Lorsque Netflix fait des fictions, cela donne souvent des productions woke un peu pénible. Mais là avec "Painkiller", on aborde le plus grand scandale sanitaire américain, de Big Pharma comme disent certains. On dénombre 500 000 morts de l’Oxycontin depuis l’an 2000. Pour en parler, nous avons invité l’actrice franco-américaine aux 50 films et séries, Béatrice Rosen, qui est beaucoup intervenue pendant la crise du covid.
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AmusantTranscription
00:00 Bonjour, aujourd'hui nous allons parler du plus grand scandale sanitaire américain,
00:07 de Big Pharma comme on dit maintenant.
00:08 Pour ce faire, j'ai invité une actrice américaine, Béatrice Rosen, qui est très
00:13 impliquée dans la politique sanitaire et sur le Covid.
00:16 *Générique*
00:45 Béatrice Rosen, bonjour.
00:47 Bonjour, merci de m'inviter.
00:48 Je vous en prie.
00:49 Vous êtes donc actrice, vous avez joué dans 23 films dont "Dark Knight" de Kirsten
00:54 Batman, 2012, également dans 27 séries et téléfilms, dans une pièce de théâtre
01:00 avec Berlard Tapie.
01:01 Je ne désespère pas de faire une émission avec vous sur les deux séries de Berlard
01:06 Tapie, mais enfin bon, on verra.
01:08 Donc vous êtes également chroniqueuse maintenant à TPMP, vous êtes ce qu'on appelle une
01:13 influenceuse, vous intervenez pas mal sur le Covid et sur des questions sanitaires, vous
01:18 êtes donc la personne qui a les clés, je dirais, de compréhension de "pain killer".
01:22 Alors "pain killer", qu'est-ce que ça veut dire ?
01:24 Alors, "pain killer", littéralement, ça veut dire "tueur de douleur".
01:30 Voilà, donc je pense que ce n'est pas anodin comme titre, évidemment c'est le nom usuel
01:35 pour un antidouleur, ce qu'on appelle nous un antidouleur, mais d'utiliser le mot "killer"
01:40 dans le titre, je pense que c'est évidemment percutant et c'est à double tranchant, étant
01:45 donné que c'est un médicament qui a été surprescrit et ça a donné des morts.
01:52 Des morts.
01:53 Alors, le pitch c'est très simple, le résumé, le pitch comme on dit dans votre pays, donc
01:57 j'essaie de m'adapter.
01:59 Donc le pitch c'est l'oxycomptin qui est une molécule qui est l'oxydone, qui a été
02:05 inventée en 1916, qui a été choisie donc par Purdue Pharma, qui est très addictive.
02:13 Vous nous direz si c'était intentionnel ou pas le côté addictif, la série elle
02:19 laisse entendre que oui, quand même.
02:21 Et donc cette molécule a fait un très très grand nombre de morts.
02:26 On lui a reproché une espèce de politique commerciale poussée à l'extrême, donc
02:33 ils ont recruté des jeunes filles blondes en faculté de médecine pour aller user de
02:38 leur charme auprès des médecins, pour leur fixer des quotas ou quasiment, et puis elles
02:44 vont les voir rouler en voiture de sport.
02:47 C'est un peu excessif, mais c'est comme ça en Amérique ou au pays de la liberté
02:52 mais aussi du commerce royal.
02:53 Alors, pour revenir sur la série, en fait c'est une série vraiment de bonne qualité,
02:57 je la conseille même en tant que divertissement.
02:59 Peter Berg, qui a été primé à Hollywood, c'est le réalisateur, vraiment a fait un
03:03 très bon travail.
03:04 En ce qui concerne l'intention de départ du laboratoire et de la famille qui détient
03:09 le laboratoire, dans la série, ils laissent planer un petit peu le doute.
03:13 En fait, on ne sait pas si c'était complètement intentionnel dès le départ de mentir sur
03:19 le côté addictif du médicament, sur le degré d'addiction que créait ce médicament,
03:24 ou si en fait les protagonistes sont laissés entraîner dans le succès qu'avait ce médicament
03:33 et les bénéfices engrangés.
