À 7h50, comme chaque vendredi, c'est le Débat Eco. Cette semaine : "L'Europe, un bouc émissaire trop facile ?" Dominique Seux et Thomas Porcher.
Retrouvez tous les débats économiques de Dominique Seux et Thomas Porcher sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/le-debat-economique
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00:00 Le 6/9 sur France Inter.
00:04 L'heure de l'édito politique avec vous, bonjour Yael Gauze.
00:07 Bonjour Ali, bonjour Marion.
00:08 Pendant que les eurodéputés font campagne, Yael, nos députés légifèrent.
00:13 Au Palais Bourbon, le débat sur la fin de vie a démarré le 27 mai dans une relative indifférence.
00:18 Oui, c'est le paradoxe. Le 4 mars, la France devenait le premier pays à sanctuariser le droit à l'avortement.
00:23 Et dans la foulée, dans cet élan sociétal, Emmanuel Macron exposait les contours du futur projet de loi sur la fin de vie.
00:30 Un texte au calendrier très politique, puisque programmé juste avant les européennes.
00:34 Une pierre de plus dans le jardin des oppositions, le RN en tête, l'occasion pour le Président de démontrer qu'il continue à engager de grandes réformes.
00:42 On y est, les députés discutent, amendes, article 6 voté hier soir, Alice Kachaner vous en parlait à 7h.
00:48 Mais, sauf à Zappé sur LCP qui retransmet tous les débats, on ne peut pas dire que le sujet soit sorti de l'hémicycle,
00:54 qu'il est émergé dans la campagne ou dans nos conversations.
00:57 Moins de 100 000 messages postés en deux semaines sur les réseaux sociaux, c'est extrêmement peu.
01:02 Quand on se rappelle les guerres de tranchées du Pax et du mariage pour tous, quel contraste ?
01:06 Et après tout, pourquoi s'en plaindre ?
01:08 Et comment vous l'expliquer ?
01:09 Pas ou peu d'écho dans les européennes.
01:11 Ça c'est logique puisqu'il s'agit de trouver un modèle français sur la fin de vie, pas une Europe de la fin de vie.
01:16 Et les dernières européennes ont laissé des traces.
01:18 En 2019, en toute fin de campagne, la tête de liste LR, François-Xavier Bellamy, prenait position contre la mort programmée de Vincent Lambert,
01:26 malgré l'acharnement thérapeutique.
01:28 Un débat de société complexe, clivant y compris à droite.
01:31 Depuis, les politiques préfèrent la prudence, liberté de vote, liberté de conscience.
01:35 Enfin, sommes-nous prêts, nous-mêmes, à regarder la mort en face et la souffrance ?
01:40 Ou met-on la poussière sous le tapis ?
01:43 Et un débat est vraiment si apaisé que ça Yael ?
01:45 Il y a de la gravité, il y a de la dignité, pas toujours, je vais y revenir, de l'écoute.
01:50 Et ça change de la bordélisation et des happenings pour TikTok.
01:53 On n'a pas peur d'exprimer ses doutes, de dire qu'on a changé d'avis.
01:56 L'étiquette politique devient dérisoire, sous l'œil avisé des participants à la convention citoyenne sur la fin de vie qui s'est tenue l'an dernier.
02:04 Certains sont là, dans les tribunes, tous les jours, au-dessus des députés, garant discret d'un débat complexe qu'ils ont eux-mêmes déjà tranché.
02:12 Beaucoup de fauteuils vides aussi dans cet émixsicle, 4 sur 5 vides, ce qui confirme la prise de distance avec un sujet difficile.
02:19 La plupart de ceux qui sont là ont déjà travaillé, auditionné, pesé les conséquences de leur vote.
02:24 Et donc à mesure que le texte avance, on entend aussi n'importe quoi ?
02:27 Oui, oui, que des néerlandais fuiraient pour l'Allemagne de peur d'être euthanasiés chez eux, dans leur pays.
02:32 Que les personnes trisomiques seraient menacées, qu'il y aurait un appel d'air pour les étrangers attirés par nos lois.
02:39 Le grand remplacement même dans la mort, fallait l'inventer celui-là.
