Le dernier baromètre de l’attractivité des territoires d’Arthur Loyd annonce 23,5 milliards d’euros d’investissements dans l’industrie verte en 2024. Soit une baisse de 10 % par rapport à 2023, année record. Pour Cevan Torossian, directeur du département études et recherches du cabinet, le secteur se porte bien et résiste à l’instabilité politique.
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00:00Générique
00:00Le zoom de Smart Impact, on parle de réindustrialisation verte avec Sévan Torossian, bonjour.
00:13Bonjour Thomas.
00:14Bienvenue, vous êtes le directeur du département études et recherches chez Arthur Lloyd,
00:19réseau de conseils en immobilier d'entreprise.
00:21Vous annoncez plus de 3000 transactions et missions chaque année.
00:25On parle de quoi ? Sur quel type d'actifs immobiliers ?
00:28Les locaux professionnels, les locaux d'activité, les locaux tertiaires, les bureaux, les entrepôts logistiques, le commerce,
00:35tous les locaux de l'immobilier professionnel, nous nous accompagnons, les entreprises, les industriels.
00:40Pour acheter, pour vendre ?
00:41Voilà, dans leur recherche d'implantation dans les territoires.
00:44Et vous publiez chaque année votre baromètre de l'attractivité des territoires.
00:49On va beaucoup se concentrer dans cette interview, dans ce zoom sur la réindustrialisation verte.
00:54Mais peut-être la leçon générale de ce baromètre, c'est la 8e édition.
00:57Tout à fait. L'attractivité, c'est une notion complexe, large.
01:02Nous, on aborde ça avec plein d'indicateurs.
01:05La leçon générale, c'est que tous les territoires ont leur chance.
01:08Pour peu, il y a un alignement entre la volonté politique, les moyens qui sont mis en place
01:12et l'émergence d'écosystèmes économiques.
01:16Donc il y a de bonnes énergies partout en France.
01:19Et sur la réindustrialisation verte, notre focus, qu'est-ce qu'on peut en dire cette année ?
01:24Alors réindustrialisation verte, quand on parle de ça, il s'agit en fait d'annonce d'investissement
01:29des industriels dans les filières de la transition énergétique, dans les filières de la transition climatique.
01:36Et donc 2024 a été une année plutôt performante avec un petit peu moins de 24 milliards d'euros
01:40d'investissement en France, en légère baisse par rapport à l'année 2023.
01:46Mais l'année 2023 était record.
01:50Exceptionnel, voilà. Exceptionnel.
01:52On compare la moyenne à 5 ans, elle était à 14 milliards d'euros.
01:54Donc on est à 24.
01:55Donc on est quand même sur une très bonne année, compte tenu en plus du contexte qui s'est dégradé, évidemment, en 2024.
02:01On va découvrir le top 10 des départements les plus attractifs.
02:06Donc ce sont les montants investis dans les filières liées à la transition climatique
02:10avec un podium, la Seine-Maritime en première place, le Barin, la Somme.
02:15Puis on voit ensuite les Bouches-du-Rhône, les Vosges, Hauts-de-Vienne, Hauts-de-Pyrénées, Nord, Hauts-de-Garonne et l'Aisne.
02:21La Seine-Maritime, c'est quand même assez massif.
02:24Alors déjà, comment vous définissez ?
02:28C'est vraiment des promesses d'investissement ?
02:30Comment vous définissez les critères ?
02:32Tout à fait. Alors on s'appuie sur notre partenaire de la Trendéo,
02:35qui est spécialiste sur l'analyse des projets d'investissement en France et dans le monde.
02:39Et donc on consolide toutes les données sur les annonces d'investissement de ces industriels.
02:46Par exemple, dans les filières des énergies renouvelables.
02:49Par exemple, quand il y a une usine de création, de construction de pompes à chaleur.
02:56Par exemple, sur les gigafactories de batterie.
02:58Toutes ces nouvelles filières, l'hydrogène vert, toutes ces nouvelles filières
03:02qui vont nous permettre d'assurer la décarbonation de nos modes de vie.
03:07Et qui, voilà.
03:08Mais avec, alors ce que je lisais dans le baromètre, moins de petits projets.
03:13Oui.
03:13C'est ça ?
03:14C'est l'une des leçons de l'année.
03:15Un petit peu moins de petits projets.
03:16Au total, on a 392 projets d'investissement qui ont été recensés en 2024.
03:21Avec, il est vrai, un petit peu moins de petits projets sur le segment de moins de 10 millions.
03:25Comment ça t'explique ça ?
03:26Tout simplement parce qu'il y a eu une légère baisse en fait sur la filière batterie
03:31et sur la filière énergie renouvelable.
03:32Tout simplement parce que ce sont des projets de plus en plus capitalistiques.
03:36Et donc tout simplement, on a un mouvement de balancier de volume plus faible vers des plus gros montants.
03:41Il y a eu plus de 30 projets de plus de 100 millions d'euros.
