• l’année dernière
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00:00 *Ti ti ti ti ti ti*
00:02 *Musique*
00:08 France Culture, Olivia Gesper, bienvenue au Club.
00:12 *Musique*
00:17 Bonjour à tous. Un club de la photo aujourd'hui avec Vincent Fournier, réalisateur de plusieurs séries dont Out to Sanibalis ou encore Space Utopia.
00:27 Le photographe Vincent Fournier s'expose cette semaine avec Uchronie au Musée de la chasse et de la nature à Paris jusqu'au mois de septembre.
00:34 Une exposition qui nous parle de ses futurs possibles, de son rapport aux vivants et aux technologies, de ses rêves tout simplement.
00:41 Et si le futur est encore de la science-fiction, vous verrez avec lui, vous verrez en l'écoutant, vous verrez en regardant ces photos qu'il existe bel et bien dans nos imaginaires.
00:51 Ce futur, bienvenue à vous, bienvenue au Club, on est vendredi.
00:55 *Musique*
01:02 *Ti ti ti ti ti ti*
01:04 Une émission programmée par Henri Leblanc avec Anouk Delphineau, préparée par Sacha Matéi, réalisée par Félicie Fauger avec Dimitri Paz à la technique.
01:13 Et bonjour à vous Vincent Fournier, bonjour.
01:15 Bonjour Olivia, merci de nous recevoir.
01:17 Bienvenue, bienvenue, bienvenue dans ce club des passionnés de la photo, sachez-le.
01:21 C'est un médium, un art que l'on adore.
01:25 Vous êtes le Kubrick ou le Philippe Cadic de la photo, vous Vincent Fournier ?
01:30 Ah ben alors c'est deux monstres sacrés que j'adore.
01:33 Kubrick particulièrement, "Domina, l'Odyssée de l'espace" qui est un film auquel je fais beaucoup référence dans l'exposition.
01:41 L'exposition a traversé de référence à ce film.
01:43 Moi j'avais été très marqué par la scène à la fin du film où on retrouve le cosmonaute Dave dans sa communion spatiale entouré de mobilier Louis XV.
01:52 Et j'aimais bien cette espèce de confusion des temps, d'aller-retour entre le passé et le futur qu'on retrouve beaucoup dans l'exposition.
01:58 Et Cadic, j'adore aussi d'ailleurs le titre "Uchronie" de l'exposition.
02:04 Cadic a un très bon exemple pour ça dans son livre "Le Maître du Haut-Château" où il raconte l'Amérique des années 50 occupée par le Japon parce que les Allemands ont gagné la guerre.
02:16 C'est vraiment un type d'Uchronie qui m'a aussi beaucoup marqué.
02:20 "L'Uchronie", c'est le titre de votre exposition à voir à Paris au Musée de la chasse et de la nature.
02:25 C'est aussi un genre qu'on a plutôt tendance à rattacher quand même à la littérature.
02:31 Cette fiction imaginée à partir d'un point de vue historique, comment est-ce qu'on fait de l'Uchronie en photo ?
02:36 Comment est-ce qu'on fait de l'Uchronie en photo ?
02:38 Alors moi c'est vraiment un point de départ dont je me sers pour ensuite jouer avec.
02:42 C'est vraiment un terrain de jeu avec lequel je vais travailler pour mélanger le passé et le futur.
02:49 C'est le point de départ.
02:51 On retrouve au début de l'exposition une grande mosaïque qui représente non pas des gladiateurs romains mais un casque spatial.
02:59 Dès le départ, on a la couleur de cette exposition.
03:03 C'est une image qui montre un casque de la NASA que j'ai photographié dans les archives à Houston
03:08 qui est composé de plein de petits miroirs qui ont été assemblés par un bras robotique.
03:13 Et ça donne le point de départ.
03:15 Ici, les romains étaient allés sur la Lune par exemple et donc ça donne cette espèce d'image un peu décalée d'Uchronie.
03:20 Vous êtes reparti des mosaïques antiques dans l'idée, dans l'imaginaire.
03:25 Vous les avez aussi transformés, métamorphosés et projetés dans ce futur possible.
03:31 Imaginez le futur. Est-ce que c'est d'abord pour vous, Vincent Fournier, se plonger dans une esthétique particulière ?
