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Mathieu Bock-Côté propose un décryptage de l’actualité des deux côtés de l’Atlantique dans #FaceABockCote

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00:00Dix-neuf heures sur CNews, merci d'être avec nous pour Face à Mathieu Bocoté. Mathieu, bonsoir.
00:04Bonsoir.
00:04Arthur Dematrigan, bonsoir.
00:05Bonsoir.
00:06J'ai hâte d'entendre vos éditos parce que dans un instant on va parler de JD Evans et je sais que vous avez deux visions diamétralement opposées de ce discours.
00:13J'ai hâte d'entendre ça, les téléspectateurs aussi. Mais avant cela, c'est le point sur l'information avec Isabelle Piboulot. Bonsoir Isabelle.
00:20Bonsoir Eliott, bonsoir à tous.
00:22Le Premier ministre maintient qu'il n'était pas au courant des faits dénoncés dans l'affaire du collège lycée de Bétarame.
00:28François Bayrou affirme avoir fait ce qu'il devait faire lorsqu'il était ministre de l'Education nationale.
00:33Il demande aujourd'hui des magistrats supplémentaires pour aller au bout des investigations.
00:37Le parc de Pau enquête sur plus d'une centaine de plaintes pour agressions physiques et sexuelles dans l'établissement.
00:43Selon le chef de la diplomatie polonaise, Emmanuel Macron a convié des dirigeants européens à une réunion lundi à Paris.
00:50À l'heure où les initiatives diplomatiques de Donald Trump sur l'Ukraine inquiètent, nous devons montrer notre force et notre unité.
00:57A déclaré sur X le Premier ministre polonais, la présidence française L évoque des discussions pour une possible rencontre informelle, sans pour autant confirmer de date.
01:07Enfin, escortés par des terroristes, Sacha Troupanhoff, Yair Horn et Sagi Dekelchen ont été libérés à Rannunes ce matin.
01:14Sixième échange depuis le début de la trêve dans la bande de Gaza.
01:18Après 498 jours de captivité, ils sont apparus en meilleure forme par rapport aux otages relâchés le week-end dernier.
01:26En contrepartie, 369 prisonniers palestiniens ont été libérés.
01:30Quatre d'entre eux ont été hospitalisés.
01:33Merci Isabelle pour le point sur l'information.
01:35À la une de face à Mathieu Bocoté, Jenny Vance, vice-président américain éparpille façon puzzle l'élite européiste.
01:42Son discours à Munich sur la liberté d'expression en recul sur notre continent a été vécu comme une bouffée d'oxygène pour les uns, une insulte pour les autres.
01:51Peut-on parler d'un discours historique ? L'analyse de Mathieu Bocoté et Arthur de Vatrigan dans un instant.
01:57À la une également, un sujet totalement sous-traité médiatiquement.
02:00Mais la préfecture d'Ile-de-France a lancé au début du mois un vaste plan de prévention pour lutter contre les mutilations sexuelles féminines.
02:07Comment expliquer qu'il faille prévenir, protéger, accompagner des femmes en France qui risquent l'excision ?
02:13Pourquoi un tel silence sur un sujet de santé publique ?
02:16Là aussi, nous en parlons dans cette émission.
02:18Enfin, vous recevez ce samedi soir Guillaume Perrault, journaliste au Figaro, auteur de ce livre absolument passionnant,
02:24Voyages dans l'histoire de France, quinze grands récits de Louis XIV à nos jours.
02:29Voilà le programme de face à Mathieu Bocoté.
02:33Mathieu Bocoté, on parle beaucoup depuis hier du discours de Jay Devance à Munich
02:38où le vice-président américain a analysé la crise de la démocratie européenne et vous y consacrerez votre première édito.
02:45Alors, ce qui est tout à fait fascinant, c'est qu'en l'espace de quelques semaines, on a deux grands discours venus du Nouveau Monde.
02:52Celui de Meleï qui l'a fait à Davos et maintenant celui de Jay Devance à Munich
02:57qui reviennent en fait, ce sont des Européens d'Amérique en quelque sorte,
03:02qui reviennent en Europe pour rappeler à l'Europe l'exigence de fidélité à sa propre tradition, à son propre héritage, son propre patrimoine.
03:11Alors, le contexte. C'est un discours dans le cadre d'une conférence de sécurité.
03:15Normalement, on devrait parler les Russes, les Chinois, et ainsi de suite.
03:19Et là, Jay Devance se dit, d'accord, on va aller au-delà de ces adversaires qui sont bien réels,
03:25mais on va parler d'une question fondamentale.
03:27Se pourrait-il que le pire ennemi de la liberté en Europe, ce soit cette idéologie européiste,
03:33cette idéologie multiculturaliste, cette idéologie antidémocratique,
03:38cette idéologie qui est poussée vers la censure, qui s'érote et qui est incarnée dans une caste,
03:44qui se méfie des peuples européens, qui cherchent à les faire taire,
03:49qui cherchent à les neutraliser, qui cherchent à les démanteler politiquement.
03:53Se pourrait-il que le plus grand péril, sans qu'on ose l'avouer, soit intérieur ?
03:57Alors rappelez-vous, il y a quelques semaines ici, je disais que nous sommes passés probablement à l'échelle de l'histoire
04:01du conflit des deux Allemagnes au conflit des deux Occidents.
04:05Et je disais, à certains égards, que l'Europe occidentale a la tentation de devenir une grosse RDA.
04:10Eh bien, de ce point de vue, on peut dire que Jelly Vance est venu aujourd'hui dire,
04:15comme en d'autres temps Reagan avait dit à propos du mur de Berlin,
04:18«tear down that wall», jeter ce mur par terre, il faut retrouver l'esprit de liberté en Europe.
04:24Et c'est ce qu'a dit Jelly Vance.
04:26Je précise qu'on peut être très critiques envers la présidence Trump, envers la politique américaine,
04:30tout en reconnaissant la valeur de ce discours.
04:33Alors, que nous.
04:35Puis je dirais, ce qui est intéressant dans cette séquence-là, c'est que Vance en a profité
04:39pour établir dès maintenant son envergure potentiellement présidentielle et internationale.
04:44Donc on voit que le Trumpisme survivra à Trump et ses extravagances.
04:48Ça aussi, c'est une chose qu'on doit noter.
04:50Alors, il nous dit que c'est un péril intérieur pour la liberté en Europe,
04:54la caste européiste, qu'il n'est pas loin de comparer.
04:57Et en fait, il le fait avec l'URSS d'hier.
05:00Ça nous laisse croire que l'Union européenne est une forme de RSS.
05:04Il donne quelques exemples.
05:06Il parle de l'annulation récente des élections en Roumanie.
05:09On en a parlé ici.
05:11Il dit «si, dans un pays, vous vous permettez d'annuler le résultat des élections parce que ça ne vous plaît pas,
05:16prétextant je ne sais quelle tentative d'influence russe,
05:19vous croyez qu'une petite campagne russe sur TikTok est capable de dérégler tout un système politique,
05:24de conduire tout un peuple à se donner à une dictateur, vous pensez ça? »
05:28Il dit «vous ne faites pas confiance à la démocratie, vous ne faites pas confiance à vos peuples».
05:31Il s'inquiète aussi parce qu'il fait référence à la déclaration de Thierry Breton.
05:35Thierry Breton qui a dit «ce qu'on a fait en Roumanie, on va le faire en Allemagne».
05:39Puis ensuite, Thierry Breton nous a dit qu'il ne parlait pas de l'annulation des élections.
05:43Je veux bien le croire, mais je n'ai jamais compris alors ce qu'il voulait dire.
05:46Donc là, la prochaine étape, c'est les élections dans quelques jours en Allemagne,
05:49si l'AFD avait un score plus important qu'on ne le croit.
