« La Pac est une politique dont la réforme reste à faire »

  • il y a 2 mois
Momagri

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00:00Oui, bonjour, M. Karl. Vous êtes député général de Montmagry, qui est à Sinkonk sur les prospectives de politique agricole.
00:12Nous venons à vous pour que vous fassiez votre interprétation des récentes décisions qui ont été prises à Bruxelles
00:20concernant le budget de la politique agricole commune et l'avenir de la politique agricole commune.
00:25Dans un premier temps, vous savez très bien de M. Hollande, en sortant des négociations addites, qu'il pense avoir préservé les intérêts des agriculteurs français.
00:34Vous, qu'en pensez-vous alors que le budget a été réduit en euro constant 2011 de 11-12% ?
00:41Oui, bonjour. Je pense que cette réforme est au mieux une réforme transitoire.
00:47Au pire, c'est la prolongation du système actuel avec quelques adaptations.
00:52Il y a une réduction de près de 50 milliards d'euros. On ne peut pas dire qu'on préserve une politique quand on accepte une baisse de 12%.
01:02Le contexte politique général, le contexte budgétaire était un contexte très contraint.
01:07Il est évident que la France a sauvegardé une PAC qui, encore une fois, est une politique dont la réforme reste à faire.
01:18C'est la prolongation d'un système sans beaucoup d'imagination et avec moins de moyens.
01:25Est-ce que vous pensez que le passage au Parlement européen sera un moyen de revoir sa copie et de trouver un meilleur compromis ?
01:36Normalement, le Parlement européen doit avoir à cœur, et c'est ce que certains des responsables du Parlement disent,
01:44d'utiliser le processus de co-décision qui s'applique à l'agriculture pour la première fois.
01:50De là à dire que le Parlement européen va faire la révolution, je n'en suis pas convaincu.
01:54Je ne sais pas d'ailleurs s'il en a les moyens.
01:57Il est évident que le Parlement pourrait très bien rejeter l'accord du Conseil des chefs d'Etat et relancer une véritable discussion autour du budget.
02:10Je ne pense vraiment pas que ce soit le cas. Il y a les élections allemandes qui vont avoir lieu en septembre.
02:15Il y aura peut-être un baroud d'honneur. Il y aura certainement un baroud d'honneur.
02:18Mais il y aura un accord sur la rareté budgétaire qui sera peut-être réparti un petit peu différemment.
02:24Je ne suis pas sûr d'ailleurs que la PAC ait gagné.
02:28Faisons le mieux avec ce que l'on a.
02:32Au Mont-Madrid, on réfléchit beaucoup sur l'organisation des marchés, mais aussi sur la façon de redistribuer et d'envisager un redéploiement des ailes.
02:42Comment envisagez-vous la mise en place de la convergence de la PAC avec le budget que l'on a ?
02:47Quelles idées auriez-vous envie de donner au gouvernement pour qu'elle soit plus en phase avec la situation actuelle de l'agriculture et qu'elle ne repose pas que sur une situation de rente ?
03:00Nous travaillons depuis plus d'un an à une PAC alternative qui essaie d'employer de manière plus efficace les moyens budgétaires
03:09et en même temps d'assurer une rémunération à la fois plus équitable et plus stable pour le monde agricole.
03:16Nous pensons que le système actuel des paiements découplés, des DPU, est un système qui n'est pas bon
03:22parce que lorsque les prix sont élevés, on se demande un petit peu à quoi servent ces aides.
03:26Et quand les prix sont bas, très souvent, ça ne suffit pas.
03:29Et c'est la concrétisation d'une absence de stratégie agricole européenne.
03:35Il n'y a pas de stratégie, il y a une politique de redistribution d'un budget de plus en plus rare.
03:41Je ne pense pas que c'est ce qu'il faut pour l'agriculture et la réforme à laquelle nous avons pensé
03:46est dans le cadre de l'enveloppe budgétaire actuelle, voire même éventuellement avec un petit peu moins.
03:51On pourrait mettre en place un système de paiement contracyclique,
03:55notamment pour le secteur des céréales, du lait et des oléoprothéagineux,
04:00qui assurerait un revenu minimum tout à fait décent au monde agricole,
04:05tout en laissant libre recours des jeux du marché,
04:09mais dans des limites qui seraient contrôlées par la puissance publique européenne.
04:15Il faut savoir qu'on a à faire face de plus en plus souvent à des crises.
04:19Le système actuel est un système qui ne permet pas de gérer les crises.
