Un enfant de trois ans est mort du choléra à Mayotte, premier décès officiel sur le territoire français. Frédéric Valletoux, Ministre de la Santé est arrivé hier sur l'ile de Mayotte pour prendre la mesure de la situation. Ses annonces ce matin au micro de Yves Calvi.
Regardez L'invité de RTL avec Yves Calvi du 10 mai 2024
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00:00 *Générique*
00:04 - Bonjour Frédéric Valtoux, vous êtes ministre délégué à la Santé, vous êtes présent depuis hier à Mayotte,
00:08 notre département français situé dans l'océan Indien.
00:10 Mayotte où s'évite depuis deux mois une épidémie de choléra qui a fait une victime, une petite fille de trois ans décédée avant-hier.
00:15 Frédéric Valtoux, quelle est la situation ? Combien de cas ont été recensés ?
00:19 - Bonjour, on va écouter sur place. La situation montre effectivement une lente
00:22 élévation du niveau de personnes touchées aujourd'hui. Il y a 65 personnes qui ont été touchées effectivement.
00:27 Je pense à cette petite fille qui malheureusement a succombé il y a moins de 48 heures,
00:33 effectivement première victime du choléra ici à Mayotte dans une situation qui est apparue,
00:38 enfin une maladie qui est apparue le 18 mars et qui depuis c'est l'objet de mesures pour tenter
00:44 autant que possible de la circonscrire et on voit qu'effectivement on arrive pour l'instant à n'avoir qu'un seul foyer
00:49 et une intervention des services de santé sur la vaccination, sur la prise en charge,
00:55 sur l'accompagnement des personnes touchées qui permettent pour l'instant de circonscrire cette poussée du choléra.
01:01 - Alors vous nous annoncez 65 personnes touchées, ça veut dire si je comprends bien votre première réponse
01:05 que l'épidémie est a priori sous contrôle à l'heure où nous parlons ?
01:09 Est-ce que vous pouvez l'affirmer ce matin sur RTL ?
01:11 - Oui, elle est sous contrôle dans le sens où nous n'avons réussi à contenir l'épidémie que sur un foyer,
01:15 le quartier de Kirizoni dans la commune de Kungu ici à Mayotte.
01:19 Pour l'instant la présence permanente des services de santé, des réserves, de la réserve sanitaire,
01:25 c'est-à-dire des volontaires qui viennent donner un coup de main localement et qui viennent de l'Hexagone
01:30 mais aussi d'associations comme la Croix-Rouge pour finalement faire passer à la population
01:34 les gestes d'hygiène qui permettent d'éviter d'être touchés par le choléra
01:38 puisque finalement le choléra c'est quand on ingurgite de l'eau sale à des eaux sales,
01:43 quand on fait de la cuisine avec des eaux sales, quand on en est à effectivement être contaminé par l'eau
01:49 et donc il faut se laver les mains, n'utiliser que l'eau potable.
01:52 Tous ces gestes-là sont répétés par les associations et les services sanitaires qui sont sur le terrain
01:58 ce qui permet pour l'instant de contenir cette poussée du choléra.
02:02 - Comment un département français peut-il être à ce point privé d'eau potable ?
02:05 - D'abord il faut rappeler que le choléra vient des Comores
02:07 et que les premiers cas de choléra ici à Mayotte sont des personnes qui sont arrivées d'Anjouan ou des Comores
02:14 comme ces allées et venues permanentes de personnes qui clandestines investissent Mayotte.
02:19 Donc cette diffusion des parts elle vient de là, parce que dans l'Afrique australe, parce qu'aux Comores
02:24 il y a une poussée du choléra qui est réelle et qui atteint des sommets beaucoup plus importants.
02:28 - J'entends bien monsieur le ministre mais nous avons quand même un tiers des habitants qui n'ont pas accès à l'eau potable, c'est avéré.
02:33 - A Mayotte non, il y a eu effectivement une crise hydrique il y a quelques mois, à l'automne dernier,
02:39 dès la fin de l'été dernier, et l'État a fait face en distribuant de l'eau potable.