05:52L'AFD qui a légitimé, par ailleurs, Gilli Vance après Mosque.
05:56C'est-à-dire qu'il dit que manifestement, il ne considère pas que c'est un parti
05:59qui doit être à l'extérieur du périmètre démocratique.
06:01Mais si l'AFD l'emporte, est-ce qu'il va falloir annuler cette élection-là?
06:04C'est intéressant.
06:05D'ailleurs, il s'oppose au «fire wall», autrement dit, traduisons, au cordon sanitaire en démocratie.
06:11Il dit qu'il n'y a pas des partis qui sont à l'extérieur du jeu démocratique.
06:14Et si vous n'êtes pas capable d'entendre vos peuples, votre fonction, ce n'est pas de les rééduquer,
06:18votre fonction, c'est de les comprendre, de chercher à comprendre ce qu'ils vous disent
06:21en votant pour des partis sur lesquels vous jetez l'anathème.
06:25Il s'est aussi opposé au rigueur.
06:28La logique de censure qui se diffuse en Europe aujourd'hui, en Europe occidentale,
06:33qui est assez triste en fait.
06:35On en parle souvent ici, encore une fois, sur la liberté d'expression,
06:39donc les discours haineux, les fameux discours haineux.
06:41Au nom de la lutte contre les discours haineux,
06:44on ne cesse de restreindre le périmètre de la liberté d'expression.
06:48Au nom de la lutte contre la désinformation ou la mésinformation,
06:52en Europe aussi on voit ça aujourd'hui,
06:54eh bien on constate qu'il y a une volonté de faire taire les discours
06:57qui remettent en question le narratif dominant.
06:59Et Vence dit que ça, c'est scandaleux, c'est pas fidèle à la véritable tradition européenne.
07:03Il s'oppose à la régulation fanatique des réseaux sociaux
07:06et au bannissement, je l'ai dit, des partis dits populistes.
07:09Et là il nous cite Jean-Paul II, qui dit « n'ayez pas peur »,
07:13et ça il dit ça aux élites européennes, n'ayez pas peur de vos peuples,
07:16cessez d'avoir peur de vos peuples,
07:18et vos peuples d'ailleurs crient, il y a un cri de détresse qu'on entend aujourd'hui.
07:22Ce qui est très drôle, c'est la réaction des élites européistes.
07:25Alors j'avais l'impression d'être devant, plusieurs,
07:28mais j'avais l'impression d'être devant une caste de paratiques soviétiques
07:32en 88 ou encore en Allemagne de l'Est, qui disent
07:36mais le socialisme a un très grand avenir,
07:38mais comment osiez-vous douter des vérités révélées du marxiste-léninisme?
07:41Et là, mais là c'était la version, c'est au nom de la démocratie
07:45que nous nous opposons à ce qu'on puisse nous tenir au tel discours.
07:48La démocratie exige de lutter contre le discours de M. Vence.
07:51Est-ce qu'on se rend compte à quel point on est dans une forme d'inversion généralisée du sens des mots?
07:55Vence plaide pour le pluralisme politique.
07:58Le pluralisme démocratique dit c'est pas parce que vous n'aimez pas un discours
08:01que vous devez le censurer, et on dit c'est inacceptable.
08:04C'est merveilleux quand même.
08:06Donc une forme, il y avait dans le public, on l'a vu au début des applaudissements polis,
08:10ensuite très peu d'applaudissements, ils avaient tous en fait une face d'enterrement.
08:14Au Québec on appelle ça une face de carême.
08:16Ils avaient tous une face de carême, ils étaient effondrés de douleur
08:20en entendant un discours qu'ils ne pouvaient pas tolérer.
08:22Et qu'est-ce qu'on voit, et c'est la tendance qu'on va voir dans les années à venir je crois,
08:26à moins de voir si ça va basculer,
08:29l'élite européiste se replie sur certains dogmes.
08:33L'écologisme radical, le socialisme, le fiscalisme, le mondialisme, le droit de l'homisme.
08:39Une caste s'enferme en elle-même.
08:41Elle a tellement peur de perdre ses privilèges.
08:43Elle n'est tellement pas capable de remettre en question le système idéologique
08:46dans lequel elle a été élevée, dans lequel elle a été socialisée,
08:49qu'elle se dit tout ce qui est extérieur à cela est inacceptable.
08:53Tout ce qui est extérieur à cela, c'est de la désinformation.
08:56Et voilà pourquoi elle a maudit JD Vance.
08:59JD Vance s'est aussi prononcé, Mathieu, sur la question de l'immigration.
09:02Ses propos à ce sujet ont aussi fait grand bruit.
09:05Oui, parce que JD Vance a dit, globalement, un continent qui change de population
09:10en l'espace d'une ou deux ou trois générations,
09:12est-ce que c'est encore le même continent, globalement?
09:14Il dit, et là c'est important, il dit,
09:16est-ce que les peuples n'ont jamais été consultés devant cette immigration massive?
09:20Les peuples européens n'ont jamais été consultés.
09:23C'est fondamental, ça.
09:25Le dire directement à ces élites qui sont sur le mode de la fierté démocratique,
09:29revendiquer nos démocraties, nos valeurs démocratiques.
09:32Il dit, vous ne les avez jamais consultés.
09:34Vous changez fondamentalement la composition de la civilisation européenne
09:38et vous ne pensez même pas que les peuples méritent d'être consultés.
09:41Il va plus loin en plus, il dit,
09:43ce n'est pas simplement une histoire naturelle d'immigration.
09:46Il dit, il y a eu des décisions politiques qui ont rendu possible ça.
09:48Je ne sais quel plan ou complot, mais il dit,
09:50il y a des décisions politiques qui ont rendu possible ça.
09:52Puis là, je pousse plus loin de mon côté.
09:54Je dis, effectivement, il y a la technocratie mondialiste, européiste,
09:57qui a cru à la fiction du vivre ensemble,
10:00vivre ensemble qui ne tenait pas compte de la diversité réelle des cultures
10:03et que certaines cultures, lorsqu'elles sont mises ensemble, s'entrechoquent.
10:06On pensait qu'il y avait une humanité strictement technocratique et juridique.
10:10L'oligarchie néolibérale qui, elle, s'est dit,
10:13on va faire venir des populations comme ça,
10:15ça va permettre de faire baisser le coût du travail,
10:17une pression sur le travail.
10:19Résultat des courses, on se retrouve avec des sociétés
10:21qui sont de plus en plus désarticulées.
10:23La gauche radicale qui est dans une logique d'expiation aussi,
10:26parce qu'on a colonisé le monde, on doit accepter que le monde nous colonise.
10:29La contre-colonisation rédemptrice et expiatrice.
10:32Alors qu'est-ce que nous dit Vance, en fait?
10:34Que le processus politique, en Europe,
10:36s'est dissocié du concept de souveraineté populaire.
10:39Le processus politique s'est autonomisé du peuple
10:42et le peuple s'est retrouvé dans l'opposition.
10:44Et depuis 40 ans, on pourrait dire que le système politique
10:47s'est construit sur la volonté de mater l'insurrection des peuples.
10:51Donc, je l'ai dit, diabolisation des populistes et des identitaires,
10:54loi pour criminaliser, le simple constat de l'échec de leur modèle.
10:58Plus leur modèle échoue, plus ils veulent nous interdire de le dire.
11:01Ce qu'on nomme l'état de droit qui sert dans les faits
11:04à étouffer la démocratie, à perdre toute substance.
11:06Et aujourd'hui, la volonté de mater les réseaux sociaux et de les écraser.
11:09Pourquoi? Parce que c'est sur les réseaux sociaux
11:11que s'est exprimée la révolte du peuple,
11:13parce qu'il a trouvé là un espace pour s'exprimer
11:15à l'extérieur du système médiatique régulé,
11:18où on se permet de temps en temps de fermer des chaînes télé
11:20parce qu'on craint qu'ils ne se disent pas des bonnes choses.
