Sacha Houlié, député Renaissance de la Vienne, est l'invité de Sonia Devillers. Il fait partie des signataires d'une tribune demandant la régularisation des travailleurs sans-papiers dans certains métiers.
Retrouvez les entretiens de 7h50 sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-7h50
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00:00 Daniela De Villers, votre invité est député de la Vienne, président de la commission
00:05 des lois et co-signataire d'une tribune dans le quotidien Libération.
00:09 Vous réclamez entre autres la régularisation urgente des travailleurs sans papier dans
00:13 les métiers où l'on manque de main-d'œuvre.
00:15 Bonjour Sacha Ollier ! Oh la photo ! Oh la photo ! Vous avec Julien Bayou, vous avec
00:22 Fabien Roussel, vous avec Boris Vallaud, avec l'EPS, avec Europe Écologie Les Verts,
00:27 avec le Parti Communiste, ça s'appelle une fronde ?
00:30 Je pense que c'est au contraire tout l'inverse.
00:32 Il s'agit pour nous d'abord de défendre des mesures que nous avons voulues, des mesures
00:38 qui figurent dans le projet du gouvernement.
00:39 Le projet de loi ? Un projet de loi du gouvernement sur l'immigration
00:43 qui est extrêmement radical puisqu'il reprend des mesures que la droite n'a jamais réussi
00:48 à faire adopter et que la gauche n'a jamais eu le cran de proposer.
00:51 Je veux donner quelques exemples.
00:53 Il s'agit d'abord d'expulser plus systématiquement les étrangers délinquants.
00:57 Il s'agit également de régulariser les travailleurs dans les métiers en tension.
01:00 Et puis également de simplifier une procédure qui est aujourd'hui devenue kafkaïenne,
01:04 à la fois dans les préfectures mais aussi dans les tribunaux.
01:06 Rendez-vous compte que parfois, juste pour avoir un rendez-vous à la préfecture, il
01:10 faut pouvoir faire une action judiciaire.
01:11 On marche sur la tête et donc ce projet de loi extrêmement radical, il nous faut désormais
01:16 pouvoir le faire voter.
01:17 Et donc il faut pour cela élargir la majorité et c'est ce à quoi je m'attache avec
01:22 cette tribune ce matin avec une partie de la gauche.
01:25 Justement, régulariser les travailleurs sans papier, y compris dans les secteurs sous
01:29 tension.
01:30 Pour la droite, pour les LR, c'est irrecevable.
01:35 C'est même non négociable.
01:36 Vous parlez de la droite parlementaire parce qu'en réalité la droite dans les territoires,
01:40 c'est ce qu'elle nous demande.
01:41 Moi, dans ma permanence parlementaire, et on est tellement nombreux dans la majorité
01:45 à avoir ce genre de situation, des chefs d'entreprise, par exemple le CHU de Poitiers
01:49 pour ce qui me concerne, qui me demande la régularisation de médecins libanais, syriens.
01:53 J'ai le chef d'entreprise qui me dit que dans sa boîte de travaux publics, dans son
01:57 restaurant, il a un travailleur qu'il a depuis plusieurs années, qui travaille, qui a soit
02:01 besoin de papier, soit besoin de renouvellement de son titre.
02:04 Sauf que vous noterez que le patronat est quand même très discret sur le sujet.
02:06 Justement, je pense qu'il faut sortir collectivement de l'hypocrisie.
02:09 Il faut sortir de l'hypocrisie pour les politiques.
02:11 Il faut sortir de l'hypocrisie pour le monde économique.
02:13 Et tout ce qu'on demande à bas bruit, tout ce qu'on demande entre nous, tout ce qu'on
02:17 demande à la préfecture ou à l'État, parce qu'il y a même des députés, y compris
02:21 de droite, qui écrivent au gouvernement pour qu'on régularise les travailleurs, eh bien
02:25 il faut le faire.
02:26 Et il faut le faire dans la loi.
02:27 C'est intéressant ce que vous dites.
02:28 C'est-à-dire qu'il y a des députés de droite sur le terrain qui poussent pour des
02:32 régularisations et qui derrière, à l'Assemblée, sont dans la droite ligne d'Olivier Marlex
02:37 et menacent d'une motion de censure ?
02:38 Bien évidemment, parfois même les principaux intéressés.
02:41 Donc ce qu'il faut dire, c'est que les projets que nous proposons, ils rencontrent
02:45 des difficultés parce qu'ils sont radicaux.
02:46 La gauche, elle ne veut pas des expulsions des étrangers et des vagabonds.
02:48 Pourtant, c'est un problème qu'on rencontre dans toutes les villes.
02:51 La droite, elle ne veut pas des régularisations des sans-papiers.
02:53 Moi, je pense qu'il faut faire bouger les choses.
02:54 Et cet acte collectif, il permet un peu de se dépasser, de dire sur quoi on est d'accord.
02:59 Et qu'est-ce que par cohérence, on pourrait soutenir.
