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Aujourd'hui, dans "Punchline", Laurence Ferrari et ses invités débattent des conséquences de la déchristianisation de la France et des transformations qui en ont suivies.
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Transcription
00:00Punchline, 18h-19h, Laurence Ferrari sur CNews et Europe 1.
00:1218h40, retour dans Punchline sur CNews et sur Europe 1.
00:15Louis de Ragnalella, Alexandre Devecchio, on accueille Jérôme Fourquet.
00:18Bonsoir Jérôme Fourquet.
00:19Vous exscultez la société française depuis des années
00:22et votre dernier livre, Métamorphose française, est saisissant sur l'état de notre pays.
00:26On en parle tous les jours sur nos antennes.
00:29Mais là, c'est une radiographie de ce qui se passe.
00:31Juste un mot, on vient de parler de Michelin, de la désindustrialisation.
00:35Ça aussi, c'est un signal que le tissu économique de notre pays se défait, pour vous, Jérôme Fourquet.
00:41En tout cas, le tissu industriel s'est défait.
00:44Ensuite, ce qu'on essaie d'expliquer, c'est comment d'autres structures économiques ont pris la place,
00:49le pivotement vers une économie de la consommation.
00:53Et quelque part, la zone commerciale ou l'entrepôt a remplacé le site de production.
00:58J'entendais vos débats précédemment.
01:00Effectivement, Michelin, c'est encore un floron de l'industrie automobile française.
01:04Et pour autant, même un floron aussi puissant et aussi solide que lui connaît aujourd'hui des difficultés.
01:12Et on voit comment la foudre s'abat sur des villes moyennes.
01:17Vannes, on peut se refaire touristiquement puisqu'on est au bord du littoral.
01:23Mais c'est une ville comme Cholet qui va être frappée.
01:26A Cholet, on avait connu la fin de la chaussure.
01:29Maintenant, c'est le pneumatique.
01:32Même si on est à proximité de la Vendée, on est dans un endroit en France où on est sur un taux de chômage qui est très faible.
01:38Parce que, fort heureusement, il y a un tissu industriel qui demeure puissant.
01:43Jérôme Fourquet, vous partez de la dislocation de la matrice catholique dans notre pays.
01:48Est-ce que c'est le premier de tous les symptômes du mal français ou pas, selon vous ?
01:54Du mal français, je ne sais pas.
01:56En tout cas, c'est un des éléments du PULSE qui explique l'ampleur des transformations.
02:01Bien évidemment, la déchristianisation ne commence pas dans les années 60.
02:05Ça fait longtemps qu'on en parle.
02:07Mais le phénomène s'est accéléré pour arriver au stade terminal aujourd'hui.
02:11On peut regarder un indicateur assez classique de surface, si je puis dire.
02:15C'est le taux de personnes qui vont à la messe le dimanche.
02:19C'était à peu près 35 % au début des années 60, au moment de Vatican II.
02:23C'est de l'ordre de 3-4 % aujourd'hui.
02:25Mais la déchristianisation, c'est bien autre chose.
02:28En fait, c'est tout le substrat culturel qui a bougé.
02:31Dans nos sondages, on demande aux gens quelle est la signification de la pentecôte ou de l'assomption.
02:35Ils ne savent pas.
02:36On a des réponses polies ou gênées.
02:39Et puis, quand on regarde de manière encore plus profonde sur la question anthropologique,
02:43on voit comment les plaques ont bougé.
02:46Les tectoniques ont bougé très fortement.
02:48On était en période de Toussaint la semaine dernière.
02:51La crémation, c'était 1 % des obsèques en 1980.
02:55C'est 43 % aujourd'hui.
02:57Un Français sur deux.
02:59Oui, parce que la tendance est en développement.
03:02Quand on lit les travaux de Lévi-Strauss sur le rôle des rites funéraires
03:07dans la structuration d'une société, quand on voit comment tout ça a bougé
03:10en un laps de temps aussi court,
03:12on ne peut être que saisi par l'ampleur de ces...
03:15On est une société qui cache les morts.
