En partageant son témoignage, Sabrina souhaite briser cette chaîne et faire comprendre l'importance de la parole. Exprimer sa douleur, même lorsque c’est difficile, devient un acte de protection pour soi et pour les autres. Elle veut rappeler que chaque parole peut faire une différence, que chaque adulte a un devoir de vigilance et de soutien pour mettre fin aux abus.
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00:00J'ai été victime d'abus sexuels par un membre proche de ma famille
00:04qui était adolescent au moment des faits,
00:06moi j'avais donc 4 ans quand ça a commencé.
00:09On passait beaucoup de réunions familiales ensemble,
00:12beaucoup de vacances aussi,
00:14on se voyait plusieurs fois par semaine,
00:16on passait tous nos étés, les deux mois d'été ensemble.
00:18Et c'est vrai que dans ce contexte-là,
00:20dès que les adultes avaient un peu le dos tourné,
00:23ils pouvaient en profiter pour instaurer
00:26ce que lui, il pouvait appeler des jeux,
00:27et qui en fait se sont avérés être des abus sexuels.
00:31Ça a commencé par des agressions, des attouchements,
00:34mais toujours dans un cadre de jeu, de rigolade,
00:38qui se voulait quelque part bienveillant et rassurant pour moi.
00:42Et au fur et à mesure du temps qui a passé,
00:45ces attouchements se sont transformés en abus sexuels.
00:49Moi j'ai jamais eu d'amnésie traumatique,
00:52je me suis toujours souvenue de ces faits-là.
00:55Je les ai enfouis à l'intérieur de moi
00:57et je n'en ai parlé à personne.
00:58Tous les abus que j'ai pu subir
01:01ont eu lieu par le biais de la manipulation.
01:03Moi je n'ai jamais vécu de violence physique.
01:06Il n'a jamais essayé de m'intimider par exemple,
01:08soit en me criant dessus,
01:10soit en me maintenant très violemment.
01:13Ça a vraiment été par le biais de la confiance
01:16et le fait qu'on était très proches,
01:17lui et moi, qu'on se connaissait très bien,
01:19qu'on partageait beaucoup de choses
01:21et que finalement, en tout cas moi je l'aimais beaucoup,
01:25et que je lui faisais confiance, que je l'admirais.
01:27Et c'est par ce biais-là qu'il me demandait des faveurs.
01:32En fait, il a été très intelligent
01:34parce qu'avant de me demander des faveurs,
01:37il m'a plutôt proposé de me montrer des jeux
01:41en me demandant de me laisser faire.
01:42Donc il a plutôt, lui, commencé par m'agresser
01:47en étant acteur et moi en devant me laissant faire.
01:51Et c'est une fois que cette manipulation-là
01:53a été très instaurée,
01:55qu'après, il a essayé de me demander des faveurs.
01:57Enfin, qu'il s'est permis de me demander des faveurs
01:59en me disant, comme je t'ai fait plaisir,
02:01parce qu'il fallait absolument que je puisse lui dire
02:04que ce qui m'avait fait, m'avait fait plaisir,
02:06c'était très important que je puisse lui dire.
02:08Et moi, je répondais oui parce que j'avais 4 ans
02:10et que je voyais qu'il avait très envie que je lui dise ça,
02:13ce qui lui permettait en fait après de me demander
02:15de lui faire plaisir à lui.
02:17Je ne comprenais absolument pas ce qui se passait,
02:19je ne mettais aucun mot sur ce que j'étais en train de vivre.
02:24Même si je pense que mon corps a pu ressentir
02:26un peu du plaisir mécanique parce que c'est un corps humain,
02:30psychiquement, j'ai tout de suite été dans le déplaisir
02:34et dans le besoin justement de me dissocier de mon corps.
02:36Et c'est pour ça que ça a longtemps duré,
02:38après cette dissociation, c'est parce que c'est comme ça
02:40que j'ai trouvé le moyen finalement de survivre à cet acte-là,
02:45aux actes qui m'ont été imposés pendant des années et des années.
