• il y a 2 ans
Dans son ouvrage "Deux colères fracassées dans l'ignorance", Guillaume Bernard, historien du droit, met en scène une conversation fantastique entre un enfant à naître et sa mère qui envisage de l’avorter. Cette conversation illustre l’affrontement entre deux univers mentaux et deux motivations sociales opposés. Elle est cependant marquée par des compréhensions partielles, car, chacune de ces deux colères est loin d’être toujours dirigée contre l’interlocuteur direct. Les lecteurs sont, eux aussi, pris à partie dans la mesure où ils sont, individuellement et collectivement, des acteurs du drame qu’est un avortement.

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Transcription
00:00 Madame, Mademoiselle, Monsieur, avouons-le.
00:02 L'inquiétude est plus que jamais de mise,
00:04 puisque par rapport à 2023,
00:06 nous accusons un important retard
00:08 pour constituer notre budget pour 2024.
00:11 Notre budget, parlons-en.
00:13 Pour 365 jours d'émission,
00:15 avec un journal télévisé quotidien,
00:17 avec une présence sur tous les réseaux sociaux,
00:20 avec une équipe de professionnels de 25 personnes mobilisées
00:23 et beaucoup, beaucoup de bénévoles,
00:25 nous avons besoin de l'équivalent du montant
00:28 que le gouvernement Macron offre,
00:30 écoutez bien, tous les ans, avec nos impôts,
00:33 à des journaux conformistes comme,
00:35 citons, l'Est éclair ou le journal de la Haute-Marne.
00:38 C'est d'ailleurs une somme infime
00:39 au regard des 2 milliards d'euros annuels
00:42 déversés à la grosse presse
00:43 et aux 4 milliards d'euros attribués
00:45 aux services audiovisuels publics.
00:48 En donnant ta TVL,
00:49 vous faites un bras d'honneur à la presse conformiste,
00:52 à cette presse de propagande.
00:53 Vous faites en sorte que l'argent de vos impôts
00:55 corresponde à vos idées, vos engagements, vos opinions
00:58 et ne servent pas à financer la presse contrôlée.
01:00 Oui, la liberté a un prix.
01:02 Aidez TVL, maintenant, c'est urgent !
01:27 Bonjour à tous,
01:28 ravi de vous retrouver pour ce nouveau Zoom,
01:31 aujourd'hui en compagnie de Guillaume Bernard.
01:33 Bonjour Monsieur.
01:34 Bonjour Pierre.
01:35 Guillaume Bernard vous enseignait l'histoire des institutions
01:38 et des idées politiques à l'Institut catholique de Vendée.
01:41 Vous avez publié plusieurs ouvrages.
01:43 "La guerre à droite aura bien lieu",
01:46 "L'Empereur et les brigands" co-écrit avec Corentin Stemmler,
01:50 le dernier en date,
01:51 "Deux colères fracassées dans l'ignorance"
01:54 publié aux éditions de l'Homme nouveau
01:56 comme d'habitude à retrouver sur la boutique de TV Liberté.
02:00 Une conversation fantastique entre un enfant à naître
02:04 et sa mère qui envisage de l'avorter.
02:08 Guillaume Bernard, vous avez écrit cet ouvrage
02:10 dans une période professionnelle et personnelle,
02:13 dites-vous, difficile.
02:15 Pourquoi vous être saisi de cette thématique
02:18 dans la difficulté, celle de l'avortement ?
02:22 Écoutez, j'ai effectivement eu des difficultés
02:26 et j'ai été objectivement fragilisé.
02:29 Et sans aucun doute, je pense que je me suis intéressé
02:34 au cadre de quelqu'un qui était encore plus fragile que moi,
02:36 c'est-à-dire l'enfant à naître que sa mère envisage d'avorter
02:40 et qui est pied et poing lié, et qui ne peut pas faire grand-chose.
02:44 Alors que moi, j'ai pu me battre, j'ai pu me débattre
02:47 et j'ai pu effectivement vaincre la situation que je connaissais.
02:52 Mais le cadre de cet enfant qui ne peut rien faire
02:55 et qui dépend entièrement des autres,
02:57 eh bien, m'a particulièrement attendri.
02:59 Et voilà pourquoi cet ouvrage est né.
03:02 Alors, l'avortement, certains, certaines nous diront
03:06 que l'homme n'a pas sa place dans ce débat.
03:09 Qu'est-ce que vous leur répondriez ?