03:39 C'est vrai que ça a produit des formes qui m'intéressent beaucoup.
03:43 Je suis passionné de science-fiction, d'univers utopiques, d'imaginaire du futur.
03:50 Ce sont des choses qui viennent beaucoup de l'enfance. Je suis un peu nostalgique du futur de mon enfance.
03:55 C'est vraiment ça qui a nourri mon travail et que je prolonge ici.
03:59 Dans l'exposition, on retrouve surtout deux thèmes.
04:03 Il y a un thème qui a un lien avec l'imaginaire de l'exploration spatiale
04:07 et puis un autre thème qui a un lien avec l'imaginaire lié au vivant,
04:11 surtout la réinvention du vivant dans une dimension à la fois poétique et aussi de prospective.
04:16 Cette histoire de futur, il y a le présent qui existe.
04:21 Pour moi, trouver dans le présent des éclats d'avenir, c'est la façon dont j'essaye de faire.
04:26 Toutes vos photos sont quand même aussi des voyages extraordinaires.
04:30 Il y a de nombreux dessinateurs qui ont prêté en leur temps leurs crayons au récit de Jules Verne
04:35 pour les illustrer, que ce soit Neuville, Rioux ou encore Bennett.
04:38 Il y a des maîtres de la gravure sur bois.
04:42 Ils étaient tous plutôt visionnaires, on peut le dire, comme l'auteur.
04:47 Mais est-ce qu'ils ont, avec leur travail, avec ce travail-là aussi d'illustration,
04:51 que vous avez pu voir dans vos livres d'enfants, puisque vous disiez que cet imaginaire vient de cette enfance de la vôtre,
04:56 comment est-ce qu'ils ont aiguisé votre regard ?
05:00 Deux photographes avec leurs crayons.
05:03 Ils l'ont aiguisé, ils l'ont stimulé, effectivement à la fois par rapport à l'esthétique,
05:08 encore une fois les formes que ça produit, et puis les histoires que ça raconte,
05:12 qui sont souvent dans un équilibre entre réalité et fantasme.
05:16 Il y a un espèce de pas de côté aussi qui est intéressant.
05:20 Ce sont des propositions qui sont comme des hypothèses, des prototypes de pensée.
05:24 Et je trouve que c'est...
05:28 Il y a un côté merveilleux qui m'intéresse beaucoup là-dedans.
05:32 Oui, il y a une esthétique, on le disait, mais il y a aussi forcément un goût pour le récit,
05:36 ou les récits, d'autres récits possibles que ceux d'aujourd'hui.
05:40 Vos photos, elles n'ont pas d'enjeu que d'être belles, j'imagine aussi pour vous, non ?
05:46 Non, elles sont à la fois nourries d'histoire,
05:50 ce sont des images qui vont plutôt questionner.
05:52 Je n'ai pas une position particulière, j'aime bien ménager un trouble avec ça
05:56 et plutôt susciter le questionnement, l'interrogation.
06:00 Vous questionnez le réel ou vous questionnez l'avenir ?
06:02 Vous pensez qu'on manque quand même cruellement aujourd'hui, dans ce temps présent,
06:06 coincé comme on est dans ce présentisme presque parfois un peu réducteur, un peu malsain ?
06:14 On manque cruellement de futur désirable ?
06:16 Oui, je le pense, effectivement. Le futur est un peu en panne.
06:20 On est effectivement dans un présent perpétuel lié beaucoup aux réseaux sociaux, en fait.
06:26 Il y a ce livre d'Ariel Kirou que j'aime beaucoup qui s'appelle "Dans les imaginaires du futur"
06:32 où il raconte qu'il y a deux imaginaires très présents actuellement liés au futur.
06:36 Un premier lié à la catastrophe, qui est représenté partout au cinéma, etc.
06:40 Et puis un autre qui est plutôt une espèce de solution tout technologique.
06:44 Et entre ces deux futurs, l'esprit est comme court-circuité, on a du mal un peu à se projeter.
06:49 Et effectivement, on a du mal, on a besoin de se projeter.
06:53 Je crois que la vie c'est une suite de projets et donc on a besoin d'imaginer, de rêver.
06:57 Ça fait partie de la façon dont on est fait.