02:48Ça a été de mettre à distance les choses et de me dire
02:51même si mon corps est en train de ressentir quelque chose
02:53sur lequel je ne mets pas de mots,
02:55parce que vraiment le plaisir à 4 ans,
02:57je ne sais pas si on peut vraiment se dire
02:59« Ah là, je suis en train de ressentir un plaisir. »
03:02Là, je ne mettais vraiment absolument aucun mot.
03:05Je sais en tout cas que mentalement,
03:07j'étais très gênée par ce qui se passait.
03:09Je n'avais pas envie de vivre ça,
03:11je n'avais pas envie que ça se passe,
03:12mais que je n'arrivais pas à lui dire
03:14parce que j'avais tellement peur de perdre son amour à lui,
03:18qui était très important pour moi en fait,
03:20et puis aussi certainement parce que je sentais
03:23que c'était tellement important pour lui
03:24que j'avais un peu peur qu'il aille le dire aux adultes,
03:28finalement en disant que moi j'avais fait peut-être
03:32une bêtise ou quelque chose de pas normal.
03:35Comme je suis fille unique,
03:37il était un petit peu mon grand frère de cœur,
03:40même si ce n'était pas le statut qu'il avait en réalité.
03:43Du coup, j'avais beaucoup d'amour pour lui,
03:45un vrai amour fraternel et une vraie admiration,
03:48peut-être comme pourrait avoir une petite soeur
03:50vis-à-vis de son grand frère.
03:51Et que c'est bien pour ça aussi que j'ai mis
03:54tant d'années à parler,
03:56tant d'années tout simplement à comprendre
03:58ce qui m'était arrivé et à pouvoir aussi peut-être
04:01le considérer comme un agresseur.
04:03J'ai continué à aimer pendant des années et des années
04:06parce qu'on n'a jamais perdu contact.
04:08Aujourd'hui, on ne se voit plus,
04:10mais jusqu'à moi, mes 25 ans,
04:13on est restés en fait en contact
04:15et on se voyait très régulièrement
04:17et on partageait les mêmes réunions de famille
04:20qu'on pouvait partager quand j'étais enfant.
04:22En 2017, j'ai 27 ans et pour la première fois,
04:26j'ose écrire une lettre à mon agresseur
04:28en posant ce mot en fait, en lui disant
04:30voilà, je n'ai jamais oublié ce qui s'est passé.
04:33J'ai mis plus de 20 ans à pouvoir poser les mots justes
04:37et à pouvoir vraiment dire que tu es mon agresseur
04:41mais j'ai besoin de te le dire
04:43et donc je t'écris cette lettre pour cette raison-là.
04:45Il s'est enfermé dans le silence
04:46et la seule réponse, si je puis dire,
04:51que j'ai eue de sa part, c'est qu'il a tout de suite prévenu son père
04:54en disant que j'avais eu une décompensation mythomane,
04:57que j'étais complètement folle
04:58et qu'il fallait du coup m'hospitaliser d'urgence
05:01en hôpital psychiatrique
05:03et que de toute façon, il préviendrait toute la famille
05:06que j'étais très malade psychiatriquement
05:07et qu'il ne fallait rien écouter de ce que je pouvais dire.
05:10Même si je suis absolument certaine de ce que j'ai vécu,
05:14le fait que lui tente de nier les faits
05:19et de me traiter de mythomane,
05:20par ce comportement-là, il arrive quand même à me déstabiliser
05:23et à faire en sorte qu'une part de moi, même infime,
05:27se dise mais Sabrina, est-ce que vraiment tu as vécu ça ?
05:30Donc en fait, c'est toute une contradiction
05:31comme une petite voix qui serait là en permanence
05:33et qui vient quand même me dire
05:35est-ce que tu es sûre vraiment ?
