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La secrétaire générale du syndicat Unité-Magistrat Béatrice Brugère était l’invitée de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.

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Transcription
00:00Bonjour Béatrice Brugère.
00:02Bonjour Sonia.
00:03Et bienvenue à la grande interview sur CNews et Europe 1.
00:05Vous êtes magistrate et secrétaire générale du syndicat Unité Magistrat FO,
00:09syndicat à la tête duquel vous venez d'être réélu très largement à l'unanimité.
00:14Vous êtes aussi l'auteur de ce livre Justice, la colère qui monte.
00:17Et justement, la colère monte aussi contre l'emprise des narcotrafics dans notre pays.
00:22C'est un rapport explosif de 90 pages de la Cour des comptes qui a été rendue publique hier.
00:27Ce rapport met le doigt sur la gangrène qui gagne désormais toutes les villes et les campagnes autrefois paisibles de notre pays.
00:33Près de 80% des communes sont touchées.
00:36Le ministre de l'Intérieur avait parlé de mexicanisation, d'autres alertes sur un narco-état.
00:41Comment la magistrate que vous êtes appréhende ou définit cette situation aujourd'hui ?
00:46Alors d'abord, je suis ravie que ce rapport existe parce qu'il confirme déjà ce qu'a fait la commission d'enquête,
00:52l'excellent travail des sénateurs qui avaient déjà tiré la sonnette d'alarme.
00:56Mais cette situation, elle est connue aussi en interne et nous aussi en tant que syndicat,
01:01il y a longtemps que nous tirons la sonnette d'alarme, parfois un peu en vain, j'allais dire.
01:07Donc ça, c'est déjà une très, très bonne nouvelle.
01:10Aujourd'hui, il faut bien comprendre qu'on a deux menaces criminelles
01:14qui sont quasiment des menaces qui touchent l'existence même de notre société.
01:21La première, c'est l'islamisme radical dont la manifestation la plus spectaculaire,
01:27on le sait malheureusement, ce sont les attentats terroristes ou des attentats comme l'affaire de Samuel Paty,
01:34mais qui se déclinent sur tous les fronts sociétaux.
01:37C'est-à-dire que l'islamisme radical, ce n'est pas que les attentats,
01:40c'est aussi tous les fronts de la société sur lesquels il y a des coups de boutoir en permanence.
01:46La deuxième menace existentielle pour notre État et notre société, c'est le narcotrafic,
01:53parce que le narcotrafic aujourd'hui a pris une telle dimension, une telle surface territoriale,
02:00une telle surface financière et une telle force de frappe judiciaire aussi.
02:05C'est-à-dire qu'aujourd'hui, et je crois que le rapport le dit,
02:10vous avez plusieurs milliards de bénéfices pour le narcotrafic, c'est une criminalité organisée.
02:18Il faut d'ailleurs ne pas non plus se concentrer que sur le produit,
02:23parce que les organisations criminelles travaillent sur les opportunités criminelles.
02:28Et ce qui est intéressant dans le narcotrafic, c'est qu'il y a aussi le haut du spectre,
02:33mais en fait, ça irrigue toute la criminalité jusqu'en bas, jusque dans les cités.
02:39Ça va du braquage, ça va des violences, des intimidations, des fusillades, des assassinats.
02:46Et en fait, ça pollue tout le territoire.
02:51Et aujourd'hui, on a une véritable difficulté avec ça,
02:54parce que ça fait longtemps que nous tirons la sonnette d'alarme
02:58et que nous ne sommes pas nécessairement armés pour faire face.
03:01Mais armés, nous allons en parler.
03:02Parfois, les deux menaces existentielles que vous avez décrites,
03:05Béatrice Brugère, l'islamisme et le narcotrafic, sont liées.
03:08Et parfois, il peut y avoir des cibles, et ces cibles sont des magistrats.
03:13Menaces, intimidations, agressions verbales, physiques, ça a été le cas.
03:18En tout cas, il y a eu beaucoup d'inquiétude autour du procureur de Douai.