02:45 Rappelez-vous, on en avait beaucoup parlé à l'époque, en installant des rampes d'eau dans les quartiers qui effectivement se sont privés d'eau.
02:51 Et quand je dis quartiers c'est souvent des bidonvilles qui sont installées dans des endroits où effectivement il n'y a pas d'assainissement,
02:57 il n'y a pas d'installation collective, et donc c'est là qu'effectivement les bactéries, le choléra, se glissent.
03:05 - Mais vous nous dites que tout est réglé, en tout cas dans l'accès à l'eau au moment où nous parlons ?
03:08 - Non, non, je n'ai pas dit que tout était réglé, j'ai dit que l'État va continuer des distributions d'eau autant que nécessaire,
03:15 que des rampes d'eau ont été installées dans certains quartiers, qu'il y a de toute façon une vigilance aujourd'hui,
03:19 au-delà de ce quartier de Thérisonie qui est principalement le seul foyer, il y a une vigilance dans d'autres quartiers
03:25 qui pourrait peut-être être susceptible demain de voir se développer le choléra,
03:29 et donc il y a des dépistages qui sont faits en ce moment, de manière à ce qu'on veille effectivement à ce qu'il n'y ait pas d'autres foyers qui apparaissent.
03:35 - Monsieur le ministre de la Santé, certains soignants et élus évoquent une situation on va dire très tendue à l'hôpital,
03:40 je rappelle un seul hôpital pour près de 300 000 habitants officiellement,
03:43 certains parlent d'un demi-million d'ailleurs, avec l'immigration des comores que vous évoquiez il y a quelques instants.
03:48 Cinq urgentistes, est-ce que c'est acceptable ?
03:50 - La situation est très tendue, et ils ont raison de le dire, elle est très tendue, elle est connue, elle est ancienne,
03:55 première maternité de France, plus de 10 000 accouchements par an,
03:58 effectivement aujourd'hui la nécessité d'ouvrir des services pour le choléra, pour ceux qui ont les formes les plus graves du choléra,
04:07 ça nous rappelle un peu le Covid, où on basculait des services en services Covid,
04:12 bon ben là il y a 20 lits qui ont été ouverts pour accueillir des patients qui développent des formes graves du choléra,
04:21 donc ça rajoute de la tension et de la crise dans un hôpital qui effectivement tourne beaucoup avec des réserves,
04:27 avec la réserve sanitaire, c'est-à-dire avec des renforts d'appoints qui pour quelques mois viennent épauler les équipes ici,
04:33 mais c'est vrai que les équipes ici souffrent parce qu'elles sont soumises en permanence et depuis longtemps à des rythmes extrêmement tendus.
04:41 Pour autant il y a des investissements qui ont démarré, il y a une reconstruction totale, une extension, reconstruction,
04:47 modernisation de l'hôpital de Mayotte qui a été initié, les travaux démarrent dans quelques semaines,
04:52 j'ai fait le point avec les équipes hospitalières hier pour 242 millions, donc on va avoir un hôpital tout neuf
04:57 et puis l'engagement d'un deuxième hôpital dans une autre partie de l'île qui permettra là aussi de soulager la pression sur le seul hôpital,
05:06 en tant qu'hôpital c'est 72% du soin dans l'île, donc c'est l'hôpital qui tient quasiment tout le soin ici à Mayotte.
05:12 - Vous nous dites ce matin clairement "nous n'abandonnerons pas Mayotte".
05:15 - Nous n'abandonnerons pas Mayotte, autant dans la crise qu'on traverse là et je veux citer un chiffre,
05:20 86 réservistes qui aujourd'hui sont sur le terrain, infirmiers, infirmières, médecins, qui viennent de l'Hexagone
05:25 et qui face aux choléras donnent du temps pour venir donner un coup de main aux soignants ici,
05:31 et puis plus généralement les investissements que je cite montrent que l'État n'abandonne pas Mayotte, bien au contraire,
05:37 le sujet effectivement c'est une population qui est très importante, bien au-delà des chiffres officiels,
05:43 et il faut faire face pour éviter effectivement des problèmes de santé publique,
05:46 et lorsqu'ils apparaissent comme là avec le choléra, il faut agir tout de suite, ce qu'ont fait les équipes, il y a beaucoup beaucoup de dégouement sur le terrain.