11:22Alors, il a parlé de beaucoup de pays en Europe,
11:24mais il n'a pas parlé de la France.
11:26En quoi cela devrait-il interpeller particulièrement la France?
11:28Vous avez noté, on parle un peu en ce moment de la question du référendum.
11:31C'est intéressant la question du référendum.
11:32Et qu'est-ce qu'on nous dit en France?
11:34Que bien des référendums sont possibles,
11:36sur la couleur des bicyclettes probablement,
11:38sur la fin de vie, sur les saveurs de crème glacée,
11:41mais pas sur l'immigration.
11:44La question fondamentale, la plus fondamentale qui soit,
11:46on nous explique que ce n'est pas possible
11:48de consulter le peuple sur cette question-là.
11:50Donc, on consultera le peuple de manière artificielle,
11:52à la manière d'un grand sondage,
11:54mais on ne consultera pas le peuple sur la question fondamentale
11:57qui l'habite la question existentielle, s'il en est une.
12:00C'est assez intéressant quand même.
12:02On pourrait se dire que l'esprit démocratique,
12:04c'est consulter le peuple sur des questions qui semblent importantes.
12:06On a parlé du Conseil constitutionnel cette semaine.
12:08La volonté de verrouiller l'usage du référendum,
12:11pour le détacher complètement de ses questions,
12:13c'est quand même l'héritage des dernières années,
12:15l'héritage des années fabuleuses.
12:17En France, ou plus largement en Europe,
12:18la multiplication des délits d'opinion.
12:20On dit que ce n'est pas une opinion, c'est un délit.
12:22Mais tout rentre dans le délit aujourd'hui.
12:24C'est fascinant.
12:26Officiellement, c'est pour lutter contre les propos haineux, les vrais.
12:28Dans les faits, parce qu'on fait un constat statistique
12:30sur l'échec du vivre ensemble,
12:32on peut se retrouver devant les tribunaux.
12:34La logique du Front républicain en politique,
12:36on va faire la fédération de tous les ratés du système
12:38qui vont se rassembler ensemble pour bloquer le peuple
12:40qui s'oppose justement à la société qui s'effondre sous nos yeux.
12:45Alors, je dirais qu'il y a eu un moment identitaire en Europe depuis longtemps.
12:48Il est encore là.
12:49Il y a eu un moment « libertarien », j'entends par là.
12:52Une volonté de secouer les structures bureaucratiques,
12:54de secouer la censure.
12:56Et j'y reviens, ça sera ma dernière phrase.
12:58L'Amérique vient rappeler de ce point de vue...
13:01Moi, j'étais de ceux qui étaient assez désespérés les États-Unis
13:03ces dernières années.
13:04Mais là, qu'est-ce que je vois?
13:05Une Amérique vient rappeler à l'Europe sa tradition de liberté.
13:09Et je dirais aussi son ancrage dans la civilisation chrétienne.
13:12Sa tradition de liberté, tout comme l'Europe de l'Est
13:14a rappelé ces dernières années à l'Europe occidentale
13:17qu'elle n'était pas que structure et processus,
13:19qu'elle était aussi une identité.
13:21Comme quoi l'Europe occidentale pourrait peut-être regarder
13:23le monde qu'elle a créé il y a quelques siècles.
13:25Peut-être pourrait-il l'inspirer.
13:27Je vous invite, du moins les téléspectateurs,
13:29à lire un livre prémonitoire.
13:31Il s'appelle « Le totalitarisme sans le goulag ».
13:34Vous avez parlé de la caste politique,
13:36mais la caste médiatique, par exemple,
13:37qui va décrypter le discours de J.D. Evans,
13:40que sais-je, lundi sur France Inter.
13:43Un petit billet n'entendra pas ce que vous avez dit, par exemple.
13:47Je pense que vous avez tout à fait raison, hélas.
13:49Arthur de Wattringer.
13:51Juste un mot sur les référendums.
13:53Mathieu a raison sur la bicyclette, les crèmes glacées.
13:55En revanche, sur la fin de vie, je pense que c'est aussi important,
13:58voire plus que sur l'immigration, parce que
14:00c'est une révolution anthropologique, de mon point de vue,
14:03assez monstrueuse, mais c'est un vrai sujet.
14:06Revenons sur le discours de J.D. Evans.
14:08Vous le savez, je suis avec un grand intérêt
14:10la carrière de J.D. Evans.
14:11J'ai une grande admiration pour les intellectuels
14:13et le courant qui l'accompagne,
14:15qui est le courant post-libéral, dont on a parlé plusieurs fois ici.
14:18J'attendais, évidemment, avec une grande impatience,
14:22son premier discours sur le sol européen.
14:24Évidemment, beaucoup l'ont découvert hier.
14:27Il faut l'avouer que pour une grande partie des élites
14:29européennes et françaises, ce fut une gueule de bois carabinée
14:32dès la minute qui suivait la fin de son discours.
14:34Et pour d'autres, vous l'avez dit, un grand enthousiasme,
14:36même un sentiment de libération.
14:38Il a abordé plusieurs sujets,
14:40mais tout son discours s'articulait autour
14:42de la trahison des élites.
14:43C'est quelque chose qu'il connaît parfaitement bien
14:45parce qu'il est devenu par la force des choses,
14:47aux Etats-Unis, la voix de l'Amérique du Midwest,
14:50les « highbillies », c'est-à-dire les péquenots
14:52et les ploucs des Appalaches, qui ont été dévastés
14:55par l'industrialisation.
14:57Et puis, l'abandon des élites.
14:59Il sait de quoi il parle.
15:00Ensuite, sur la guerre en Ukraine,
15:01qui a été aussi un de ses sujets,
15:03il s'est positionné très tôt pour le retrait américain
15:05parce qu'encore une fois, lui, en tant que Marines,
15:07engagé dans les Marines en Irak,
15:09a vécu dans sa chaire les échecs et les sacrifices.
15:12Alors, sur le fond, je partage évidemment
15:14beaucoup de choses de son discours,
15:16et que Mathieu a rappelé.
15:17On l'a dit mille et une fois ici.
15:19Alors, évidemment, quand c'est un vice-président américain,
15:21l'écho et les conséquences sont bien plus importantes,
15:23ce qui est assez amusant.
15:25Mais non, moi, je ne partage pas complètement
15:27l'enthousiasme de Mathieu, et ce qui m'ennuie.
15:29Et ça m'ennuie d'autant plus quand je vois
15:30des réactions de certaines personnes,
15:31comme Jacques Attali, qui est à deux doigts
15:32de comparer J.D. Evans au nazisme,
15:34si vous avez vu ses tweets il n'y a pas longtemps,
15:36en expliquant qu'il est venu à Munich,
15:38alors qu'avant, les autres venaient libérer du nazisme.
15:40Et lui, il a parlé aux ancêtres,
15:42aux héritiers de Munich en 1940.
15:44Vous voyez l'image.
15:46Quand je vois les réactions de Mme Loiseau,
15:48de M. Barrault, ça m'ennuie de ne pas partager
15:50l'enthousiasme de Mathieu.
15:52Néanmoins, il y a une raison assez simple,
15:54c'est que s'il s'était présenté à une élection
15:56en Europe, je n'aurais pas eu du tout
15:58la même approche.
16:00Or, il vient en tant que vice-président américain.
16:02Il ne faut jamais oublier, un Américain
16:04qui soit de gauche ou de droite, c'est toujours
16:06América first. Moi, si vous n'avez pas échappé,
16:08je ne suis pas américain, je suis français.
16:10Ensuite, je suis européen. J'aimerais bien qu'on s'inspire de ça,
16:12c'est-à-dire la France d'abord.