03:21Vers quel pays va-t-on si on arrive à intimider des magistrats en France ?
03:26Vous avez raison de le souligner, parce que je crois que c'est encore un impensé
03:29dont on n'a pas pris toute la mesure.
03:30D'ailleurs, le rapport de la Cour des Comptes le dit, et ça, c'est très important.
03:34Il faut savoir que l'arme du terrorisme, c'est la terreur, c'est le spectaculaire, c'est la peur.
03:40L'arme du narcotrafic, c'est la corruption, c'est l'intimidation
03:44et également toutes les possibilités de violence.
03:48On a vu, et vous le dites très justement, des magistrats qui ont été menacés,
03:53des hauts magistrats, puisqu'on parle de la Cour d'appel de Douai,
03:57d'une tentative peut-être de séquestration du procureur de Douai.
04:02Mais ce n'est pas un phénomène nouveau.
04:04En fait, dès 2016, déjà, Urvoas avait demandé, garde des Sceaux à l'époque,
04:10un rapport sur toutes ces menaces.
04:12Je crois qu'il faut prendre toute la mesure aujourd'hui de ce face à face,
04:16sur lequel d'ailleurs des magistrats avaient tiré la sonnette d'alarme
04:20et sur lequel ils s'étaient fait rabrouer.
04:23Vous parlez des magistrats marseillais,
04:25qui après avoir parlé d'une guerre presque perdue, quand même, se sont fait...
04:30Exactement, mais il faut parler... En fait, c'est toute la chaîne.
04:32C'est la police qui peut être attaquée, c'est la pénitentiaire.
04:36Vous avez encore en tête aussi cet assassinat de la pénitentiaire
04:41avec l'affaire Amra, avec de la corruption obligatoirement,
04:45avec, si vous voulez, des complicités en interne.
04:49Eux-mêmes sont menacés.
04:51Maintenant, vous avez des magistrats.
04:53Vous avez les deux versants.
04:54Vous avez le versant aussi possible de la corruption, de griffier, de magistrats,
04:59et le versant intimidation.
05:01C'est gravissime.
05:02C'est gravissime.
05:03Ce sont des coups de boutoir en plus.
05:04Alors là, on peut en parler.
05:06L'état de droit, quand des magistrats sont menacés dans un pays,
05:09c'est l'état de droit.
05:10Et vous avez raison.
05:11Quand je parle de deux menaces existentielles,
05:13c'est que le terrorisme vise à détruire notre modèle civilisationnel,
05:18le narcotrafic vise à diluer l'État pour imposer sa loi.
05:23Donc, si vous voulez, c'est deux menaces, en effet,
05:25qui sont des menaces réelles et pas fantasmées cette fois-ci.
05:29Là, on parle de choses très concrètes de notre état de droit
05:32et de notre modèle démocratique.
05:34Fusillades, assassinats, règlements de comptes, agressions ultra-violentes
05:38s'enchaînent, on l'a vu, à une vitesse vertigineuse ces derniers temps.
05:42Et surtout, le territoire français nous oblige,
05:44Béatrice Brugère, à interroger aussi l'efficacité
05:46de notre politique sécuritaire et pénale,
05:48y compris pour des mineurs de plus en plus jeunes.
05:51Ce matin, si on ne change pas notre grille,
05:54si on ne change pas notre logiciel,
05:56que risque-t-il de se passer, selon vous ?
05:58En fait, le problème, c'est qu'on a déjà pris beaucoup de retard.
06:01C'est-à-dire qu'on ne s'est pas adapté aux mutations criminelles
06:04qui sont les nôtres.
06:05Nous avons un rajeunissement, d'ailleurs,
06:07c'est ce qui est dit également dans le rapport,
06:10sur la violence, y compris la violence des mineurs
06:12qui sont embriadés dans des réseaux criminels.
06:15Nous avons des mineurs qui ont une violence
06:17de plus en plus débridée, sans complexe,
06:20qui n'ont pas peur de venir s'attaquer
06:23à des choses extrêmement de l'autorité.