03:17Les morts avaient été à la maison, on les veillait, on priait à leur chevet.
03:21Il y a, à mon avis, plusieurs éléments qui expliquent cet engouement pour la crémation.
03:26D'abord, le fait que...
03:28Encore une fois, c'est un symptôme de la dislocation de la vieille matrice catholique.
03:31On rappelle que l'Église a très longtemps condamné et interdit la crémation.
03:35On l'a autorisé...
03:36Dans les années 60.
03:37Voilà, après Vatican II.
03:39Et puis, c'est aussi le symptôme de ce que j'appelle le grand déménagement.
03:43C'est comment aussi la population française s'est arrachée de son terroir familial.
03:48Donc, historiquement, on se faisait enterrer
03:50parce que c'était aussi un moyen de se rapprocher, de s'aligner.
03:53On était enterrés dans le caveau familial.
03:55À partir du moment où vous avez fait votre vie,
03:57à 500 kilomètres de l'endroit où s'enterraient vos propres parents
04:00et que vos propres enfants eux-mêmes sont très loin de là où vous habitez,
04:04quel va être le sens de se faire enterrer quelque part ?
04:08Et bien sûr que la société française a toujours connu des changements.
04:12La Révolution française, la Révolution industrielle,
04:16les Trente Glorieuses.
04:17Mais ce substrat anthropologique n'avait pas bougé.
04:19C'est-à-dire qu'à la fin des fins, on se faisait enterrer.
04:23Avant cela, on était baptisés et il y avait la pratique du mariage.
04:27Là, c'est le substrat anthropologique qui se met à bouger très rapidement.
04:32Et donc, ça montre bien qu'on est sur une période de métamorphose assez inédite.
04:35Jérôme Bourg, encore une question.
04:36Après, je passe la parole à ma petite camarade.
04:38Sur les parents.
04:39Il y a un chapitre sur les parents désunis, ces nouvelles familles.
04:42En 1946, il y avait 8,7 % des naissances qui étaient hors mariage.
04:47Aujourd'hui, en 2022, on est à 65,2 %.
04:51C'est-à-dire que la norme, c'est de naître hors mariage.
04:54Vous savez qu'à l'époque, on parlait même d'enfants illégitimes.
04:57Aujourd'hui, vous parleriez comme ça, on vous regarderait assez curieusement.
05:01Et là, vous remontez très loin.
05:03Mais même en prenant le début des années 80,
05:05c'est 11 % des naissances qui sont hors mariage.
05:07Donc, prenons un cas concret.
05:08Une institutrice qui commence sa carrière au début des années 80,
05:12elle a un enfant sur dix dans la classe dont les parents ne sont pas mariés.
05:15Elle part en 2015 ou 2020 à la retraite.
05:18Elle a deux tiers de sa classe dont les parents ne sont plus mariés.
05:21Donc, on voit comment quelque chose qui était hors norme
05:24est devenu totalement accepté.
05:27Alors, est-ce que c'est grave ? Est-ce que c'est pire ?
05:29Ou est-ce que c'est mieux qu'avant ? Chacun jugera.
05:31Nous, ce qu'on essaie de faire, c'est de montrer, encore une fois,
05:33la vitesse et la profondeur de ces transformations.
05:36Alors, Louis Dragne a une question.
05:37Alors, moi, je trouve que c'est passionnant, Jérôme Fourquet,
05:40toute la description que vous faites, le constat,
05:42et puis la mise en perspective de certaines données.
05:44Mais ce qui m'intéresserait, c'est d'en savoir un petit peu plus.
05:46Sur la partie de la déchristianisation,
05:49vous parliez tout à l'heure de la dislocation de l'Église catholique
05:52dans les années 60-70.
05:54Ce que vous ne dites pas,
05:56et c'est pour ça que ça m'intéresserait d'avoir votre réponse,
05:58c'est qu'est-ce que les Français ont cherché
06:01en refusant l'Église catholique ?
06:03Quel est le moteur de tout ça ?
06:06Alors, c'est des choix qui ont été...
06:09En tout cas, des mécanismes qui sont assez complexes.