03:36 On n'arrive pas à savoir exactement l'intention, on n'est pas dans la tête de ces gens de
03:42 toute façon, et sans procès on ne peut pas parler à leur place.
03:47 Mais en tout cas, le doute plane et donc cette série est une enquête sur la fabrication,
03:54 la mécanique de ce scandale qui est arrivé à faire 500 000 morts et à avoir des accords
04:02 juridiques entre le cabinet de conseil qui a fabriqué la stratégie du laboratoire pour
04:08 vendre et prescrire en masse ce médicament.
04:12 Et donc ce cabinet de conseil, c'était McKinsey, et ça a mené aussi à un accord
04:19 juridique avec le laboratoire et la justice américaine, et la Cour suprême cet été
04:26 vient de suspendre cet accord juridique avec le laboratoire.
04:30 – On va voir ça, on va voir ça.
04:32 Vous dites "on n'est pas dans la tête de ceux qui ont vendu et fabriqué", je suis d'accord,
04:37 alors la série, elle fait quand même une allusion assez forte puisqu'on voit le PDG
04:42 de Purdue dire "la vie est un balancier qui oscille entre la douleur et le plaisir,
04:52 si on arrive à mettre le balancier au milieu, il n'y aura plus de problème d'argent
04:56 pour Purdue".
04:58 C'est donc une phrase assez cynique et assez dure quand même, je ne sais pas si elle est
05:03 réelle ou si elle n'est pas réelle, la série se veut à la fois, comment dirais-je,
05:09 une histoire vraie, mais qui prend quand même des libertés.
05:12 – Alors je pense qu'en fait, au début de chaque épisode, il y a 6 épisodes,
05:15 au début de chaque épisode il y a un disclaimer, c'est-à-dire qu'ils disent que les personnages
05:19 sont fictifs, etc. – C'est comme un tapis, c'est pour éviter le procès.
05:23 – C'est pour éviter le procès, et pour contrebalancer cette obligation juridique,
05:27 le réalisateur a fait venir au début de chaque épisode, et ça c'est assez poignant,
05:32 une famille qui a perdu un enfant ou un membre de sa famille et qui témoigne.
05:38 Et donc il y a un mini témoignage au début de chaque épisode qui dit voilà…
05:41 – Avec pas mal de dignité.
05:43 – Avec beaucoup de dignité, mais en même temps ça rend le témoignage d'autant plus poignant.
05:47 – Non, c'est vrai.
05:48 – Et ils disent voilà, la série est fictive, mais mon histoire ne l'est pas,
05:52 et mon enfant, avec l'image de leur enfant, et on voit que ça a touché toutes les catégories
05:57 sociales, des gens très jeunes, parfois des classes moyennes supérieures,
06:03 il y a eu aussi beaucoup de classes moyennes et classes populaires,
06:07 parce que le travail avec une pénibilité physique devait être compensé
06:12 par une prescription médicamenteuse, et on voit là tout le cynisme,
06:18 et comme vous dites, en fait, cette série, si on devait la résumer à un mot,
06:23 c'est le cynisme, c'est-à-dire qu'on y voit tout le cynisme qu'il y a
06:27 dans le business de la santé, et c'est ça qui parfois peut surprendre,
06:31 parce qu'on pense que les autorités, même médicales, que tout le monde
06:35 veut notre bien, et en fait, il y a un élément très cynique dans tout ça.
06:40 – Alors il y a eu ça, vous allez le rappeler, depuis l'an 2000,
06:43 il y a eu 500 000 morts, donc c'est quand même pas rien,
06:47 c'est-à-dire la moitié que le Covid, qui est un peu surreprésenté aux États-Unis aussi,
06:52 donc la moitié du Covid aux États-Unis, pourquoi une telle hécatombe
06:57 n'est pas extrêmement médiatisée ? Je veux dire par là,
07:00 quand on regardait par exemple le Covid, on avait tous les jours un décompte
07:05 avec le nombre de morts du jour, une totalisation, etc.
07:09 Là, il y a 500 000 morts en… je ne sais pas, il n'y a pas de compteur.
07:15 – Alors aux États-Unis, on en a parlé médiatiquement,
07:18 c'est vrai qu'en France, en tout cas, on en a très peu,
07:21 les gens ne sont pas vraiment au courant de ce scandale sanitaire
07:24 et donc ça a été traité de façon complètement différente.
