• l’année dernière

Category

🗞
News
Transcription
00:00 7h-9h, les Matins de France Culture, Guillaume Erner.
00:06 La question du jour, un changement radical dans la gestion des futures sécheresses.
00:10 Voici ce que préconise le rapport d'inspection interministérielle dont certains éléments
00:14 ont été révélés dans Libération ce week-end alors que l'été dernier, des terrains de
00:19 golf restaient verdoyants alors même où plusieurs centaines de villages n'avaient
00:23 plus accès à l'eau potable.
00:24 Ce rapport vise à éclairer les dysfonctionnements de la gestion de la crise de l'eau lors
00:29 de l'été 2022 pour peut-être mieux se préparer à l'été qui vient.
00:35 Bonjour Agathe Zin.
00:36 Bonjour.
00:37 Vous êtes anthropologue directrice de recherche au CNRS.
00:39 La sécheresse de l'été dernier était, d'après le rapport d'inspection interministérielle,
00:44 probablement la plus sévère depuis au moins un demi-siècle.
00:47 Quelles ont été ses conséquences, ses manifestations concrètes ?
00:51 Alors effectivement, l'ensemble du territoire est avec des différences selon les sous-territoires.
00:58 Tout le monde n'est pas logé à la même enseigne.
01:00 On s'est retrouvé dans une situation effectivement encore non vécue, méconnue, mais en fait
01:07 déjà anticipée par un certain nombre de collègues dans Climatologues qui avaient
01:13 vu ces trajectoires de limitation et d'évolution des précipitations, notamment liées à un
01:19 dérèglement climatique assez global et dont les conséquences sont l'exacerbation d'un
01:24 certain nombre de phénomènes extrêmes, que sont de grosses sécheresses, que sont des
01:28 inondations, que sont des tempêtes.
01:30 Est-ce que la tempête Noa en fait partie ?
01:33 Là, c'est de la météo, mais dans une ambiance de manque d'eau, on se retrouve dans des
01:41 situations où effectivement certains territoires ont rencontré notamment en 2022, durant
01:48 l'été, des crises conjoncturelles parce qu'une limitation de la précipitation liée
01:54 à une saisonnalité et d'autres qui se sont retrouvés dans des crises, une crise particulièrement
02:00 importante qu'il a fallu gérer.
02:02 Par exemple, si vous pouviez nous donner justement des exemples de territoires à Gathezin.
02:08 Alors, on se rend compte que finalement, on a une augmentation du nombre de départements
02:14 en situation de crise déjà depuis une dizaine voire une vingtaine d'années.
02:19 Si on connaît la zone méditerranéenne, qui est particulièrement touchée, d'autres,
02:24 et on a bien vu même jusqu'à la Bretagne, dont nos représentations font qu'en général,
02:28 on se dit plus régulièrement, c'est davantage humide.
02:32 Mais là aussi, on s'est retrouvé dans des situations de sécheresse qui a conduit
02:36 notamment à des incendies qui sont un des événements qui sont provoqués par des phénomènes
02:44 de sécheresse.
02:45 Et le rapport souligne à Gathezin qu'on a sous-évalué ces risques de sécheresse
02:49 et qu'il a fallu adopter des gestions urgentes de la crise, ce qui, j'imagine, n'est
02:53 pas idéal.
02:54 Alors, effectivement, en fait, l'ensemble des usages de l'eau s'est trouvé complètement
02:59 impacté par ces problématiques-là, à commencer par l'eau potable.
03:04 Vous l'avez évoqué, près de 1000 communes se sont retrouvées dans une situation avec
03:10 des coupures d'eau ou des manques d'eau davantage prolongées.
03:13 Alors, c'est essentiellement, on va dire, les zones les plus rurales, sachant que les
03:20 réseaux dans les milieux urbains sont souvent interconnectés, si jamais on était amené
03:26 à avoir un manque d'eau en termes de disponibilité de la ressource à un endroit ou à un autre.
03:31 Mais les zones rurales, qui ne sont pas connectées finalement entre elles, se retrouvent dans
03:36 des situations où quand il n'y a plus d'eau, il n'y a plus d'eau.
03:38 Ça veut dire qu'il faut aller la chercher grâce à des citernes ou avec des bouteilles
03:44 d'eau, ce qui n'est vraiment pas la solution.
03:46 Donc, se retrouver dans une situation de pénurie, du coup, est particulièrement nécessaire
03:53 à être géré à tous les niveaux.
03:54 Est-ce qu'on peut imaginer que ces risques soient encore accrus cet été ?
