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Dans son édito du 29/05/2024, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]

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Transcription
00:00 Il faut, autrement dit, c'était dans le discours de la contre-culture,
00:04 dynamiter la famille pour permettre à l'individu d'émerger le plus rapidement
00:10 comme étant tout-puissant.
00:11 J'ajoute une chose qui est importante.
00:13 Il y a eu des délires dans ces pédagogiques-là.
00:16 Dans les années 70, on le sait, le rapport trouble d'une certaine gauche
00:19 avec la pédophilie. Pourquoi?
00:21 Parce qu'on se disait de quelle manière faire sauter la famille,
00:23 c'est en éduquant à la sexualité le plus tôt possible l'enfant
00:27 pour le délivrer des codes culturels du monde bourgeois.
00:31 Je précise que c'est une parenthèse dans l'histoire des gauches
00:33 et la plupart des personnes qui ont tombé dans cette espèce de délire idéologique
00:36 se sont repenties.
00:37 Mais on a vu jusqu'où pouvait aller la volonté d'arracher l'individu
00:41 à la famille et à la communauté.
00:43 Je note, soit dit en passant, qu'on a constaté aussi depuis 40 ans
00:46 le prix à payer, parce que ces idées-là, on les a mises en pratique.
00:49 La déconstruction de la famille, on a tout fait pour la faire tomber.
00:51 On a vu le résultat.
00:52 La disparition du père dans les sociétés entraîne normalement
00:55 une montée de la violence.
00:57 La disparition de la mère entraîne naturellement un enfant carencé
01:00 sur le plan affectif.
01:01 Et j'ajouterais que la disparition de la famille entraîne une crise
01:05 qui s'appelle celle de la natalité.
01:07 Donc, vous voyez que la famille ne se présente pas simplement
01:09 comme l'unité naturelle qui paraît pour nous tous.
01:12 Pour plusieurs, c'est un problème à déconstruire pour faire advenir
01:15 une société nouvelle où on pourrait se passer le plus possible de la famille.
01:19 Passionnant.
01:21 Parlons très concrètement, comment cette aversion à la famille s'exprime-t-elle?
01:26 Alors, l'idée, pour certains, c'est d'arracher le plus tôt possible
01:31 l'enfant à la famille, justement.
01:33 De quelle manière?
01:34 On pourrait dire, je laisse de côté l'idée qu'on a multiplié les lois
01:37 pour faciliter la dissolution des familles, et ainsi de suite.
01:40 Je peux comprendre, ce sont des lois libérales.
01:42 Une famille malheureuse où tout le monde se sent enfermé
01:44 et n'en peut plus de vivre ensemble.
01:46 On ne veut pas forcer les gens à vivre ensemble.
01:48 La famille ne doit pas être une prison.
01:49 Mais je mets l'accent sur la dimension scolaire,
01:51 et qu'on se comprenne bien, j'aime l'école, j'aime l'école publique,
01:53 je pense qu'il est bien d'envoyer ses enfants à l'école.
01:55 Mais pour une certaine gauche, il y a toujours eu cette idée
01:58 qu'il faut rapprocher le plus possible l'âge de la scolarisation,
02:02 l'âge de la socialisation du berceau, parce que moins l'enfant
02:06 prend de temps avec ses parents, moins il risque d'intégrer leurs préjugés.
02:12 Donc, il y a cette idée qu'on va toujours faire en sorte
02:15 que l'enfant doit être scolarisé le plus tôt possible.
02:18 Officiellement, l'argument négatif qu'on me dit, c'est que la famille
02:21 est un lieu toxique. L'argument positif moderne, c'est pour être capable
02:24 d'adapter l'enfant à la société moderne, aussi bien le prendre en charge
02:28 le plus rapidement possible.
02:30 Mais dans les faits, il y a cette idée qu'il faut le plus tôt possible
02:34 remplacer les parents par des experts, mandatés par l'État,
02:39 qui eux sauront de quelle manière correctement élever les enfants.
02:43 Il y a aussi, soit dit en passant, je prends la peine de le dire,
02:46 on s'inquiète, je le dis, de la culture transmise à la maison,
02:49 parce que la culture transmise à la maison, si vous avez plusieurs familles
02:52 rassemblées ensemble, ça fait une poche de résistance culturelle,
02:55 quelques fois rassemblée autour d'une école, j'y reviendrai dans un instant,
02:58 qui peut résister au discours étatique dominant, alias les Yvelines.
03:03 Mais j'y arrive à l'instant, il y a certains ministres qui ont dit
03:06 très clairement quel est leur rapport à la famille.