07:28 Est-ce que c'est pour ne pas mettre un soupçon sur les laboratoires
07:33 ou sur le marketing justement lié à la santé ?
07:36 Quelles sont les raisons de cette non-médiatisation ?
07:40 Je ne sais pas, et effectivement aux États-Unis,
07:42 on parle quand même d'épidémie de consommation d'opioïdes.
07:49 Donc il y a quand même ce facteur épidémique,
07:52 comme le Covid est une épidémie,
07:54 on parle d'épidémie de consommation d'opioïdes qui a tué autant.
07:58 Donc effectivement, c'est étonnant et on comprend donc
08:01 que les causes de mortalité ne sont pas égales et traitées de la même façon
08:06 et qu'il y a peut-être des raisons politiques et financières
08:09 à les traiter différemment.
08:11 – Oui, parce que le Covid, ça a été un traumatisme immédiat,
08:16 international et immédiat, on en a parlé partout,
08:20 alors que là, c'est une affaire qui traîne en fait depuis 1990,
08:24 le procès a lieu en… la Boîte dépose son bilan en 2019,
08:30 enfin les procès sont en cours,
08:32 donc c'est quand même une affaire sur au moins 30 ans, bas mot quoi.
08:35 – La vraie différence en fait avec le Covid,
08:37 c'est qu'au début le Covid, il y avait cet aspect très mystérieux,
08:41 c'était quelque chose de nouveau qu'on ne connaissait pas,
08:44 alors qu'en fait, l'Oxycontine, dedans il y a des choses,
08:48 bon je ne suis pas médecin, je ne veux pas du tout,
08:51 mais il y a des choses qui sont proches, issues de l'héroïne,
08:55 ou un mélange ou quelque chose en rapport avec l'héroïne,
08:58 qu'on connaît déjà, et donc les dynamiques en fait
09:02 de traitement médiatique et même de traitement de vente des médicaments
09:06 étaient complètement différentes, et c'est vrai qu'on voit
09:10 le côté politique qui vient se mêler à tout ça,
09:14 pour traiter une information, peu importe le nombre de morts au final,
09:17 même s'il est similaire.
09:19 – Alors on voit un truc assez incroyable,
09:21 enfin je pense que ça existe en France aussi,
09:23 mais ils ont des réunions de brainstorming pour trouver le bon nom,
09:27 parce que c'est la clé de voûte du médicament,
09:31 et donc ils lancent des mots comme ça en l'air,
09:35 en essayant de trouver un mot qui ne reflète ni la douleur,
09:39 ni la mort, ni le cancer, ni des choses comme ça,
09:42 donc cette espèce de marketisation, de merchandisation de la santé,
09:48 ça vous choque ?
09:49 – Moi ça me choque en fait, justement je trouve que cette série
09:53 est d'utilité publique parce qu'on voit le mécanisme derrière
09:57 la vente d'un produit médicamenteux, et on croit, on a cette idée,
10:03 cette illusion, encore une fois, que tout le monde veut notre bien,
10:06 alors qu'en fait, dans cette industrie, un médicament c'est un produit,
10:11 et donc il faut le vendre, le rendre attractif, le rendre peut-être
10:15 parfois sexy, ou peu importe quel adjectif, pour pouvoir le vendre au maximum,
10:22 et on voit que non seulement sur le nom, mais même sur la stratégie
10:25 qui a été pensée, le cynisme a été immense en amont et en aval,
10:29 en amont parce que finalement ça a été une responsabilisation
10:36 de toute la chaîne des intervenants, c'est-à-dire du laboratoire
10:40 aux filles qui faisaient les commerciales, aux médecins qui surprescrivaient,
10:46 qui étaient incités à prescrire des doses même plus importantes
10:49 pour avoir des bonus, enfin on voit le cynisme et finalement
10:52 la dilution de la responsabilité, parce que c'est une façon
10:57 de culpabiliser tout le monde s'il y a un problème, et ça rappelle un petit peu,
11:01 en tout cas moi ça m'a rappelé un petit peu la crise sanitaire du Covid,
11:04 où finalement on a eu cette distribution de la responsabilité
11:08 à tous les échelons, et donc ça, ça me choque, ça me choque.
