Christophe Delporte est professeur agrégé et docteur de l’Université. Ancien chef d’établissement dans le secondaire, il publie "Indignons-les", chez Vérone éditions. Des écrits "libres et libérés" sur l’Education nationale et la crise qui la traverse. Pour TVLibertés, Christophe Delporte revient sur les causes de ce phénomène, mais également sur les voies et moyens pour sortir de l’impasse.
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00:00♫ Générique de fin ♫
00:06– Madame, Monsieur, bonjour, bienvenue dans ce nouveau numéro du Zoom de TV Liberté.
00:11Aujourd'hui en compagnie de Christophe Delporte.
00:14Bonjour Monsieur. – Bonjour.
00:15– Merci d'intervenir sur TVL.
00:17Vous êtes professeur agrégé et docteur de l'université.
00:22Après avoir enseigné justement à l'université,
00:24vous êtes devenu chef d'établissement dans le second degré.
00:28Nous vous recevons aujourd'hui, Monsieur Delporte,
00:30dans le cadre de la parution chez Véron Editions de votre essai
00:35Indignons-les, sous-titré, écrit libre et libéré sur l'éducation.
00:39Un ouvrage disponible sur notre boutique en ligne tvl.fr.
00:44Ma première question, Christophe Delporte,
00:47vous dédicacez cet ouvrage à Samuel Paty et Dominique Bernard.
00:52Vous dites que ce sont des héros OS, mais aussi des héros A.U.T.S.
00:58De quoi, quel message portait-il ?
01:00– Il portait, et il porte encore, le message de la résistance à une décivilisation
01:07qui n'est pas seulement un combat qui est mené contre la République,
01:13mais contre la France elle-même, contre son identité même.
01:16Ils sont héros de la France au sens où Péguy l'entendait,
01:19des héros qui sont morts sur les champs de Bonheur pendant la guerre de 14-18.
01:25– Il y a eu des élèves qui les ont trahis, même.
01:29C'est des peurs que vous avez eues, vous, comme directeur d'établissement,
01:33au moment de se dire, ces jeunes que j'ai en face de moi,
01:36un jour, peut-être, peuvent-ils se retourner contre l'institution que j'incarne ?
01:40– Personnellement, je n'ai pas eu peur,
01:42mais j'ai rencontré beaucoup de professeurs qui ont peur, qui ont toujours peur.
01:46Il y a 56% des enseignants qui, aujourd'hui encore, se censurent.
01:52Pour des raisons très simples, c'est que l'institution Éducation nationale
01:59a relativisé la civilisation judéo-chrétienne.
02:03Et pas ce relativisme, elle a laissé s'imprégner dans une sous-culture,
02:12une forme de violence à l'encontre de l'institution scolaire
02:16qui est le dernier bastion de résistance face à l'islémisation de la France,
02:22face au hoquisme, si on peut parler aussi de ce type d'idéologie, ou du relativisme.
02:31– L'assassinat de Samuel Paty date de l'automne 2020.
02:35Est-ce que, selon vous, la situation s'est aggravée ?
02:38Depuis, on avait promis une libération de la parole des professeurs,
02:42une meilleure protection pour les professeurs.
02:44Est-ce que c'est ce que vous avez constaté sur le terrain ?
02:46– Non, la situation s'est aggravée.
02:48À preuve, Dominique Bernard a été assassiné au mois d'octobre dernier.
02:55Les ministres se perdent en logorrhée pour nous expliquer
03:00que ce sera la dernière fois qu'ils lutteront contre les fondamentalismes.
03:07Mais force de constater que l'ennemi est plus puissant qu'il n'y paraît.
03:13Et qu'aussi, on laisse, par lâcheté, par procrastination,
03:20on laisse se faire ce qui ne devrait pas se faire.
03:24Les élèves qui sont fondamentalisés,
03:27que l'on sait fondamentaliser dans les établissements et que l'on laisse sur place.
03:31On laisse les élèves parler en arabe,
03:34insulter les professeurs en arabe dans les cours, etc.
03:37sans que personne n'intervienne jamais.
03:39Et on ne s'explique plus ensuite pourquoi ils vont plus loin,
03:46et toujours plus loin, mais force de tirer sur le fil, ils cassent.
03:51– Revenons-en au cœur du propos de votre livre,
03:55avec une question à la fois simple et en même temps tellement complexe.
03:59Christophe Delporte, qu'est-ce qu'éduquer, selon vous ?
04:02Quelle est la définition que vous donnez à la mission de l'éducateur ?
04:07Quelle est la mission ? Quelle mission pour l'éducateur ?
04:10– La mission de l'éducateur essaie d'élever, au sens presque agricole,
04:17de mettre le grain de blé en terre et de le faire germer
04:22pour en donner le plus bel épi.
04:24Sachant qu'il y a l'ivraie qui pousse au milieu du blé,
04:30mais il appartient à l'éducateur de faire en sorte que la jeune pousse
04:35ne pousse pas de manière anarchique, mais soit encadrée par l'instruction
04:41et par l'éducation, et que la jeune pousse puisse elle-même
04:50être un germe d'espérance.