02:42 Une loi qui va tuer cette emportée, mardi, la députée RN Laure Lavalette, très proche sur ce point,
02:48 déposition de Mgr Opeti, l'ancien archevêque de Paris dont j'exhume le tweet posté il y a 10 jours, écoutez.
02:55 "Un homme sur le quai du métro se lance sous la rame qui arrive. Que faire ? Je le pousse ou je le retiens ?
03:00 Il me paraît tellement évident qu'il faille le retenir.
03:03 Le poussé reviendrait à accomplir ce fameux suicide assisté, cher aux soi-disant progressistes, fermez les guillemets,
03:10 avec des raccourcis pareils. On aimerait effectivement que la société s'empare davantage du débat sur la fin de vie
03:16 pour y remettre un peu d'humanité et de raison."
03:18 L'édito politique de Yael Gauze, à suivre le Débat Éco.
03:27 Débat Éco avec Thomas Porchet, professeur à la Paris School of Business et membre des économistes atterrés.
03:34 Et Dominique Seux, éditorialiste à France Inter et aux Échos.
03:37 Bonjour messieurs.
03:38 Bonjour Ali.
03:39 L'Europe, l'Europe évidemment au sommaire et à l'ordre du jour de ce débat du vendredi.
03:45 L'Europe sous un angle économique avec de très nombreux enjeux.
03:49 On peut faire le constat que beaucoup, beaucoup de ceux qui se présentent aux élections européennes ont critiqué l'Europe.
03:57 Ces critiques sont-elles justifiées ou pas sur le plan économique ?
04:01 Il y a la politique économique et monétaire qui a été mise en cause.
04:05 Il y a la gestion du Covid. Il y a la guerre en Ukraine évidemment et la défense européenne, le commerce international.
04:12 On se souvient de tous les discours sur le libre-échange.
04:15 On va commencer par une question assez simple mais je vous demande d'y répondre très franchement.
04:22 L'Europe, est-ce qu'elle a été pendant toute la campagne un bouc émissaire trop facile Thomas ?
04:27 Non, ça n'a pas été un bouc émissaire trop facile.
04:30 Ce que je veux dire c'est qu'à chaque étape de la construction européenne, on nous a promis des gains économiques.
04:36 Et je pense qu'à un moment il faut interroger ces promesses.
04:38 C'est-à-dire, est-ce que le marché unique et la monnaie unique ont produit les résultats promis ?
04:43 Les résultats qu'il y avait dans les rapports, comme le rapport Secheny par exemple sur le marché unique.
04:47 Est-ce que la stratégie de Lisbonne en 2000 a permis à l'Europe d'être la première économie de la connaissance au monde ?
04:53 Est-ce que l'UE est un acteur géopolitique ?
04:55 Il y a tout un tas de questions auxquelles il faudrait donner des réponses.
04:58 Et on a l'impression que ces questions sont assez rarement posées.
05:01 On va les prendre les unes après les autres mais bouc émissaire facile l'Union Européenne pendant cette campagne ?
05:06 Oui, je pense vraiment totalement différemment de mon ami Thomas Porcher.
05:11 D'abord je me méfie, le bashing de l'Europe, ça aide ceux qui veulent la démolir.
05:16 Et je pense qu'il y a des raisons, ça tombe bien de dire que l'Europe a progressé de manière assez considérable ces dernières années.
05:24 Ces dernières années, vous diriez les cinq dernières années par rapport à 2009 par exemple ?
05:28 Ou en remontant aussi loin que Thomas ?
05:30 Par rapport à 2019, il y a énormément de changements.
05:33 Elle a changé, elle s'est adaptée et quand elle veut faire des choses, elle arrive à le faire.
05:38 On l'a vu sur la façon, le Covid bien sûr, mais c'est déjà presque un peu vieux.
05:43 Mais la façon de répondre à la disparition du gaz russe ensemble, la possibilité de faire des plans de relance, la possibilité, il y a un budget défense.
05:53 Le point quand même aussi, c'est que l'Europe, évidemment on en parle énormément parce que c'est la campagne,
05:59 mais l'Europe, le budget de l'Europe, si on demandait aux Français quel est le budget de l'Europe,
06:04 ils annonceraient probablement un chiffre beaucoup plus élevé qu'il n'est.
