court à la conversation.
16:47 Plus tard, j'ai vu une autre copine.
16:49 - Il y a quand même une histoire aussi en France.
16:51 Déjà, il y a la séparation de l'Église et de l'État.
16:53 Il y a un clergé, il y a tout l'historique qu'on connaît,
16:57 justement de l'écrasement aussi de la société française
17:00 par le catholicisme à un certain moment de l'histoire.
17:02 - Bien sûr, bien sûr, ça fait partie du sol, bien sûr.
17:03 - Donc il ne faut pas oublier que, effectivement, pour certains Français,
17:06 cette histoire-là est encore fraîche, en fait.
17:08 - C'est 1905 quand même. Il y a un moment où on peut aussi...
17:11 - Oui, mais c'est les grands-parents, quoi.
17:13 - Non, mais bien sûr.
17:14 Mais aussi, moi je pense, c'est comme ça que j'explique,
17:16 mais vous avez totalement raison.
17:17 Il y a autre chose, moi, que j'explique.
17:19 C'est-à-dire que je pense qu'on ne parle du christianisme
17:24 que sous un prisme négatif.
17:25 En fait, ça n'aide pas non plus à l'ouverture, à la tolérance,
17:29 au pas d'amalgame concernant cette foi.
17:32 - Et finalement, dans cette foi, ce qui vous touche, c'est ses valeurs.
17:34 C'est-à-dire le pardon.
17:36 - Bien sûr, la charité.
17:38 Un dieu d'amour, c'est merveilleux, c'est magnifique.
17:41 - Normalement, Dieu, il est amour partout.
17:43 - Comment ?
17:44 - Normalement, Dieu, il est amour partout dans les trois grands monothéismes.
17:46 - Oui, alors moi, je ne connais pas les autres, mais je veux dire...
17:49 En fait, moi, je suis vraiment une autodidacte, en plus de la foi chrétienne.
17:51 C'est-à-dire que je ne suis pas entrée dans mon initiation au catholicisme par la Bible,
17:57 mais par les lectures que j'ai faites, notamment d'André Frossard,
18:00 grand résistant de la Seconde Guerre mondiale,
18:02 un des seuls survivants de la baroque juive de Montluc,
18:05 qui a écrit des choses magnifiques dans son langage d'académicien.
18:10 Enfin, c'est exceptionnel.
18:13 Ou alors Paul Claudel.
18:15 Vous voyez cette phrase qu'il a écrite ?
18:18 "Même pour le simple envol d'un papillon, le ciel entier est nécessaire."
18:24 Je ne sais pas si je me souviens très bien.
18:27 Qu'est-ce que c'est merveilleux.
18:28 Regardez, c'est la beauté de l'âme.
18:31 Pour moi, vraiment, la langue française, en plus, c'est la langue des anges.
18:35 Qu'est-ce que c'est beau comme langue.
18:36 Moi, je suis émerveillée par tout ça.
18:38 Et ce qui m'intéresse, ce sont les belles choses.
18:39 Mais aujourd'hui, lorsque vous n'entrez pas dans les nouvelles normes de croyance,
18:43 eh bien, vous êtes au mieux taxé d'éliminer, ce qui est mon cas,
18:46 au pire de se le chanter en anglais gris.
18:48 - Non, c'est pas très sympa.
18:49 - Oui, c'est pas sympa.
18:51 - Vous avez écrit un autre livre introspectif, Claire Coche,
18:55 "Clair, le prénom de la honte",
18:56 qui est paru en 2021, cette fois-ci, chez Albert Michel.
19:00 J'avais mélangé les deux.
19:02 Et vous nous y racontez que vous êtes issue de cette famille à Lévis,
19:05 qui a fui les persécutions en Turquie pour s'installer en France.
19:08 Vous avez changé de prénom.
19:09 Et malgré une enfance relativement tranquille, vous en avez parlé aussi,
19:13 les tensions culturelles, identitaires au sein de votre famille,
19:16 les pressions religieuses.
19:17 Bon, tout ça, on peut se le dire, c'était parce que vous étiez une femme, clairement.
19:21 - Moi, je pense que ça joue énormément.
19:22 - Si vous auriez été un homme, vous auriez voulu vous convertir au catholicisme
19:25 et faire un enfant à une française.
19:27 Peut-être que ça serait mieux passé.
19:29 - Certainement.
19:29 Je pense que c'est mon point de vue.
19:32 J'en sais rien, mais peut-être qu'on aurait dit
19:34 "Ah bah, il s'est un petit peu perdu en chemin, il va revenir à la raison".
19:37 Voilà, je pense.
19:38 Je le dis parce que j'ai vu des exemples concrets
19:43 où on n'a pas fait non plus d'histoire.
19:48 En plus, vous voyez, ce qui était assez incroyable avec mes parents,
19:51 c'est que moi, quand même, dans mes choix, qui sont très personnels
19:55 et qui n'ont pas été...
19:56 Je ne me suis pas construite contre mes parents.
19:59 Chaque enfant a son caractère.
20:05 Moi, j'ai jamais manqué de respect à mes parents.
20:06 Jamais, jamais.
20:07 J'ai toujours été présente pour eux.
20:09 J'ai toujours été l'enfant qui a beaucoup d'amour pour ses parents.