05:51 - Cette épidémie, vous l'avez rappelé, a commencé un peu plus tôt bien entendu au Comores, l'île voisine de Mayotte,
05:56 où on enregistre déjà plus d'une centaine de décès, les soignants expliquent que des bateaux arrivent directement des Comores avec des personnes malades,
06:02 ce qui provoque une pression évidemment supplémentaire. Est-ce qu'on peut bloquer ces arrivées ? Est-ce que ce serait normal, souhaitable, choquant ?
06:09 - Ecoutez, les bloquer, je pense que l'État fait autant que possible pour interpeller des "quoissa-quoissa",
06:16 le nom qu'on donne à ces bateaux qui traversent effectivement et qui en moins d'une dizaine d'heures arrivent sur les côtes de Mayotte depuis en juin,
06:23 il y a la question de toute façon des arrivées clandestines, il y a la question effectivement aujourd'hui de personnes qui arrivent en étant contaminées.
06:31 Donc si c'était si simple que ça d'interdire les allées et venues, puisque parfois même les reparties reviennent, ça se ferait depuis longtemps.
06:40 Donc je pense qu'il y a des renvois aux Comores régulièrement de personnes qui n'ont rien à faire ici à Mayotte.
06:46 Néanmoins, il y a des vagues importantes qui n'ont pas submergé, ce serait exagéré comme image, mais en tous les cas, régulièrement arrivent sur les côtes mahoraises.
06:56 - Nous avons suffisamment de vaccins, où en est la campagne ? Combien de personnes vaccinées ?
07:00 Il faut une campagne plus massive, nous disait encore récemment les EU, les stocks étant selon eux limités en février, l'Agence régionale de santé de Mayotte n'en disposait que de 1800 doses.
07:10 Aujourd'hui, il y a 3700 personnes qui, dans le seul quartier de Kirisoni, ont été vaccinées.
07:16 La stratégie vaccinale pour le choléra n'est pas de vacciner toutes les inuites et à l'aveugle, elle est d'avoir une stratégie par palier, c'est-à-dire progressive.
07:26 On vaccine l'entourage des personnes qui sont touchées, on vaccine les gens qui ont été en contact dans les dernières 48 heures des personnes qui sont touchées.
07:34 Et c'est comme ça que je disais, 3800 personnes ont été vaccinées dans ce quartier. Pour autant, des stocks, on en a.
07:40 Il y a aujourd'hui à peu près 7000 vaccins sur l'île, il y a 6000 vaccins qui arrivent la semaine prochaine.
07:46 On a encore des doses possibles, évidemment, et dans des volumes plus importants pour le début de l'été.
07:53 Donc, pour l'instant, le Haut conseil de la santé publique a formulé pour le choléra la nécessité non pas d'y aller à l'aveugle, ça ne sert à rien,
08:01 mais de manière concentrique, en travaillant dans les zones où apparaît le choléra et auprès des proches des gens touchés.
08:07 - Pouvez-vous nous dire ce matin sur RTL si la situation est maîtrisée ? Est-ce que ce terme vous semble appliqué à ce que vous combattez sur place ?
08:15 - C'est un début de l'épidémie, c'est toujours compliqué d'avoir des mots définitifs. En tous les cas, de manière très claire, elle est circonstruite.
08:21 C'est-à-dire que, je le redisais aussi bien par son ampleur territoriale, un seul quartier pour l'instant, par le suivi qui est fait,
08:29 par la prise en charge très rapide des patients. Donc, on meurt très peu, le taux de mortalité doit être inférieur à 2%.
08:34 Donc, l'important, c'est comme ce qu'on fait depuis début mars, mi-mars, c'est de prendre en charge les patients et de traiter autour d'eux leurs cercles proches.
08:44 Et de cette manière-là, on arrive effectivement à contenir la progression de l'épidémie.
08:49 - Une situation circonscrite, c'est le terme que vous employez ce matin. Merci beaucoup, monsieur le ministre de la Santé, Frédéric Valtout, d'avoir pris la parole.