06:26On le voit avec la multiplicité des infractions
06:28contre les gendarmes, la police.
06:30On voit très bien que les mineurs, aujourd'hui,
06:33se sentent un peu pour certains.
06:35C'est une minorité dans la toute-puissance.
06:37Et nous n'avons pas adapté nos réponses pénales.
06:41Nous, nous avons fait des propositions,
06:43justement, là-dessus, suite aux émeutes.
06:46Je ne sais pas si vous vous souvenez,
06:47il y a eu des émeutes où on s'est aperçu
06:48qu'il y avait énormément de mineurs,
06:50pour remettre en place des procédures rapides
06:52style comparation immédiate,
06:54pour interroger aussi l'atténuation de responsabilité
06:57qui est quasiment automatique,
06:58sur la tranche de 16 à 18 ans,
07:02et pour qu'elle soit motivée.
07:03Moi, je suis contente de voir que ça a été repris,
07:06d'ailleurs, dans une proposition de loi
07:08de Gabriel Attal, qui l'avait déjà un peu repris
07:10quand il était Premier ministre.
07:12Donc, il faut changer, en urgence,
07:15notre grille de lecture.
07:16Moi, ce que je ne comprends pas,
07:18c'est pourquoi on n'y va pas plus vite.
07:20Alors, vous avez raison,
07:21et ce qu'on ne comprend pas,
07:22le grand public et la grande majorité des Français,
07:24c'est certaines décisions de justice
07:25qui ont quand même choqué,
07:26on ne va pas les citer,
07:27mais notamment dans la terrible affaire philippine.
07:29Béatrice Brugère,
07:30entre peines aménagées et lois inadaptées,
07:33on ne comprend pas pourquoi
07:34et comment notre justice n'arrive pas
07:35à protéger les plus faibles.
07:37Vous avez dit, dans une récente tribune,
07:38ça m'a beaucoup interpellée,
07:40et ça interpellera certainement
07:42nos auditeurs et nos téléspectateurs.
07:43Ce qui est terrible,
07:44c'est que parfois,
07:45il y a des failles de la justice
07:46dans la légalité.
07:48C'est-à-dire que la justice administrative,
07:49judiciaire, peut être dysfonctionnelle
07:52dans la légalité.
07:53Oui, on a institutionnalisé nos failles.
07:55C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
07:56il faut retrouver la légitimité.
07:59C'est pour ça qu'il faut être
08:00à l'écoute des attentes.
08:02La justice, elle est au service des citoyens.
08:05On n'est pas là que pour faire du droit,
08:06on est là pour rendre justice.
08:07Et il y a un écart entre appliquer la loi
08:09et rendre justice.
08:10Cet écart, c'est toute l'intelligence
08:12de situation, du discernement.
08:15Et là, il faut qu'on retrouve
08:16notre légitimité.
08:17Ça ne vous a pas échappé qu'aujourd'hui,
08:19la justice est en perte de crédit
08:21en permanence.
08:22Il faut absolument,
08:23parce que c'est un pilier
08:24de notre démocratie,
08:25que la justice retrouve ce crédit.
08:27Les citoyens ont un besoin
08:30de justice incroyable.
08:32On le voit, c'est un idéal.
08:34Les gens sont prêts à se battre
08:35toute une vie pour obtenir justice.
08:37Nous leur devons cette justice.
08:39Pour cela, il faut absolument
08:40se remettre en question.
08:42Se remettre en question,
08:43c'est-à-dire éviter de se dire
08:45non, circulez, vous n'avez rien compris,
08:46tout est parfait, on a respecté la norme.
08:49Il faut réinterroger nos modalités.
08:51Il faut réinterroger notre façon de travailler.
08:54Il faut réinterroger notre façon
08:56de rendre justice.
08:57Vous en êtes capable,
08:58et vous le faites.
08:59Est-ce que tout le monde l'est ?