04:00 Bon, là, aujourd'hui, il pleut, mais cette pluie n'est pas si fréquente que cela.
04:06 Qu'est-ce que l'on peut imaginer pour les mois d'été qui viennent à Gathezin ?
04:11 Écoutez, les prévisions faites par les collègues quant à la question de la recharge des nappes
04:18 2022-2023, ça reste déficitaire.
04:22 C'est les collègues du BRGM dans leur situation hydrogéologique du 1er mars 2023 qui évoquent cela.
04:28 En fait, on est dans une situation de cumul, sachant qu'on est actuellement à un niveau
04:35 plus bas que ce qu'on avait l'an dernier.
04:38 Et donc, les pluies qu'on a aujourd'hui, c'est extra, c'est extrêmement important,
04:45 mais malheureusement, on n'est pas sûr que ça suffise pour justement revenir finalement
04:53 au niveau qui serait nécessaire pour satisfaire à la fois les besoins du milieu naturel,
04:59 qui est absolument essentiel, qui est la condition même pour l'ensemble du vivant, et puis
05:04 pour satisfaire l'ensemble des usages.
05:06 Donc, l'eau potable, je l'évoquais, mais également sur les besoins pour l'agriculture,
05:11 sur toutes les cultures qui, en ce moment, au moment du printemps, ont vraiment besoin
05:16 de suffisamment d'eau pour lever.
05:18 Et puis aussi au niveau énergétique et au niveau des loisirs, voilà, ces déficits
05:24 d'eau, il va falloir les anticiper et faire évoluer, changer nos pratiques, changer les
05:31 comportements pour tous les acteurs et dans l'ensemble des territoires.
05:35 Par exemple, qu'est-ce qu'il faudrait voir évoluer selon vous, Gatheuzin ?
05:38 Je pense qu'on est dans une situation où on ne peut plus envisager l'eau au service
05:44 des usages.
05:45 Il faut inverser la tendance.
05:47 C'est-à-dire qu'il faut ré-envisager chacun des usages, quels qu'ils soient, en fonction
05:53 de la disponibilité de la ressource, de sa qualité et de sa capacité à se renouveler.
05:58 Donc, on est dans le milieu agricole, avec l'évolution de la question de l'irrigation,
06:07 la question des prélèvements, la question surtout des cultures, et puis effectivement
06:11 pour assurer une alimentation pour tous, mais en même temps de la nécessité de partager
06:17 de façon juste l'ensemble des ressources disponibles.
06:20 Dans ces conditions, on évoque par exemple l'utilisation des eaux usées pour les cultures.
06:26 Est-ce que ça, c'est une solution ? Est-ce qu'elle est facile à mettre en œuvre ?
06:29 Alors, disons d'un point de vue technique, on a fait des progrès assez extraordinaires
06:33 et des innovations particulièrement importantes.
06:36 La question, c'est quel type d'eau pour quel type d'usage ?
06:40 Sachant qu'il peut y avoir des enjeux de santé humaine, mais aussi environnemental.
06:46 Donc, réutiliser des eaux usées, ça peut être tout à fait pertinent sur certains
06:51 usages.
06:52 Vous évoquiez notamment les golfs, ça peut être un moyen de préserver au moins la partie
06:59 du green, si le reste n'est pas une priorité.
07:01 La question est de se dire, développer ce genre de choses doit être raisonné et approprié
07:10 à chacune des situations.
07:11 Ce n'est peut-être pas une généralisation.
07:12 Parce que les golfs, ça avait beaucoup marqué les esprits sur le plan symbolique, mais
07:17 j'imagine qu'il n'y a pas tant que ça de golf.
07:20 On a évoqué aussi les grands événements sportifs, la Coupe du monde de rugby et puis
07:25 plus encore les Jeux olympiques l'été prochain 2024.
07:29 On se dit que là, il va y avoir besoin aussi d'eau, d'eau supplémentaire également
07:35 parce qu'on imagine un afflux touristique.
07:38 Est-ce que c'est bien raisonnable de continuer comme ça à Gatheuzin selon vous ?
07:42 Je crois que vous avez donné la réponse dans votre question.
07:44 Effectivement, je crois que là, nous avons tous préconscience de cette réalité.
07:50 Donc, on est passé d'une prise de conscience à une prise de réalité avec laquelle maintenant,
07:54 il faut agir et composer.
07:55 Donc, en évoluant dans la pratique des différents usages, en limitant les usages utilisés,
08:02 mais pas pour autant en profiter pour en utiliser d'autres.
08:06 Merci beaucoup Agathe Heguin.
08:09 Je rappelle que vous êtes anthropologue et directrice de recherche au CNRS.
08:13 7h23 sur France Culture.
08:14 [Musique]

Recommandations