16:14Si on entre dans le détail, sur la guerre en Ukraine,
16:16il dit, la menace qui m'inquiète le plus vis-à-vis
16:18de l'Europe, ce n'est pas la Russie, ce n'est pas la Chine,
16:20ce n'est pas un acteur extérieur. Ce qui m'inquiète le plus,
16:22c'est la menace intérieure. Sous-entendu,
16:24les élites qui trahissent.
16:26Moi, je ne mets pas sur le même plan
16:28Mme Vandalayen et M. Poutine, si vous voulez.
16:30Cette dernière n'est puissante et menaçante
16:32que par la grâce de la collaboration
16:34et de la soumission de nos politiques
16:36qu'on a élues.
16:38Poutine, ce n'est quand même pas tout à fait la même chose
16:40et je parle en tant que français, imaginez ce que doit penser
16:42un Polonais qui n'est pas très loin.
16:44Ensuite, sur les élections, à l'entendre quand même,
16:46on a l'impression ou le sentiment qu'il y a un grand nombre
16:48d'élections en démocratie qui seraient truquées.
16:50Je le cite, il dit, nous sommes au point où la situation
16:52est devenue si critique qu'en décembre dernier,
16:54la Roumanie a carrément annulé les résultats
16:56d'une élection présidentielle.
16:58Il me semble que si la Roumanie a annulé une élection présidentielle,
17:00c'est leur conseil à eux qui ont annulé
17:02et pas une intervention extérieure.
17:04Mais quand on regarde le Brexit, les Pays-Bas,
17:06l'Allemagne, l'Italie,
17:08il ne faut pas dire que les élections soient
17:10truquées, bien au contraire. Donc, quand on a lu
17:12les discours et les écrits de J.D. Evans,
17:14on peut être un peu déçu de
17:16venir de quelqu'un d'aussi brillant, d'aussi fin,
17:18d'aussi cultivé, de verser un peu
17:20dans cette démagogie. Quand on verse là-dedans,
17:22il faut toujours un peu se méfier. Ensuite, pour ceux qui
17:24en doutaient, l'Amérique compte bien redevenir
17:26le gendarme du monde. Encore une fois, une citation.
17:28Il est important dans le cas d'une alliance commune
17:30que les Européens prennent le relais pendant
17:32que l'Amérique se concentre sur les régions du monde
17:34qui sont en grand danger. Traduction,
17:36une fois qu'on aura réglé le problème
17:38avec Poutine sur vos dos, vous allez régler votre petit
17:40problème de syndic et puis nous on va s'occuper de sauver
17:42le monde comme avant. Merci l'oncle Sam.
17:44On a déjà vu comment c'était passé avant et les conséquences
17:46qu'on avait eues directement chez nous.
17:48Après, il y a 2-3 trucs qu'il a dit qui sont intéressantes,
17:50c'est reprenez votre liberté, ça passe par le
17:52réarmement de l'Europe. Très bien, on est d'accord.
17:54L'Europe veut investir dans sa défense, ils l'ont dit
17:56depuis que Trump a annoncé qu'il allait se désengager
17:58en Ukraine et puis même se désengager
18:00un peu sur le terrain
18:02proche de l'Europe. C'est plutôt une bonne nouvelle.
18:04Ce qu'il faut savoir comme 2-3 choses,
18:06par exemple que de nombreux systèmes
18:08d'armes européennes intègrent des composants
18:10américains. Pour la faire vite, c'est-à-dire que les Américains
18:12peuvent bloquer l'emploi d'armes
18:14qu'utilisent les armées européennes.
18:16La France plaide depuis un certain temps
18:18pour qu'on sorte de ça, qu'on ait une souveraineté
18:20ce qui permettrait de développer en plus une industrie.
18:22Les Allemands ne veulent pas.
18:24D'abord les Américains ne veulent pas. On a réussi à négocier
18:26puis au moment où ça a avancé,
18:28comme d'habitude les Allemands nous ont fait
18:30un enfant dans le dos en négociant avec les Américains
18:32pour pas que ça se fasse.
18:34Souveraineté c'est très bien, liberté c'est très bien
18:36mais il faudra peut-être qu'ils arrêtent de se mêler un peu trop
18:38de ce qui se passe chez nous aussi. Alors encore une fois,
18:40je partage beaucoup de constats sur l'immigration
18:42évidemment, sur la trahison des élites évidemment,
18:44sur la liberté d'expression évidemment
18:46et c'est peut-être ma fierté française et mon
18:48orgueillasson qui me fait rappeler cette maxime.
18:50Moi, le linge sale,
18:52je le lave toujours en famille.
18:54Autre sujet à présent, et on en a
18:56peu parlé ces jours-ci, mais un plan pour lutter
18:58contre l'excision en Ile-de-France
19:00a été lancé la semaine dernière,
19:02Mathieu Bocoté, et vous tenez à revenir sur ce sujet.
19:04Alors je tiens à vous en parler
19:06pour vous parler de la manière dont on nous en a parlé
19:08lorsqu'on nous en a parlé.
19:10Alors, j'ai vu, j'ai le discours gouvernemental,
19:12j'ai vu sur certaines chaînes info,
19:14pas la nôtre, heureusement là-dessus,
19:16on nous a parlé
19:18du problème de l'excision en Ile-de-France
19:20et qu'il était nécessaire
19:22de mettre en place un plan
19:24pour lutter contre l'excision qui prendrait
19:26de plus en plus de place en Ile-de-France,
19:28de plus en plus de jeunes filles seraient menacées
19:30d'excision, et il est nécessaire
19:32de mobiliser de véritables moyens.
19:34Et je ne dis pas le contraire, l'excision est
19:36un signe d'une barbarité atroce,
19:38effrayant, c'est diabolique, on se demande
19:40comment l'être humain peut en arriver là.
19:42Mais il y a une absence totale
19:44de mention des origines de la question
19:46de l'excision en Ile-de-France. Si je peux me permettre,
19:48normalement, regardons le peuple français, on pourrait se dire
19:50aujourd'hui, bon, oui, il y a des questions,
19:52des problèmes de santé pour tout le monde,
19:54on pourrait avoir des plans pour l'obésité,
19:56des plans pour le manque de sport, faites la liste.
19:58Mais l'excision, pourquoi?
20:00Et là, il y a une absence totale
20:02de mention dans le récit médiatique,
20:04mais aussi dans le discours politique de,
20:06ce qu'on pourrait appeler, l'importation de la question
20:08de l'excision en Ile-de-France, et plus largement
20:10en France, qu'est-ce que c'est?
20:12C'est-à-dire qu'on ne veut pas mentionner
20:14l'africanisation démographique et culturelle
20:16d'une partie de l'Ile-de-France aujourd'hui.
20:18C'est directement lié.
20:20L'excision n'est pas une coutume française.
20:22Je sais que la semaine dernière,
20:24une intellectuelle,
20:26une professeure de droit des migrations
20:28disait que, c'était sur le service public,
20:30évidemment, qu'il fallait que
20:32la population française s'intègre
20:34aux immigrés, pour m'envoyer le signal
20:36d'une ouverture à la diversité.
20:38Je ne sais pas si elle veut qu'on pratique l'excision,
20:40je ne sais pas, mais dans ce cas-là,
20:42elle m'expliquera comment faire les tris des coutumes
20:44qu'on doit adopter ou non pour montrer
20:46qu'on est vraiment ouvert. Mais ce qui est certain,
20:48c'est que la seule mention qui est faite
20:50de l'immigration, on parle des primo-arrivants.
20:52C'est la seule mention qui est faite
20:54dans le discours gouvernemental.
20:56La censure du réel m'exaspère.
20:58On ne parle pas de sa source,
21:00de ses origines, et au final,
21:02on ne parle pas vraiment de ce problème
21:04parce qu'on s'interdit de remettre en question
21:06le dogme qui veut que la diversité
21:08de l'information est celle entourant
21:10les circonstances de la mort du jeune Elias, Mathieu.