11:12 – L'analogie avec le Covid, à mon avis, c'est double,
11:15 d'abord se pose la question de la sincérité de l'industrie pharmaceutique,
11:18 ça vous allez m'en dire un mot, et ensuite, il y a quand même
11:23 une grosse différence entre le Covid et ça, c'est que dans le Covid,
11:27 on a un retour à feedback, comme on dit chez vous,
11:30 un retour d'informations sur l'engorgement des hôpitaux, etc.
11:35 Là, il y a beaucoup de gens qui meurent, on voit dans la série
11:39 que finalement il y a une espèce de divorce entre les médecins
11:42 qui prescrivent à outrance, et de l'autre côté le secteur hospitalier
11:46 qui lui ramasse les corps et traite les gens.
11:51 Donc là, il y a une petite différence.
11:53 Alors, sur la sincérité de l'industrie pharmaceutique,
11:57 est-ce que vous croyez qu'on doit faire une analogie avec le Covid ou pas ?
12:01 – Moi, je pense qu'il faut analyser tous ces sujets de façon pas binaire,
12:08 c'est-à-dire, c'est pas tous des gentils ou tous des méchants,
12:11 c'est pas manichéen, c'est-à-dire que c'est une industrie,
12:14 évidemment que les laboratoires doivent vivre, faire de l'investissement
12:18 pour la recherche, nous on a besoin de médicaments pour se soigner,
12:22 donc il ne faut pas non plus jeter le bébé avec l'eau du bain.
12:25 Maintenant, ce qu'il faut, je pense, c'est réguler au maximum
12:28 pour éviter les dérives et pour éviter de tomber dans ce cynisme
12:33 qui au final coûte des vies sous prétexte d'en sauver.
12:37 Le slogan pendant le Covid, c'était "oui, on sauve des vies, on sauve des vies",
12:41 mais parfois, on peut malheureusement le tuer au nom de sauver des vies.
12:47 Donc c'est vraiment, il faut que les organismes de régulation et de contrôle
12:54 soient extrêmement forts, pertinents et effectifs.
13:00 Et justement, dans cette série, en tout cas comme le réalisateur l'a traité,
13:05 le rôle de l'agent de la FDA est majeur, qui s'appelle Curtis Wright,
13:10 c'est un homme qui est encore vivant, et en fait, on voit,
13:14 on a l'impression que quand un médicament doit être approuvé,
13:18 il y a tout un panel, on fait des tests, il se passe plein de choses,
13:22 et là, on s'est rendu compte avec cette série qu'il n'y avait qu'un seul homme
13:26 qui était responsable, qui n'a pas de laboratoire,
13:29 qui était dans son bureau et qui révisait les données qu'on lui fournissait.
13:33 Un camp administratif.
13:35 Et qui a décidé à lui tout seul de la validation de ce médicament.
13:40 Après l'avoir refusé de nombreuses fois.
13:42 Il avait l'air d'être assez éthique, en tout cas, je me base sur ce qui est dit dans la série.
13:47 Donc ça, c'est la vision de Peter Berg.
13:50 Il avait l'air assez éthique, et en fait, au fur et à mesure,
13:54 on l'a amadoué, le laboratoire l'a invité, a fini par l'inviter deux jours dans un hôtel,
14:01 où on ne sait pas ce qu'il s'est passé, quand il est sorti de l'hôtel,
14:03 ça c'est une scène de la série, quand il sort de l'hôtel,
14:06 après, on ne sait pas quoi, il valide tout d'un coup ce médicament
14:11 que pourtant il avait refusé maintes fois.
14:14 Et comme par hasard, un an après, il quitte son travail,
14:17 où il gagnait à peu près, en tout cas, c'est ce qui est dit par Peter Berg,
14:21 dans les 50 000 dollars par an, pour accepter un travail
14:25 chez le laboratoire en question, chez Purdue,
14:28 où là, il gagnait plus de 400 000 dollars par an.
14:31 Donc on comprend en creux qu'il y a dû avoir des petites choses
14:36 qui se sont passées dans cet hôtel.