03:02 Après, de là à passer au vote, il y a un pas.
03:04 Mais au moins, il faut qu'on puisse se dire les choses.
03:06 Et que l'on puisse avancer au Parlement.
03:09 Je rappelle pour que les choses soient bien claires pour nos auditeurs que le texte dont
03:10 on parle ce matin ne porte que sur le volet de l'accès au travail des personnes étrangères
03:15 sur le territoire français.
03:16 Il s'agit de se positionner.
03:17 On parle avec la droite sur certains aspects.
03:19 Elle a des exigences qui ne sont pas acceptables sur la sortie des traités européens, par
03:23 exemple, ou sur la suppression de l'aide médicale d'État qui protège aussi les
03:26 Français parce que c'est des mesures de santé publique.
03:29 Et de l'autre côté, on parle aussi avec la gauche sur des mesures qui sont d'abord
03:33 le travail, la régularisation des travailleurs dans les médias en tension, mais aussi l'autorisation
03:38 de travail pour les demandeurs d'asile.
03:39 Donc, on sait très bien qu'ils vont recevoir une protection.
03:41 Un Syrien, un Afghan, il a 80% de chances d'être protégé.
03:44 Est-ce qu'on le laisse à l'aide de demandeurs d'asile qui est de quelques 400 euros ? Ou
03:48 est-ce qu'on l'autorise à travailler, à payer des cotisations et quelque part à
03:52 s'intégrer ? Je pense que les alternatives, elles sont vite mises en balance.
03:55 Le MoDem a signé, le groupe Lyot a signé, le PS a signé, Europe Ecologie Les Verts
04:00 a signé, le PCF a signé, la LFI ne signe pas.
04:03 Après, chacun est mis devant ses responsabilités.
04:06 Il y a une cohérence de la gauche à pouvoir dire que ces mesures sont acceptables.
04:09 On verra ensuite comment c'est fait dans le cadre de l'également des mesures.
04:12 Vous parlez de cohérence de la gauche, il n'y a pas la LFI avec vous.
04:14 Mais la France Insoumise, moi je regrette cette façon un peu systématique de se placer
04:19 dans l'opposition, de se draper dans une forme de vertu et quelque part de faire oeuvre
04:23 de sectarisme.
04:24 Parce que pour le coup, je ne vois pas ce qui les aurait empêchés de pouvoir soutenir
04:27 ces dispositions.
04:28 Peut-être précisément parce que dans le texte de loi dont vous parlez, il y a un volet
04:32 de régularisation et d'accès au travail des sans-papiers et un autre qui est raffermi
04:36 et qui accélère les institutions.
04:37 Et parce qu'il faut lever l'hypocrisie ?
04:38 Et que peut-être, peut-être, une partie de la gauche refuse de cautionner le volet
04:43 social pour ne pas vous renforcer sur le volet autoritaire ?
04:47 Mais moi encore, j'embrasse toute la réalité de ce qu'on voit dans le pays.
04:51 Est-ce que dans les villes en France, on a un surcroît, ou en tout cas une grande proportion
04:56 de délinquants, ce qui est aussi d'origine étrangère ?
04:57 C'est vrai.
04:58 Et est-ce que c'est grave de le dire ?
04:59 Non.
05:00 Il faut regarder les choses en face.
05:02 Est-ce qu'en France, on a un problème dans les métiers en tension, qui ne vivent aujourd'hui
05:05 dans la propreté, dans le bâtiment, dans les métiers du médico-social, dans les métiers
05:10 médicals ?
05:11 Est-ce qu'ils ne vivent que parce qu'il y a un soutien extrêmement important de la
05:15 main d'œuvre étrangère ?
05:16 Oui, c'est vrai.
05:17 Et notre but à nous, c'est de dire qu'est-ce que vit le pays, qu'est-ce que rencontrent
05:20 les gens sur le territoire, qui sont les gens dans nos permanences et qu'est-ce qu'ils
05:23 nous demandent ?
05:24 Et comment on règle les problèmes ?
05:25 Et je pense que c'est faire œuvre utile que de nommer les problèmes et de chercher
05:29 avec des gens, parfois la droite, parfois la gauche, à les résoudre et à prêtre
05:33 que chacun prenne ses responsabilités.
05:34 Alors en attendant, la droite, vous ne l'aurez pas tant que vous proposez de régulariser
05:38 les travailleurs sans papier.
05:40 La droite, vous ne l'aurez pas.
05:42 À moins que…
05:43 À moins que…
05:44 À moins que…
05:45 Vous savez, d'abord, je pense que la droite, elle a des exigences qui sont au-delà même
05:48 des médias en tension beaucoup plus importantes et qui ne sont pas acceptables.
05:52 La sortie des traités européens notamment.
05:53 Oui.
05:54 Ensuite, il y a la faculté de faire baisser…
05:55 Vous pensez que le bloc de droite peut se fissurer là-dessus ?