05:36Est-ce que tu es bien sûre de toi ?
05:38Parce que c'est tellement violent en fait d'être
05:40face à sa vérité pleine et entière,
05:42ça peut être tellement violent
05:43que je pense que cette petite voix, elle me protège un petit peu
05:45et elle me permet finalement
05:47de continuer à parler en me disant
05:50bah en fait, il faut découvrir la vérité.
05:51Et donc, j'essaie d'instaurer un dialogue avec mes parents,
05:54mes grands-parents.
05:55Moi, je n'ai pas forcément parlé au départ,
05:58j'ai écrit beaucoup de lettres
05:59parce que je pense que c'était tellement difficile pour moi
06:02de parler, de mettre des vrais mots
06:04que j'avais besoin d'écrire
06:06et de ne pas me retrouver tout de suite face à eux.
06:09Je ne voulais pas voir leur réaction immédiate
06:11en apprenant les abus que j'avais subis.
06:13Ça a été un tel choc pour eux,
06:15une telle déflagration,
06:16ces révélations que leur première réaction
06:20a quand même été de me questionner,
06:22de me demander ce que j'entendais
06:23par des agressions, par des viols,
06:25qu'est-ce que je voulais dire ?
06:26Est-ce que j'étais bien sûre
06:28que j'avais réellement vécu ça ?
06:29Voilà, ils ont eu besoin de peut-être comprendre
06:31ce que j'étais en train de leur dire.
06:33J'essaye d'expliquer avec les mots les plus simples
06:35et les plus directs à ma mère
06:37ce que j'entends par viol, par agression.
06:40Et donc ma mère est complètement abasourdie,
06:43elle s'effondre, elle pleure énormément.
06:46Ma première réaction, c'est d'essayer
06:47de la rassurer elle et de la réconforter.
06:50Même si à l'époque, ce n'est pas du tout le cas.
06:51En 2017, j'allais plutôt mal en réalité
06:55d'essayer de lui dire que quand même je vais bien,
06:58je suis une thérapie,
06:59que j'arrive à m'en sortir, etc.
07:01Et que si je parle, c'est parce que
07:03j'ai envie de me défaire un peu de mon histoire
07:05et le silence que je me suis imposé,
07:08qui m'a été imposé par mon agresseur,
07:10c'est un petit peu des deux finalement.
07:11Je me suis quand même à l'intérieur de moi isolée
07:14en ne parlant à personne.
07:15Et donc les liens, même avec mes parents notamment,
07:19se sont beaucoup distanciés au fil du temps.
07:21Et je pense qu'en parlant,
07:23j'avais aussi à la fois l'espoir
07:27que ma famille reconnaisse ma douleur
07:29et ma souffrance et l'accueil,
07:32mais aussi que l'on puisse retrouver un lien.
07:35À partir du moment où j'ai écrit puis parlé,
07:37j'ai changé le cours de ma vie en fait,
07:39j'ai changé le cours de mon destin
07:40parce que je me suis libérée
07:42de la plus grande douleur
07:44que j'ai jamais vécue dans ma vie
07:46et dont je ne savais pas quoi faire.
07:47Mon propre agresseur a fini
07:49par reconnaître en partie les faits.
07:51Et il s'empresse de dire qu'évidemment,
07:53j'étais consentante,
07:54que j'étais tout à fait d'accord
07:55avec ce qui était en train de se passer,
07:57que c'était de simples jeux d'enfants.
07:58Mes parents, du coup, me croient immédiatement
08:00et comprennent qu'en fait,
08:02tout ce que j'ai raconté est absolument vrai
08:04et qu'ils comprennent que j'ai vraiment vécu l'horreur
08:07pendant des années.
08:08Les autres membres de ma famille,
08:09je pense, sont peut-être tellement choqués
08:12face à la véracité de ces révélations
08:15qu'ils préfèrent se dire
08:17que tout ça a bien été des jeux d'enfants
08:19et que peut-être du coup, c'est moins grave
08:22que ce que je veux bien dire.
