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Depuis une jurisprudence de la Cour de cassation fin 2023, les preuves déloyales sont recevables sous conditions face à la justice prud’homale. Une révolution potentielle pour l’ensemble du monde du travail, expliquée par l’avocat en droit social Étienne Pujol.

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Transcription
00:00Jusqu'à un arrêt de décembre 2023, devant le Conseil des prud'hommes,
00:03seules les preuves obtenues loyalement pouvaient être produites en justice.
00:07Preuve loyale signifie une preuve dont l'interlocuteur sait qu'elle peut être produite en justice.
00:13Depuis cet arrêt, les preuves obtenues de manière déloyale
00:17peuvent également être produites devant le Conseil des prud'hommes
00:20ou la Cour d'appel dans les contentieux entre un employeur et son salarié.
00:23Les juges vont vérifier le principe de proportionnalité
00:27entre le fait que la preuve a été obtenue de manière déloyale
00:30et l'utilisation que l'on fait de cette preuve pour justifier le licenciement par exemple.
00:35En septembre dernier, la Cour de cassation a ainsi admis
00:38que l'on pouvait utiliser une clé USB qui appartenait à un salarié
00:42mais qui se trouvait sur son lieu de travail pour prouver la faute de cet salarié.
00:46On voit donc que le juge a considéré que cette preuve déloyale,
00:50cette clé ne lui appartenait pas, pouvait être produite
00:53parce que c'était la seule qui permettait de prouver la faute de ce salarié.
00:57En février 2024, la Cour de cassation a admis
01:01que l'on pouvait utiliser un enregistrement vidéo pris à l'insu d'une salariée
01:07pour prouver le fait qu'elle avait volé dans le stock de la pharmacie dont elle était salariée.
01:12Là aussi, le juge a estimé que cet enregistrement vidéo
01:16était le seul moyen que l'employeur avait de prouver le vol de sa salariée.
01:21Dans tous autres cas, cette preuve n'aurait pas été acceptée
01:23et jusqu'à cet arrêt de décembre 2023, elle n'aurait pas été non plus admise.
01:27Il y a bien entendu des contre-exemples.
01:29En octobre 2024, la Cour de cassation a refusé le licenciement d'un collaborateur,
01:34cadre dirigeant, qui avait tenu des propos graveleux avec deux collaborateurs
01:38mais en utilisant la messagerie professionnelle.
01:40La Cour de cassation a estimé qu'il s'agissait de propos tenus de manière privée,
01:44donc elle a refusé cette preuve comme source de licenciement de ce cadre dirigeant
01:49au nom de la liberté d'expression.
01:51D'une manière plus générale,
01:53la liberté d'expression est un principe fondamental dans les relations professionnelles.
01:56On ne peut pas sanctionner quelqu'un pour avoir tenu des propos
01:59sur son employeur ou sur ses collègues,
02:01sauf évidemment s'il s'agit de racisme ou de misogynie ou de harcèlement.
02:06Un animateur télé a vu son licenciement confirmé
02:09parce que les propos qu'il avait tenus étaient publics et portaient tort à son employeur.
02:14Cet arrêt de la Cour de cassation va bouleverser les relations sociales au sein de l'entreprise.
02:18Il faut faire très attention à ce que l'on dit et ce que l'on fait sur son lieu de travail.
02:27Juste un rappel, les collaborateurs aussi peuvent utiliser des preuves déloyales contre leur employeur.

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