03:08 Il y a une citation qui est connue de Vincent Péillon,
03:11 figure classique, qui adore la Révolution française,
03:15 à chacun ses passions dans la vie, mais lui, voilà comment il présente
03:18 le rapport à l'école et la Révolution française.
03:20 - Ancien ministre de l'Éducation.
03:21 - Bien sûr, et philosophe, du moins le croit-il.
03:24 1789, l'année sans pareille, est celle de l'engendrement
03:28 par un brusque saut de l'histoire d'un homme nouveau.
03:32 La Révolution est un événement méta-historique,
03:35 c'est-à-dire un événement religieux.
03:37 La Révolution implique un oubli total de ce qui précède la Révolution
03:42 et donc l'école a un rôle fondamental.
03:45 L'école doit dépouiller l'enfant de toutes ses attaches pré-républicaines
03:49 pour l'élever jusqu'à devenir citoyen.
03:52 Et un peu plus tard, il dit, ça c'est dans un ouvrage, il dit,
03:55 pour donner la liberté du choix, il faut être capable d'arracher
03:59 l'élève à tous les déterminismes, familial, ethnique, social,
04:04 intellectuel, pour après faire un choix.
04:07 Ça vous voyez, c'est un choix philosophique, puis Vincent Péon
04:09 il n'a pas écrit ça en 1902, non plus qu'en 1802,
04:11 il a écrit ça tout récemment en 2012.
04:14 En 2012, donc, il nous dit, pour rendre l'individu libre,
04:18 il faut l'arracher à ce cadre étouffant et aliénant qu'est la famille.
04:23 Ensuite, il pourra en faire le choix librement,
04:25 mais on va d'abord l'arracher au sien pour le rendre à lui-même.
04:29 Donc, on comprend que dans cette idée, la famille,
04:31 il faut se rappeler ce que je dis, ça véhicule des préjugés,
04:34 ça véhicule un conservatisme, ça véhicule une conception de l'autorité,
04:38 ça véhicule l'idée d'une transmission.
04:40 Pour certains, c'est même l'institution qui est porteuse des valeurs
04:43 qui nous ont conduit au fascisme.
04:45 Donc, quand on a une vision aussi négative de la famille,
04:47 il faut la faire sauter. De quelle manière, notamment?
04:50 En cherchant à centraliser le plus possible l'école.
04:53 Donc, on va guerre contre l'école libre.
04:56 L'école libre, pourquoi? Parce qu'elle peut porter
04:58 une philosophie de l'éducation plus proche des parents que de l'État.
05:04 Et quand on sait cela, en pensant à l'école alzacienne,
05:07 eh bien, il faut être capable d'en finir avec cette école
05:10 qui porte des valeurs qui ne sont pas célébrées.
05:14 Par exemple, on se méfie des valeurs.
05:15 Qu'est-ce qu'ils font, par exemple, avec leur catholicisme là-dedans?
05:17 Durant l'arabesque, c'était strictement privé.
05:19 Comment peuvent-ils fonder un projet éducatif
05:21 sur une religion et une philosophie qui ne peut être qu'une spiritualité privée?
05:25 Comment osent-ils?
05:26 Donc, limiter le plus possible l'école libre.
05:28 C'est une espèce de vieille obsession de la gauche d'en finir avec ça.
05:31 De même, la guerre contre l'école à la maison.
05:33 Ça, c'est central. L'école à la maison, la scolarisation à la maison,
05:38 parce que là, c'est vu comme l'enfermement familial total.
05:41 Je précise que, personnellement, je n'ai pas d'enthousiasme
05:43 pour l'école à la maison. J'aime l'école.
05:45 Je pense qu'il est bien d'être socialisé et tout ça.
05:47 Mais j'essaie de comprendre pourquoi la gauche s'obstine sur l'école.
05:51 Pourquoi elle va en finir avec une école qui est dégagée
05:54 du pouvoir de l'État parce qu'elle veut, dans son esprit,
05:58 éviter les influences extérieures dans la formation des enfants.
06:02 Et je le disais, je parlais du cas des Yvelines un peu à la blague,
06:05 mais quand vous avez plusieurs familles qui veulent se rassembler
06:08 autour d'un projet éducatif, qui est quelquefois culturellement
06:11 plus conservateur que le discours porté par l'État ou par le régime,
06:15 plusieurs familles autour d'une école, ça fait une communauté.
06:18 Une communauté où des personnes se disent « Ah, mais ce modèle fonctionne bien.
06:22 Ça m'attire. Je veux aussi envoyer mon enfant là-bas. »
06:24 Ça fait des communautés qui peuvent résister quelquefois
06:27 au discours étatique dominant et ça, la gauche n'aime pas.
06:31 [Musique]
06:35 [SILENCE]

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