04:23Celui que nous proposons sera un système de budget flexible.
04:26Lorsqu'il y aura des crises, les paiements contracycliques donneront la possibilité de faire face à ces crises.
04:31Lorsque les prix seront élevés, il y aura beaucoup moins d'aides qui seront distribuées en vain.
04:35Le problème n'est pas le montant du budget en soi,
04:40mais l'ambition de construire une politique agricole
04:44qui permettrait de donner davantage de moyens à l'Union Européenne et d'affirmer son rang.
04:50Je crois qu'en même temps, vous comparez la situation européenne
04:53avec ce qui était organisé dans les autres grandes régions mondiales
04:57où l'agriculture était vraiment une stratégie.
04:59Tout à fait. Il faut qu'il y ait trois niveaux.
05:01Un niveau stratégique, un niveau politique et un niveau budgétaire.
05:04Aujourd'hui, on a complètement inversé l'ordre des choses.
05:07On part du niveau budgétaire pour définir une politique et on oublie complètement la stratégie.
05:12Les autres grands pays, nous avons mis en place un indicateur qui s'appelle SGPA,
05:16soutien global à la production agricole.
05:18Nous l'avons appliqué aux Etats-Unis, au Brésil, à la Chine et à l'Europe.
05:22Il apparaît que tous les grands pays ont des stratégies agricoles,
05:25mettent en face les moyens nécessaires,
05:27ce qui peut à certains moments entraîner des augmentations fortes des budgets.
05:31Les moyens nécessaires, c'est de préserver le maximum d'autosuffisance alimentaire,
05:36donc une préoccupation de sécurité alimentaire,
05:39et d'assurer aussi à ces pays-là une présence dans le monde
05:43qui soit une présence qui rime avec puissance.
05:47Le Brésil, c'est clair, a un objectif de devenir, on le dit souvent, la ferme du monde.
05:53Ils en ont les moyens, ils s'en donnent les moyens.
05:56Le Brésil, par habitant, soutient autant son agriculture que l'Europe.
06:00On l'oublie complètement ou plutôt on ne le sait pas.
06:03Et les Américains, c'est le double.
06:06Une question un peu d'actualité.
06:09Justement, le budget européen manque un peu d'ambition.
06:13Vous réfléchissez à une meilleure politique agricole, plus efficace,
06:16par rapport à la crise de l'élevage.
06:18Comment votre modèle pourrait prendre en compte les difficultés de l'élevage
06:22pour que le monde de l'élevage retrouve une dynamisme, une vocation,
06:26et que la France ne se transforme pas en plaine céréalière ?
06:30Déjà, je pense qu'en stabilisant mieux le revenu,
06:33en affectant mieux les fonds publics,
06:35on peut assurer aux producteurs, aux éleveurs,
06:39un accès beaucoup plus stable à la ressource.
06:42Aujourd'hui, les prix élevés des céréales sont un véritable problème.
06:46Vous avez fait des propositions à M.Solos sur l'élevage ?
06:48Oui, on a fait des propositions à M.Solos.
06:50On lui a présenté notre système à la fin du mois de janvier.
06:53Il a été très intéressé et il a demandé que l'on travaille ensemble
06:57dans la perspective d'une réflexion post-réforme de la PAC.
07:01Je suis intimement convaincu que ce que nous lui avons proposé
07:04peut être très utile pour gérer en particulier le secteur du lait,
07:09qui est un secteur qui est soumis à des crises de plus en plus fréquentes,
07:12et aussi le secteur de l'élevage.
07:14Nous allons commencer à travailler avec la Commission européenne
07:17pour ouvrir le chemin d'une véritable réforme de la PAC
07:21qui utilisera mieux les moyens budgétaires
07:26et qui se situera dans le cadre d'une stratégie européenne
07:29de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
07:32En attendant, tel que c'est parti, pour vous l'Union européenne
07:36se décroche au niveau de la stratégie de nourrir le monde ?
07:41L'Union européenne, depuis une dizaine d'années,
07:44du fait de cette absence de stratégie et de cette focalisation
07:48sur la rareté budgétaire, ne remplit pas son rôle de guide.
07:52On dit que la politique agricole commune est la seule politique intégrée.
07:55C'est une politique intégrée qui est vidée de son sens
07:58par l'absence de stratégie.
07:59Il est temps de remettre en œuvre une stratégie ambitieuse.
08:04On en a les moyens et on en a le besoin
08:06parce qu'on va passer à 9 ou 10 milliards d'hommes.
08:08Je pense que l'Europe a vraiment un rôle à jouer dans le domaine agricole.
08:12Merci M. Carle.

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