21:12Ah oui, parce qu'on nous a d'abord dit
21:14qu'il était mort d'un coup de couteau,
21:16ou deux, ou trois, mais des coups de couteau.
21:18Et un jour, on a appris, notamment par la lettre
21:20des parents, que ce n'était pas un coup de couteau,
21:22finalement, c'est de la machette. C'est autre chose.
21:24Encore une fois, la machette n'est pas
21:26une tradition française. La machette,
21:28comme on nous dit, tout le monde transportait
21:30en son temps une opinelle dans ses poches.
21:32Oui, oui, mais on ne transportait pas
21:34une machette, ça, je vous rassure.
21:36Le public s'adapte. Parce que ça a dû aller
21:38à l'origine des policiers aussi, si je ne me trompe pas.
21:40Donc, on nous envoie un mensonge, un mensonge par omission,
21:42enfin, un mensonge par déformation.
21:44Ce n'est pas une machette, c'est un petit couteau.
21:46Alors finalement, c'est une machette, mais là, quand on l'apprend,
21:48quand on le sait, même l'AFP,
21:50l'Agence française de propagande,
21:52décide de ne pas relayer l'information,
21:54si je ne me trompe pas. On nous dit,
21:56ben non, on ne corrige pas,
21:58on ne dit pas que c'est une machette. Donc, qu'est-ce qu'on veut, encore une fois,
22:00oblitérer, c'est la question
22:02de l'origine, c'est la question de l'immigration,
22:04c'est ce changement de mœurs,
22:06ce changement de mentalité, ce changement
22:08de pratique sociale qui fait qu'aujourd'hui,
22:10on peut effectivement mourir d'un coup de machette
22:12à Paris. Alors, pendant tout cela,
22:14on va nous dire, ce qui est fascinant,
22:16je terminerai là-dessus, on dit non,
22:18la France ne change pas de culture, ne change pas d'identité,
22:20ne change pas de population. De quoi parlez-vous?
22:22La proportion d'étrangers en France demeure la même
22:24au fil des décennies, au fil d'un siècle,
22:26alors qu'on sait très bien que dans les faits,
22:28nous importons des coutumes nouvelles.
22:30Je ne suis pas certain que ces coutumes soient enthousiasmantes.
22:32Arthur Delvatrig,
22:34dans quel regard portez-vous sur ces actualités
22:36où finalement, les mots n'ont aucun sens
22:38mais parfois certains sont mis sous le tapis.
22:40Pourquoi?
22:42Excision, machette, assassinat
22:44pour un sens de l'honneur préhistorique, il n'y a pas à dire,
22:46la France est en pleine évolution et en plein progrès.
22:48Mais alors, j'ai vu ce plan d'excision,
22:50il est en Ile-de-France. Rappelez-moi
22:52qui est la présidente de l'Ile-de-France, déjà.
22:54Je crois que c'est Madame Pécresse.
22:56Madame Pécresse qui signait en 2010
22:58un appel à une république multiculturelle
23:00aux côtés d'indigénistes.
23:02Madame Pécresse qui, en 2015,
23:04disait qu'il fallait combattre
23:06ce fléau de l'islamophobie
23:08ou Madame Pécresse qui, en 2022,
23:10expliquait que le grand remplacement est une théorie
23:12de la haine et de la peur et qu'elle le combattait.
23:14Bon ben voilà, il n'y a pas que les mots qu'on cache,
23:16il y a aussi des mots et des déclarations politiques.
23:18On va voyager, après la publicité,
23:20voyager dans l'histoire de France
23:22avec Guillaume Perrault, journaliste au Figaro
23:24et auteur de Donc Voyage dans l'Histoire de France.
23:26C'est dans un instant sur CNews.
23:28A tout de suite.
23:32Quasiment 19h30 sur CNews,
23:34la suite de Face à Mathieu Boccotté.
23:36Bonsoir, Guillaume Perrault.
23:38Je rappelle que vous êtes journaliste au Figaro
23:40et vous êtes auteur de
23:42Voyage dans l'Histoire de France.
23:44Mathieu Boccotté, pourquoi avoir
23:46invité ce soir Guillaume Perrault ?
23:48Parce qu'on oublie
23:50quelques fois que le passé peut servir
23:52véritablement à éclairer le présent,
23:54à donner une décision politique au temps présent.
23:56Depuis quelques années, on se dit
23:58que le passé n'est aucune leçon.
24:00C'est faux. Si on se tourne vers l'Histoire de France,
24:02on peut éclairer, dévoiler notre présent
24:04autrement des angles morts.
24:06Ce livre permet de s'y plonger
24:08de très belle manière à travers 15 histoires,
24:1015 récits qui permettent de
24:12découvrir autrement
24:14l'histoire de ce pays.
24:16Guillaume Perrault, bonsoir.
24:18Vous commencez votre livre
24:20en rappelant votre rapport à l'Histoire de France
24:22quand vous étiez tout jeune.
24:24On a l'impression qu'aujourd'hui,
24:26quand un jeune homme ou une jeune femme
24:28s'intéresse à l'Histoire de France,
24:30c'est la colonisation et ses crimes,
24:32l'histoire réduite à une série de pages noires
24:34absolument insoutenables.
24:36Or, vous nous présentez un temps
24:38que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître
24:40où l'Histoire de France apparaissait
24:42jusqu'à la manière d'un grand récit
24:44auquel on pouvait s'attacher
24:46et qui créait l'attachement à la nation.
24:48Absolument. Je suis né en 1972.
24:50Dans une petite école de quartier,
24:52rue Titon, j'ai eu des institutrices
24:54en fin de carrière qui restaient
24:56indifférentes, même plutôt hostiles
24:58aux polémiques qui, déjà,
25:00à l'époque, affectaient l'enseignement
25:02de l'Histoire. Elles restaient fidèles
25:04à la tradition du Malais et Isaac,
25:06qui était le manuel canonique
25:08d'histoire qu'elles avaient eu
25:10dans leur propre jeunesse.
25:12Alors, qu'est-ce que ça veut dire ?
25:14Ça veut dire que moi, quand j'étais en CM1,
25:16il y avait des frises chronologiques sur les murs.
25:18On se repérait dans
25:202000 ans d'Histoire.
25:22C'était la succession des règnes
25:24puis des régimes, avec les batailles
25:26et les traités,
25:28qui étaient la toile de fond
25:30des leçons, parce que c'était
25:32de véritables leçons. Et en CM1,
25:34c'est un exemple
25:36qui vous touchera, cher Mathieu, puisqu'il concerne
25:38le Québec. Je me souviens très bien
25:40d'une leçon très marquante où il y avait une lithographie.
25:42On voyait un général sur son lit de mort
25:44et c'était l'explication,
25:46l'illustration d'une défaite française
25:48devant Québec en 1759.
25:50C'est la France de Louis XV qui venait
25:52d'être vaincue par les Anglais. C'était la chute
25:54de la Nouvelle-France. J'avais 10 ans.
25:56J'avais 10 ans. Combien
25:58d'élèves entrent en 6e aujourd'hui
26:00en connaissant,
26:02en sachant ce qu'est la guerre de 7 ans ?
26:041754-1755,
26:061763. Moi, je l'ai appris
26:08à 10 ans. C'était au début des années 80.
26:10Ce n'est pas si vieux.
26:12C'est un petit peu vieux, mais quand même pas.
26:14Et ce que je veux dire,
26:16c'est que toutes ces modes
26:18de repentance, de simplification,
26:20d'anachronisme, de regard justicier
26:22sur le passé,
26:24elles étaient sans doute présentes dans
26:26l'espace public, mais elles n'affectaient
26:28pas du tout le fonctionnement
26:30quotidien de l'école
26:32encore. Et quand j'ai passé le bac
26:34en 90,
26:36ça n'était pas encore le cas.