08:23Je pense que ça a été une manière pour eux
08:24de se protéger.
08:25Comme mon agresseur dit,
08:27avoir lui-même subi des agressions
08:31dans son enfance,
08:32c'est une parade qu'il avance très rapidement
08:35pour dire que finalement,
08:36il aurait vécu des choses bien pires que les miennes
08:38et que finalement, à côté,
08:40ce qu'il m'a fait subir
08:42ne sont pas vraiment des agressions
08:44parce que ce n'est pas le même contexte,
08:45ce n'est pas la même violence,
08:47ce ne serait pas la même chose.
08:48Il a un grand demi-frère.
08:50Il dit qu'il a été violé pendant plusieurs années
08:52par ce grand demi-frère
08:53où ils ont effectivement,
08:55je pense, une dizaine d'années de différence.
08:57Il explique aussi que quand il était tout petit,
08:59donc vers 4-5 ans,
09:00il a été abusé, violé par son oncle maternel.
09:03À ce moment-là, oui, j'y crois.
09:05Je pense que ça explique aussi
09:07son comportement envers moi.
09:08Ce n'est pas forcément toujours le cas
09:10mais souvent, les agresseurs
09:12et souvent même les jeunes agresseurs
09:13ont eux-mêmes été agressés dans leur enfance
09:15donc il y a quelque chose de la suite logique.
09:18Et moi, j'ai l'impression de comprendre
09:20finalement pourquoi lui-même
09:21s'est permis de m'agresser.
09:23J'aurais presque envie qu'on se soutienne
09:24pour s'en sortir ensemble en fait
09:26parce que je me dis que si lui m'a agressé,
09:29c'est qu'il n'a pas du tout pu
09:30trouver du soutien ni s'en sortir.
09:32Si justement, il avait pu avoir du soutien,
09:34il avait pu avoir de l'écoute,
09:36peut-être qu'il ne m'aurait pas fait subir ça.
09:38C'est pour ça que je pense qu'à la fois
09:40il le dit certainement pour se libérer
09:42mais aussi pour se dédouaner
09:44des propres agressions que lui m'a fait subir.
09:47La première fois que je me rends compte
09:49avoir vécu quelque chose de pas normal
09:52et donc de pouvoir dire
09:54oui, c'est vrai, j'ai subi des viols.
09:56J'ai 15 ans et là, je tombe en dépression
09:59pendant plusieurs années.
10:00Je me débats comme je peux,
10:01je ne sais pas quoi faire.
10:02Je n'en parle à personne.
10:03Mes parents sont assez démunis
10:05parce qu'ils voient quand même
10:06que je ne vais pas bien
10:07mais ils ne comprennent pas pourquoi.
10:08Je n'arrive pas du tout à mettre de mots
10:10sur ce qui se passe pour moi,
10:12sur ce qui me traverse.
10:12À ce moment-là, j'habite au Maroc
10:14parce que mes parents travaillent là-bas.
10:15Il n'y a pas beaucoup de psychologues au Maroc.
10:17Ce n'est pas forcément quelque chose
10:18qui est très développé.
10:19Donc en fait, je suis seule face à mes difficultés
10:21et je n'arrive pas du tout à élaborer,
10:23à mettre de mots.
10:24Juste, je sais que je ne vais pas bien.
10:25Une fois que je passe mon bac au Maroc,
10:27j'arrive en France à 18 ans
10:28pour faire mes études supérieures,
10:30pour être éducatrice spécialisée.
10:32Travailler notamment en protection de l'enfance,
10:34donc pour les enfants qui sont en danger,
10:36qui sont placés, qui sont retirés
10:39de leur famille d'origine.