06:06 Le budget de l'Europe, c'est le PIB de la zone Grand Est en France.
06:09 C'est 1% du PIB européen. C'est 1%.
06:14 Donc il ne faut pas dire que l'Europe occupe la totalité de notre vie.
06:20 Et puis j'ai presque envie de dire, quasiment en étant naïf, parce qu'au lendemain de la célébration du 80e anniversaire du débarquement,
06:28 les pays qui étaient représentés sur les plages hier étaient opposés hier.
06:33 Ils ont été dans la guerre les uns avec les autres.
06:36 Et bien, après-demain, il y a 360 millions d'habitants qui vont être appelés à voter ensemble.
06:41 Pour des députés, pour construire des choses ensemble.
06:45 Excusez-moi d'être un tout petit peu naïf, mais ça m'émeut encore un peu.
06:48 C'est un peu ça le problème. C'est-à-dire que sur l'Europe, quand on en parle, on reste sur des considérations générales.
06:53 Alors ça vraiment, je suis ces affaires depuis 20 ans.
06:56 La promesse de la paix ou celle de la solidarité, ce ne sont pas des considérations générales.
07:00 Allons dans le fond.
07:02 Je vais m'expliquer. En 2005, quand on a parlé par exemple du traité constitutionnel,
07:05 il y avait des gens qui avaient lu le traité et qui ont dit "écoutez, il y a un certain nombre de choses dans ce traité qui me posent problème".
07:11 Par exemple, le fait que les services publics soient soumis à la concurrence.
07:13 Et en face, que disaient ceux qui défendaient le traité ? "Oh, attention, l'Europe c'est la solidarité, c'est la paix".
07:18 Et aujourd'hui, on vous dit la même chose. C'est des considérations générales sans rentrer dans le corps du texte.
07:22 Alors oui, il a raison Dominique de rappeler qu'il y a eu une parenthèse.
07:26 Attention à la parenthèse, il a fallu qu'on se tape quand même une pandémie mondiale pour qu'on commence à se dire
07:30 "Tiens, peut-être qu'on a été trop loin sur la case des modèles sociaux européens".
07:33 Mais vous ne me dites pas que quelque chose s'est passé au moment du gouvernement ?
07:36 Oui, ça s'est passé, mais la parenthèse, le problème c'est qu'elle est en train de se refermer.
07:40 Il s'est aussi passé quelque chose en 2008 où il y a eu des plans de relance,
07:42 il y a eu un soutien budgétaire à l'activité et ça s'est très vite refermé.
07:46 Et c'est ça moi le problème, c'est qu'il a fallu qu'il y ait une guerre à nos frontières
07:48 pour qu'on se rende compte que finalement les dépenses de défense c'est important.
07:53 Donc il faut à chaque fois qu'il y ait une crise d'une ampleur assez importante pour qu'il y ait une remise en question.
07:58 La réalité c'est que la remise en question, elle peut avoir lieu sans qu'on ait de crise.
08:02 Et je veux dire, il y a eu plusieurs fois où cette remise en question, je finirai là-dessus, elle a eu lieu.
08:06 Par exemple, les Français ont majoritairement voté non à la Constitution.
08:10 Les Grecs...
08:11 Le traité constitutionnel, en 2005, en tout, 8 pays l'ont adopté.
08:14 Oui, mais les Grecs par exemple ont voté non...
08:16 8 pays ont été pour ce traité constitutionnel.
08:18 Je termine. Les Grecs ont voté non au mémorandum, c'est-à-dire à un certain nombre de réformes de l'Union Européenne.
08:24 Et vous savez, il y a M. Juncker à l'époque, président de la Commission...
08:26 La grâce à ratification du traité de 2005.
08:28 Le président de la Commission Juncker avait dit "il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités".
08:33 Donc ça aussi, il faut parler un petit peu du déni démocratique qu'il y a eu à un certain moment.
08:36 Au moment de faire les grands choix, les Grecs ont choisi de rester dans la zone euro et dans l'Union Européenne.
