• il y a 2 ans
C'est lui qui est intervenu à Magnanville : Matthieu Langlois, médecin au Raid, répond aux questions de RTL Matin.
Regardez Le débat du 25 septembre 2023 avec Yves Calvi et Amandine Bégot.

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Transcription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 7h-9h, RTL Matin.
00:05 Il est 8h23, bonjour Mathieu Langlois.
00:09 Bonjour Yves Calvi.
00:10 Merci beaucoup d'être avec nous ce matin sur RTL. Vous êtes ancien médecin chef du RAID,
00:14 l'unité d'élite de notre police. Le procès de l'attaque de Magnanville s'ouvre donc aujourd'hui, sept ans après l'assassinat
00:19 de ce couple de policiers à leur domicile par un terroriste djihadiste. L'assaut que vous avez mené a permis
00:25 d'éliminer l'assaillant et de sauver la vie de leur petit garçon de 3 ans, Mathieu. Mathieu a aujourd'hui 11 ans, c'est un enfant
00:31 traumatisé, on le sait. Quel souvenir gardez-vous de ce drame, sept ans après les faits ?
00:35 Je vais commencer par une note positive.
00:37 C'est-à-dire que c'était une soirée très sombre, dramatique même. Et moi je garde un souvenir qui est une petite lumière
00:46 grâce aux policiers du RAID qui ont permis justement de récupérer cet enfant vivant.
00:52 Et j'ai eu une scène d'une intimité totale dans l'ambulance qu'allait ensuite l'emmener sur Paris et sur Necker,
01:00 où on s'est retrouvé avec le policier qui nous a aidés et qui a été le premier à le récupérer,
01:04 ce petit garçon et moi, et la souris, donc une petite tête blonde avec un petit sourire
01:11 malgré tout l'enfer qu'il venait de vivre. Et c'est ça, ce visage-là et cette émotion-là que je retiens
01:18 et qui nous motive, nous, pour faire ces métiers-là difficiles.
01:22 Vous nous dites "on avait fait notre boulot, quel que soit le drame auquel on était confronté,
01:25 et j'ai eu le sourire de cet enfant" qui est quoi pour vous ? Un signe d'espoir ?
01:29 Mais bien sûr, mais c'est l'image que je retiens de tout ça. Mais évidemment il y a eu plein d'autres
01:34 choses, mais l'image que je retiens, moi, c'est ce petit visage et ce petit sourire.
01:39 Et c'est ce qui nous nourrit au quotidien pour continuer à faire ces métiers.
01:43 Lorsque vous arrivez sur place,
01:45 est-ce que vous savez qu'il y a un enfant dans la maison ?
01:47 On l'apprend assez vite et en particulier on va utiliser le policier ami de la famille
01:53 qui s'appelle Eric, mais qu'on va appeler Canard parce que c'était son surnom et malheureusement qui nous a quitté l'année dernière.
01:59 Et c'est lui qui va apporter beaucoup d'informations, qui connaissait évidemment la famille, qui connaissait les lieux.
02:06 Ça va aider bien sûr pour réaliser l'intervention.
02:10 Mais ça va aussi nous aider dans la compréhension des différentes personnalités et différents choix qu'on va mettre en place
02:17 pour récupérer l'enfant.
02:19 Pardonnez-moi, je vous interromps, l'objectif à ce moment-là est bien de récupérer l'enfant ?
02:23 De toute façon, l'objectif est d'intervenir et d'éviter des blessures et de récupérer
02:29 tous ceux qui sont encore vivants.
02:31 On a eu vite
02:33 des éléments qui nous faisaient penser qu'elle était malheureusement décédée, mais on a gardé cette hypothèse.
02:39 Le mari ayant été lui-même, et l'extérieur ?
02:41 Le mari, malheureusement, Jean-Baptiste, on savait que c'était...