06:11Je pense que si on devait résumer,
06:13c'est l'aboutissement d'un long processus
06:16qui a commencé au moment des Lumières,
06:18qui a d'abord touché les élites françaises,
06:20et qui est celui de l'autonomisation de l'individu.
06:22L'individu ne veut plus s'accrocher
06:26à une appartenance religieuse.
06:28On a vu ce qu'il en était aussi des structures familiales.
06:30Donc, il y a eu cette autonomisation de l'individu
06:35et le parallèle va vous paraître un peu osé,
06:38mais je compare souvent ce qui s'est passé
06:40au moment de Vatican II
06:42avec la perestroïka de Gorbatchev.
06:44C'est-à-dire qu'on avait un système
06:46qui était très, très structuré,
06:48qui commençait à prendre l'eau de toutes parts
06:50et qui était fissuré.
06:51Et Gorbatchev a dit,
06:52si on ne veut pas que le barrage entier s'effondre,
06:54il faut qu'on ouvre les vannes.
06:56Vatican II, on a fait un peu pareil.
06:57On a dit, voilà, les Églises commencent à se vider
06:59et il faut qu'on lâche un peu du lest
07:01sur, eh bien...
07:04Le divorce.
07:05Oui, mais aussi sur la doxa.
07:07On n'a plus parlé de l'enfer.
07:09La communion n'était plus devenue obligatoire, etc.
07:12Et ce faisant, dans les deux cas,
07:15on n'a fait qu'accélérer le phénomène.
07:17Alors, vous voyez, je ne dis pas que Vatican II
07:19est la cause de toute chose.
07:20Pour moi, c'était une espèce de réponse inconsciente
07:22au fait que les choses ont commencé à bouger
07:26très fortement à cette époque.
07:28Alexandre de Vecchio.
07:29La question, c'est est-ce qu'une société
07:31ou une civilisation peut vivre sans matrice
07:33et est-ce qu'il y a des matrices de substitution ?
07:36Est-ce que la déchristianisation laisse place
07:38à une islamisation, une américanisation ?
07:41Qu'est-ce qui va prendre le relais ?
07:43Alors, on voit comment cette société française
07:46est assez poreuse à d'autres influences
07:50que celles que nous avons connues historiquement.
07:52Notamment, vous évoquez l'américanisation.
07:55On est en plein dedans.
07:57On a parlé tout à l'heure de la Toussaint.
07:59On voit comment, quelque part, les chrysanthèmes
08:01sont concurrencés par la citrouille d'Halloween.
08:04Donc, il y a cette couche américaine
08:07qui s'est déposée.
08:09Mais, effectivement, on peine à voir
08:12une matrice ou des matrices aussi structurantes
08:15que celles qu'on a connues historiquement.
08:17Une fois qu'on a dit ça, on voit quand même
08:20qu'il reste des ressorts assez profonds,
08:23assez inconscients d'un sentiment d'appartenance
08:26commun, en ce sens que le pays,
08:29dans sa grande majorité, arrive encore
08:32à vibrer ensemble au même moment.
08:34Soit dans les moments de joie,
08:36on l'a vu au moment des JO,
08:38soit dans les moments de douleur
08:41et de...
08:44Oui, de...
08:46De deuil, d'attentat.
08:48Notamment, en 2015, lors de l'attaque de Charlie
08:51et du battement, on a vu là que,
08:53quelque part, ça répondait.
08:55C'est-à-dire que, quand vous soumettez
08:57le corps social à un stimulus électrique,
09:00positif ou négatif, on voit encore
09:02que le corps arrive à peu près à bouger
09:04de manière coordonnée.
09:05Donc, ça veut dire qu'il reste
09:07des choses en partage, même si tout ça
09:09n'est plus aussi structuré que ça a été
09:11au cours des décennies passées.
09:13Mais qu'est-ce qui peut remplacer le christianisme ?
09:16Vous parlez beaucoup de l'essor des églises évangéliques,
09:18qui est en plein boom.
09:20Alors, en termes de volume...
09:22Rien à voir ?
