Les Vraies Voix avec Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de la revue Conflits.
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##LE_COUP_DE_PROJECTEUR_DES_VRAIES_VOIX-2025-05-09##
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NewsTranscription
00:01Vladimir Poutine, souriant, assis aux côtés de Xi Jinping, accompagné des chefs d'État brésiliens, égyptiens, vénézuéliens, serbes et d'autres.
00:09Et puis le Premier ministre, Slovaque. Je vous le rappelle, la Slovaquie, membre de l'Union Européenne.
00:15Tous assistent au défilé de l'armée russe, mais aussi de celle de 13 autres pays sur la Place Rouge de Moscou.
00:22Les images de la commémoration du 9 mai ce matin alertent inévitablement sur la force du chef d'État russe, pourtant mis au banc de la communauté internationale pour cause d'invasion de l'Ukraine.
00:35Le défilé du 9 mai à Moscou a-t-il conforté le pouvoir de Vladimir Poutine sur la scène internationale ?
00:42Vous dites oui à 85% sur le compte X de Sud Radio.
00:46Continuez de voter. Appelez-nous au 0826 300 300.
00:50Aude vous attend. Quelles impressions vous ont faites ces images avec ces caméras embarquées sur les chars,
00:59avec ces plans très très bien conçus de la réalisation russe pour envoyer au monde un signe fort ?
01:06Réagissez au 0826 300 300. Vous êtes les bienvenus.
01:10Les vrais voix avec nous, Philippe Bilger, Tom Conan, Abel Boyi.
01:14Philippe Bilger, ce matin, est-ce que pour vous, Vladimir Poutine a réussi son pari ?
01:21– Je ne crois pas que ça a renforcé le pouvoir de Vladimir Poutine et du président chinois.
01:35– Parce qu'en réalité, ce qui s'est passé à Moscou n'a fait que confirmer le partage du monde en deux,
01:45j'allais dire de manière un petit peu schématique, le monde des démocraties même imparfaites
01:51et le monde des dictateurs. Et j'avoue que ça m'a fait froid dans le dos de voir le président chinois et Vladimir Poutine,
02:01ces deux dictateurs sans pitié, avec leur soutien autour d'eux, sans doute délibérés pour une marche du monde
02:09qui ressemblerait à ce qu'ils souhaitent pour le pire.
02:13Moi, j'avoue que ça me fait très peur, mais j'espère que nos démocraties et le président Macron sur ce plan-là,
02:22Dieu sait qu'on peut le critiquer, me semblent tenir bien la barre, enfin, au sein de l'Europe.
02:29Il n'est pas le plus médiocre de ses dirigeants.
02:32– Pour nous éclairer, et peut-être aller dans le sens de ce que vous venez de dire,
02:36Philippe Bilger, Jean-Baptiste Noé, donc le rédacteur en chef de la revue Conflit.
02:41– Oui, Jean-Baptiste Noé, on rappelle qu'en plus, le premier ministre indien, Nehra Ndra Modi,
02:47était à l'origine attendu à Moscou, mais du fait du conflit avec le Pakistan, il ne s'est pas rendu.
02:53C'est-à-dire qu'on aurait eu quoi ? De représenter un tiers de la population planétaire ?
02:58C'est affolant ce qui s'est passé ce matin, Jean-Baptiste Noé ?
03:01– Oui, c'est un signal très fort qui est envoyé au monde, et surtout, on voit comment un événement important,
03:07la fin de la Deuxième Guerre mondiale, est utilisé pour la donne géopolitique actuelle,
03:13et notamment pour défendre la guerre en Russie actuelle et l'actuelle recomposition du monde.
03:19Donc le politique utilise toujours l'histoire, il instrumentalise toujours l'histoire à son profit,
03:24on en a une démonstration, et c'est très important les symboles.
03:28Et ce qu'on a vu là est éminemment symbolique, c'est un message qui est important, qui est envoyé,
03:33et il me semble important d'éviter aussi cette confrontation, d'éviter cette logique des blocs.
03:40On a, d'ailleurs, on a signé aussi des partenariats avec l'Inde, côté français,
03:43mais dans cet enfermement dans lequel les BRICS ou un pôle sud veut enfermer le monde,
03:50le rôle de la France, ça devrait être notamment d'éviter cet enfermement
03:54et de défendre une voie un peu plus autonome.
03:56Bon, alors des BRICS, tous n'étaient pas là, le Brésil présent, la Russie, évidemment, bien sûr,
04:03mais les aspirants, notamment de l'Arabie Saoudite, plus l'Afrique du Sud, n'étaient pas là.
04:09Mais en tout cas, c'est vrai qu'il y a ce pôle.
04:11Tom Conan, vous êtes un artiste, vous êtes un homme d'image, vous êtes un homme de réflexion,
04:15les images ce matin vous ont choqué, j'imagine.