26:38J'ai eu un enseignement secondaire de l'histoire
26:40tout à fait traditionnel et
26:42normal, qui ne portait aucune trace
26:44des modes actuels.
26:46Un dernier détail auquel
26:48je tiens, on dit parfois
26:50que l'esclavage
26:52et d'autres pages sombres de notre passé
26:54auraient été occultées, ou en tout cas
26:56édulcorées, minorées, jusqu'à une période récente.
26:58Je peux affirmer
27:00ici, solennellement, que c'est faux.
27:02En CM1,
27:04j'ai eu une leçon sur l'esclavage
27:06et la traite transatlantique.
27:08Et c'était très impressionnant
27:10parce qu'il y avait une lithographie qui était un extrait
27:12du Candide de Voltaire.
27:14On voyait un malheureux esclave
27:16qui disait à Candide
27:18« C'est à ce prix que vous mangez du sucre
27:20en Europe. »
27:22J'avais 10 ans, ça m'a marqué.
27:24Et donc je suis stupéfait de voir
27:26la simplification,
27:28plus qu'une simplification,
27:30le regard faux porté sur notre passé
27:32qui voudrait, qui fait croire
27:34à une partie de la jeunesse, qu'on aurait
27:36occulté des pages sombres du passé.
27:38Je peux affirmer que ce n'est pas vrai
27:40et qu'on l'enseignait
27:42dès l'école primaire
27:44de façon équilibrée.
27:46Alors aujourd'hui, vous étiez un jeune homme,
27:48aujourd'hui vous êtes responsable des pages d'histoire
27:50dans le Figaro quotidien
27:52et vous avez comme souci d'éclairer
27:54l'actualité à la lumière de l'histoire.
27:56Et ça j'ai l'impression que c'est la part manquante
27:58même de l'analyse politique aujourd'hui.
28:00Donc on veut éclairer l'actualité avec les chiffres de l'économie,
28:02avec je ne sais quelle théorie sociologique,
28:04mais raconter ce qui nous a conduit
28:06au présent, les angles morts de ce présent
28:08souvent. J'ai l'impression que c'est le
28:10passage par l'histoire pour penser la politique
28:12nous échappe un peu aujourd'hui.
28:14Est-ce que vous partagez ce constat ?
28:16Oui tout à fait, je m'efforce toujours en effet d'éclairer
28:18l'actualité par la longue durée
28:20en me gardant
28:22du risque
28:24auquel l'exercice
28:26expose, c'est-à-dire l'anachronisme.
28:28Parce que c'est vrai qu'on peut faire des comparaisons
28:30abusives, on peut faire
28:32des analogies qui soient
28:34simplificatrices.
28:36Donc il y a cet écueil qu'il faut éviter.
28:38Mais il y a certaines comparaisons
28:40qui sont justifiées.
28:42On peut les faire de façon raisonnable
28:44et c'est même nécessaire parce qu'on
28:46a le nez collé sur le présent.
28:48C'était moins le cas
28:50il y a 30 ou 40 ans parce que
28:52on avait encore un sentiment de continuité
28:54entre le présent,
28:56le passé et le présent. Le passé était
28:58censé donner les
29:00clés du présent et de l'avenir.
29:02Et désormais on vit dans un régime
29:04du pur présent. On n'a plus du tout
29:06le même rapport au passé. Il s'est vraiment détaché
29:08de nous de façon brutale. Je l'ai vécu.
29:10Je l'ai ressenti. J'avais l'impression
29:12quand j'avais 10 ans
29:14qu'il y avait encore des traces d'un passé
29:16ancien que je pensais
29:18toujours nous accompagner. Je pensais
29:20qu'il était là de façon permanente.
29:22C'était naïf. Je me trompais.
29:24Et donc il est d'autant plus, aujourd'hui
29:26que ce passé est vraiment révolu et
29:28qu'on a du mal à le comprendre, il est d'autant plus nécessaire
29:30en effet, je m'y efforce, d'éclairer
29:32l'actualité par l'histoire.
29:34Je donne deux exemples de politique.
29:36De Gaulle, vous avez mentionné
29:38le Québec, je me permets de le faire un instant.
29:40De Gaulle avec son Vive le Québec libre
29:42dit en 1967 j'ai payé
29:44la dette de Louis XV. Autrement dit,
29:46une action au temps présent
29:48a un sens à l'échelle
29:50des siècles. Je corrige
29:52une histoire qu'il y a deux siècles
29:54la France n'était pas à la hauteur disait-il.
29:56Mitterrand dit à propos de l'Europe je suis
29:58le dernier grand président français, le dernier héritier
30:00des rois de France, ensuite il n'y aura que des comptables.
30:02Est-ce que des figures politiques
30:04qui se situaient dans l'histoire, la classe politique
30:06actuelle, est-ce que vous avez l'impression
30:08qu'elle pense historiquement ?
30:10Est-ce qu'elle a cette conscience historique lorsqu'elle agit ?
30:12À l'évidence non.
30:14Il est certain
30:16qu'il n'y a plus aujourd'hui cette
30:18conscience. D'abord ils n'ont pas été reliés
30:20à de grands événements historiques et de
30:22grandes tragédies du XXe siècle. C'est pas leur faute.
30:24Il y a une succession des générations, le temps a passé.
30:26Mais quand j'ai commencé à m'intéresser
30:28à la vie politique française, on avait quand même des gens
30:30qui avaient fait encore la Deuxième Guerre mondiale
30:32ou qui avaient fait la guerre d'Algérie, qui l'avaient
30:34vécu ou qui avaient été des collaborateurs
30:36du général de Gaulle ou de Pompidou.
30:38Donc eux-mêmes, ça les anoblissait
30:40en quelque sorte d'avoir participé
30:42à ces pages
30:44anciennes de l'histoire de France.
30:46Tout ça est terminé, maintenant ils font un job.
30:48Un top job.
30:50Il paraît que la Commission européenne appelle comme ça
30:52les postes de commissaires européens
30:54quand il faut les pourvoir.
30:56Donc évidemment, ils se banalisent
30:58eux-mêmes en se coupant
31:00de l'analyse
31:02historique de l'actualité.
31:04Il y a quand même quelques
31:06exceptions. Il y a bien sûr des gens cultivés
31:08qui subsistent à gauche
31:10et à droite, ici et là, mais ils sont rares.
31:12C'est vrai. Ça participe de l'appauvrissement
31:14de la classe politique.
31:16On dit qu'ils ne sont pas habités par un
31:18sens de l'histoire.
31:20Par contre, ce qui est quelque chose d'étonnant, c'est que les
31:22Français ont une appétence pour l'histoire.
31:24On le voit dans les succès en librairie, dans les succès au cinéma,
31:26dans les succès d'émissions de TV,
31:28de radio, même de documentaires. Comment expliquer
31:30cette différence et comment expliquez-vous cette passion
31:32française des Français
31:34pour l'histoire ? D'abord parce qu'elle est de moins
31:36en moins bien enseignée à l'école.
31:38Donc, il faut bien que le besoin de racine
31:40étant toujours permanent,
31:42parce que c'est un besoin humain essentiel,
31:44il faut bien qu'il soit satisfait
31:46d'autres manières. Donc, il y a
31:48ce que vous évoquez, Arthur. Ça, c'est un premier
31:50élément. Et deuxièmement, c'est qu'il y a
31:52un sentiment d'accélération
31:54du temps, d'accélération
31:56de l'histoire. Ça va très vite,
31:58ça va même trop vite.
32:00Chacun le ressent. Donc, les
32:02premières journées du patrimoine,
32:04c'était en 1980. C'était à la fin
32:06des années Giscard. C'était le début
32:08du sentiment qu'on était en train de se détacher
32:10d'un passé très ancien de nous.