09:00Je cite notamment,
09:01comment redonner confiance
09:03dans le système judiciaire
09:04et faire en sorte d'éviter
09:05toute politisation de certains magistrats,
09:07notamment à travers
09:08Béatrice Brugère,
09:09le syndicat de la magistrature,
09:10qui à coup de tribunes,
09:11de participations à la fête de l'Humain,
09:13affiche clairement,
09:15officiellement,
09:16son orientation politique.
09:17Est-ce qu'on peut,
09:18dans notre pays,
09:19juger et être syndiqué
09:21avec des opinions politiques affichées ?
09:23Nous avons un devoir d'impartialité.
09:25Vous m'avez répondu, donc.
09:27Donc non, on ne peut pas juger et être syndiqué.
09:30Nous avons un devoir d'impartialité.
09:31Moi, ce que je veux dire aux auditeurs,
09:32parce qu'il y a une confusion,
09:33il faut qu'ils entendent ça.
09:34Il existe un syndicalisme judiciaire,
09:37réformiste,
09:38qui ne fait pas de politique
09:40et qui est au service des citoyens.
09:42Nous ne voulons pas avoir aucune allégeance.
09:44Nous n'avons aucune allégeance,
09:45ni politique, ni militante.
09:47Nous parlons, d'ailleurs,
09:48à tous les politiques.
09:49Nous faisons des propositions de réforme.
09:52Nous ne sommes pas corporatistes.
09:54Nous sommes capables
09:55de reconnaître nos erreurs,
09:56nos dysfonctionnements.
09:57Moi, je regardais
09:58le dernier projet de loi de finances.
10:00Nous avons des indicateurs de performance
10:02et des indicateurs de contre-performance.
10:04Je m'explique.
10:05On rajoute des moyens.
10:06On rajoute des moyens humains et budgétaires.
10:09Les délais s'allongent.
10:10Nous jugeons de moins en moins.
10:12La chaîne pénale est saturée.
10:13Nous avons un rapport de l'inspection
10:16qui est un peu secret ou discret, en tout cas,
10:20qui montre que nous avons
10:21des millions de procédures
10:22qui ne sont pas traitées
10:23dans les commissariats, gendarmerie.
10:25Aujourd'hui, on nous demande
10:27d'augmenter les alternatives aux poursuites.
10:30Nous avons un des taux les plus bas,
10:32puisqu'aujourd'hui, nous sommes à peine à 15 %,
10:35écoutez bien, 15 % de dossiers
10:38qui sont jugés devant une juridiction.
10:40Vous êtes en train de nous dire
10:42que vous subissez aussi de l'impuissance en amont.
10:44Oui, donc il faut changer nos modèles.
10:46On peut le faire.
10:47Le déclin n'est pas irréversible.
10:49Prenons un exemple concret.
10:50Pour améliorer le système,
10:51il faut aussi que la justice et l'intérieur
10:53marchent d'un même pas
10:54et travaillent main dans la main.
10:56Par exemple, on nous dit toujours,
10:57et c'est le cas,
10:58qu'il faut plus de places de prison.
10:59Comment expliquer, Béatrice Brugère,
11:01que des détenus condamnés et dangereux
11:03se retrouvent dans des centres de rétention administrative ?
11:05Est-ce que c'est parce que nous n'avons pas de place de prison ?
11:08Comment expliquer ce transfert de profil ?
11:10Alors, en fait, nous avons fait des propositions là-dessus.
11:12Normalement, les détenus qui sont étrangers
11:15et qui purgent une peine de détention
11:17devraient faire l'objet d'une attention toute particulière
11:21pour avoir des procédures soit de libération,
11:24expulsion pour qu'ils partent avant de sortir.
11:26Comme on n'anticipe pas
11:28et qu'on ne fait pas ces procédures pour une grande majorité,
11:31ils sortent.
11:32Après, ils vont dans les centres de rétention administrative,
11:34dont on sait qu'ils ne sont pas faits pour ça.
11:37D'ailleurs, il y a des problèmes de violence au passage.
11:39Ils ne sont pas faits pour ça.
11:40Ça coûte très cher.
11:41Et après, vous avez des délais
11:43où on est obligé de les remettre dehors.