03:11 Écoutez, pour qu'il y ait la conception d'un enfant,
03:14 il faut qu'il y ait la rencontre d'un ovule féminin,
03:17 d'un spermatozoïde masculin.
03:20 Et donc, par conséquent, l'homme a toute sa place dans cette question.
03:23 Et puis, je crois qu'au-delà même de la question de savoir
03:27 si ce sont des hommes ou des femmes, c'est une question de société.
03:31 Et par conséquent, je me trouve parfaitement légitime
03:34 pour pouvoir intervenir sur ce sujet.
03:36 Alors, rentrons dans le dur.
03:39 Guillaume Bernard, parlons de l'acte sexuel
03:42 puisqu'il en est question dans cet ouvrage.
03:44 Pour faire un enfant, c'est comme ça qu'on s'y prend.
03:47 À l'origine de l'enfantement, cette femme dit ceci,
03:50 après son rapport sexuel, elle est donc en train de s'entretenir
03:53 avec son enfant à naître.
03:55 Elle lui dit "l'autre est un partenaire, chacun son plaisir".
04:00 Qu'est-ce qu'on peut penser de cette volonté
04:03 d'user d'autrui pour s'assouvir ?
04:06 Je crois que, sous prétexte de libération sexuelle,
04:09 la sexualité a été extrêmement appauvrie.
04:12 Et que, dans le fond, disons les choses de manière un peu brute,
04:17 eh bien, la sexualité aujourd'hui se réduit bien souvent
04:22 à une masturbation d'un partenaire sur l'autre.
04:25 Et c'est un appauvrissement parce que cela signifie
04:29 qu'il n'y a pas véritablement de recherche de communion avec l'autre,
04:33 le fait que deux personnes puissent se donner l'un à l'autre
04:36 pour ne faire plus qu'un.
04:38 Et donc, oui, je crois que la sexualité est extrêmement appauvrie
04:42 et que ça explique un certain nombre de cas
04:45 où des femmes se retrouvent enceintes sans avoir véritablement voulu,
04:49 mais le fait est qu'elles le sont.
04:51 Et que l'enfant à naître n'a sans doute pas à pâtir
04:54 des faits et gestes de ses parents.
04:57 Qui est à l'origine de cette libération sexuelle ?
05:00 Pourquoi a-t-on voulu libérer les individus quant à leur sexualité ?
05:06 Il y a une incontestable volonté, je dirais,
05:09 de réagir ou de s'opposer à ce qui était considéré
05:13 comme une morale, en particulier chrétienne,
05:17 dans nos sociétés occidentales,
05:19 qui était supposée étouffer les instincts des individus.
05:25 Or, la morale, au-delà même de la religion
05:28 et indépendamment même de la religion,
05:30 c'est quelque chose qui permet de se canaliser,
05:33 qui permet, je dirais, d'agir en connaissance de cause.
05:37 Et je crois qu'on a rendu les relations humaines
05:41 beaucoup plus bestiales, beaucoup plus dures,
05:44 que ce soit dans le monde économique,
05:46 où les rapports sociaux sont devenus extrêmement durs,
05:50 ou dans le monde de la séduction.
05:53 Eh bien, en fait, on est rentré dans un véritable rapport de force
05:56 et non plus dans la recherche d'une communion et d'un bien commun.
05:59 C'était volontaire, cette recherche du rapport de force,
06:04 de vouloir voir les individus s'affronter entre eux.
06:08 Je ne sais pas si, en termes de séduction et de sexualité,
06:12 c'était l'objectif qui était poursuivi,
06:14 mais en tout cas, c'est la conséquence.
06:15 C'est, vous savez, le premier roman connu de Michel Houellebecq,
06:18 "Extension du domaine de la lutte".
06:20 Il y avait une lutte économique et sociale,
06:23 et celle-ci a été transposée dans le monde de la séduction
06:27 et des rapports amoureux.
06:28 Cette femme qui envisage l'avortement
06:31 ne voit son enfant à naître.
06:33 Vous l'écrivez que comme un vil accro de contraception,
06:36 un imprévu conçu fortuitement, un problème passager.
06:41 Depuis quand, pour certaines femmes, la vie est devenue un problème ?
06:46 Je crois qu'on a cherché à les dénaturer,
06:48 c'est-à-dire à le faire oublier qu'en elles,
06:51 il y avait un élément intrinsèque qui était la maternité,
06:55 la possibilité en tout cas de la maternité.
06:57 C'est le refus du corps ?
