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Dans son émission média, Thomas Isle et sa bande reçoivent chaque jour un invité. Aujourd'hui, Melissa Bell et Anne Toulouse, pour parler des élections américaines.
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NewsTranscription
00:00Vous écoutez Culture Média sur Europe 1, 9h30, 11h avec Thomas Hill et vos invités ce matin, Thomas.
00:05Oui, à quelques heures des premiers résultats des élections américaines, je reçois ce matin deux journalistes qui suivent depuis longtemps
00:10la politique américaine, la correspondante en France de la chaîne américaine CNN, Mélissabelle, et Anne Toulouse, correspondante d'Europe 1 aux Etats-Unis.
00:17Et je voulais qu'on s'intéresse ce matin à la manière dont les médias ont traité cette élection parce que, vu d'ici, on a l'impression qu'on est à l'apogée de la politique spectacle
00:26avec Kamala Harris entourée de vedettes, encore hier avec Lady Gaga, Donald Trump qui joue à l'éboueur ou au serveur de fast-food.
00:35Est-ce qu'il n'y a que ça dans cette campagne ou est-ce que les Américains ont quand même un petit peu entendu parler de leur avenir, Mélissabelle ?
00:41Peu, je pense, moins que d'habitude justement parce qu'aujourd'hui, les candidats, par tous ceux dont vous venez de parler, les apparitions au McDo, les stars,
00:49essaient de se faire entendre de l'autre côté en fait. Et comment le faire ? Pas tellement en parlant de politique étrangère ou même d'économie ou d'inflation,
00:57même si les stratèges de Donald Trump auraient bien aimé qu'il se focalise un peu plus sur l'essentiel de ce qui peut le faire gagner.
01:03C'est des coups de com' aussi pour essayer de pouvoir parler au plus grand nombre d'électeurs et surtout se faire entendre par les électeurs qui n'écoutent pas,
01:12ne suivent pas les mêmes réseaux sociaux, ne suivent pas... C'est-à-dire que le paysage médiatique dont on va parler ce matin est tellement fracturé, divisé,
01:18qu'il faut des grands coups de com' pour espérer être entendu par ceux qui sont en face.
01:21Pour aller chercher les indécis, c'est ça ? Aussi peu nombreux soient-ils, oui.
01:24Anne Toulouse, il faut chercher une image qui claque, c'est ça ce qu'ils cherchent, Kamala Harris comme Donald Trump ?
01:31Oui, alors moi ce qui me frappe dans le rapport des médias américains avec leur public, c'est qu'en fait les gens ne se tournent pas vers les médias pour être informés,
01:37mais pour vérifier leurs préjugés. C'est-à-dire, ce qui me frappe souvent chez les gens, je leur dis mais attendez, vous êtes démocrate, vous allez lire le Washington Post,
01:45pourquoi de temps en temps vous ne liriez pas le Wall Street Journal ? Ou pourquoi au lieu de regarder, vous savez, on peut dire qui vous êtes parce que vous regardez,
01:53vous avez des chaînes de télévision comme Fox News à droite, on va dire pour simplifier, MSNBC à gauche, CNN qui penche plutôt du côté gauche.
02:04Ah oui ?
02:04Oui, oui, qui est...
02:06Ah vous dites au milieu, mais ça va.
02:08C'est très difficile de trouver quelque chose qui vous donne simplement de l'information, mais en même temps les gens ne demandent pas ça.
02:13Ils veulent s'ils sont Trumpistes ou... D'abord il faut dire que vous n'avez pas un pays où vous avez la moitié des gens qui soient Trumpistes à fond,
02:23ou les autres qui soient complètement acquis aux vues démocrates, parce que si vous regardez, vous avez 30% de chaque côté, et au milieu vous avez un volant d'indépendants
02:32qui sont ceux qu'il faut séduire et qui sont ceux peut-être qui s'intéressent le moins à la presse.
02:36Mais quand je suis aux Etats-Unis, j'ai à proximité de l'endroit où je travaille deux télévisions, et j'en ai une sur MSNBC et CNN et l'autre sur Fox News,
02:47et je suis comme dans un match de tennis, je vais d'un côté et d'autre parce que je me dis que la vérité est quelque part au milieu.
02:53Et justement ce qui a beaucoup changé par exemple depuis 2016, ce que vous dites est très vrai, c'était déjà le cas en 2016, ça n'a fait que s'amplifier,
03:02mais ce qui a changé aussi c'est la place qu'ont les médias traditionnels, les legacy medias maintenant, par rapport aux réseaux sociaux.
03:08C'est-à-dire qu'effectivement, quand on regarde, on imagine par exemple en Europe, on a encore, il me semble, des espaces médiatiques partagés, une réalité partagée.
03:18C'est beaucoup moins le cas aux Etats-Unis aujourd'hui, suivant qu'on regarde telle chaîne ou telle chaîne, ou qu'on lise tel journal ou tel journal.
03:24C'est toujours très tranché, c'est ça ce que vous dites ?
03:25Ça l'est beaucoup plus, et la population est beaucoup plus fracturée par rapport à cette réalité commune dans laquelle elle vit,
03:32ce qui est amplifié bien sûr par les réseaux sociaux, qui ont pris une place beaucoup plus grande dans cette campagne qu'ils ne l'avaient en 2016.
03:38Vous dites qu'aujourd'hui, pour vous, ils ont pris le pas carrément sur les médias traditionnels, ces réseaux sociaux ?
03:43C'est eux qui dominent la campagne aujourd'hui ?