10:40Je pense que ce n'est quand même pas anodin
10:41par rapport à mon propre parcours
10:44mais à ce moment-là,
10:44je ne l'élabore pas forcément de cette manière-là.
10:46Juste, je sais que c'est important pour moi
10:49de faire ce métier-là
10:50et j'y mets toute mon énergie, tout mon cœur.
10:52Et même si au fond de moi,
10:54je continue quand même à aller vraiment mal,
10:57j'entame un suivi thérapeutique
11:00qui commence à m'aider,
11:02à mettre des mots sur ce que j'ai vécu,
11:05à comprendre un petit peu les choses
11:08et finalement aussi à pouvoir un peu mieux
11:10appréhender ma vie de jeune femme.
11:13Je suis à Paris, je fais mes études,
11:15j'ai mes amis, j'ai mon compagnon aussi.
11:17Je vis une première grande histoire d'amour avec quelqu'un,
11:20je m'installe avec cette personne,
11:21je commence à construire aussi.
11:23Et c'est vrai que plus je travaille
11:25en tant qu'éducatrice spécialisée,
11:27plus je me rends compte que c'est difficile pour moi
11:29parce que ma propre histoire
11:31me fait énormément écho, fait résonance.
11:33Je pense que je suis à ce moment-là
11:35une très bonne éducatrice spécialisée,
11:37je pense que je fais très bien mon travail
11:38mais que moi, ça me détruit plus qu'autre chose à l'intérieur.
11:40Quand je suis face aux enfants que je rencontre,
11:42aux familles que j'accompagne,
11:44jamais ne me vient l'idée de parler de moi
11:47parce que je suis là pour eux
11:48et que ce qui est très important pour moi,
11:49c'est en sachant la douleur dans laquelle je suis,
11:52de me dire qu'il faut qu'ils soient accompagnés au mieux
11:54et le plus tôt possible.
11:55Parce que je sais la douleur que ça crée,
11:57je sais les séquelles que ça engendre.
11:59Il faut trouver des solutions pour que ça ne soit pas le cas.
12:02C'est ça en fait mon objectif et mon but.
12:04Mon parcours professionnel fait que je me retrouve
12:06à travailler en centre éducatif fermé.
12:08Mon travail à ce moment-là,
12:09c'est d'accompagner des jeunes délinquants,
12:11des jeunes mineurs délinquants
12:12qui ont entre 16 et 18 ans, garçons,
12:15et qui sont là parce que parfois,
12:16ils ont violé des jeunes femmes ou des enfants,
12:20ils ont agressé des personnes.
12:22Et mon travail, c'est de les accompagner
12:24et de les aider à mettre de la compréhension,
12:26à mettre des mots et à pouvoir prendre du recul
12:28sur les actes qu'ils ont posés
12:30pour que ça ne se reproduise pas.
12:32Et ces jeunes-là, en fait,
12:34me redonnent un visage humain de l'agresseur.
12:37C'est-à-dire qu'à un moment où moi,
12:38j'ai eu besoin de visualiser mon agresseur
12:41comme un monstre inhumain absolument terrible,
12:45eux, en partageant leur quotidien,
12:47parce que c'est un internat,
12:49en faisant des activités avec eux,
12:50en parlant avec eux énormément,
12:52je remets beaucoup d'humanité
12:54dans ce qui m'est arrivé à moi
12:55et peut-être dans la vision
12:56que j'ai voulu construire de mon propre agresseur.
12:59Je décide d'arrêter
13:02d'être éducatrice spécialisée petit à petit.
13:04Je continue encore pendant un an ou deux,
13:05mais dans une autre structure.
13:07Et même si c'est une expérience
13:09humainement très enrichissante,
13:10je sens aussi que c'est le moment pour moi
13:12de passer à autre chose
13:14et finalement de m'occuper de moi réellement.
13:16Pendant cette période-là,
13:17je trouve un groupe de paroles de femmes
13:19toutes victimes de violences sexuelles
13:22et je commence en fait à m'impliquer
13:24dans ce groupe de paroles-là.