14:38 – Il y a une chose qui peut peut-être expliquer quand même aussi
14:41 le fait qu'il y ait eu plus de dégâts aux États-Unis et au Canada, d'ailleurs,
14:46 qu'en Europe, c'est deux choses.
14:48 Premièrement, c'est un médicament qui existe toujours, ça c'est sûr,
14:54 il est utile, quand quelqu'un a un cancer en phase terminale,
14:57 ne pas souffrir, c'est formidable, mais aux États-Unis,
15:01 il était accordé de manière, je dirais, extrêmement libre,
15:06 pour des mots pas très importants.
15:11 – Oui, parce qu'ils se sont basés sur une ligne publiée
15:17 dans un journal scientifique qui disait que probablement,
15:21 on pensait que ce n'était pas aussi addictif que d'autres antidouleurs opioïdes.
15:28 Et sur ce "peut-être", "on pense", qui ne veut rien dire,
15:31 qui est le "on qui pense", toute la stratégie pour convaincre les médecins,
15:38 c'est basé sur ça, sur des éléments de langage, finalement,
15:42 au lieu de preuves solides et tangibles,
15:45 ce sont basés sur des éléments de langage,
15:47 en tout cas c'est ce qui est dit dans la série, pour convaincre.
15:50 Et finalement, ça a pris comme une traînée de poudre,
15:53 parce que c'était efficace dans le sens où les gens n'avaient plus mal
15:56 et pouvaient reprendre leur vie, et il y a des douleurs chroniques
16:00 qui rendent la vie très compliquée.
16:02 - Oui, bien sûr, et accidents de travail, choses comme ça.
16:04 - Absolument, et donc ça a eu un succès phénoménal,
16:07 il y a eu des campagnes de publicité.
16:09 - Il y a eu un succès phénoménal, mais aussi, je pense qu'il y a une grande différence,
16:13 c'est que le rapport de l'américain avec le médicament
16:16 est différent du rapport avec l'européen.
16:18 Moi, quand je vois une bouteille, une boite de Liprane,
16:23 il y a marqué "dangereux" et en dessous,
16:27 "un surdosage peut entraîner la destruction du foie".
16:30 C'est en toute lettre, à moins d'être aveugle,
16:33 je ne vais pas avaler la boite de Liprane.
16:36 Donc, aux États-Unis, les médicaments ne sont pas distribués comme ça.
16:40 D'abord, un grand nombre de médicaments sont en libre-service,
16:44 pas ceux-là, bien sûr, mais ça a tendance à donner la frontière
16:48 entre d'un côté les médicaments et de l'autre côté la grande consommation,
16:53 une frontière un peu ténue, si j'ose dire.
16:56 La deuxième des choses, c'est qu'ils sont vendus à l'unité,
16:59 on en parle en ce moment en France,
17:01 de vendre des médicaments à l'unité.
17:03 C'est peut-être très bien, je n'ai pas d'avis sur la question,
17:06 mais ils sont mis dans des petites boites.
17:08 - Des flacons transparents avec des autocollants dessus.
17:11 - Il n'y a pas de notice.
17:13 - Il y a des petites lignes.
17:15 - Nous, on a une notice.
17:17 - Et on peut faire des publicités.
17:19 Ayant vécu là-bas longtemps, on voit des publicités
17:22 pour des médicaments à la télévision,
17:24 et à la fin, ils disent "demandez à votre médecin"
17:27 et puis s'en suit, parce que juridiquement,
17:29 ils sont obligés, la litanie des effets secondaires
17:32 qui sont mentionnés, mais ils sont mentionnés en ultra-accéléré.
17:36 Donc on a "ça fait mal au cœur et mal au ventre blablabla".
17:40 - Comme les mentions légales à la radio.
17:42 - Mais les mentions légales, finalement, ça désensibilise,
17:46 ça a au final l'effet inverse de ce que ça devait avoir,
17:51 parce que ça désensibilise,
17:53 on en entend tellement toute la journée.
17:55 - Il peut y avoir de la puce sur les médicaments aux Etats-Unis ?
17:57 - En tout cas, moi, quand j'y étais, il y avait de la puce.
17:59 - Parce qu'en France, non, il n'y en a pas.