09:23On n'est pas du tout à l'échelle
09:25de ce qui a été perdu.
09:26Alors, ce qui est assez intéressant,
09:28c'est que les questions existentielles
09:30n'ont pas disparu, j'allais dire,
09:32comme par enchantement.
09:34Et l'effondrement de la vieille église catholique
09:37a laissé place à un vide béant.
09:38Parce que, quand on interroge, nous, les Français,
09:40il y a encore à peu près un Français sur deux
09:42que ces questions-là travaillent.
09:43Il y en a qui sont dans un matérialisme
09:45très assumé.
09:46L'individualisme a remplacé...
09:48Oui, la consommation, c'est ici et maintenant.
09:50Mais il y a quand même des gens qui se disent
09:52qu'il y a une vie après la mort,
09:53le sens de la vie, le sens de l'existence.
09:55Et pour autant, on ne se tourne plus
09:57vers la vieille boutique.
09:58Et donc, la nature ayant hors du vide,
10:01on a d'autres offres qui se mettent en place.
10:05Donc, soit des offres très packagées,
10:07on dirait aujourd'hui, très structurées,
10:08comme les courants évangéliques,
10:10soit des choses qui sont très adaptées
10:11aussi à un air du temps.
10:12C'est-à-dire, un peu dans le
10:14« Venez comme vous êtes »,
10:15chacun va faire son bricolage spirituel.
10:17Et donc, on voit le développement personnel,
10:19on voit les courants boutiques.
10:20Le yoga.
10:21On voit aussi des choses un peu plus étranges,
10:24comme des importations de traditions néo-chamaniques
10:28qui se déplacent.
10:30Alors, tout ça, c'est minoritaire,
10:32mais ça doit s'analyser comme une réponse
10:35à un vide spirituel et existentiel.
10:38Jérôme Fourquet, une question de Louis Drac.
10:39Oui, et en même temps,
10:40j'entends et je constate ce que vous dites,
10:42et en même temps, on voit qu'il y a
10:44une hausse des baptêmes,
10:45il y a une hausse des confirmations
10:46dans l'Église catholique.
10:48Vous avez des diocèses qui sont extrêmement dynamiques.
10:50Ce n'est pas du tout le reflet de toute la France.
10:52Et vous avez des espèces d'endroits
10:54dans l'Église catholique qui sont extrêmement forts.
10:56Je pense qu'il y a des communautés,
10:57je ne sais pas si vous connaissez,
10:58la communauté de Saint-Martin,
10:59où il y a beaucoup de prêtres, par exemple,
11:01avec le pèlerinage de Chartres, par exemple,
11:04comme jamais ils ne peuvent plus recevoir
11:06plus de participants parce qu'il y a trop d'inscrits.
11:08Comment est-ce que vous analysez ça ?
11:10Ces communautés, notamment celle de Saint-Martin,
11:12où l'Emmanuel assure à elle seule
11:14un nombre d'ordinations qui est très important aujourd'hui,
11:17si on essaie de prendre un peu de recul,
11:19se dire que la France, jadis fille aînée de l'Église,
11:23est revenue en fait une terre de mission.
11:27C'est-à-dire qu'on a géré pendant longtemps
11:29le déclin de réévangélisation.
11:32D'ailleurs, il y a une revue catholique militante
11:34qui s'appelle Mission,
11:36qui dit qu'on n'est plus dans la gestion de l'héritage,
11:39on doit repartir au temps premier.
11:41Donc, ce que vous évoquez,
11:42ce sont des analogies qu'on peut faire
11:45avec les premières communautés chrétiennes
11:47dans un pays qui ne l'était pas,
11:49et en fait là, aujourd'hui,
11:51qui ne l'est plus véritablement.
11:53Et donc, ces chrétiens et ces catholiques
11:55sont d'autant plus impliqués,
11:58j'allais dire militants ou convaincus,
12:00qu'ils le font par choix.