13:25Je sens que c'est quelque chose
13:26qui peut me faire du bien.
13:27Donc ça a été très porteur pour moi
13:29et ça m'a permis ensuite
13:31d'entamer une psychanalyse.
13:33Et en parallèle à ma psychanalyse,
13:36j'ai repris des études pour être psy.
13:38De l'instant où j'ai commencé à parler,
13:41moi, je me suis rendu compte à la fois
13:43à quel point c'était libérateur de pouvoir parler,
13:45à quel point c'était important d'oser parler
13:49et aussi à quel point il était nécessaire
13:53de se sentir écouté.
13:54Et je sais que c'est ça qui m'a sauvé la vie,
13:56c'est de m'être sentie écoutée
13:59et d'avoir pris la parole librement.
14:01Je me guéris aussi en aidant les autres
14:04et en étant là pour les autres.
14:06Ça fait vraiment partie de mon cheminement à moi.
14:09Mais que j'avais envie de le faire
14:10dans un contexte cadré,
14:12de ne pas le faire n'importe comment.
14:13Et donc, ça a été important pour moi
14:14de reprendre ces études-là
14:16et de vraiment pouvoir devenir officiellement psychologue.
14:20Moi, ce que j'aurais vraiment envie de dire,
14:22c'est par exemple, si des parents d'enfants de victimes sexuelles,
14:26l'idée, ce serait vraiment de pouvoir les écouter.
14:28Pas forcément de poser beaucoup de questions,
14:30mais d'être très attentif au comportement de vos enfants,
14:33de vos ados, des jeunes adultes même.
14:35Et vraiment de pouvoir ouvrir le dialogue
14:39et dire que vraiment, vous êtes là pour les écouter,
14:42que vous êtes là pour les soutenir.
14:44Mais sans forcément poser trop de questions,
14:45sans vouloir absolument savoir ce que ça veut dire
14:48avoir été agressé, ce que ça veut dire avoir été violé.
14:50Pouvoir être dans l'écoute.
14:52Et je pense que c'est d'ailleurs ce que nous guérir
14:55essaye d'amener aussi comme message.
14:57De dire que la question, maintenant,
14:59elle n'est plus de l'ordre de la libération de la parole des victimes,
15:03mais vraiment de la libération de l'écoute
15:04des personnes, de l'entourage des victimes
15:07ou même de la société de manière générale.
15:08Que c'est ça, en fait, qui est important aujourd'hui.
15:10Que les gens puissent entendre, puissent accepter d'écouter
15:13et puissent du coup, dans un deuxième temps,
15:15essayer de mettre des actions de soutien en marche
15:19pour que ces sujets-là ne soient plus tabous
15:21et ne soient plus silenciés.
15:22C'est extrêmement important.
15:24Et c'est comme ça aussi que nous, anciennes victimes,
15:27victimes, appelons-nous comme on veut,
15:29on peut se guérir et qu'on peut aider d'autres personnes
15:34à s'en sortir, qu'il n'y a absolument pas de fatalité,
15:37que ce n'est pas parce qu'on a vécu des choses terribles
15:38dans notre enfance ou quand on a été ado ou jeune adulte
15:41qu'on est voué, forcément, avoir une vie terrible
15:44et qu'on ne s'en sortira pas.
15:46L'idée, voilà, c'est de pouvoir donner de l'espoir
15:48et dire qu'en fait, on peut tout à fait construire
15:51sa vie de femme, sa vie professionnelle,
15:53sa vie amoureuse, etc.
15:56Et que ce n'est pas une fatalité, en fait,
15:58d'avoir été victime de violences.
16:00Donc c'est un petit peu aussi, enfin c'est totalement
16:02le message du podcast, nous guérir, en fait.
16:04C'est toute cette vie d'après qui existe
16:08et qui est très belle.