08:43 Mais dans la zone euro. Un parti classé à l'extrême gauche, Syriza, a dit, Alexis Tsipras, entre 2010 et 2012,
08:51 "eh bien c'est mieux pour nous de rester dans l'Union Européenne malgré..."
08:55 Oui, mais les Grecs ont dit non. Le peuple a dit non.
08:57 Oui, mais je crois qu'aujourd'hui, les Grecs ne regrettent pas d'être dans la zone euro.
08:59 Et donc un parti est devenu un parti de gouvernement, a pris ses responsabilités historiques.
09:04 Donc on peut reparler de 2005 éternellement. Enfin, ça fait 20 ans maintenant.
09:08 Donc ce qui s'est passé, c'est que ces dernières années, vis-à-vis de l'attitude vis-à-vis de la Chine,
09:16 et Dieu sait que c'est compliqué sur ce sujet-là, entre la France et l'Allemagne.
09:20 Ah bon, alors prenons dossier par dossier.
09:22 Alors justement, comment sont, par les relations, l'Union Européenne-Chine sur ces cinq dernières années ?
09:27 Beaucoup de choses ont changé, et en bien selon vous ?
09:29 Je pense qu'il y a eu le réveil face à ce qu'on appelait une certaine naïveté.
09:35 Pendant des années, la Chine a apporté beaucoup de pouvoir d'achat aux Européens.
09:39 Mais ce qui a changé ces dernières années, c'est que les difficultés intérieures chinoises
09:44 ont fait que le commerce extérieur est devenu leur planche de salut.
09:48 Et donc, ils ont... et qu'en plus, les États-Unis sont fermés.
09:51 Donc ils sont prêts à faire débarquer un certain nombre de produits chez nous à prix cassé.
09:56 On l'a vu sur les panneaux solaires, on est en train de le voir sur les voitures électriques.
09:59 Modulons le fait quand même que, quand on regarde de près les chiffres,
10:04 l'invasion des voitures chinoises en Europe, pour l'instant, c'est du flan.
10:08 - Thomas Porchet, sur ce dossier.
10:10 - Effectivement, il y a eu une évolution dans la tête des gens pour reconnaître que le libre-échange pouvait...
10:16 - Dans la tête des gens ou dans les faits ?
10:17 - Dans les faits, je ne vois pas trop de changements dans les textes, moi.
10:19 Puisque vous savez, on signe toujours des traités de libre-échange.
10:22 Par exemple, en plein Covid, on en a signé un avec le Vietnam.
10:25 Donc dans la tête des gens, oui, il y a une évolution.
10:27 Mais dans les textes et dans les faits, je ne vois pas trop d'évolution.
10:30 - Dans les faits, qui ?
10:31 - Attendez, je vous donne un exemple très simple.
10:33 - Rapidement, parce qu'on a de nombreux dossiers à passer en retour.
10:35 - Tout à fait, mais j'aimerais aussi pouvoir...
10:36 - Bien sûr, allez-y Thomas.
10:37 - On nous a beaucoup parlé de la souveraineté européenne face justement à la Chine et aux Etats-Unis.
10:41 C'est une bonne question, mais qu'est-ce qui se passe à l'intérieur de l'Europe ?
10:44 A l'intérieur de l'Europe, l'Europe a reproduit en fait tous les effets délétères de la mondialisation.
10:48 Vous avez 5 paradis fiscaux, vous avez aujourd'hui des compagnies qui peuvent payer 0,005% d'impôts sur les sociétés, c'est Apple en Irlande.
10:56 Vous avez une concurrence sur les salaires avec les pays de l'Est.
10:59 Et la majorité des délocalisations françaises se font à l'intérieur de l'Europe.
11:03 Donc aujourd'hui, on peut être souverain européen, mais perdre des usines en France.
11:07 Cette question n'a pas été une seule fois traitée dans la campagne des élections européennes.
11:10 - De votre point de vue, vous devriez dire, le grand changement par rapport à 2019,
11:13 c'est que le mot "fédéralisme" était encore sur toutes les lèvres en 2019,
11:16 et vous ne l'aimez sans doute pas, et aujourd'hui c'est le mot "souveraineté" qui est remplacé dans les programmes de quasiment tous les partis.