03:45On le voit par les apparitions qu'ont fait les candidats, en se focalisant beaucoup sur des podcasters, Kamala Harris surtout.
03:52On sait comment fonctionnent ces réseaux sociaux, vous parliez d'amplification du point de vue dans les médias traditionnels,
03:58c'est bien sûr encore plus important dans les réseaux sociaux, où en plus il n'y a pas ce filtre d'intégrité journalistique qui veut que les faits soient vérifiés.
04:06Les fausses informations, on en parlait tout à l'heure avant de prendre l'antenne de cette histoire de migrants haïtiens qui avaient mangé leurs animaux domestiques,
04:12c'était né d'un post Facebook, amplifié par les réseaux sociaux et les cadres du Parti Républicain, qui a pris une place absolument absurde dans cette campagne.
04:21Donc oui, cette fois-ci, c'est cette tendance qu'ont les réseaux sociaux à renforcer les préjugés, les idées politiques des gens, à les amplifier, qui ont eu une remarquable influence.
04:33Avec la particularité en plus d'avoir le dirigeant du réseau social peut-être le plus puissant en matière politique, c'est-à-dire Twitter X aujourd'hui,
04:42et son dirigeant Elon Musk est un fervent soutien de Donald Trump, est-ce que ça ne pose pas une vraie question ça aussi Anne Toulouse ?
04:49Oui, alors cela dit, si vous regardez les chiffres, les gens s'informent autant sur les télévisions que sur les réseaux sociaux.
04:56Je regardais une enquête depuis ce matin, donc la télévision n'a pas perdu, c'est quand même encore le grand vecteur.
05:03Oui, c'est vrai que ce n'est pas un hasard si Donald Trump et Elon Musk se trouvent sur le même bateau, parce qu'il y a le même côté.
05:14Elon Musk ce n'est pas seulement Twitter, c'est une grande partie de tout ce qui fait la vie quotidienne et autre des américains.
05:22Je dirais que c'est comme Henry Ford au moment où il a inventé l'automobile, ce n'était pas forcément un personnage sympathique Henry Ford,
05:29il avait des sympathies pour l'Allemagne nazie, il n'empêche qu'il a transformé l'Amérique, et quand vous regardez Elon Musk,
05:36il est aussi l'espace, la voiture électrique, les communications, donc il projette en fait cette image aux côtés de Donald Trump
05:47que tout passe par une nouvelle façon de voir la vie, c'est une sorte de négation de l'ordre ancien, où effectivement on regardait la télévision,
05:56on lisait son journal, et maintenant il y a cette espèce d'explosion planétaire des médias.
06:02Avec cette place en plus qu'il lui est promise dans le gouvernement Trump si Trump gagne, et vous disiez très justement,
06:09ce n'est pas seulement lui, c'est des milliards de dollars avec l'État qu'a Elon Musk et ses entreprises,
06:14on parle même plus de conflit d'intérêts, mais d'un intérêt dans le conflit, c'est-à-dire qu'il a une place primordiale aussi
06:21dans le fait que Donald Trump gagne avec tout ce que ça peut vouloir dire pour lui et ses entreprises.
06:25Et si on revient aux médias traditionnels, en France la quasi-totalité des grands médias penchent plus ou moins nettement en faveur de Kamala Harris,
06:32quel est le rapport de force aux Etats-Unis dans les médias ? Est-ce que là aussi il y a un prisme plus démocrate ?
06:39Qu'est-ce que vous diriez-vous, Mélissabelle ?
06:41Ça dépend des médias, ce qui est intéressant dans cette campagne, c'est que des gens de grands journaux comme le Washington Post choisissent,
06:48sous Jeff Bezos, de ne pas se prononcer, alors que c'est inhabituel, ils ont perdu des centaines de milliers d'abonnés en conséquence,
06:54et même au-delà des grands groupes médiatiques.
06:59Vous à CNN par exemple, parce que CNN a souvent été accusée d'être plutôt pro-démocrate,
07:05est-ce que c'est le cas ? Est-ce que ça veut dire que c'est plus difficile aussi pour vous, par exemple, d'aller couvrir la campagne de Trump aujourd'hui ?
07:11C'est né avec Donald Trump, c'est-à-dire qu'en 2016, 2015, quand il a fait son apparition sur le paysage médiatique,
07:17nous, notre chef à l'époque, Jeff Zucker, disait que c'est parce qu'on est pour la vérité qu'on a l'air d'être contre Donald Trump,
07:23et donc cette bataille est née entre lui et nous, et d'autres médias, The New York Times, The Washington Post, etc.
07:29Et donc plus on a essayé de continuer à faire notre travail de journaliste, plus il s'en est pris aux médias traditionnels.
07:35C'est né là et ça continue, bien sûr, encore aujourd'hui.
07:38Ce qui ne veut pas dire que le positionnement de groupes médiatiques comme le mien doivent changer,
07:44ça reste un travail de journaliste dans des conditions plus difficiles,
07:47mais bien sûr transformé par le fait qu'on est l'ennemi public numéro un, bien sûr.
07:53On va poursuivre cet échange dans un instant, ce sera juste après le journal des médias de Julien Pichenay.
07:58Oui, le journal des médias, et ce matin, on va parler notamment de ces chaînes de télé françaises
08:03qui vont dans les prochaines heures se mettre à l'heure américaine.
08:07Gros dispositif en vue ce soir, on va tout vous détailler dans un instant avec Julien Pichenay, à tout de suite.
08:12Culture Média, 9h30, 11h