32:12Les grands succès
32:14inattendus de
32:16livres de Georges Duby
32:18ou de Le Roi Ladurie, Montaïau, Village Occitan,
32:20qui a vraiment
32:22été des succès tout à fait inattendus,
32:24même leurs propres auteurs en étaient stupéfaits,
32:26expriment ça, expriment
32:28ce besoin de se rattacher
32:30à un passé,
32:32parce que, si vous voulez,
32:34jusqu'alors, chaque génération se sentait
32:36le maillon d'une longue chaîne
32:38et se croyait, s'estimait,
32:40appelé à écrire un nouveau chapitre
32:42de l'histoire de France.
32:44J'ai encore grandi enfant
32:46un peu dans cet esprit.
32:48On ne faisait pas de grands discours à ce sujet.
32:50On le vivait, c'était naturel, c'était comme ça.
32:52Et puis ça s'est perdu, progressé,
32:54ça s'est perdu finalement assez vite,
32:56en quelques décennies.
32:58D'où ce besoin que vous évoquez,
33:00Arthur, de se rattacher,
33:02de se retourner vers ce passé et essayer de comprendre
33:04ce qui nous est arrivé.
33:06Vous nous proposez 15 grands récits et c'est une chose qui me semble importante
33:08parce que trop souvent, je pense que c'est un héritage
33:10des dernières décennies,
33:12on a voulu chasser les récits, on a voulu chasser
33:14l'événement, on a voulu chasser les grands personnages.
33:16Comme si l'histoire devait se quantifier
33:18d'une forme d'approche quantitative
33:20ou exagérément sociologique.
33:22Et on oubliait le fait que l'histoire est une histoire
33:24qu'on se raconte aussi.
33:26À travers cette histoire de France,
33:28y a-t-il des constantes que vous repérez?
33:30Autrement dit, la France change beaucoup, de mille manières,
33:32mais y a-t-il des traits qui font en sorte
33:34qu'on regarde Louis XIV, on regarde Napoléon,
33:36on regarde le général de Gaulle,
33:38on regarde les temps présents,
33:40on regarde l'influence de la gauche au 20e siècle,
33:42on regarde les temps présents.
33:44Est-ce qu'il y a des constantes que vous repérez dans l'histoire de France?
33:46Oui, y en a une,
33:48c'est le rôle central de l'État,
33:50à l'évidence, puisque notre pays a été
33:52construit par l'État, que ça plaise ou non,
33:54pour de bonnes ou de mauvaises raisons,
33:56c'est le cas.
33:58Donc y a une attente envers la puissance publique,
34:00que ça soit une république aujourd'hui
34:02ou une monarchie hier, qui n'ont pas d'équivalent
34:04chez nos voisins. La société civile est faible,
34:06et les contre-pouvoirs
34:08sont
34:10minces.
34:12Et donc,
34:14qui détient l'État,
34:16détient à la fois une grande force et une grande responsabilité,
34:18parce que l'État est assez isolé
34:20et sans relais.
34:22Il a face à lui une société civile
34:24qui est à la fois dans l'attente et dans la défiance
34:26envers lui. Ça, c'est un trait français.
34:28Et par ailleurs,
34:30la révolution française,
34:32l'exécution du roi, la fin
34:34de la monarchie, ont fait disparaître
34:36un principe d'unité. C'était un verrou
34:38qui a sauté. Il y avait quand même,
34:40avec cette incarnation monarchique,
34:42une limite
34:44aux forces centrifuges
34:46qui n'existent plus maintenant.
34:48Alors, la Troisième République a essayé
34:50justement de créer un récit
34:52national fédérateur
34:54avec une puissance de l'histoire
34:56de France. On pensait qu'il y avait une force politique
34:58de l'histoire de France sous la Troisième République
35:00pour cimenter la nation.
35:02C'était d'autant plus nécessaire.
35:04On a beaucoup moqué le petit lavis
35:06et les manuels
35:08de la France de la Troisième République, mais
35:10ils ont eu aussi une immense vertu.
35:12C'est de
35:14créer un lien collectif puissant
35:16et une fierté,
35:18une estime de soi pour
35:20cautériser les plaies
35:22après la défaite de 1870,
35:24après l'invasion
35:26de 1870-71
35:28et après le drame de la Commune de Paris.
35:30Il est donc
35:32assez logique aujourd'hui
35:34que l'histoire de France se décompose
35:36parallèlement à l'affaiblissement de l'État, parce que les deux
35:38sont liés. C'est le même phénomène
35:40qui s'exprime dans deux secteurs
35:42différents. – Alors, vous avez un chapitre
35:44notamment où vous revenez
35:46sur la mémoire des guerres de Vendée.
35:48C'est très important parce que
35:50la mémoire de Vendée, c'est un peu l'angle
35:52mort de l'histoire de la Révolution.
35:54C'est, je vais me dire,
35:56la première révolte moderne est une révolte
35:58anti-moderne en quelque sorte, au nom de la
36:00tradition de l'Histoire et la volonté de ne pas devenir
36:02un homme désincarné et abstrait. Est-ce que
36:04l'évolution de la mémoire
36:06de la Vendée, on pourrait dire des années
36:0860 où elle était absente à aujourd'hui, n'est pas
36:10le signe que la France a revisité aussi son
36:12histoire en sortant un peu de la mythologie révolutionnaire ?
36:14– Si, si, si, ça vient.
36:16C'est une conséquence
36:18de la perte d'influence
36:20de la tradition communiste
36:22à l'université, parce que
36:24l'histoire universitaire
36:26de la Révolution française était extrêmement
36:28marquée politiquement. Mathiez,
36:30qui était un historien de grande valeur par ailleurs
36:32et qui a été un pontife
36:34de la Sorbonne en matière
36:36d'études révolutionnaires, c'est aussi quelqu'un
36:38qui a adhéré au Parti communiste français et qui
36:40croyait que la Révolution bolchevique
36:42de 1917, c'était le parachèvement
36:44de la Révolution française. Donc évidemment
36:46quand on a cette grille de lecture, ça oriente
36:48tout votre travail intellectuel.
36:50Et ça a été le grand mérite de François Furet
36:52et de Mona Ouzouf dans leur dictionnaire critique
36:54notamment de la Révolution française
36:56en 1989, de
36:58faire droit à
37:00d'autres sensibilités.
37:02Reynald Seychère par ailleurs
37:04a joué un grand rôle,
37:06quelle que soit l'appréciation qu'on porte sur la thèse
37:08qu'il défend, du point de vue strictement historique
37:10il a fait un travail documentaire pour
37:12réfuter un poncif
37:14qu'on entendait jusqu'aux années 80
37:16qui est « on ne peut pas évaluer le nombre de morts ».
37:18C'était toujours « ah mais on n'a pas de document,
37:20on ne peut pas estimer
37:22de façon rigoureuse le nombre de morts ».
37:24En fait on ne voulait pas, c'est pas qu'on
37:26ne pouvait pas, c'est qu'on ne voulait pas chercher.
37:28Lui là, il s'est attaqué à un tabou
37:30et le cœur de sa thèse
37:32qui lui a valu
37:34de ne pas pouvoir
37:36faire une carrière universitaire,
37:38c'était de s'attaquer à ce tabou là.
37:40Après il a construit une théorie
37:42d'un supposé génocide qui
37:44est tout à fait discutable et que beaucoup d'historiens
37:46récusent.
37:48Ça n'empêche pas qu'il faille saluer
37:50la démarche
37:52proprement scientifique initiale qui est d'aller voir
37:54des documents et de montrer qu'on peut tout à fait
37:56établir de façon rigoureuse
37:58faire une appréciation en tout cas du nombre de morts.