11:45Je signale aussi que nous avons envoyé
11:47sur la place des prisons.
11:49On a aujourd'hui entre 3 000 et 4 000 matelas.
11:52Et c'est un problème de surpopulation.
11:55Nous avons écrit aux gardes des sceaux,
11:57il y a un mois, pour dire
11:59« Attention, nous avons la possibilité
12:01aujourd'hui, dans les textes, il n'y a rien à faire,
12:03il n'y a juste à donner des ordres, à appliquer. »
12:073 000 à 4 000 détenus européens
12:10qui pourraient être transférés immédiatement dans leur pays
12:13sans laisser passer consulaire
12:15pour finir d'exécuter leur prison
12:17chez eux, dans leur pays.
12:19Là, il n'y a pas de problème de laisser passer consulaire,
12:21ce sont des détenus européens.
12:233 000 à 4 000, c'est les 3 000 à 4 000 matelas
12:25qui sont au sol.
12:26Ce qui est incroyable, vous parlez de ces détenus européens,
12:28il y a les détenus extra-européens,
12:30un quart des détenus français sont des étrangers
12:32et en majorité des extra-européens.
12:34Est-ce que c'est aux gardes des sceaux
12:36de donner des instructions, en réalité,
12:38pour que soit appliquée ce que vous nous dites ?
12:40Bien sûr, ça s'appelle la politique pénale.
12:42Donc, CQFD, si on peut dire.
12:45Vous avez, sur les détenus extra-européens,
12:48tout un travail qui est fait aussi par le ministère de l'Intérieur.
12:51Je crois que Bruno Rotailleau, le ministre de l'Intérieur,
12:53a commencé à le faire avec un début de succès.
12:56Tout un travail diplomatique, vous le savez,
12:58puisqu'en fait, là, pour le coup,
13:00on est soumis à des laissés-passer consulaires.
13:03Donc ça, c'est un travail politique.
13:05Les ministres sont des politiques.
13:07C'est à eux qu'il appartient de faire en sorte que ça marche.
13:10C'est pas l'impuissance du politique.
13:12Mais il y a les deux.
13:14C'est-à-dire qu'on a aussi les taxes pour faire les choses,
13:16on ne le fait pas.
13:18Pourquoi on ne le fait pas ?
13:19Alors, pourquoi ?
13:20Est-ce que la prison, c'est l'exception ?
13:23Ou bien parce que les prisons sont pleines à craquer
13:25et justement qu'on fait porter aussi sur les magistrats cette impuissance ?
13:28Est-ce qu'il y a des deux ?
13:29Alors oui, la prison, c'est l'exception.
13:31D'ailleurs, on nous demande de plus en plus...
13:32Depuis très longtemps, c'est la fameuse théorie Foucault.
13:34Bien sûr.
13:35Mais on nous demande de plus en plus
13:37de mettre de moins en moins en prison, en détention,
13:40parce que justement, on nous dit qu'on a une surpopulation carcérale.
13:43Sauf que, moi, j'indique qu'on a une politique
13:46depuis des années incohérente et irresponsable.
13:50On a stoppé tous les chantiers de construction.
13:52Aujourd'hui, on est en sous-équipement carcéral.
13:55Christiane Taubira, quand elle est arrivée,
13:57elle a stoppé tous les chantiers.
13:59On nous dit qu'il faut 7 ans pour faire sortir des prisons du sol.
14:03En vrai, quand on regarde, il faut 2 ans et demi à 3 ans.
14:05Le reste, c'est de la techno-bureaucratie.
14:07Donc, il faut accélérer les process.
14:10Il faut construire autrement.
14:11Nous, on a fait des propositions d'ultra courte peine de 7 jours.
14:15On s'aperçoit qu'en fait, aujourd'hui,
14:17on a un problème de politique pénale.
14:19On incarcère pas plus que dans les années 80,
14:21mais les gens restent 2 fois plus longtemps.
14:23Donc, 35 000 détenus dans les années 80,
14:27c'est 70 000 places aujourd'hui
14:29parce qu'ils restent 2 fois plus longtemps.