07:00 Et en ce moment, c'est là que c'est un peu compliqué.
07:03 Mais se projeter, en tout cas pour l'auteur, pour celui qui s'y projette,
07:06 et peut-être aussi pour le regardeur, le spectateur, c'est quand même un pari risqué qu'on s'y projette en photo,
07:13 en BD ou en film. A en croire en tout cas le dessinateur Enki Bilal.
07:18 Enki Bilal, Cénico-Paul, C. Bugg et tant d'autres.
07:21 Il y a la littérature, mais il y a aussi le cinéma.
07:23 Et ça, c'est quelque chose aussi qui m'a énormément influencé dans ma manière d'appréhender la bande dessinée.
07:31 On peut parler d'un film qui est fondateur pour moi de beaucoup de choses, qui est 2001 dans l'hôpital d'espace,
07:39 qui est un film qui a aujourd'hui, si on le voit, on peut trouver quelques signes de faiblesse, de vieillissement, certainement.
07:47 Mais dans la forme, mais pas dans le fond. Le questionnement reste sans réponse.
07:56 On est dans quelque chose qui est puissant et qui sort évidemment du champ du divertissement
08:04 et qui est un film qui m'occupe toujours intellectuellement, aujourd'hui encore.
08:08 Et moi, j'aime ça dans le cinéma, j'aime ça dans les oeuvres littéraires.
08:11 C'est des choses qui restent et qui ne vous lâchent pas.
08:14 Donc moi, j'essaie de fonctionner comme ça, avec cette idée du questionnement toujours.
08:21 Et cette zone que j'appelle prospective, qui est juste devant, dans cette temporalité du futur proche, elle est là pour ça.
08:29 Et c'est ça qui m'amène aussi parfois à mettre le doigt sur des choses qui font très, très mal.
08:36 Et ça a été le cas notamment du 11 septembre.
08:39 Je ne suis pas devin, je ne suis pas visionnaire, mais quand on joue avec cette temporalité,
08:45 de la manière dont je viens de l'évoquer, on a de fortes chances de tomber juste, malheureusement.
08:54 Voilà, c'est la plume dans la plaie, comme l'évoque Enki Bilal.
08:57 Ça vous est déjà arrivé à vous, Vincent Fournier, à force d'imaginer, de rêver, de vous projeter,
09:03 de tomber sur un os, ou pire que ça, sur des choses qui font très, très mal,
09:09 comme l'évoquait Enki Bilal, dans ses projections vers le futur ?
09:13 Non, pas véritablement. Non, non, je n'ai pas eu cette expérience-là.
09:18 Mais je suis ravi que vous me passiez à Enki Bilal, j'adore.
09:22 Il sera d'ailleurs présent au Musée de la chasse et de la nature. Il est invité aussi.
09:25 Parce que vous avez des invités, oui, en plus de l'exposition.
09:28 Donc jamais, vous n'avez jamais eu peur de ce que vous avez pu apercevoir, entrevoir dans vos rêves ?
09:35 Eh bien, dans mes projets, qu'est-ce qu'il y a ?
09:37 Là, j'ai un projet qui s'appelle "Les fleurs de chair".
09:39 Ce sont des fleurs, des plantes qui produisent de la chair artificielle comestible pour la manger.
09:44 Ce sont des recherches basées sur les tissus cellulaires.
09:47 Et ce que je montre, ce sont les squelettes de ces fleurs de chair.
09:49 Je ne sais pas si on en arrivera jusque-là, mais ça pourrait être.
09:52 Mais ça, ce n'est pas forcément un futur désirable ?
09:55 Non, mais c'est présenté sous une forme très belle aussi.
09:59 Mais vous questionnez ça. Où est-ce que la science nous emmène aujourd'hui aussi ?
10:03 Ça fait partie des questionnements que soulèvent vos photographies.
10:06 Oui, tout à fait. C'est un miroir à la fois de nos espoirs, parce qu'il y a beaucoup d'espoir là-dedans,
10:14 et puis il y a aussi beaucoup de crainte, parce que c'est l'inconnu.
10:17 Donc ça questionne effectivement tout ça à la fois.
10:20 Dans la vie, vous êtes comme ça, Vincent Fournier, toujours un peu entre deux mondes,
10:26 toujours un peu "lost in translation" comme dirait Sofia Coppola.