04:18Oui, et ça m'a rappelé un vieux débat, vous savez, sur l'opposition,
04:21c'est un truc qu'on étudie, genre à Sciences Po, en fac de droit, je ne sais pas,
04:24sur l'opposition entre Huntington et Fukuyama, la théorie d'Huntington, c'est le choc des civilisations,
04:30Fukuyama, c'était plutôt celle de la fin de l'histoire,
04:33c'est-à-dire qu'après la chute de l'URSS, au début des années 90,
04:38on serait rentré dans un monde libre, d'une certaine façon,
04:41où la démocratie et aussi une forme d'économie de marché prédominerait.
04:45On voit qu'effectivement, actuellement, c'est un renversement total de paradigmes
04:50qui est en train de se faire, mais en effet, je suis tout à fait d'accord
04:52avec ce que dit monsieur à l'instant,
04:53c'est-à-dire qu'il ne faut pas rentrer dans ce paradigme Huntingtonien,
04:57d'une certaine façon, et recréer un choc des civilisations systémiques
05:01avec des oppositions paradigmatiques.
05:04Jean-Baptiste Noé, alors, on va donner les noms,
05:07je fais un petit clin d'œil, histoire de défendre un petit peu,
05:10de détendre l'atmosphère, toutes les erreurs sont permises,
05:15évidemment, détendre, défendre, tout marche.
05:17Il y a le Zimbabwe, il y a le Congo, il y a l'Éthiopie, il y a l'Égypte,
05:22il y a la Serbie, et puis il y a ce pays qui est quand même membre de l'Union Européenne,
05:27la Slovaquie, représentée par Robert Fico, le chef de l'État serbe.
05:31Il n'y a pas un moment où on dit vous y étiez,
05:33vous n'êtes plus de l'Union Européenne, ça ne marche pas aussi simple que ça,
05:36mais enfin, on peut se poser la question, Jean-Baptiste Noé ?
05:39Oui, alors, on a aussi des pays qui mangent un peu à tous les râteliers,
05:44et qui vont là où ça les arrange.
05:45Comme la Serbie, par exemple.
05:47Exactement, donc, quand il faut avoir des financements de l'Union Européenne,
05:50ils sont côté européen, et quand il faut avoir des intérêts avec la Russie,
05:54ils sont côté russe.
05:55C'est pareil également de certains pays africains.
05:57Donc, vous avez des pays qui savent jouer des rivalités
06:01entre le bloc russe et le bloc américain,
06:03et qui sont plus dans l'opportunisme que dans une réelle confrontation mondiale.
06:11Kazakhstan, Biélorussie, évidemment, on s'y attendait,
06:13mais Vietnam, Arménie, Cuba, Venezuela, Abel Boyi,
06:17il y a des gens qui ne doivent pas sortir indemne de ce qui s'est passé ou pas ?
06:21Je pense que c'est assez compliqué de répondre oui ou non à cette question,
06:25mais je reviendrai sur ce qui a été dit, sur le symbole.
06:27Pour lui, c'est une réussite totale.
06:29Il faut se souvenir comment la cérémonie de l'année dernière
06:32était moquée par la presse internationale,
06:35ou même dans la presse russe, il était écrit que la présence
06:38des quelques chefs d'État africains qui étaient là
06:41était nécessaire pour le côté exotique, en fait.
06:43C'est-à-dire tellement il y avait peu de chefs d'État,
06:45c'est quelque chose qu'il est important de rappeler.
06:47Vladimir Zelensky a réagi, puisqu'il a annoncé le sommet
06:50des dirigeants de la coalition des volontaires.
06:52Volodymyr, excusez-moi.
06:54Et Lula, quand même, en fin d'après-midi,
06:56a appelé à un renforcement du partenariat stratégique avec Moscou.
07:00Donc le symbole aussi permet d'instrumentaliser, voire de manipuler,
07:05mais pourquoi pas d'obtenir des résultats inespérés.
07:08Comme on dit, on ne sait jamais sur un malentendu,
07:10quelque chose peut passer.
07:14Je vois à l'instant un SMS de notre ami Éric Revelle,
07:19qui est toujours très pertinent.
07:20Lui, il considère un peu comme Abel que c'est un renforcement, en réalité, du Sud global.
07:28Et donc, comme vous l'avez dit aussi, il considère que c'est plutôt une victoire de Vladimir Poutine.
07:35Mais moi, j'ai une vision peut-être toujours tristement morale de la vie internationale.
07:42J'y vois plutôt le sentiment glaçant que cet univers-là nous menace,
07:49et qu'en réalité, il n'est écrit nulle part qu'il va s'arrêter jusqu'en Ukraine.
07:56Oui, et surtout, on parle de puissance nucléaire,
07:58s'agissant de l'Inde, de la Chine ou de la Russie.
08:02Donc c'est quand même des forces de dissuasion qui sont extrêmement puissantes.
08:05Alors la Corée du Nord, évidemment, était représentée.
08:08Bien sûr, il y avait 29 nations.
08:11Bon, il y a aussi les Serbes de Bosnie.
08:12Alors après, il y a des pays comme l'Ossétie,
08:14qui ne sont pas forcément reconnus par l'ONU.