11:21 Donc c'est une évolution qui va complètement dans votre sens.
11:24 Donc vous devriez dire, là, ce ne sont pas simplement des faits, ce sont des mots, ce sont des faits,
11:28 et ça se traduit dans un certain nombre d'actes.
11:30 Donc je ne comprends pas trop, en fait, que vous puissiez dire "rien n'a bougé".
11:36 - Dominique, Dominique, la question par exemple de l'Europe sociale, c'est une question, c'est un serpent de mer qui dure depuis 20 ans,
11:43 avec des gens qui disent "maintenant, il faut développer le volet social de l'Europe".
11:47 Il n'a jamais été développé. La question de la souveraineté, effectivement, elle est apparue il y a quelques années,
11:51 moi je demande à voir, mais je me permets aujourd'hui d'être sceptique.
11:55 - L'Europe sociale, c'est par exemple l'Europe de la santé, ça n'est pas une compétence européenne,
11:59 on avait au moment du vaccin qu'il y avait une production et un partage des vaccins qui a été réel,
12:04 la Roumanie a eu autant de vaccins que les Allemands.
12:07 - Et nous espérons, j'espère que ça va continuer, mais j'ai l'impression que ça bouge dans le bon sens.
12:12 - L'environnement, la question de l'environnement elle est évidemment cruciale,
12:16 il y a eu ce qu'on appelle, au cours de ces cinq dernières années, cet agenda proposé par la Commission Européenne
12:22 d'un "Green New Deal" ou d'un "New Deal Vert".
12:26 Pour vous Dominique, c'est un progrès et c'est une évolution dans le bon sens de l'Union Européenne ?
12:32 - Ça va dans le bon sens, mais parfois ça va un petit peu de manière erratique.
12:36 On va voir les émissions de gaz à effet de serre de l'Union Européenne, -10% sur les dix dernières années,
12:42 pour aller très simplement. Aucun autre continent, pays, etc. n'a fait quelque chose de ce type-là.
12:47 Donc c'est une réussite insuffisante, bien sûr, et je le dis tout à fait sincèrement.
12:53 En même temps, on voit bien que sur la politique agricole commune et ce qu'on a demandé aux agriculteurs,
12:57 on est allé un peu n'importe où, n'importe quoi, ça a été raté de ce point de vue-là,
13:02 notamment sur ce qui concerne les plants éco-phyto, les pesticides.
13:08 On a soit demandé trop de choses, soit mal demandé, soit mal organisé.
13:12 Donc tout ne va pas bien, mais sur le climat, il est difficile de dire que l'Europe ne fait non pas le job,
13:18 ça n'est pas assez, mais qu'elle n'a pas avancé.
13:21 - Vous vous acquiescez Thomas Porcher ?
13:23 - Oui, tout à fait. L'Europe a toujours été un des continents qui a respecté les accords de Kyoto
13:28 et qui a pris l'environnement au sérieux.
13:30 Mais il y a quand même un "mais", il faut dire qu'il y a une quinzaine d'années,
13:34 nous étions quand même les numéros un sur les panneaux solaires.
13:36 Aujourd'hui, nous accumulons un retard énorme sur les énergies vertes.
13:39 Entre les deux, il y a eu une dizaine d'années, et c'était la décennie austéritaire,
13:43 avec les TSCG, l'histoire de la Grèce, et j'en passe des meilleurs.
13:48 Et pareil, là, je trouve qu'on a loupé un tournant où on aurait pu être, pour le coup, des leaders au niveau mondial.
13:54 - La défense est aussi un autre sujet important.
13:57 Évidemment, la guerre aux portes de l'Europe, mais on a vu aussi se mettre en place quelque chose
14:01 comme une collaboration, Thomas Porcher et Dominique Seux, pour fabriquer notamment des munitions pour les Ukrainiens.
14:08 - Non, ce qui s'est passé, c'est qu'à partir de la chute du mur de Berlin,
14:11 la totalité des pays dans le monde ont commencé à baisser leurs dépenses de défense.