10:30 Je ne sais pas.
10:32 Non ?
10:33 Oui, je ne sais pas.
10:35 Ou vous êtes très terre à terre. Il n'y a que dans vos photos que vous vous projetez comme ça ?
10:40 Je crois que j'ai un peu les deux. J'ai les pieds assez sur terre et la tête dans les étoiles.
10:45 C'est un équilibre entre les deux en fait.
10:47 Vous êtes entre les deux. Alors voilà. Vous photographiez le futur, Vincent Fournier.
10:51 C'est-à-dire que vous saisissez un temps qui n'est pas encore advenu,
10:55 que vous prenez des images d'un monde qui n'existe pas encore.
10:58 Vos photos sont à voir depuis le début de la semaine au Musée de la chasse et de la nature à Paris.
11:03 On se retrouve dans quelques instants. France Culture, il est 12h12.
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15:20 Un printemps 100% Basquiat qui vient de s'ouvrir.
15:26 On vient d'entendre un morceau extrait du film Downtown 81.
15:31 C'est une sorte de déambulation dans le New York des années 80,
15:35 dans le village comme on dit avec ses stars,
15:37 et notamment Basquiat dont on vient d'entendre la voix
15:39 avec Quatamundi pour ce Palabras con ritmo.
15:42 Alors si vous êtes fan, il y a un podcast de nos confrères,
15:46 amis, camarades de FIP, Basquiat Soundtracks,
15:49 à écouter, ou une expo, Basquiat Soundtracks toujours,
15:52 qui est à voir à la Philharmonie de Paris jusqu'au 30 juillet.
15:55 Je vous dis, c'est du total 100% Basquiat.
15:57 En ce moment, l'exposition qui vient de débuter à la Fondation Vuitton,
16:02 c'est Basquiat avec Andy Warhol à quatre mains.
16:06 Ils ont peint ensemble et c'est cette conversation,
16:09 ce dialogue que la Fondation vous présente actuellement.
16:13 [Musique]
16:16 France Culture, bienvenue au club.
16:19 Olivia Gesper.
16:21 Les aventures spatiales, les architectures dingues, utopiques, un peu folles,
16:25 les robots humanoïdes.
16:27 On est en compagnie aujourd'hui du photographe Vincent Fournier.
16:30 Il y a dix ans, vous avez croisé vos photos et la musique de Sébastien Gaxi
16:34 pour une création hybride intitulée Otus Animalis.
16:38 Une fable, une sorte de fable, un conte initiatique,
16:41 tout plein d'animaux augmentés, sans la musique,
16:44 vous n'auriez pas pu donner vie aux images,
16:46 comme vous l'avez fait dans cette série, dans cette exposition.
16:49 Vous avez pensé photographie et musique ensemble.
16:52 Alors effectivement, c'est un travail qui a été réalisé dans le cadre
16:55 de Swiss Life à quatre mains.
16:57 C'est un prix qui récompense la collaboration entre un musicien,
17:00 un compositeur et un photographe.
17:02 C'est vraiment un travail qui a été fait ensemble.
17:05 Et ça s'appelle Otus Animalis, ça veut dire animal augmenté.
17:08 C'est un peu un prolongement du dernier projet que j'avais fait
17:11 qui s'appelle Post-naturalistory, mais qui est moins dans le post-naturalisme,
17:15 qui est plus lié à... Effectivement, on est dans le domaine du fantastique.
17:19 On a franchi un cap par rapport à l'imaginaire, on est moins dans le réel.
17:22 Et c'est une fable, un conte, qui raconte l'histoire d'un bestiaire
17:26 de créatures hybrides qui sont entre deux mondes
17:30 et qui ne trouvent pas leur place sur Terre,
17:32 et qui, pour retrouver un certain équilibre, vont se transformer en étoiles.
17:35 Donc c'est vraiment le récit de cette transformation d'espèces en étoiles.
17:39 Donc on est vraiment sur le territoire de l'enfance,
17:42 du conte, du récit initiatique.
17:45 - Qui vous a permis, vous, en photo, d'inventer un langage nouveau ?
17:51 - Ça m'a permis de le prolonger, effectivement,
17:55 de sortir un petit peu du naturalisme dans lequel j'étais avec ce précédent projet,
18:00 et de l'emmener sur un autre territoire.
