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Source
Barrau https://www.youtube.com/watch?v=7ZuoeCp9nzw
Musique https://www.youtube.com/watch?v=zbMt_VG9AsU

Réponses au quiz de fin :

/!\ Description à ne pas lire avant d'avoir vu la vidéo entièrement
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Comment Barrau définit-il l'espace ?
Là où il n'y a rien, correspond à l'exhibition la plus vile de notre techno-prédation.

Quels sont les deux problèmes liés à la science ?
1 - L'espace qu'elle prend. Nous confondons ses créations avec un dévoilement de ce qu'est la vérité propre du réel. C'est très grave pour nos imaginaires.
2 - La manière de la pratiquer est technicisée pour l'assujettir à un système de réification.

Quels sont les carburants utilisés par les fusées ?
Kérosène et hydrogène liquide.

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Transcription
00:00 La science a partilié avec une vaste entreprise de chosification, elle contribue à l'effacement de la cosmopoétique du réel, qu'il faut lui reconnaître le droit à n'être plus la seule version correcte de la réalité.
00:20 Est-ce que la science définie ainsi, telle que vous la dénoncez, se retrouve alors dans une impasse ?
00:38 Pas forcément. Je crois qu'il ne faut pas confondre le constatif et le normatif. L'impasse est là, mais elle pourrait ne pas être. Il faut, je crois, réintroduire un peu de contingence dans notre jeu.
00:50 Je pense n'avoir pas exactement dit que la science devait définir le réel, car je crois justement que le réel est protéiforme, polymorphe, extrêmement bigarré et diapré, et que c'est une des erreurs de notre société occidentale capitaliste et technoscientiste que de croire que la science révèle l'ensoi du réel.
01:10 Je pense que la science est un matériau extraordinaire, d'une richesse inouïe, d'une précision remarquable, qui révèle quelque chose, qui exhibe quelque chose de précieux et d'irremplaçable quant au monde dans lequel nous nous trouvons.
01:24 Mais, ni plus ni moins que la littérature, que la philosophie, que la musique, que la peinture, ou vraisemblablement que le rêve d'un chien, auquel nous n'avons ni vous ni moi, me semble-t-il, accès.
01:35 Et donc ce que je veux dire, c'est que le problème, il est double. C'est d'une part que la science a acquis une position quasi hégémonique. Personne, et surtout pas moi, je rappelle quand même que je suis à temps perdu astrophysicien, ne souhaite l'effondrement de la science.
01:53 Personne, je crois, ne le souhaite sérieusement. Mais ce qui est problématique, ce n'est pas l'existence de la science. C'est quand la science prend tout l'espace et qu'en effet, nous confondons ses productions, ses créations, aussi extraordinaires et sublimes soient-elles, avec une sorte de dévoilement.
02:09 Vous savez, en grec ancien, "aletheia", ça signifie "dévoilement". Une sorte de dévoilement de ce que serait la vérité propre du réel.
02:17 Ça, je crois que c'est dramatiquement faux et que c'est très grave quant à l'appauvrissement de notre imaginaire. Ça, c'est le premier problème.
02:23 Et le deuxième problème, c'est qu'au-delà de cet espace envahissant, je trouve, pris par la science, il faudrait savoir partager, tout simplement.
02:32 Il y a aussi une manière de la pratiquer qui, plutôt que d'essayer de la faire fonctionner poétiquement, et je pense qu'on va y revenir parce que pour moi c'est le plus important finalement,
02:41 c'est-à-dire de la mettre en résonance avec une pulsion de vie, avec une épiphanie de la chose même, on a tendance à la techniciser pour la sujettir à un système de réification, de production et donc de désublimation du monde.
02:59 Peut-être, je peux donner un exemple ? Mes réponses sont trop longues, non ?
03:02 Ah non, non, non, non, on est là pour vous écouter !
03:05 Chouette ! Je vais juste donner l'exemple qu'on a discuté 30 secondes avant de s'asseoir ici, à savoir la conquête spatiale.
03:17 Rien, enfin rien, hormis les atrocités de ces derniers mois naturellement, rien ne m'agace plus que notre rapport au spatial.