04:52Finalement, éduquer, c'est s'enfermer dans l'espérance.
04:54Je parle des vertus cardinales dans mon livre,
04:57j'aurais tout aussi bien pu parler des vertus théologales,
05:01puisque la vertu d'espérance est une vertu fondamentale quand on est éducateur.
05:06Malheureusement, aujourd'hui, l'espérance n'est plus le moteur de l'éducation.
05:12Quand on lit Jaurès, je suis loin des idées de Jean Jaurès,
05:16mais quand on lit Jaurès, quand on lit Ferry, quand on lisait,
05:20quand on lit des personnes peut-être plus proches de mes idées
05:25comme Edith Stein ou Simone Weil,
05:29on a cette idée que chaque naissance est une espérance,
05:34et qu'une espérance pour un avenir meilleur pour le monde,
05:39un avenir meilleur, c'est pour ça que je dis qu'il y a une eschatologie de l'éducation,
05:47parce qu'on va vers un monde qui devrait être meilleur à force d'éducation.
05:53Et à rebours de tout cela, malheureusement,
05:56on a plutôt l'impression d'un monde qui régresse qu'un monde qui progresse.
06:00Et si j'ai intitulé mon livre Indignons-les,
06:02c'était en partie pour répondre à Stéphane Essel, le talent en moi, malheureusement,
06:09quand il a écrit son Indignez-vous et sa petite poussette,
06:15et dans lesquelles il poussait les jeunes une forme de lâcheté
06:23à abandonner le passé et à se projeter dans un avenir
06:29qu'ils ne maîtrisaient peut-être pas eux-mêmes,
06:31sans enracinement, sans aucune valeur et sans aucun mur porteur.
06:40Une éducation sans mur porteur est une éducation créée dans l'évangile,
06:46c'est donc par l'évangile, on va dire cela.
06:48La maison doit être bâtie sur le roc, sinon elle ne tient pas bien longtemps.
06:52– Oui, puisque vous rappelez aussi dans votre livre,
06:54c'est que contrairement aux autres espèces,
06:56l'homme doit passer par l'autre pour devenir lui-même,
06:59c'est-à-dire que sans éducation, il ne devient jamais ce qu'il est,
07:03c'est-à-dire il ne devient pas un homme ou une femme.
07:06– Tout à fait, et c'est la grande question de l'empathie actuellement,
07:08sur laquelle je suis en train de travailler.
07:12On nous assomme d'empathie, empathie, empathie,
07:18mais la rencontre n'est possible que dans la mesure
07:21où il y a un humus commun, que dans la mesure où il y a un enracinement commun,
07:25que dans la mesure où les uns et les autres
07:29peuvent se relier à une espérance commune.
07:33Et aujourd'hui, autrefois, la République était une espérance,
07:38si elle pouvait en être une, elle était une religion,
07:41en tout cas pour un certain nombre d'instituteurs,
07:43illustrant la République, etc.
07:45Aujourd'hui, l'espérance qu'a chacun, c'est son selfie,
07:50c'est son portable et ses petites poussettes qui s'amusent avec son pouce,
07:54et qui finalement se soucie guère peu de ce qui se passe à côté de lui.
07:58Et il y a là une source d'indignation.
08:02Et indignons-les, c'est indigner d'une part les jeunes,
08:06en leur donnant des discours qui ne vont pas dans le sens qu'ils voudraient qu'ils aillent,
08:14il ne s'agit pas de faire du bisounours à longueur de journée quand on est à l'école,
08:19on nous abreuve de bienveillance, mais la bienveillance n'est rien
08:24sans fermeté, sans autorité.
08:27Et puis, il faut absolument que l'on redevienne,
08:38comme les fondateurs, alors j'en parle dans un livre que je suis en train d'écrire,
08:43mais les fondateurs des écoles jésuites, la Ratio Studio Room,
08:49qui fondent l'éducation sur le bien commun,
08:56et sur la conviction qu'il y a une loi naturelle, un beau, un bien, un vrai, un bon,
09:02et que le relativisme, le hookisme sont des idéologies mortifères
09:10qui ne pourront conduire qu'au chaos.
09:12– Justement, on parlait de l'assassinat de Dominique Bernard et de Samuel Paty,
09:17on oppose souvent à cet antrisme islamiste dans l'école,
09:22la laïcité républicaine, est-ce vraiment la bonne réponse ?
09:26Parce qu'elle comporte aussi cette part de relativisme.
09:31– La laïcité c'est un concept,
09:35et elle doit se vivre et s'éprouver si on veut qu'elle existe.
09:41Et je crois qu'à elle seule, le concept à lui seul ne sert à rien
09:48s'il n'y a pas d'enracinement, encore une fois, dans une culture,
09:52dans une foi peut-être, pour ceux qui la partagent,
09:57un enracinement qui fait que l'on peut aller dans la modernité.
10:02La modernité ce n'est pas simplement, comme le disait Stéphane Eyssel,
10:08foncer, foncer, foncer.