12:02Les baptêmes et les confirmations en augmentation
12:04que vous évoquez,
12:05ce sont des baptêmes qui sont souvent réalisés
12:07arrivés à l'adolescence ou à l'âge adulte,
12:09et qui ne sont plus le fait d'un héritage,
12:11de quelque chose qu'on aurait reçu,
12:12mais qu'on aurait assumé de faire.
12:14Je sais qu'on est en pleine élection américaine,
12:16évidemment, avec ce duel
12:18Donald Trump-Kamala Harris.
12:20On parlait beaucoup de l'américanisation
12:22de la société française,
12:23dans sa culture, évidemment,
12:25dans la politique aussi.
12:26Vous auscultez les fractures françaises.
12:28C'est la même chose qu'aux Etats-Unis ?
12:30Les fractures sont les mêmes pour vous ?
12:32Alors, il y a des ressorts communs,
12:34ce qui, moi, m'interpelle beaucoup.
12:36On verra que l'issue sera sans doute
12:38assez serrée, au final,
12:40on se mouille pas trop.
12:41Et donc, disons que Trump fasse à moitié
12:43à peu près la moitié des voix.
12:45Donc, quand on voit le personnage,
12:47quand on entend ce qu'il raconte,
12:48on se dit comment se fait-il
12:49que dans un pays développé comme les Etats-Unis,
12:51il y a quand même à peu près une personne sur deux,
12:53en plus ou en moins,
12:55qui vote quand même pour lui.
12:57Et donc, là, il y a des ressorts
12:59qu'on peut retrouver ici, en France.
13:01Le fait que Trump
13:03mette sur la photo
13:05les fameux déplorables
13:07stigmatisés par Hillary Clinton,
13:09ou les ordures...
13:11De Joe Biden.
13:13Et donc, cette Amérique-là
13:15se dit, ce type
13:17est milliardaire, il gagne beaucoup plus que nous,
13:19mais au moins,
13:21comme on l'entend parfois dans la bouche
13:23des lecteurs du Rassemblement national à propos de Marine Le Pen,
13:25au moins, lui n'a pas honte
13:27de nous sur la photo.
13:29Et un autre ressort qu'on peut retrouver
13:31ici, en France, c'est le fait que
13:33Trump se pose
13:35comme étant la victime d'un système
13:37politico-médiatique, d'une élite,
13:39et quelque part, il y a ce qu'on appelle
13:41un transfert avec une homologie de situation,
13:43c'est-à-dire qu'une partie de l'Amérique
13:45se dit que ce que lui vit
13:47dans la sphère politico-médiatique
13:49correspond à ce que nous, nous vivons,
13:51c'est-à-dire à cette opprobre, etc.
13:53Et même si le type est fantasque,
13:55même si le type
13:57est tout à fait dérangeant,
13:59et si un certain nombre de ses propositions
14:01ne tiennent pas la route,
14:03le fait qu'il nous prenne en considération
14:05et que, quelque part,
14:07il soit dans la situation que nous,
14:09nous connaissons, et bien,
14:11comme disent les Américains,
14:13he's our guy.
14:15C'est notre homme.
14:17Marine Le Pen joue sur le même ressort ou pas pour vous, Jérôme?
14:19En partie. Alors, là où on a des différences
14:21qui sont fondamentales, c'est que,
14:23compte tenu des sommes
14:25financières en jeu
14:27qui sont colossales, compte tenu du mode
14:29de scrutin américain,
14:31Trump n'a jamais pu
14:33se présenter en outsider
14:35ou en front tireur. Il a été obligé d'abord
14:37de prendre d'assaut le Parti républicain.
14:39Et donc là, on a...
14:41C'est une grande différence avec ce qu'on connaît en France,
14:43c'est qu'on a un modèle qui est bipartisan,
14:45alors que chez nous, c'est quand même beaucoup plus éclaté.
14:47Une dernière question, Alexandre de Vecchio ?
14:49Oui.
14:51Est-ce qu'il y a malgré tout... Vous décrivez
14:53un monde extrêmement segmenté,
14:55une France extrêmement segmentée.
14:57Est-ce qu'il n'y a pas une majorité relative
14:59qui cherche à faire nation,
15:01justement ?