03:27 On lit souvent, vous savez, les amoureux du ciel et de l'espace. C'est un peu comme dire les amoureux de la vie et du meurtre.
03:34 Parce que le ciel et l'espace, ça n'a rien à voir. Quand on aime le ciel, on n'aime pas la conquête spatiale.
03:39 Les fusées, pour moi, c'est l'archétype de la techno-débilité mortifère, pour ne pas dire nécrophile, de notre Occident contemporain.
03:48 Tout est sale dans les fusées. Déjà le symbole, vous voyez, c'est cette espèce d'immense structure phallique, là, comme ça, dans cette compétition virile entre les musk, les Bezos et les présidents américains
03:58 qui vont finalement dans un déluge de fer, de feu, de kérosène et d'hydrogène liquide. Elle est où ? Là où il n'y a rien. Il n'y a rien dans l'espace.
04:09 Nous habitons une planète extraordinaire, sublime, peuplée de millions d'espèces dont nous n'avons, pour certaines d'entre elles, pas même conscience qu'elles existent.
04:18 Chacune de ces espèces présente des organisations sociales, des rapports au monde, des ontologies extrêmement différentes.
04:25 Et qu'est-ce qui nous fait vibrer, pour ne pas dire bander, parce que quand même vraiment l'allégorie spatiale est fondamentalement nécro-virile, d'accord,
04:34 qu'est-ce qui nous fait donc, qu'est-ce qui nous excite donc à ce point d'aller là où il n'y a rien ?
04:39 J'ai même entendu monsieur Pesquet, qui est vraisemblablement un homme tout à fait respectable, mais oser dire, droit dans ses bottes, qu'il faudrait que tout le monde aille dans l'espace pour se sensibiliser à l'écologie.
04:52 Non mais il faut quand même oser une telle absurdité. Vous vous rendez compte qu'il voudrait qu'on aille au seul endroit depuis lequel on ne peut voir aucun être vivant, pour enfin découvrir les êtres vivants.
05:04 C'est un peu comme dire, il faut absolument fermer toutes les librairies pour enfin découvrir les livres. C'est un peu bête en réalité, voilà.
05:12 Ça n'a rien de personnel. En fait c'est marrant parce que l'espace s'est tellement ancré dans nos imaginaires comme quelque chose de mélioratif, alors qu'en réalité je crois que ça correspond à l'exhibition la plus vile et la plus veule de notre technoprédation, que c'est presque intouchable.
05:29 Moi d'habitude les gens me font plutôt confiance, parce que je suis sincère en fait, donc c'est légitime, sauf quand je parle de l'espace. Là on me dit "ouais mais en fait vous êtes jaloux".
05:38 Non mais je suis jaloux de beaucoup de gens. Je parle de Carlo Revelli dans ce livre, c'est un ami physicien que je trouve génial. Moi je suis jaloux de son génie. J'aimerais être aussi fort que lui en physique.
05:47 Mais alors jaloux de Thomas Pesquet. Non mais ce sont des marionnettes marketing, qu'on ne nous parle pas de héros. Les héros aujourd'hui ce sont les indiens qui essayent de sauver la forêt,
05:56 ce sont les gens qui essayent de survivre sous les bombes dans notre indifférence. Ce ne sont certainement pas ces marionnettes qui vont faire quoi ?
06:03 Qu'est-ce qu'on a appris dans ce déluge ? Non seulement de pollution et d'émissions de gaz à effet de serre, mais ça c'est pas grave, mais surtout d'effondrement symbolique.
06:13 Vous vous rendez compte ? Le monde meurt ici, donc regardons ailleurs. Qu'est-ce qu'on pourrait donner de pire comme message ?
06:19 Qui plus est, vous savez que bientôt les constellations seront défigurées par les satellites artificiels.
06:24 Et pourtant nous pensions quand même que la voûte céleste c'est ce qu'ils ne pouvaient pas nous voler. C'est la dernière chose qui nous restait, c'est ce qu'on ne pouvait pas nous prendre.
06:33 Et bien même ça ils l'auront eu. Avec quoi ? De la publicité spatiale, des dépôts de garburant en orbite, un tourisme obscène pour richesses indécentes.
06:41 C'est fondamentalement dégueulasse. Mais je suis sûr que le livre de M. Pesquet s'est vendu merveilleusement pour les fêtes. Grand bien lui fasse.
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