18:01 - Là-bas, il y en avait, mais je vous dis,
18:03 avec cette mention légale qui, finalement,
18:05 désensibilise, parce qu'on entend tellement
18:07 toute la litanie qu'on s'y habitue,
18:09 et on n'y fait plus attention.
18:11 - Il y a un truc assez incroyable dans la série,
18:14 c'est qu'il parle d'une première action
18:16 qui a été intentée et qui a été étouffée.
18:19 Il a l'air de dire que ça vient de la présidence
18:22 de la République.
18:24 Je ne dis pas le président, de la présidence,
18:26 donc peut-être l'entourage.
18:28 Ça veut dire que le lobby pharmaceutique aux Etats-Unis
18:32 est aussi puissant que celui des armes ?
18:35 - Je ne sais pas si c'est aussi puissant
18:37 que celui des armes, mais je sais que c'est
18:39 un lobby extrêmement puissant.
18:41 Par exemple, il me semble que les Grammys,
18:45 quand on voyait les Grammys, il n'y a pas longtemps,
18:48 on voit à chaque arrêt pub,
18:50 les Grammys sont apportés par tel laboratoire,
18:55 et on voit le logo qui sponsorise
18:58 des événements majeurs comme ça.
19:00 Il y a des lobbies, évidemment,
19:02 chez les politiciens, etc.,
19:04 qui financent des campagnes.
19:06 Donc oui, évidemment, tout ça,
19:09 c'est très problématique.
19:10 C'est un vaste sujet qui pourrait faire
19:12 une émission en soi, parce qu'à quel moment
19:15 les conflits, les liens d'intérêt
19:17 deviennent des conflits d'intérêt.
19:19 Ça, c'est une question qu'on se pose tous.
19:21 Il y a une opacité dans les prises de décision.
19:25 On l'a vu même à l'Union européenne.
19:28 C'est quand même incroyable que tout ce qui était
19:34 vaccination, etc., ait été payé par les impôts
19:38 et donc par les contribuables,
19:40 et que les contribuables n'aient pas accès
19:42 en transparence aux contrats,
19:44 et de savoir comment ça a été négocié, etc.
19:46 Ça, en soi, peu importe le médicament dont on parle,
19:50 c'est un peu choquant quand même.
19:52 Oui, bien sûr.
19:53 C'est un sujet aussi.
19:54 Oui, bien sûr, c'est un sujet, oui.
19:56 Et donc cette série, finalement,
19:58 est intéressante et pertinente actuellement,
20:01 et extrêmement pertinente,
20:03 parce que ça fait se poser toutes ces questions-là,
20:06 et on prend conscience des intérêts
20:09 dans tous les sens, en fait.
20:11 Alors, vous me disiez tout à l'heure,
20:13 avant l'émission, qu'il y a une chose
20:15 dont ne parle pas la série,
20:17 certainement pour des questions juridiques,
20:19 c'est le rôle de McKinsey.
20:21 Est-ce que vous pouvez nous en dire un mot ?
20:23 Alors, en fait, je pense que c'est pour des raisons juridiques,
20:27 parce que McKinsey, ça a été répartorié
20:29 dans des articles de presse, du Figaro,
20:31 et à l'international,
20:33 McKinsey était à la source
20:36 de cette stratégie vraiment précise
20:39 d'aller démarcher les médecins,
20:42 et de faire comme ça,
20:44 pour les inciter à vendre
20:46 par des petites commerciales,
20:48 en exploitant donc avec cynisme
20:50 tout, finalement, toutes les failles
20:52 de l'être humain, de la séduction,
20:54 des rap... Bon, voilà, c'est comme ça,
20:56 le monde est comme ça,
20:58 et en fait, en 2021, il y a eu un accord juridique
21:01 entre McKinsey et la justice américaine,
21:03 parce qu'ils étaient donc poursuivis
21:05 par les familles, par certains États,
21:08 un accord juridique,
21:10 et ils n'ont jamais reconnu
21:13 ni réfuté leur culpabilité,
21:15 si vous voulez, donc c'est resté au statu quo,
21:17 mais ils ont quand même payé 600 millions de dollars
21:19 pour que ça s'arrête,
21:21 que les poursuites s'arrêtent,
21:23 donc en soi, c'est... Voilà,
21:25 chacun en déduira ce qu'il veut
21:27 quand on paye 600 millions de dollars,
21:29 mais officiellement, ils n'ont jamais dit
21:32 qu'ils avaient fauté,
21:34 donc je pense que la série,
21:36 peut-être pour se protéger juridiquement,
21:38 de ne plus mêler leur nom
21:40 à... Voilà, aux épisodes,
21:42 mais en tout cas, le rôle est documenté,
21:45 et n'importe qui peut chercher...