14:32Si vous mettez des peines de prison
14:34qui sont exécutées très courtes,
14:37par exemple, comme 7 à jour,
14:38comme on propose pour des faits graves,
14:40pour des primo-délinquants,
14:42pour qu'ils aient une réponse immédiate, etc.,
14:44il faut que 400 places pour 10 000 peines prononcées.
14:49Donc, ce n'est rien.
14:50Donc, on voit bien qu'on est sur un problème de politique pénale.
14:53Je voudrais conclure par l'actualité.
14:55Vous avez été magistrate antiterroriste,
14:58Béatrice Brugère.
15:00Il y a eu les positions de la France Insoumise
15:02qui ont beaucoup choqué,
15:03qui souhaitent, à travers une proposition de loi,
15:05supprimer le délit d'apologie du terrorisme
15:08dans le code pénal.
15:09Comment vous avez réagi à cela ?
15:11À quoi ça reviendrait, selon vous ?
15:13Alors, ce délit qui avait été fait, je crois,
15:16par M. Cazeneuve, à l'époque,
15:18avait un intérêt.
15:19C'est qu'en fait, on s'était aperçu
15:22que les gens qui faisaient du délit d'apologie
15:25étaient souvent des futurs terroristes.
15:28Et ça permettait, un, d'identifier ces personnes,
15:31leur dangerosité,
15:32condamner éventuellement cet appel au meurtre,
15:35au terrorisme.
15:36C'est quoi l'apologie du terrorisme ?
15:37C'est de demander d'aller tuer des gens, quand même.
15:39Et en général, ce sont des civils.
15:40Donc, en effet, ce délit a un intérêt
15:43parce qu'il permet d'investiguer,
15:44parfois, justement, de prévenir des attentats
15:46et de condamner des gens qui sont radicalisés.
15:49La proposition de loi dont j'ai entendu
15:52qu'elle serait pas une abrogation pure et simple,
15:55mais un transfert pour le remettre
15:57dans le droit de la presse,
15:59je n'ai pas vu ça du tout.
16:00Ce n'est pas écrit comme ça.
16:01C'est ce qui est expliqué aujourd'hui.
16:03En fait, c'est une abrogation pure et simple
16:05qui serait...
16:06Pure et simple, qui a été proposée par les élus LFI.
16:08Qui serait...
16:09Et avec, aussi, trois articles,
16:10dont le deuxième serait
16:12d'évaluer la politique des magistrats qui l'utilisent.
16:15C'est quand même très particulier.
16:17C'est-à-dire, aller voir comment les magistrats
16:19appliquent la loi.
16:21En deuxième article,
16:22me semble une régression très grave
16:24par rapport à la menace que je vous ai indiquée,
16:27qui est une menace existentielle aujourd'hui.
16:30Puisque, sur tout le territoire, aujourd'hui,
16:32nous avons de plus en plus de contestations
16:37du modèle de notre société,
16:40dont l'apologie du terroriste,
16:41qui appelle très clairement
16:43à des actions extrêmement violentes,
16:46y compris contre des civils.
16:48Merci, Béatrice Brugère.
16:50Je rappelle que, pour votre livre
16:51« Justice, la colère qui monte »,
16:52vous avez reçu le prix de l'essai politique
16:54du barreau de Paris 2024.
16:56Je crois que c'est la première fois.
16:57Oui.
16:58Magistrate et récompensée.
16:59On voit votre sourire, je veux dire.
17:00Oui, j'en suis très heureuse.
17:01C'est important,
17:02compte tenu des thèmes que vous portez.
17:04Oui, et puis, c'est très important
17:06parce que c'est difficile, parfois,
17:08avec les avocats qui reprochent
17:10des relations difficiles.
17:12Et je trouve que c'est un très beau symbole.
17:15On peut faire l'unanimité, parfois.
17:16Et ça me fait très plaisir.
17:17Vous êtes heureux.
17:18Merci, Béatrice Brugère.
17:19Bonne journée à vous.
17:20Merci.

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