05:57 Je pense qu'il y a des députés qui peuvent reconnaître que des employeurs leur demandent
06:02 des papiers pour leurs travailleurs.
06:03 Je pense que ça peut justifier des abstentions sur le texte.
06:06 Et le cas échéant, je pense que ces mesures étant toutes populaires, les expulsions
06:10 comme les régularisations, elles peuvent être soutenues par la population.
06:15 Et pourquoi pas un 49-3 populaire ?
06:17 Un 49-3 populaire ? Ce serait une première ?
06:19 C'est-à-dire qu'à partir du moment où tous les gens constatent que ces réalités
06:23 sont des réalités de terrain et qu'on a besoin de mesures législatives, de lois,
06:27 de lois pour changer les choses, il faut bien faire adopter la loi.
06:29 Et si toute la population nous soutient, alors il faut assumer de pouvoir aller au
06:33 vote ou alors de faire adopter des lois.
06:35 Ou alors d'amoindrir ce texte.
06:38 Ou alors de l'amender.
06:39 Ou alors de faire sortir ce fameux article 3.
06:41 C'est-à-dire qu'Elisabeth Borne a laissé entendre au printemps que pour satisfaire
06:47 la droite, on pourrait renoncer à ce fameux volet de régularisation des sans-papiers.
06:52 D'abord, ce que je veux dire c'est que toute la majorité est d'accord sur le fait
06:55 qu'il faille bouger sur cette question.
06:57 Il y a ensuite des questions de forme.
06:58 Est-ce qu'on le fait par une loi réglementaire, des circulaires, des décrets, tout ça ?
07:01 Ou est-ce qu'on le fait par une loi ?
07:02 Moi je dis que pour que ce soit efficace, pour que vraiment on change les choses, pour
07:05 que dans les préfectures il y ait une action qui soit réelle de l'État, il faut que
07:10 ce soit une loi.
07:11 Sans ça, on n'aura pas fait œuvre utile parce que ça n'aura pas évolué.
07:15 Pour satisfaire la droite, on va renoncer à la loi.
07:21 Et on va proposer une circulaire.
07:24 Et comme ça, ça sera au bon vouloir des préfets.
07:26 Fort heureusement, au Parlement, il y a une droite et une gauche.
07:30 Donc chacun sera mis dans ses responsabilités ensuite quand viendra le texte.
07:34 Aujourd'hui, on a une action pour dire qu'il y a certaines mesures du texte qui sont bien.
07:37 Ces mesures doivent être adoptées.
07:39 La loi doit évoluer.
07:40 Et moi je salue ceux qui ont eu le courage de le reconnaître et j'espère qu'ils
07:43 iront au bout.
07:44 Gérald Darmanin est pour des quotas en matière de régularisation.
07:49 Et vous ?
07:50 Moi je pense que ces quotas-là, ils n'ont pas beaucoup de sens ni dans le travail, ni
07:54 dans l'asile.
07:55 Mais ça fait partie de la discussion et chacun fait valoir ses positions.
07:58 Pourquoi ils n'ont pas beaucoup de sens ?
07:59 Parce qu'en fait, quand vous fixez un quota à 10 000 et que vous avez besoin de 30 000
08:03 travailleurs, ce quota de 10 000 ne suffit pas.
08:04 Et puis quand vous fixez un quota à 10 000 mais qu'en réalité on n'aurait besoin
08:07 que de 3 000 travailleurs, ce quota est bien excessif.
08:10 Ça montre un peu le côté arbitraire des chiffres.
08:11 Et le référendum ?
08:12 Le fameux serpent de mer du référendum sur l'immigration ?
08:16 Là encore, le problème du référendum sur l'immigration, c'est que comme il n'est
08:20 pas permis aujourd'hui par la Constitution, il faudrait d'abord changer la Constitution
08:24 et faire un référendum sur le référendum.
08:27 Vous voyez que tout ça est une démarche un peu compliquée.
08:30 Et je pense que pour le coup, on a aujourd'hui, malgré la majorité des relatives, l'opportunité
08:35 de faire bouger des choses.
08:36 On l'a déjà fait sur des textes sur la sécurité.
08:38 On a renforcé des mesures sur le stupéfiant.
08:41 On les étudiera d'ailleurs à la Commission des lois pour voir si ça marche et ce qu'il
08:44 y a encore à faire.
08:45 Mais pour le coup, je pense qu'on peut déjà changer les choses.
08:48 Et vous, Sacha Oulier, vous, d'accord ?
08:51 Si jamais l'exécutif retire de ce texte l'article 3 sur la régularisation de la
08:56 main d'œuvre sans papier, vous voterez contre ?
08:59 Moi, je ne fais pas de chantage, mais effectivement, je vais vous dire, je ne fais pas de chantage,
09:02 mais par contre, j'ai quelques exigences et celle-là en fait partie.
09:04 Donc, vous voterez contre ?
09:05 Ça fait partie de mes exigences.
09:07 Bonne journée.