08:17Bon, mais au-delà de ça, Jean-Baptiste Noé, ça veut dire quoi ?
08:2013 armées de 13 pays différents ont...
08:25En fait, moi, c'est ce symbole peut-être qui m'inquiète le plus.
08:28C'est-à-dire qu'il y a le défilé de l'armée russe qui revient d'Ukraine et qui défile,
08:33et à côté d'elle, il y a 13 armées de 13 autres pays.
08:36Ça, c'est déjà vu, ça, ou pas, dans ces commémorations, parce que ça fait froid dans le dos ?
08:42Pas à ma connaissance.
08:43Ben oui.
08:43Je ne pense pas.
08:44Je serais peut-être démenti, mais je ne pense pas.
08:48En tout cas, envoyer son armée, c'est évidemment un élément, un symbole très fort.
08:53Ça veut dire qu'on est alliés et que si l'armée défit côte à côte,
08:56on est prêt un jour à aller faire combattre côte à côte.
08:59C'est clair, oui.
08:59C'est un message qu'il ne faut pas négliger.
09:03Et pour moi, le vrai sujet aussi, c'est comment les démocraties peuvent redevenir désirables.
09:09Ce n'est pas uniquement par l'argent, ce n'est pas uniquement par le mode de vie.
09:14Il faut aussi présenter ces systèmes politiques comme étant meilleurs et plus désirables que les autres.
09:19Et aujourd'hui, on a l'impression que beaucoup de pays démocratiques ont perdu un peu cette désirabilité
09:24et que c'est le pouvoir fort, la dictature, l'autoritarisme qui devient désirable.
09:29Et ça, c'est assez dangereux.
09:30Comment, par exemple, le clan de l'OTAN doit réagir à ce qui s'est passé avec les pays qui étaient présents à Belboilly ?
09:37Il risque déjà de réagir en étant présent auprès de Volodymyr Zelensky ce week-end.
09:43Maintenant, c'est assez compliqué.
09:45Il faut éviter la montée, il faut éviter de tomber dans une espèce de guerre intellectuelle
09:51entre l'Occident démocrate et les autres pays, que ce soit les pays en voie de développement
09:58ou les pays asiatiques qui sont plutôt représentés par des dictatures.
10:02Et effectivement, comment redonner une image positive de la démocratie ?
10:06Je pense que c'est par l'incarnation politique aussi.
10:09Parce que s'il y a une crise de l'image de la démocratie, on le voit en France,
10:13comment le président de la République peut être regardé.
10:16Mais on le voit dans de nombreux pays occidentaux.
10:18Il y a une crise de la représentation.
10:20Il y a une crise de l'amour pour le politique aussi.
10:23Et c'est vrai que, je le vois même auprès des jeunes,
10:25il ne faut pas croire quand je fais certains débats, et je finirai dessus,
10:29une personne comme Vladimir Poutine est très respectée par certains jeunes.
10:33Pourquoi ? Ils n'y connaissent rien à ce qui se passe politiquement.
10:36Mais il incarne une autorité, il incarne une force masculine qui plaît à beaucoup de jeunes.
10:42Oui, il faut éviter effectivement le choc des civilisations,
10:46ce que je disais un peu tout à l'heure.
10:48Mais le vrai problème aussi, c'est qu'au sein de l'OTAN,
10:50aujourd'hui, on ne peut plus du tout traiter les États-Unis
10:52comme l'allié historique qu'ils étaient, qu'ils étaient toujours.
10:57Donc c'est encore moins évident de parler d'une seule voix.
11:00Alors, pour conclure, Jean-Baptiste Noé, j'ai une question simple à vous poser,
11:03et vous répondrez rapidement et simplement.
11:05Les 29 représentants d'États présents ce matin à Moscou
11:08étaient-ils tous réellement des alliés de Poutine ?
11:12Non. Pour beaucoup, ils sont allés pour des raisons circonstancielles.
11:16Après, ils voient d'abord leurs intérêts,
11:18ils seront prêts à se rapprocher des États-Unis ou de la France si besoin.
11:22Et ça, ça peut rassurer parce qu'il faut aussi relativiser quand même.
11:25Merci beaucoup, Jean-Baptiste Noé.
11:27Et merci les trois vrais voix.
11:29Philippe Bilger, Tom Conan, Abel Boyy.
11:32Merci à Maxime Sénat, à la réalisation, à toute l'équipe présente aussi ce soir.
11:37Dans un instant, nous parlons rugby.
11:40Alexandre Priam est là.
11:41C'est important, l'avant-dernière journée Pro D2 de la saison régulière.
11:45Alexandre, ça va faire fort ce soir.
11:48Oui, avant-dernière journée de la saison de Pro D2,
11:52on sera avec Félix Panguero, avec toute l'équipe,
11:54pour vous présenter le sprint final de ce magnifique championnat
11:57qui vous suit depuis le début de la saison sur notre entière.
12:00Super excitant.
12:01Merci Alexandre Priam.
12:02On vous retrouve dans un instant.
12:03Il y aura les infos, bien sûr.
12:04A tout de suite.