03:44Donc on a quand même un mouvement de balancier.
03:48Mais au global, on a quand même des volumes d'investissement qui sont importants en 2024.
03:51Vous parliez des incertitudes.
03:53Il y a les incertitudes politiques françaises et puis les incertitudes géopolitiques.
03:58On va évoquer ces deux thèmes.
04:00Mais à quel point, effectivement, l'année 2024 qui a été bousculée politiquement avec l'absence de gouvernement,
04:09un gouvernement barnier qui a sauté très vite, enfin bon voilà, à quel point ça a pu freiner des projets comme ceux-là ?
04:15Parce qu'ils sont souvent dépendants d'une partie de financement public quand même.
04:19Bien sûr.
04:19Alors c'est vrai que les industriels, dans les filières vertes comme dans les autres filières,
04:23ont besoin de stabilité, lisibilité sur le contexte politique, institutionnel, fiscal.
04:28Vous avez raison de le souligner.
04:30Ça a pu freiner effectivement des investissements.
04:33Également le contexte financier parce qu'on se rend bien compte qu'il y a un petit peu moins d'argent public
04:37avec le durcissement des conditions de financement, avec la remontée des taux au niveau de la BCE.
04:42Et donc c'est vrai qu'il y a un petit peu moins d'argent public
04:44qui jusqu'à maintenant soutenait largement ces filières.
04:49Malgré tout, je trouve qu'une baisse de 10% des volumes d'investissement,
04:53ce n'est pas si catastrophique compte tenu effectivement de cette dégradation du contexte que vous venez de souligner.
04:59Oui, avec quand même beaucoup d'élus qui veulent revenir notamment sur les objectifs de la loi ZAN,
05:04la loi zéro artificialisation nette.
05:06Ce zéro, il est pour 2050, mais il y a une diminution de 50% qui était prévue dès 2030.
05:12Comment vous l'analysez, ça ?
05:14C'est quand même une forme de coup d'arrêt, parce qu'on pourrait rajouter d'autres notions.
05:19Je ne vais pas tout citer, mais les ZF, les Zonafels, les Mémissions, on peut parler d'agriculture, enfin bref.
05:25Est-ce que ça impacte par ricochet, par effet de capillarité, les projets de transition environnementale
05:31et les investissements dont on parle dans ce baromètre ?
05:34Écoutez, nous quand on parle avec les industriels, en fait, il y a plusieurs critères.
05:37Il y a l'accès à l'énergie, il y a la main d'oeuvre, la volonté politique.
05:40Mais le sujet du foncier, et c'est le métier d'Arthur Loïc, c'est d'accompagner les entreprises sur le volet immobilier.
05:46Le sujet du foncier, il est vital, tout simplement, parce que quand il n'y a pas de foncier,
05:50il n'y a pas de possibilité d'implantation, finalement, ce sont des industriels qui renoncent à s'implanter.
05:55La traduction concrète, quand il n'y a pas de foncier, en général, dans l'immobilier,
06:00c'est un rapport d'offres et de demandes, ça fait monter les prix.
06:02D'accord.
06:02Donc, en fait, au final, quand il n'y a pas de foncier, ça vient renchérir aussi les coûts d'implantation.
06:08Et donc, est-ce que, vraiment, on veut rajouter des barrières ?
06:12Mais ça veut dire quoi ? Cette Loisanne, elle était...
06:13Parce qu'on peut aussi se poser des questions sur la façon dont les textes environnementaux ont été pensés.
06:18Parfois, ils sont trop compliqués.
06:19Elle a été mal fagotée, mal pensée, c'est-à-dire pour vous ?
06:22De croire qu'on pouvait mettre la même règle partout, de manière unique et de manière égalitaire,
06:28dans tous les territoires de France, alors qu'il y a des territoires qui sont en fort développement,
06:32ou des territoires sur lesquels il y avait des capacités, des possibilités, c'était peut-être une erreur.
06:37Il y a des évolutions récentes, avec une proposition sanitariale pour faire évoluer cette Loisanne.
06:43Il se trouve qu'on a déjà, en France, et c'est tant mieux pour la protection de l'environnement,
06:49un code de l'urbanisme et un code de l'environnement, parmi les plus draconiens au monde.
06:54La Loisanne, elle venait, d'une certaine manière, rajouter encore un peu de la complexité,
06:59rajouter une marche supplémentaire, la capacité des industriels, mais aussi de tous les acteurs économiques,
07:04à s'implanter dans l'État.
07:04Mais avec, il y a aussi la loi Industrivet, par exemple, qui promeut,
07:08qui à la fois prévoit de réduire des délais d'implantation, quand on parle de réaliser ça,
07:14et puis de réhabiliter les friches.
07:15Alors, ça peut sembler contradictoire, d'un côté, on dit, on freine un peu sur la Loisanne,
07:21de l'autre, il faut accélérer sur la réhabilitation des friches.