06:59 C'est le refus de la spécificité du corps féminin
07:03 et de la nature des choses.
07:05 Il y a incontestablement une volonté de rendre les choses artificielles.
07:10 De la même manière qu'on conçoit la société
07:13 comme étant le fruit d'un hypothétique contrat social,
07:16 eh bien on envisage effectivement les relations humaines
07:19 comme étant des rapports de force.
07:21 Cette femme dit à son enfant,
07:23 on peut le lire dans votre ouvrage,
07:26 son enfant à naître, elle lui dit qu'il est quelque chose,
07:29 qu'il est un amas, pas quelqu'un.
07:32 La chosification de l'embryon, c'est assez récent,
07:36 ça vient d'où ça aussi ?
07:37 Écoutez, ça vient d'une part effectivement d'une volonté
07:42 de nier l'humanité de l'enfant à naître
07:45 contre toute logique et contre toute évidence
07:48 parce que génétiquement parlant,
07:50 l'enfant à naître est évidemment humain.
07:52 Mais je crois que cette chosification,
07:53 elle vient aussi du fait qu'on a fini par ne considérer
07:58 comme n'étant humain que l'être qui est capable d'autonomie,
08:03 que l'être qui est capable d'exercer sa liberté.
08:06 Celui qui est capable de produire et de consommer en réalité ?
08:09 Oui, bien sûr, mais qui est capable, je dirais,
08:13 d'exercer une volonté.
08:15 L'enfant à naître, évidemment,
08:17 il n'a même pas demandé à venir au monde,
08:20 il n'a même pas demandé à être conçu
08:22 et donc par conséquent, il n'est peut-être pas véritablement humain.
08:26 De la même manière qu'à l'autre bout de la chaîne,
08:28 le malade comateux, ou même s'il n'est pas comateux,
08:31 s'il ne peut pas s'alimenter tout seul,
08:34 ça a été le cas de Vincent Lambert,
08:35 eh bien on le considère comme n'étant plus véritablement humain.
08:40 Donc je crois qu'il y a une définition de l'humanité aujourd'hui
08:42 qui est en train de s'imposer.
08:44 Ça n'est plus une humanité liée à la nature
08:46 qui nous est donnée par le hasard, par Dieu, par l'ordre des choses.
08:50 C'est une humanité qui est auto-construite par l'homme lui-même
08:54 et par conséquent, ça conduit à nier l'humanité et l'innocence,
08:58 bien entendu, c'est un autre aspect des choses,
09:00 l'humanité de l'enfant à naître,
09:02 puisque, eh bien, il ne respire pas seul.
09:04 – Mais cette volonté de l'enfant à vivre,
09:08 quand il sort, quand il arrive au monde,
09:11 il n'a aucune volonté, si ce n'est peut-être celle de respirer,
09:15 il n'a aucune conscience de quoi que ce soit.
09:18 – Alors, qui n'est conscient de quoi que ce soit,
09:20 ça vous n'en savez rien et moi-même non plus.
09:22 En revanche, il y a ce que les grecs anciens appelaient la fusis,
09:25 c'est-à-dire la puissance de la vie,
09:28 la vie qui jaillit, qui va s'épanouir, qui va se développer.
09:32 Et ça, je crois qu'effectivement, le fait que l'homme moderne
09:36 est, dans le fond, dépendant d'un ordre des choses
09:40 qui le dépasse et dans lequel il vit,
09:42 ça, cet aspect-là, la modernité le refuse.
09:45 – Il y a une forme de nihilisme là-dedans.
09:48 – L'enfant dit à sa mère qu'il est à sa merci,
09:51 et il l'interroge sa mère, il lui dit,
09:54 "le joux du plus fort, l'accepterais-tu pour toi ?"
09:58 C'est, soit faible avec les forts et faible avec les faibles,
10:02 et avec les forts, c'est quoi ?
10:04 C'est le féminisme qui tend vers cette théorie ?
10:09 – C'est le fait que l'exacerbation des droits
10:13 que chacun d'entre nous sommes susceptibles d'exercer,
10:17 eh bien, on les pousse tellement loin
10:19 que ça va jusqu'à une forme de sadisme.
10:22 Et le féminisme, effectivement, aujourd'hui,
10:25 est devenu l'expression d'une nouvelle lutte des classes.
10:29 N'oubliez pas que la lutte des classes,
10:31 c'est un concept libéral inventé par François Guizot,
10:33 repris ensuite par Karl Marx.