14:16 Sauf que, après les attentats du 11 septembre 2001, la plupart des pays ont remonté.
14:23 Et l'Europe a continué à faire des économies et à prendre les dividendes de la paix.
14:27 Pourquoi ? Parce que la vraie naïveté de l'Europe, c'est de se dire,
14:33 mais c'était à la fois grand et petit, c'était de dire
14:37 "notre modèle politique, notre modèle libéral, notre modèle économique, c'est-à-dire l'économie sociale de marché,
14:45 notre modèle écologique va s'imposer au monde parce que c'est le meilleur".
14:48 Bon, on doit admettre qu'on n'est quand même pas si con que ça.
14:51 Et donc sur la défense, on est autour de 2% du PIB pour les dépenses de défense dans l'Union Européenne.
14:58 La France va atteindre les 2%.
15:00 Le budget, et d'ailleurs ça explique pourquoi ils financent par des déficits les États-Unis,
15:05 le budget de la défense américaine, ça doit être de l'ordre de 900 milliards de dollars par an.
15:09 Le budget de la France, c'est 50. Donc on n'est pas du tout dans les mêmes ordres de grandeur.
15:13 Donc est-ce qu'on peut faire des choses en commun ? Il y a un fonds de défense qui est en train de se faire.
15:16 Mais chaque pays a des... Les pays de l'Est sont sous parapluie de l'OTAN,
15:21 donc ils achètent du matériel américain.
15:23 Thomas Porcher, est-ce qu'il faut blâmer l'Union Européenne ou est-ce qu'il faut blâmer les 27 ou chacun des États membres,
15:30 puisque ce sont souvent des décisions qui sont prises en commun et ce sont des décisions souvent souveraines ?
15:37 Oui, c'est des décisions souveraines, mais c'est vrai qu'il y a eu quand même une matrice qui a été imposée
15:42 par des traités qui visaient à contrôler des dépenses budgétaires et un certain nombre d'États,
15:47 notamment la France, et ça a été dit au moment de ce conflit entre la Russie et l'Ukraine,
15:52 nous avons fait sur la défense un certain nombre d'économies pour satisfaire ces critères qui ont été imposés.
15:58 Et c'est à ça, moi, que j'en veux. C'est-à-dire qu'il y a eu des choix, des arbitrages qui ont été faits.
16:03 À l'époque, d'ailleurs, il y a un professeur d'Harvard, Raoui Abdelal, qui dit que Jacques Delors est une des personnes
16:10 qui a fait cet arbitrage au sein de l'Union Européenne et que M. Michel Kambdessus et Henri Chavransky l'ont fait à l'OCDE et au FMI
16:17 et que toutes ces trois personnes étaient assez proches, d'ailleurs, du Parti Socialiste.
16:20 Ils ont fait des arbitrages envers la mondialisation et le contrôle des déficits.
16:24 Et c'est ça qui nous a amenés à des problèmes de dépenses dans la santé, à des problèmes de dépenses dans la défense
16:29 et il a fallu des crises majeures pour qu'on se dise "Ah ben mince, on aurait peut-être dû investir dans les hôpitaux,
16:33 on aurait peut-être dû investir dans la défense". L'Europe n'avance qu'avec des crises successives, c'est ça le problème.
16:39 - Les dépenses liées à la santé progressent continuellement depuis des décennies et c'est normal puisque le pays vieillit, etc.
16:47 Donc c'est difficile de dire l'austérité totale sur la... On en parlait la semaine dernière.
16:52 Non mais en 20 ans, les dépenses de santé en France ont passé de 200 à 300 milliards d'euros ces dernières années.
17:00 Donc c'est quand même pas sûr.
17:02 - D'un mot. Puisqu'il est 8h mais j'aimerais juste...
17:05 - Déjà ?
17:06 - Oui déjà, ça passe vite et c'est passionnant. D'un mot Thomas Porcher, ce que vous regrettez c'est qu'il n'y a pas eu assez d'Europe.
17:14 - Et il n'y a pas eu assez de débats sur le bilan de l'Europe et ça je le regrette.
17:19 - Merci Thomas Porcher, merci Dominique Seux, c'était le Débat Éco.