38:00Arthur de Vatrigan.
38:02Votre livre est passionnant parce que
38:04ce sont des récits et
38:06c'est un modèle qu'on ne voit plus beaucoup mais aussi parce que
38:08Mathieu l'a rappelé, le passé est clair
38:10sur le présent. Et il y a un passage
38:12qui n'est pas très connu du grand public
38:14et qui est pourtant d'actualité aujourd'hui,
38:16c'est l'antisémitisme de gauche.
38:20Comment pourriez-vous expliquer
38:22d'où vient cet antisémitisme et pourquoi
38:24ça a été aussi mis sous le tapis et
38:26y a-t-il un lien entre il y a un siècle
38:28et aujourd'hui ?
38:30Il y a une tradition d'antisémitisme de gauche
38:32qui naît au début du 19ème siècle,
38:34au moment où la révolution industrielle
38:36fait apparaître une autre civilisation
38:38où la banque et l'industrie
38:40sont au cœur de la vie
38:42économique et
38:44vous avez cette figure,
38:46ce cliché du
38:48grand banquier juif apatride
38:50que la famille des Rothschild
38:52va incarner pour les
38:54antisémites. Et effectivement,
38:56vous avez une tradition de gauche,
38:58vous avez de nombreux auteurs, y compris des gens
39:00qu'en général on estime, comme Georges Sand
39:02et d'autres comme Fourier, Pierre Leroux,
39:04c'est l'inventeur du mot socialiste, Blanqui,
39:06ça c'est la génération suivante, il fait le lien
39:08avec l'extrême gauche de la fin du 19ème siècle.
39:10Ce sont des gens qui sont
39:12clairement antisémites. Ils ont des propos,
39:14des écrits violemment antisémites
39:16et il est étonnant qu'on ne le sache pas plus
39:18et qu'on n'en parle pas davantage, ça fait partie
39:20de ces nombreuses informations
39:22parfaitement documentées
39:24et tuent parce qu'elles
39:26passent sous silence, parce qu'elles
39:28heurtent les convenances
39:30d'un certain milieu.
39:32Ensuite, vous avez l'affaire Dreyfus
39:34dont le Figaro peut
39:36s'honorer d'avoir été un des acteurs, parce qu'en 1897
39:38il y a un seul grand journal
39:40qui défend Dreyfus, c'est le Figaro
39:42et l'extrême gauche attaque Dreyfus
39:44parce qu'il est à trois titres, il est juif,
39:46c'est un bourgeois, il est officier
39:48donc il a trois titres à l'antipathie de l'extrême gauche
39:50de l'époque, qui sont représentés
39:52par les socialistes, il n'y a pas de communistes
39:54à l'époque, on est avant le parti communiste.
39:56Ensuite, les choses évoluent naturellement
39:58après le j'accuse
40:00de Zola
40:02mais enfin, je suis obligé de dire
40:04que c'est parfaitement connu et documenté
40:06que Jean Jaurès a eu des écrits dans
40:08la Petite République qui ne peuvent être qualifiés
40:10que d'antisémites.
40:12Avant le premier semestre 1898
40:14où là, il évolue
40:16il va devenir un ardent Dreyfusard, je ne cherche en rien
40:18à diminuer son mérite
40:20je veux simplement dire que
40:22ce n'est pas une raison pour occulter
40:24ce qu'il a dit avant.
40:26Alors, votre dernier récit est consacré à Raymond Aron
40:28figure que j'estime considérablement
40:30est-ce que, et là, je croise
40:32deux questions en une,
40:34Raymond Aron, on a tendance à l'enfermer quelquefois dans le XXe siècle
40:36on dit que c'est un intellectuel qui a pensé
40:38contre le communisme, mais le communisme est dernier, nous,
40:40le RSS aussi, donc il est bon
40:42pour le musée, mais certainement pas pour penser
40:44à l'étant présent. Je vous pose la question
40:46est-ce que Raymond Aron est
40:48une figure qui peut nous éclairer sur l'étant présent
40:50aujourd'hui, et par ailleurs
40:52est-ce que certains des problèmes qui se posaient au XXe siècle
40:54en matière de totalitarisme se posent
40:56encore aujourd'hui, au temps présent,
40:58encore une fois à la lumière de ce dernier récit sur Raymond Aron.
41:00Alors, on enferme effectivement
41:02Aron dans une image
41:04affadie de ce qu'il a été
41:06et on lui donne à côté une image un peu
41:08vervainemente de bon papa
41:10raisonnable, centriste,
41:12là encore, c'est une recomposition
41:14a posteriori, il est vrai qu'il était toujours
41:16courtois, il est vrai qu'il
41:18posait chaque mot, mais ce qu'il dit peut être
41:20d'une grande sévérité, et
41:22si on faisait certaines citations
41:24aujourd'hui des propos de Aron, sans dire que c'est
41:26de Aron, ça ferait polémique aussitôt,
41:28ça ferait polémique aussitôt, et
41:30ce qui est très notable,
41:32ce qui prouve la richesse
41:34de pourquoi j'ai voulu parler de Raymond Aron
41:36aujourd'hui, c'est parce qu'en fait
41:38la façon qu'il avait souvent de ne pas
41:40conclure, qu'il lui a été reproché à l'époque,
41:42en fait c'était, ça garantit
41:44la pérennité de sa réflexion,
41:46c'est-à-dire que, quand vous lisez
41:48ce qu'il a écrit sur des faits
41:50qui aujourd'hui sont oubliés, parce que c'était lié
41:52à l'actualité des années 70 au début 80,
41:54les analyses générales
41:56qu'il faisait, elles n'ont pas pris une ride,
41:58et c'est pour ça qu'il conserve
42:00oui, absolument tout son intérêt.
42:02Alors, il nous reste une minute vingt,
42:04alors dernière question, tout simplement,
42:06on dit quelquefois
42:08l'histoire ne peut pas nous donner de leçons,
42:10j'entends ça très souvent,
42:12l'histoire on peut l'étudier, elle est passionnante,
42:14mais elle ne peut pas nous donner de leçons,
42:16est-ce que vous êtes d'accord avec ça,
42:18ou est-ce qu'étudier l'histoire peut nous permettre
42:20de tirer des leçons, soit comme citoyen
42:22ou comme gouverneur politique?
42:24Évidemment, il y a des leçons à tirer, c'est sûr,
42:26il ne faut pas être, encore une fois, abusé,
42:28aveuglé par des analogies superficielles,
42:30ça c'est vrai, parce qu'on peut toujours trouver
42:32des exemples à l'appui de telle ou telle thèse
42:34mais en tout cas, une connaissance fine
42:36approfondie de l'histoire
42:38est un immense magasin
42:40d'enseignement,
42:42et je pense profondément que si on ne connait
42:44que superficiellement l'histoire,
42:46ça divise, ça provoque
42:48le ressentiment et l'amertume
42:50et ça adresse les gens
42:52les uns contre les autres, mais si on se plonge
42:54dedans, qu'on comprend vraiment
42:56l'intelligence de l'histoire, en plus
42:58ça a une vertu qui est celle de
43:00réconcilier les gens
43:02et d'apaiser, souligner par la clarté,
43:04on comprend comment les choses ont pu se produire
43:06et souvent on comprend que les raisons
43:08de ce qui a eu lieu ne sont pas idéologiques
43:10mais beaucoup plus
43:12pratiques.
43:14Un grand merci Guillaume Perrault,
43:16journaliste, on le rappelle, au Figaro
43:18pour l'occasion de saluer nos confères du Figaro
43:20pour cet entretien
43:22et voyage dans l'histoire
43:24de France. Merci à tous les deux,
43:26rendez-vous la semaine prochaine où nous, on se retrouve
43:28dans un instant pour l'heure des pro 2.
43:30A tout de suite.

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