07:24Il y en a encore des friches, d'ailleurs, à réaliser ?
07:26Il y en a encore.
07:26Il y en a encore.
07:27Les friches, c'est un sujet assez complexe, parce qu'il y a des problématiques techniques,
07:32des pollutions, par exemple, des problématiques financières, parce qu'il y a un surcoût.
07:36Et le vrai défi des friches, c'est comment on arrive finalement à reconstruire sur des friches,
07:41et donc, finalement, on se rend compte qu'on a besoin encore d'un soutien public.
07:44Ça coûte plus cher, tout simplement, que de faire du greenfield, de construire sur...
07:48Toujours est-il que c'est vertueux d'un point de vue environnemental, évidemment.
07:51C'est ce qu'il faut privilégier.
07:53La reconstruction de la ville sur elle-même, reconstruire des sites industriels sur d'anciens sites industriels,
07:59et on a plein d'exemples.
08:00C'est évidemment ce qu'il faut faire, mais ça coûte plus cher.
08:02Ça coûte plus cher.
08:03Donc, il faut un accompagnement des collectivités locales et ou de l'État.
08:08Bien sûr, bien sûr.
08:10Et voilà, il y a des fonds pour ça, mais peut-être pas suffisamment.
08:14Oui, et puis surtout des arbitrages budgétaires qu'on a vus.
08:19Je reviens au baromètre et à ces investissements dans les filières climatiques.
08:24Est-ce qu'il y a des filières climatiques, je simplifie, plus dynamiques que l'autre aujourd'hui ?
08:29Oui, incontestablement, la filière batterie véhicule électrique, pour laquelle certaines régions en France ont de vrais atouts à faire valoir.
08:37Je pense que la batterie va aller notamment dans les Hauts-de-France, par exemple.
08:40Les Hauts-de-France, la carte des départements les plus dynamiques, il y en a vraiment beaucoup qui sont dans le nord de la France.
08:47Tout à fait.
08:48Vous savez, les Hauts-de-France, depuis qu'on fait cette étude, concentrent depuis 2019 70% des investissements qui ont été faits dans la filière batterie véhicule électrique.
08:58Donc, il y a une vraie concentration des acteurs.
09:01Pourquoi ? Tout simplement parce qu'il y a déjà beaucoup d'industries automobiles qui sont implantées dans les Hauts-de-France, dans le Valais-en-Sénois, dans le Guési, etc.
09:08Et donc, il y a une vraie facilité, si vous voulez, une vraie logique à avoir les producteurs de batterie à côté des producteurs automobiles.
09:19Il y a d'autres filières qui se distinguent aussi.
09:21Il y a la filière d'hydrogène vert.
09:23Il y a des acteurs, par exemple, qui proposent des solutions assez innovantes, par exemple sur le kérosène vert, notamment en Seine-Maritime, où il y a eu aussi un boom des investissements dans les filières vertes.
09:37Pourquoi ? Parce qu'on se rend compte que l'industrie aéronautique va avoir besoin de kérosène vert décarboné pour faire voler les avions.
09:45Donc, il y a vraiment de nouvelles filières qui sont en train de s'implanter.
09:48Et la bonne nouvelle pour nos territoires en France, c'est que tout ça est vecteur d'emploi, de création d'emploi.
09:52Donc, on est dans un changement de monde.
09:54Il y a effectivement des secteurs qui vont moins bien aujourd'hui.
09:57Il y a beaucoup d'annonces de plans de licenciement.
10:00Mais il y a aussi des filières qui sont décentes et qui, elles, créent des emplois.
10:03Donc, c'est plutôt des bonnes nouvelles pour les territoires qui sont parfois même éloignés des grandes métropoles.
10:08Avec, effectivement, un dernier mot aux 30 secondes.
10:11Alors là, on est vraiment sur l'aspect général, l'attractivité des territoires.
10:15Sur l'emploi, c'est toujours les métropoles qui attirent l'emploi.
10:19Je simplifie, mais c'est un peu ça.
10:21Les métropoles sont effectivement des moteurs de l'emploi en France, clairement.
10:27Quand on parle de Toulouse, de Montpellier, de Lille, de Lyon, Rennes.
10:32Oui, ce sont toujours des bastions en termes de création d'emploi.
10:35Mais c'est vrai qu'au niveau général, on a quand même un ralentissement très fort des créations d'emploi
10:41par rapport à ce qu'on a connu post-Covid, voire même maintenant des destructions nettes d'emploi.
10:44Donc, on a un défi là pour l'année 2025.
10:47Et peut-être que ces filières vertes, justement, sont l'occasion d'avoir des créations d'emploi dans des nouvelles filières.
10:54Par exemple, pour le Nord, on parle de 20 000 créations d'emploi dans la filière des batteries.
10:58Merci beaucoup, Cévin Torosian, et à bientôt sur Bsmart for Change.
11:04On passe tout de suite à notre rubrique Startup.