10:36 Alors, bien sûr, il n'était pas d'accord sur la délimitation,
10:39 sur le contenu des classes en question qui s'opposaient,
10:41 mais c'est un concept commun aux libéraux
10:44 et aux collectivistes dans la modernité politique.
10:46 Eh bien, le féminisme a transposé au rapport entre hommes et femmes
10:50 la lutte des classes, du libéralisme et du marxisme.
10:53 – Peu de temps avant sa mort, Simone Veil,
10:55 qui est donc la maire de la loi sur l'IVG,
10:59 avait déclaré qu'on allait beaucoup trop loin,
11:02 que l'esprit de la loi qu'elle avait mis en œuvre
11:06 était dépassé, était même violé.
11:09 Qui, en fait, aujourd'hui est le tenant de cette mentalité,
11:14 de cette nouvelle mentalité ?
11:16 – Alors, deux éléments dans ma réponse, si vous le permettez.
11:19 D'abord, je ne suis pas tout à fait certain
11:21 que Simone Veil ait été bien consciente des choses.
11:24 Dans la mesure où la loi Veil, en 1975,
11:27 permettait déjà d'éliminer des enfants que l'on ne voulait pas.
11:31 Finalement, on a fait que, le législateur, par la suite,
11:35 n'a fait que pousser la logique jusqu'au bout.
11:38 Donc, je peux comprendre que Simone Veil ait été apeurée
11:41 par toutes les évolutions, le report des différents délais,
11:45 on est passé de 10 à 12 à 14 semaines, etc.
11:48 La suppression de la question de la détresse de la femme,
11:52 bon, très bien, enfin, très bien, c'est une manière de parler,
11:55 vous m'avez bien compris,
11:57 mais tout dans la loi Veil dès 1975 permet les évolutions suivantes.
12:04 Et ce que ce livre essaye de montrer,
12:06 c'est que, justement, toutes les évolutions bioéthiques
12:09 qui ont eu lieu par la suite,
12:10 les expérimentations sur les embryons,
12:12 la possibilité maintenant de faire des embryons chimériques,
12:15 le fait de pouvoir recourir à la PMA
12:18 par des couples homosexuels ou des couples hétérosexuels,
12:22 eh bien, tout cela a comme matrice la question de l'avortement.
12:27 Et je ne voudrais pas que les téléspectateurs
12:30 s'imaginent que cet ouvrage soit une charge,
12:33 c'est véritablement un dialogue qui est cherché,
12:35 véritablement, à opposer des arguments,
12:39 des sentiments, des positions,
12:43 pour que de cette confrontation puisse naître véritablement la vérité.
12:48 Et donc, il y a la prise en considération de plein d'éléments
12:51 qui excusent, qui expliquent le comportement des femmes
12:55 qui ont recours à l'avortement.
12:56 Mais pour autant, je ne suis pas du tout d'avis
12:59 qu'un retour, par exemple, à la loi Veil serait une solution,
13:02 parce qu'en fait, dès la loi Veil,
13:04 il y a tous les éléments qui permettront les évolutions postérieures.
13:07 – Le droit à disposer de son corps,
13:10 c'est cette disposition que certaines féministes utilisent
13:15 pour promouvoir l'avortement, que faut-il en penser ?
13:19 – Alors, écoutez, il y a deux points,
13:20 il y a la question du droit et il y a la question du corps.
13:23 La question du droit, c'est la plus difficile à expliquer,
13:27 mais en quelques mots, voilà l'enjeu.
13:31 En fait, on considère que parce que l'on a une faculté,
13:34 c'est donc que l'on disposerait d'un droit.
13:36 Or, c'est très discutable et c'est d'autant plus discutable
13:39 qu'en l'occurrence ici, il s'agit d'un droit
13:41 que l'on exercerait sur soi-même.
13:43 Or, toute la tradition philosophique occidentale,
13:46 que ce soit Aristote, Saint-Thomas d'Aquin, etc.,
13:48 envisage le droit comme dans une relation d'altérité
13:51 et non pas dans une relation à soi-même.
13:53 Ça, c'est la question du droit.
13:54 Et puis, il y a la question du corps.
13:55 Quand une femme dit qu'elle a le droit de disposer de son corps
13:58 et donc de recourir à l'avortement,
14:00 en l'occurrence, elle dispose du corps de l'enfant.
14:02 Et l'enfant a son propre corps qui n'est pas le corps de la femme.
14:06 – Même s'il est relié.
14:08 – Évidemment qu'il est relié.