02:43 Mais pour Jessica, on a évidemment, il y avait beaucoup d'éléments très défavorables,
02:50 mais on garde toujours une hypothèse et une part d'incertitude.
02:53 Et donc pour le petit garçon,
02:56 évidemment c'était un objectif avec plusieurs hypothèses, il pouvait être mort, il pouvait être blessé, il pouvait être...
03:02 et c'était heureusement le dénouement,
03:05 pas blessé. Et dans ce cas-là, c'était ce fameux canard qui était le premier
03:12 qui connaissait cet enfant, qui le prendrait dans ses bras.
03:15 Je reviens un tout petit peu en arrière. On sait que
03:17 cet enfant est devenu un adolescent qui va mal, pour dire les choses très simplement,
03:22 même s'il est pris en charge dans sa famille avec beaucoup d'affection et qu'il est entouré.
03:25 Vous, votre souvenir reste le sourire de ce bambin en face de vous ?
03:30 Pourquoi ? Parce que vous lui avez sauvé la vie ? Parce qu'il a en face de lui un adulte responsable qui prend soin de lui ?
03:34 Enfin, vous comprenez ma question ?
03:36 Non, c'est nous, c'est l'ensemble des équipes évidemment.
03:39 Et puis oui, moi c'est ce moment-là qui était un moment...
03:43 un moment incroyable, parce qu'on sortait, cet enfant sort de l'enfer et
03:48 et il a, dans cette intimité de l'ambulance, avec ce policier qu'il connaissait,
03:55 on a fait des petits échanges et il a eu, il n'a pas parlé, mais il a souri, ce qui parfois
04:02 c'est plus fort que les paroles. Et moi, la dernière chose que je lui ai dit, je lui ai dit "on te reverra
04:08 on te reverra un jour". Après, vous avez expliqué que c'était évidemment une
04:12 construction, parce qu'on peut même plus parler de reconstruction.
04:16 Une construction qui est lente et difficile, mais je sais qu'il est très entouré.
04:20 Alors cet enfant a aujourd'hui 11 ans, il ne sera pas présent au procès qui s'ouvre aujourd'hui devant la cour d'assises spéciale de Paris.
04:26 Vous comprenez qu'il ne soit pas là ?
04:28 Mais je comprends qu'il ne soit pas là, je comprends que
04:29 nous on ne fait plus partie de... enfin je veux dire, on ne l'a pas revu. On l'a revu une fois au RAID,
04:35 mais depuis, je n'ai aucune nouvelle et c'est normal et c'est tant mieux.
04:39 C'est ça ?
04:40 Mais bien sûr, bien sûr. Alors à titre très égoïste, vous direz que je serais ravi de le voir et de le prendre dans mes bras,
04:45 mais je comprends très bien et heureusement que sa construction,
04:50 il est entouré par des spécialistes, il est entouré par sa famille, et sa construction ne passe absolument pas par le RAID
04:57 et par moi, ça c'est évident.
04:59 Vous êtes intervenu sur des terrains absolument épouvantables.
05:04 Comment on se prépare à ça ?
05:06 Et bien on se prépare à ça d'abord en acceptant aussi qu'on
05:10 va en prendre plein la figure,
05:13 et puis ensuite en essayant à chaque fois de
05:17 justement nous inspirer de bonnes émotions. C'est pour ça que j'ai commencé par vous parler de ce petit visage.
05:22 Oui, ça me marque.
05:23 Et on puise là-dedans.
05:25 On est en permanence dans une culture
05:27 de l'amélioration, essayer de voir comment on peut être encore meilleur la prochaine fois,
05:32 et ça en vérité, c'est-à-dire ne jamais se mentir,
05:36 et ça, ça vous protège de beaucoup de choses.
05:38 Vous comprenez qu'il peut y avoir une contradiction, c'est-à-dire que vous faites de la pensée positive dans des situations où il n'y en a a priori aucune.
05:43 Et bien je continuerai, parce que ça marche.
05:46 Merci beaucoup.

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