21:47 – Le bilan de l'histoire,
21:49 c'est qu'au fond, en 2016,
21:52 la famille qui possède Purdue
21:55 est la 16e famille la plus riche des États-Unis,
21:59 que l'entreprise a fait 36 milliards de bénéfices
22:04 rien qu'avec l'OxyContin,
22:06 elle avait proposé de donner
22:08 4 milliards d'indemnités,
22:10 elle a...
22:11 – Alors c'est 6 milliards,
22:13 ils ont... Alors voilà,
22:15 il y a eu un accord juridique qui a été fait,
22:18 qui a été trouvé avec le laboratoire,
22:20 la famille qui détenait le laboratoire
22:22 a mis le laboratoire en faillite,
22:24 donc c'est une procédure légale
22:26 de mise en faillite,
22:27 et ils devaient payer 600 milliards d'indemnités,
22:30 en échange de quoi,
22:32 le laboratoire ne ferait plus face
22:34 à des poursuites plus jamais,
22:36 et ils ont demandé à ce que leur famille,
22:39 en nom propre,
22:40 donc pas juste leur entreprise, leur laboratoire,
22:42 mais en nom propre,
22:43 leur famille ne soit plus jamais poursuivie,
22:45 et là, coup de théâtre,
22:47 quelques jours avant la sortie de cette série,
22:50 donc est-ce un hasard ou pas,
22:52 ou est-ce que les projecteurs,
22:53 étant focalisés sur cette histoire,
22:55 ont fait que ça a fait bouger les choses,
22:57 on ne sait pas trop,
22:58 la Cour suprême aux États-Unis
23:00 a suspendu cet accord juridique,
23:02 pour réévaluer,
23:04 pour voir s'il n'y avait peut-être pas
23:06 une façon de fuir ces responsabilités,
23:10 en nom propre,
23:12 et un abus de mise en faillite,
23:14 parce que ce sont des gens très riches,
23:16 c'est-à-dire que même après les 6 milliards,
23:18 ils sont encore très riches.
23:21 Donc on n'a pas encore la réponse
23:24 de ce que va dire la Cour suprême
23:27 sur ce dossier,
23:28 mais moi j'ai trouvé ça très intéressant,
23:30 parce que ça peut créer une jurisprudence
23:32 pour des prochains scandales sanitaires,
23:35 en cours et à venir, potentiellement,
23:39 et donc c'est vraiment quelque chose à suivre,
23:42 de notre part à tous en tant que citoyens,
23:45 cette décision américaine,
23:46 parce que ça va vraiment avoir un impact
23:48 sur comment vont être gérés
23:49 tous les scandales sanitaires
23:50 liés à des laboratoires, etc.,
23:52 à partir de la réponse à cette question.
23:56 – Alors j'ai vu qu'il y avait
23:58 trois grandes majors du monde pharmaceutique,
24:01 si j'ose dire,
24:02 qui avaient été condamnés également à 24 milliards,
24:05 toujours dans, comment dirais-je,
24:07 dans cette crise des opioïdes,
24:08 ça fait donc 30 milliards en tout,
24:10 on peut se dire que c'est beaucoup,
24:12 mais si vous faites la division par 500 000,
24:15 ça fait 60 000 dollars par mort.
24:18 – Et puis 500 000, ça c'est le nombre de morts,
24:20 mais combien de personnes sont encore vivantes
24:23 mais ont des séquelles, ont leur vie foutue,
24:26 et toutes les familles, c'est 500 000 morts,
24:29 mais chaque famille, si on dit qu'il y a 5 à 10 personnes
24:32 ou 20 personnes par famille,
24:33 vous comprenez, c'est multiplier la vie
24:35 de millions de gens qui ont été impactés
24:37 par ce scandale.