14:09 Et c'est ce qui fait que l'enfant est entièrement pied,
14:13 entièrement à la merci de la femme qui le porte.
14:16 Et c'est pour ça que c'est évidemment un drame.
14:19 – Le droit d'entrave à l'IVG est un délit assez récent.
14:24 C'est la condamnation d'une personne ou d'une organisation
14:27 qui empêcherait ou tenterait d'empêcher une femme d'accéder à l'IVG.
14:33 C'est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
14:38 Qu'est-ce qu'il faut en penser de ce délit ?
14:41 C'est la négation du droit à l'information qu'on dénie à certaines femmes.
14:47 – Mais c'est le refus tout simplement du débat.
14:49 C'est le fait de considérer qu'une question,
14:51 parce qu'elle aurait été légalisée,
14:53 ne serait plus susceptible de continuer à être débattue.
14:57 C'est le premier point.
14:58 Et puis c'est le deuxième aspect des choses,
15:00 c'est le fait qu'une liberté opposable à la puissance publique
15:06 est en règle générale, évolue en règle générale toujours vers ensuite une créance.
15:12 C'est d'ailleurs pour cela que,
15:13 lorsque l'on voit les projets de révision de la Constitution
15:18 pour introduire la liberté de recourir à l'avortement dans la Constitution,
15:23 il y a une très grande hypocrisie.
15:25 Parce qu'on sait bien que la liberté opposable à la puissance publique
15:29 va conduire petit à petit au fait que ceux qui voudront exercer cette liberté
15:33 auront une créance, pourront obtenir de la part de la puissance publique
15:37 un certain nombre de prestations.
15:39 Donc liberté conduit aujourd'hui dans la logique du système juridique
15:44 et notamment de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme
15:47 à en fait une créance opposable aux autres
15:50 et notamment par exemple opposable pourquoi pas aux médecins
15:53 qui pourraient perdre leur liberté de conscience
15:56 si jamais on constitutionnalisait l'avortement.
15:59 Le droit à l'avortement est depuis la loi de bioéthique de 2022 possible
16:05 jusqu'au terme, c'est-à-dire jusqu'au 9ème mois
16:08 si la mère démontre une détresse psychosociale.
16:12 Comment on explique, comment on perçoit cet allongement du terme ?
16:16 Mais parce que dans la mesure où l'on nie l'humanité de l'enfant à naître
16:22 au moment de sa conception, il n'y a pas de raison de ne pas nier cette humanité
16:26 jusqu'à la naissance.
16:27 Bon, et puis je crois, j'en reviens, pardonnez-moi à ce que j'ai évoqué
16:31 déjà tout à l'heure mais je crois que c'est très important,
16:34 il y a cette idée que dans le fond n'est un être humain
16:38 que celui qui est capable d'exercer sa liberté, sa volonté, sa rationalité.
16:44 Et donc effectivement on va nier l'humanité de l'enfant
16:48 et on va nier son innocence.
16:50 J'insiste là-dessus parce qu'il n'y a pas que la question de l'humanité de l'enfant
16:54 qui peut conduire à s'opposer à l'avortement.
16:57 Il y a aussi le fait qu'il n'a commis de sa part, de lui-même,
17:01 aucun acte qui justifie que la rétribution de cet acte soit son élimination.
17:06 222 100 interruptions volontaires de grossesse, y compris médicamenteuses,
17:13 ont été réalisées en France en 2020.
17:16 Il y a cette expression que l'on entend souvent "l'IVG de confort".
17:21 Alors ça peut hérisser le poil de certains, de certaines.
17:26 Qu'est-ce que vous en pensez ?
17:27 J'en pense que d'abord il ne faut pas négliger les incontestables pressions
17:34 que les femmes peuvent subir pour les conduire à avorter.
17:38 Pression de la part d'un conjoint qui est un lâche,
17:41 pression de la part d'un employeur qui est un esclavagiste.
17:44 D'une société qui n'est pas capable d'assumer une femme qui va avoir un gosse.
17:48 Exactement, et qui préfère effectivement la faire avorter
17:52 plutôt que lui offrir les conditions pour pouvoir assurer la naissance de l'enfant.
17:57 Donc il ne faut pas négliger ça.
17:59 Pour autant, il est bien évident qu'il y a un certain nombre de femmes
18:02 qui ont recours à plusieurs reprises à des avortements.
18:05 Et là on peut considérer qu'elles se servent de l'avortement
18:08 comme d'une forme de contraception.
18:09 Et donc cela explique l'expression "IVG de confort".