15:03D'ailleurs, aux Etats-Unis ou en France,
15:05vous êtes plutôt spécialiste de la France.
15:07Est-ce que, justement, le vote
15:09important pour Marine Le Pen, c'est
15:11effectivement la demande d'être pris en compte,
15:13mais aussi la demande d'avoir
15:15un dénominateur commun minimum
15:17qui serait la nation ?
15:19C'est sans doute une demande.
15:21Est-ce que
15:23Marine Le Pen,
15:25il répond pleinement et entièrement,
15:27c'est un sujet, mais il ne vous a pas échappé
15:29que dans les meetings du Rassemblement national,
15:31il y a un moment qui est entonné, c'est on est chez nous.
15:33Et on est chez nous, c'est quelque part
15:35la version sophistiquée du droit à la continuité
15:37historique de François Fillon.
15:39On veut quelque part que la France reste la France
15:41et que les règles
15:43qui s'appliquent, écrites ou non écrites,
15:45les mœurs, les codes, soient les nôtres.
15:47Et donc ça, on ne peut que constater
15:49que ça rassemble une part
15:51importante de l'électorat. Est-ce que c'est majoritaire ?
15:53Les prochains scrutins
15:55nous le diront.
15:57Louis Drangenel ?
15:59J'ai plus de questions.
16:01Mais est-ce qu'effectivement le Big Bang électoral
16:03que vous évoquez, qui a été l'élection d'Emmanuel Macron,
16:05a conduit à l'effacement
16:07complet de ce centre raisonnable,
16:09raisonné, et donc
16:11laisse place à Marine Le Pen
16:13et Jean-Luc Mélenchon ? Seulement comme option, comme deux options.
16:15Moi, je pense qu'on n'est pas dans la situation
16:17américaine et que le Bloc central
16:19n'a pas dit son dernier mot, alors il n'aura pas
16:21exactement le même périmètre qu'aujourd'hui.
16:23Le ciment ne pourra pas être le macronisme,
16:25puisque Emmanuel Macron est amené
16:27à disparaître de la scène politique,
16:29en tout cas dans la perspective
16:31des prochaines élections présidentielles.
16:33Mais cet espace central
16:35aura son candidat.
16:37Alors la question de savoir, c'est s'ils seront
16:39à 10 % ou
16:41à 20 %, et
16:43un des enseignements quand même
16:45majeurs de l'élection législative
16:47de 2024,
16:49c'est qu'il y a encore une majorité absolue
16:51de Français qui se refusent
16:53à l'idée de voir le Rassemblement national
16:55accéder au pouvoir. Donc même s'il y a une dynamique
16:57qu'on appelle la montée des eaux bleues marines
16:59qui est spectaculaire,
17:01l'enseignement qu'on ne peut que constater, en tout cas
17:03au deuxième tour, c'est qu'il y a une majorité
17:05absolue de Français, toujours, qui refusent cette perspective.
17:07Et comme on est dans un système
17:09à deux tours,
17:11avec des blocs politiques de poids
17:13relativement identiques,
17:15on n'est pas du tout dans un modèle américain
17:17qui canalise sur deux piliers, et bien
17:19notre vie politique est de plus
17:21en plus chaotique. C'est comme si vous y marchiez à
17:23trois temps, un moteur qui est réglé sur deux temps,
17:25ça ne fonctionne pas.
17:27Jérôme Fourquet, merci beaucoup d'être venu ce soir sur nos antennes
17:29Métamorphose française, État de la France,
17:31en infographie et en images
17:33aux éditions du Seuil, et on le recommande vraiment
17:35à nos téléspectateurs et nos auditeurs. Merci à vous.
17:37Donc n'oubliez pas la nuit américaine
17:39ce soir sur CNews, et évidemment aussi
17:41sur Europe 1 avec les envoyés spéciaux
17:43de nos deux antennes. Merci de votre fidélité,
17:45merci à vous. Pierre Devineau
17:47sur Europe 1, Christine Kelly sur CNews.
17:49Bonne soirée à vous sur nos deux antennes.

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