20:17 Je les ai toujours accompagnés autant que je pouvais, même à distance,
20:20 même quand je me suis installée à Paris
20:22 et eux vivaient dans leur ville à Strasbourg.
20:24 J'ai toujours, toujours été présente.
20:25 - Et finalement, vous êtes devenue libre quand vous les avez quittés.
20:28 - En fait, en voulant me faire mal...
20:29 - Et quand vous avez changé de prénom.
20:31 - Oui, alors...
20:31 - Ça, c'est un acte symbolique.
20:33 - Ils m'ont reniée le jour où j'ai annoncé que j'avais rencontré mon mari.
20:36 C'était en 2016 que j'allais l'épouser, que j'avais trouvé l'homme de ma vie.
20:41 Donc, ils m'ont demandé s'il était français.
20:43 J'ai dit "ben oui, mais moi aussi, je suis française".
20:44 Non, non, non, un vrai français.
20:46 Donc, j'ai compris ce qu'il voulait dire de culture chrétienne.
20:49 J'ai dit oui.
20:50 Donc, mon père, à son âme, m'a traité de tous les noms
20:55 et il m'a dit que j'étais indigne de cette famille,
20:57 d'être encore un membre de la famille.
20:59 Donc, moi, je suis un tabou à la maison.
21:00 - Il ne reste peu de temps.
21:01 - Oui, alors, voilà.
21:02 Mais quelques années auparavant,
21:04 donc là, j'ai 32 ans quand j'ai rencontré mon mari,
21:06 mais à 25 ans, effectivement, je fais le choix
21:08 de demander la nationalité française.
21:11 J'en profite pour changer mon prénom, mais par amour.
21:13 Je ne voulais revendiquer rien du tout.
21:15 C'est un choix d'amour.
21:17 Et c'est là qu'effectivement, les premières tensions ont eu lieu.
21:21 - Alors, les premières tensions, puis la liberté aussi,
21:24 parce que c'est comme ça que vous avez réussi.
21:25 Enfin, ça, c'est ce que vous dites aussi.
21:26 Ça vous a aidé à devenir journaliste ?
21:28 - Oui, en fait, quelque part, mes parents, en voulant me faire mal,
21:31 en me reniant, ils m'ont rendue libre.
21:33 - C'est ça.
21:34 - Voilà.
21:34 - Et c'est ce que vous devriez retenir ?
21:36 - Ben oui, absolument.
21:37 - Vraiment, carcoche.
21:39 Après cette discussion échangée.
21:41 Est-ce que vous avez un souhait ?
21:43 - Oui, j'aimerais un peu plus de tolérance
21:46 dans cette société qui se dit moderne, progressiste.
21:48 J'aimerais un peu plus de bienveillance
21:52 par rapport à la personne qui est en face.
21:55 Peu importe sa foi, peu importe ses origines.
21:59 Et surtout qu'on accepte les personnes telles qu'elles se présentent.
22:01 Moi, j'ai fait le choix de devenir française par amour de la France.
22:05 - Vous l'étiez déjà un peu, vous avez grandi ici.
22:07 - Oui, mais pour beaucoup, ça ne va pas de soi.
22:10 Mes amis qui étaient français de longue date, si je puis dire,
22:12 pour eux, c'était incompréhensible.
22:14 Ils tenaient les mêmes propos que ma famille,
22:16 en disant "tu as honte de tes origines, on ne t'appellera jamais Claire".
22:20 C'est violent, c'est stupide même.
22:22 - Vous avez changé d'ami ?
22:24 - Oui, bien sûr.
22:26 - Eh ben merci, claircoche.
22:27 - Merci, j'ai aimé.
22:29 - Le mot qui me vient pour parler de vous, c'est la résilience.
22:32 Ça vous va ?
22:32 - Oh, j'adore. Merci.
22:34 J'ai même amour.
22:35 - Amour et résilience avec Claire Coche sur Sud Radio.
22:38 On adore.
22:39 Votre dernier livre, évidemment, Claire Coche, je le redis pour les auditeurs.
22:43 "Le jour où je me suis convertie", c'est sorti chez Plon.
22:46 Je ne me suis pas trompée cette fois-ci.
22:48 Merci d'être venue par ici.
22:50 - Merci, Judith.
22:51 - Chers auditeurs, n'oubliez pas, demain à 19h, il y a une rediff pour le Nouvel An.
22:57 On a des excellents chefs Pierre Auger et chocolatier Patrick Roger dans "C'est excellent", évidemment, sur Sud Radio.
23:03 Puis nous, on va se retrouver dès samedi prochain à 13h30 pour un nouveau "Destin de femme".
23:07 Et le premier "C'est excellent" de 2024.
23:10 Tous nos rendez-vous sont sur sudradio.fr, la chaîne YouTube de Sud Radio.
23:14 On n'oublie pas les réseaux sociaux, évidemment.
23:16 Merci à Lucille Montier qui réalise pour vous aujourd'hui, aux équipes de Sud Radio, votre radio préférée.
23:21 Bisous à tous et surtout, je vous souhaite une merveilleuse, merveilleuse année 2024.
23:27 Avec le groupe Connect, expert en recrutement intérimaire.
23:30 Rejoignez les 35 agences du groupe Connect pour des opportunités de carrière partout en France.
23:35 *bruit de la machine*