18:13 Entre condamnation et laisser faire,
18:16 où devrait être le curseur que l'État devrait placer
18:21 pour cette question de l'avortement ?
18:24 Alors moi, que les choses soient bien claires,
18:27 il y a ma position personnelle et puis il y a le dialogue entre ces personnages.
18:30 Ma position personnelle c'est que je souhaiterais qu'il n'y ait pas d'avortement.
18:35 Mais je ne suis pas un obsédé de l'interdiction.
18:38 L'objectif c'est que des enfants à naître puissent naître.
18:42 Ce n'est pas que des femmes se voient retirer une possibilité
18:46 de recourir à cet avortement.
18:48 Bon, au final, je considère qu'évidemment,
18:51 légaliser l'avortement est une ignominie,
18:53 mais pour autant, ce qui est important c'est de créer les conditions
18:57 pour que les femmes qui voudraient ne pas avorter
19:00 puissent effectivement ne pas le faire.
19:03 Et il m'a semblé que par un dialogue, par une forme littéraire,
19:08 ça permettait d'adoucir la dureté de certains propos,
19:12 la crudité de certaines questions, on en a abordé certaines,
19:15 et que cette forme littéraire était au service de la recherche de la vérité.
19:19 – Vous allez aussi, Guillaume Bernard, sur le terrain de l'euthanasie.
19:23 On sait que le président Macron a annoncé qu'il allait s'en saisir,
19:27 en tout cas c'est dans les cartons, et dans votre ouvrage on lit ceci,
19:31 "l'enfant dit à sa mère que l'enjeu entre l'avortement et l'euthanasie
19:36 est identique, la conscience mise sous anesthésie".
19:41 Certains balaient le respect dû à la vie d'un revers de manche
19:46 et invoquent toujours la liberté individuelle.
19:48 Que leur répondez-vous ?
19:50 – Eh bien qu'on est avec le même enjeu concernant la définition du droit.
19:56 Ce n'est pas parce qu'on a une faculté, par exemple la faculté de se suicider,
20:00 qu'on a pour autant le droit de se suicider.
20:03 Et donc le consentement du malade qui demanderait l'euthanasie
20:07 n'est pas une cause exonératoire de la culpabilité de celui
20:12 qui le tuerait en l'euthanasiant.
20:14 Donc par conséquent, je ne crois pas qu'une société
20:18 soit une société juste, équilibrée, saine,
20:21 si elle permet qu'une personne transfère une faculté qu'elle a de se suicider
20:28 et qu'elle prétend exercer comme un droit à un tiers
20:31 pour pouvoir l'exercer à sa place.
20:33 – Vous évoquez ainsi l'antispécisme qui réduit l'homme à un animal comme les autres.
20:39 Ça vient d'où cette idéologie ?
20:42 Est-ce que ça vient de la même idéologie que l'avortement, l'euthanasie ?
20:48 – Mais je crois que tous les sujets sont liés.
20:50 C'est sans doute un de mes leitmotifs dans un certain nombre de mes écrits,
20:56 moins littéraires que celui-là,
20:58 c'est le fait d'essayer de montrer la cohérence d'un système de pensée
21:03 au-delà même de la question de savoir si on y adhère ou pas.
21:06 Or la modernité politique, elle repose sur un certain nombre d'éléments,
21:10 d'hypothèses et notamment celles que il n'y aurait pas d'ordre naturel
21:14 ou il n'y aurait pas d'ordre cosmologique des choses.
21:17 Cette négation de l'ordre cosmologique des choses
21:20 conduit à concevoir la société comme un artifice,
21:23 comme étant le résultat d'un contrat social.
21:26 Eh bien, il n'est pas étonnant que la modernité politique,
21:29 continuant à évoluer, continuant à s'approfondir,
21:32 eh bien on aboutisse à l'idée que l'homme n'a pas de nature,
21:36 que l'homme n'a pas d'ontologie et que l'homme s'auto-construit.
21:39 L'antispécisme, c'est une des conséquences, effectivement,
21:42 du fait que l'homme prétende s'auto-construire
21:46 et ne pas prendre en considération une ontologie
21:49 qui lui est donnée par l'ordre naturel.
21:51 "De colère fracassée dans l'ignorance",
21:54 c'est le titre de votre ouvrage, Guillaume Bernard.
21:56 Merci d'être venu sur notre plateau.
21:57 Merci infiniment de m'avoir reçu. Merci.
22:00 (Générique)
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