18:02 Donc c'est autre chose, en fait.
18:04 On reste toujours dans l'idée du bestiaire associé au cabinet de curiosité,
18:10 une espèce d'expression de la différence, de la diversité.
18:13 Ça parle aussi de l'environnement, mais de manière assez poétique.
18:16 On a par exemple un oiseau qui s'appelle le tempestère.
18:19 Le tempestère, c'est une figure dans la mythologie qui représente un chaman
18:23 qui vient contrôler les éléments célestes.
18:25 La pluie, la tempête...
18:26 Et là, ce petit oiseau, en fait, il a des filaments,
18:29 et quand les filaments vibrent, il va produire de la musique,
18:32 et selon la musique qu'il va produire, ça va réchauffer ou rafraîchir l'atmosphère.
18:37 Donc chacune des espèces a des particularités.
18:40 C'est présenté comme des planches encyclopédiques,
18:42 avec une plaque en laiton qui vient décrire l'histoire qu'on voit sous les yeux.
18:47 - Et alors la bande-son, elle rugit, elle barille, elle cuicuit.
18:51 Je ne sais pas, mon vocabulaire en termes de bestiaire sonore n'est pas très fort,
18:54 si vous voulez ajouter quelque chose.
18:56 Non ? - Non, mais c'est exactement ça.
18:58 - C'est pas mal ? On l'écoute.
19:01 (Cris d'oiseaux)
19:03 (Cris d'oiseaux)
19:13 (Cris d'oiseaux)
19:24 (Cris d'oiseaux)
19:26 Et puis, c'était pas vrai que je n'aime pas les hommes.
19:34 Mais ce que j'ai compris, c'est qu'ils ne sont pas seuls.
19:38 - Musique signée Sébastien Gaxi, avec la voix de ?
19:46 - Denis Lavant.
19:47 - Le comédien qu'on vient d'entendre à l'instant.
19:50 Quelle expérience sensorielle ou peut-être intellectuelle
19:53 vous vouliez ouvrir aux regardeurs avec cet octus animaliste ?
19:57 Qu'est-ce que vous voulez provoquer ?
19:59 - Une forme d'émotion, à la fois esthétique.
20:05 Moi, ça me rappelait aussi un peu Pierre et le Loup,
20:09 ce conte musical.
20:12 Pierre et le Loup, pardon.
20:16 Voilà, toutes ces choses en fait.
20:18 C'est merveilleux, scientifique aussi,
20:21 parce que j'ai associé un peu de technologie dans ces créatures.
20:25 Par exemple, on a une raimenta qui produit sa propre empreinte acoustique,
20:30 une espèce de motif de bulle pour échapper à ses prédateurs.
20:34 Elle crée un leurre.
20:36 À chaque fois, on retrouve ces choses-là qui se mélangent.
20:39 C'est aussi créer des rencontres improbables,
20:42 des choses assez inattendues.
20:45 De la surprise, de l'émotion, du questionnement.
20:48 L'expression d'une diversité, en fait.
20:51 Ce qui est un cabinet de curiosité.
20:54 Le musée de la chasse à la nature se prépète très bien à cet endroit-là,
20:58 parce que ça résonne parfaitement.
21:00 L'idée, c'était aussi dans ce musée,
21:03 de créer un dialogue, un parcours avec les œuvres de la collection.
21:07 On s'est beaucoup amusé avec Christine Germain
21:10 à choisir les places et à raconter des histoires, des résonances
21:14 à la fois formelles, des matières, des formes, etc.
21:17 Puis aussi des choses qui ont plus lié à l'histoire de la chasse à la nature.
21:21 - C'est vraiment un écrin, ce musée.
21:23 Le délocaliser partout en France,
21:25 pour que tout le monde puisse s'y rendre aussi facilement que les Parisiens.
21:29 Le numérique et la technologie que vous attendiez pour réaliser vos rêves,
21:33 Vincent Fournier, parce que vous êtes photographe à la base.
21:36 Mais là, la photographie, dans tous ces projets,
21:38 dans toutes ces séries que vous avez montées ces dernières années,
21:40 vous avez greffé, ajouté l'impression 3D, la vidéo,
21:43 des logiciels de retouches.