24:38 Et c'est ça, souvent, qu'on oublie
24:40 dans tous ces scandales sanitaires,
24:41 c'est que c'est pas…
24:42 Évidemment, il y a la victime qui l'a vécue dans sa chair,
24:45 mais il y a aussi les familles,
24:46 il y a aussi les proches,
24:48 c'est des vies foutues, quoi.
24:50 – Bien sûr.
24:51 – Et vraiment, ça, il y a un manque…
24:52 – Bien sûr, bien sûr.
24:53 – Dans la justice, on le voit tous les jours
24:54 sur d'autres sujets,
24:55 il y a un manque, quand même, d'empathie, parfois,
24:57 et d'humanité, de comprendre ce que ça veut dire,
25:00 tout ça, en fait.
25:01 C'est pas juste un chiffre, 500 000 morts,
25:03 ça représente vraiment des…
25:04 Et c'est ça qui touche, et c'est important,
25:06 parce qu'encore une fois, on voit des vraies victimes
25:09 en début de chaque…
25:10 C'est très rapide, mais on les voit, quand même.
25:13 – À propos de la notation de la série,
25:16 je prends "Aller au ciné",
25:17 parce que "Aller au ciné", c'est quand même le seul truc,
25:19 je ne voulais pas prendre le nombre d'étoiles
25:21 donnés par Netflix,
25:23 parce que là, évidemment, à mon avis,
25:25 c'est pas probant, c'est un peu opaque aussi.
25:29 Donc, "Aller au ciné",
25:32 les téléspectateurs mettent 4 étoiles,
25:34 la presse, curieusement, n'en met que 3.
25:37 Moi, j'ai beaucoup aimé, et vous ?
25:39 – Moi, j'ai beaucoup aimé, et je vous dis,
25:41 je pense que c'est d'utilité publique,
25:43 alors même si c'est peut-être pas la perfection,
25:46 c'est pas une série qui aura un Emmy ou quoi,
25:51 moi, je pense que c'est vraiment d'utilité publique,
25:53 il faut que vraiment, j'encourage vraiment les gens
25:56 à regarder cette série, je l'ai trouvée très bien faite,
25:59 déjà, très bien fichue, très bien jouée,
26:01 les acteurs sont incroyables, c'est très bien réalisé,
26:04 et en plus, vraiment, le sujet est un sujet majeur,
26:08 et je suis contente que Netflix,
26:10 j'étais surprise que Netflix touche à un sujet aussi sensible,
26:14 étant donné la crise Covid, et tout de suite,
26:17 de traiter tout le monde de complotiste ou de ci ou de ça,
26:20 ça montre qu'il y a un sujet,
26:23 que c'est pas juste des fantasmes,
26:25 que parfois, il peut y avoir des dérives,
26:27 et qu'il faut vraiment être vigilant,
26:30 et c'est pas d'être complotiste ou je ne sais quoi,
26:33 d'en parler, au contraire, c'est s'équiper intellectuellement,
26:37 et on voit que, même en France,
26:39 il y a eu beaucoup de scandales, le sang contaminé,
26:41 déjà, je suis étonnée qu'il n'y ait pas une série, quelque part,
26:43 sur le sang contaminé. – Exactement, j'allais vous le dire.
26:46 – Ou Médiateur des Pâquines, enfin voilà,
26:48 et ça, encore une fois, ce sont des vies de vrais gens,
26:51 ce ne sont pas des statistiques.
26:53 – Alors ce que je trouve, c'est que Netflix,
26:55 lorsqu'ils font de la fiction,
26:57 se perdent dans une espèce de wokisme pénible.
26:59 – Pas là.
27:00 – Et quand ils font des sujets d'actualité,
27:03 en général, c'est de meilleure qualité,
27:05 et en ce qui concerne cette série "Pain Killer",
27:08 je trouve que vraiment, vous avez raison, c'est à voir.
27:11 Je vous remercie beaucoup, Médiatrice.
27:13 – Merci à vous.
27:14 – Et à bientôt.
27:15 – À bientôt.
27:16 – À bientôt.
27:17 [Générique]
27:47 [Générique]
27:48 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
27:51 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org