21:45 C'est cette technologie que vous attendiez ?
21:47 - Je l'ai bien accueilli.
21:51 Je ne sais pas s'il l'attendait, mais elle s'est présentée.
21:54 Je l'ai accueilli avec bonheur, parce que c'est vraiment des outils
21:57 qui me permettent de créer des choses assez hybrides.
22:01 Je travaille plus avec des idées qu'avec des outils.
22:04 Je vais avoir des idées, puis après je vais trouver des outils
22:06 pour réaliser ces choses-là.
22:08 Je travaille avec plusieurs personnes à chaque fois,
22:10 comme une espèce de mini studio finalement.
22:12 Par exemple, cette nouvelle série qui s'appelle "Flora Incognita",
22:15 ça a été réalisé par de la photogrammétrie.
22:18 C'est une technique particulière.
22:20 Au départ, on a vraiment des vrais spécimens de fleurs
22:23 qui sont photographiés à 360 degrés par plusieurs points de vue,
22:26 qui vont reconstituer ensuite une image
22:28 et que je vais pouvoir ensuite déformer.
22:31 Là, j'ai créé après des algorithmes de déformation,
22:34 comme une espèce de vent inconnu qui va déformer
22:36 chacune de ces espèces.
22:38 Il y a beaucoup d'outils technologiques derrière.
22:41 Et on retrouve ça, oui, beaucoup dans mon travail.
22:44 - Et quand vous sortez de l'École nationale de la photographie de Arles en 1997,
22:49 il n'y avait pas tout ça finalement.
22:51 Ça vous a permis d'ouvrir vraiment les champs des possibles.
22:54 Est-ce que vous vous sentiez un peu limité auparavant ?
22:57 - Je ne sais pas si je me sentais limité en fait,
23:00 mais à l'École d'Arles, j'ai déjà commencé,
23:02 je commençais déjà à travailler avec les outils numériques.
23:05 J'ai vraiment commencé très très tôt.
23:07 Dès que les outils sont apparus,
23:09 je m'en suis saisi pour formuler des choses que j'avais envie de formuler.
23:15 Effectivement, ça a été très...
23:17 Oui, je les ai accueillis avec beaucoup de bonheur.
23:20 - Oui, c'était une évidence que vous alliez les adopter ces technologies-là.
23:23 Les rencontres d'Arles, elles vont se tenir en juillet-août cet été,
23:27 comme chaque année,
23:29 et vous y serez présent avec cette série-là,
23:32 "Octus Animalis".
23:33 - "Octus Animalis" sera présenté pendant les rencontres d'Arles.
23:36 - Qu'est-ce qui représente ce festival pour vous ?
23:38 - Beaucoup de choses, parce que moi, c'est déjà à la ville d'Arles,
23:41 c'est là où j'ai étudié, j'ai fait l'école de photographie en Arles.
23:45 - C'est pas là où vous êtes né, vous êtes né beaucoup plus loin.
23:48 - Alors, oui, effectivement, je suis né à Ouagadougou, Burkina Faso.
23:52 Je suis arrivé en France, j'avais 5-6 ans,
23:55 après j'ai grandi en Bretagne,
23:56 et puis ensuite j'ai fait mes études dans le sud de la France,
23:58 et donc à Arles, à l'école d'Arles,
24:01 où j'ai ensuite exposé pendant les rencontres d'Arles,
24:04 et puis j'ai travaillé pas mal avec François Hébel,
24:06 qui était le directeur des rencontres à un moment.
24:08 Donc voilà, c'est un lieu qui compte beaucoup pour moi,
24:10 et dans lequel je me réinstalle en fait en ce moment.
24:12 Je suis en train de partager ma vie entre Paris et Arles,
24:15 donc il y a un espèce de retour aussi.
24:17 - Le retour au pays natal, c'est à la fois un festival, vous le dites,
24:23 qui compte pour vous, mais qui compte aussi beaucoup pour la photographie.
24:26 Aujourd'hui, il faut quand même le rappeler,
24:28 c'est une plaque tournante pour les photographes.
24:31 Et c'est important d'en être, dans un monde, dans un secteur,
24:35 une discipline qui est aussi devenue de plus en plus foisonnante,
24:39 concurrentielle entre l'information et entre les versions artistiques
24:42 qu'on peut en avoir aujourd'hui.
24:44 - Tout à fait, oui.
24:46 Et puis c'est une ville qui est en totale mutation aussi,
24:48 la ville d'Arles, avec la Fondation Loumatte,
24:50 ça a modifié complètement le paysage de la ville.
24:53 - Vous trouvez votre place, vous, dans ce monde ?
24:55 Il y a une place pour des photographes du futur comme vous, Vincent Fournier ?
24:59 - Ah, ben moi je suis bien à ma place, je me trouve.
25:04 Oui, oui, bien sûr, il y a une place.
25:07 C'est aussi aux gens de faire la place.
25:11 - Alors voilà, je reformule, est-ce qu'il a fallu jouer des coudes ?
25:14 - Ben écoutez, moi, je suis un peu un ovni finalement,
25:20 dans le paysage de l'art contemporain, de la photographie.
25:23 Je ne suis ni dans l'un ni dans l'autre.
25:25 J'ai d'abord été plutôt reconnu par les États-Unis,
25:28 c'est d'abord le Metropolitan Museum à New York
25:30 qui a fait l'acquisition de pièces, ou que j'ai exposé.
25:33 Après le Moriarty à Tokyo, et c'est plus récemment,
25:36 après le Centre Pompidou, je suis passé par des chemins détournés.
25:39 Donc ça a été difficile.
25:40 Non, en fait, moi ça s'est fait très naturellement.
25:44 Le Met, par exemple, j'ai reçu un mail que j'ai mis à la poubelle au début,
25:47 parce que je croyais que c'était un spam, mais bon.
25:49 - Il faut ouvrir tous ces spams, c'est ce que vous êtes en train de nous dire.
25:53 Si on ne peut pas passer à côté de sa chance.
25:56 Photographier, pour terminer, Vincent Fournier,
25:58 les journalistes de la rédaction sont en train d'entrer pour le journal de Thomas Cluzel.
26:01 Photographier simplement le réel qui nous entoure,
26:04 ça ne vous intéresse plus ou vous y reviendrez peut-être un jour ?
26:08 - Alors si, j'ai une partie de mon travail "Space Utopia"
26:11 qui concerne vraiment de la photographie directe.
26:14 Là, pour le coup, il n'y a absolument aucune retouche.
26:16 Ce sont des images qui sont faites en direct, qui sont mises en scène,
26:18 qui jouent sur un espèce d'équilibre entre le documentaire et la fiction.
26:22 Mais on est vraiment dans la photographie classique, en fait.
26:25 - Là, c'est une série que vous avez débutée il y a longtemps aussi, en 2007.
26:28 C'est votre voyage à vous dans l'espace.
26:30 Ce sont des lieux notamment qui comptent à travers le monde,
26:34 les lieux de l'exploration spatiale pour ce "Space Utopia",
26:38 ce "Space Project" que vous avez aussi, Vincent Fournier.
26:41 Mais c'est quoi le réel, au fond ?
26:43 Vous, qui me bien souvent citez "Borges dans l'immortel".
26:46 "Nous acceptons facilement la réalité, peut-être parce que nous sentons que rien n'est réel."
26:52 C'est ça votre définition aussi ? A vous de le dire ?
26:54 - Je trouve, oui, très juste.
26:56 - Rien n'est réel de ce monde. Qu'est-ce qu'il y a quand même un peu ?
26:59 - Ce qu'il en reste, une fois qu'on a tout enlevé ?
27:01 - C'est-à-dire ? Pas grand-chose. C'est bien ça ?
27:05 Cette exposition, Vincent Fournier, la vôtre, elle s'intitule "Uchronie".
27:09 Elle est présentée en ce moment au Musée de la chasse et de la nature à Paris.
27:13 C'est à voir jusqu'au mois de septembre ?
27:15 - 17 septembre.
27:16 - Et on peut passer aussi par les rencontres de la photographie TARL,
27:19 qui auront lieu cet été, pour voir aussi, si on ne passe pas par Paris,
27:23 cette série que vous avez pensée, imaginée, la plus folle,
27:27 en musique, Octus Animalis.
27:29 Merci beaucoup à vous.
27:30 Merci, Olivier.

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