10:09La modernité c'est s'appuyer sur le roc, et puis avancer pas après pas,
10:15tomber parfois, pour avoir un but, voilà.
10:18C'est en conclusion, je parle de ces trois tailleurs de pierre
10:23qui construisent une cathédrale, et qu'il n'en est qu'un qui finalement,
10:31c'est exactement ce à quoi il sert.
10:33Et dans le schéma de la laïcité à l'heure actuelle,
10:42le discours sur la laïcité que l'on a aujourd'hui,
10:45et tel qu'on veut l'enseigner aujourd'hui, par l'empathie, etc.,
10:48ne sont pas des chemins de traverse,
10:53qui ne sont même pas des chemins buissonnés,
10:55qui sont du bavardage et souvent une perte de temps pour les élèves.
11:01Quand on regarde les programmes d'éducation civique et morale,
11:05on met une urne au fond de la classe pour leur montrer comment on vote,
11:10et ce qu'il faut voter, on leur dit aussi ce qu'il faut voter parfois à l'école.
11:16Mais on ne leur explique pas que le bien commun existe,
11:20et que l'homme vit en société, et que la laïcité n'a de fondement
11:26que si on a conscience d'être société et de faire société.
11:30– Sur cette notion, Christophe Delport, de refaire société,
11:34n'y a-t-il pas aussi, disons les choses,
11:35une forme de responsabilité du corps enseignant ?
11:38Vous vous rappelez par exemple que certains professeurs
11:41obtiennent leur poste après avoir obtenu 6 sur 20 à leur concours.
11:49Comment transmettre ensuite, quand il y a une telle crise,
11:52même de la vocation au sein du corps enseignant ?
11:55– La faillite du système scolaire français
11:57repose sur la formation des enseignants.
12:00D'une part, formation technique, pédagogique,
12:03pour peu que cela s'enseigne réellement.
12:06Le charisme pédagogique, ce que j'appelle l'autorité déontique,
12:13on l'a ou on ne l'a pas.
12:16En revanche, l'autorité épistémique, la connaissance, le savoir,
12:21ce qui fonde l'enseignement,
12:23aujourd'hui est tellement dilué dans des pseudo-savoirs,
12:31dans des pseudo-connaissances,
12:33que les maîtres ne sont plus maîtres de ce dont ils devraient être les maîtres
12:38et ne peuvent plus garder témoigner que de maigres connaissances.
12:42Et on entend parfois sur des chaînes de télévision,
12:45une chaîne de télévision pourtant pas forcément accusée de wokisme,
12:49et j'entendais l'autre jour sur CNews, un chroniqueur dire
12:54qu'il faudrait qu'après quelques années de baffa,
12:58on puisse se titulariser dans l'éducation nationale.
13:00Ce n'est pas un métier anodin que d'être enseignant,
13:02c'est une mission, je pense même que c'est une vocation,
13:07qu'on n'a pas forcément vocation à être toute sa vie enseignant,
13:10et qu'il est nécessaire de regarder ailleurs parfois
13:13pour pouvoir mieux appréhender la société telle qu'elle est.
13:18– Justement, ces allers-retours entre l'école et le monde, le siècle,
13:22si j'ose dire, comment peut-on, et faut-il d'ailleurs,
13:25résister à une forme d'antrisme de la société contemporaine
13:30à l'école aujourd'hui, avec ce qu'elle renvoie,
13:32aussi vous parliez du manque d'empathie tout à l'heure,
13:35est-ce qu'il faut refaire de l'école un sanctuaire,
13:38ou c'est une vision un petit peu naïve des choses ?
13:41– Non, il faut revenir, il faut relire la trilogie de Pagnol,
13:47le temps des amours, le temps des secrets, le troisième, je l'ai oublié,
13:52dans lequel le petit Marcel raconte son histoire de jeune collégien,
13:58et on a là une école sanctuaire dans laquelle on n'autorise pas
14:04la société à entrer, ou la société n'entre que par précaution,
14:10et quand Nicolas Sarkozy, il y a quelques années,
14:13a voulu développer tout azimut l'enseignement de l'économie
14:19au détriment de l'enseignement des langues classiques par exemple,
14:26on a beaucoup perdu, et l'école n'a pas à être le reflet de la société,
14:35parce que l'école doit être celle qui doit être à même de transformer la société,
14:40et si elle en est le reflet, elle ne pourra plus la transformer,
14:43et pour ma part, et c'est peut-être un peu de la morgue de ma part,
14:50mais je considère qu'un maître est un guide, est un témoin,
14:57et qu'on ne doit pas regarder l'éducation nationale avec les propos,
15:07parfois même béloubés encore, dans sa lettre de rentrée de septembre,
15:12où on parle d'inclusion des élèves, de bienveillance à l'endroit des élèves, etc.,
15:18mais nulle part il n'est question de nourrir les connaissances des élèves,
15:22nulle part il n'est question de nourrir les espérances des élèves,
15:28et une jeunesse qui n'a plus d'espérance, et la culture est une espérance,
15:34est une jeunesse qui part en déshérence, qui part dans le communautarisme,
15:38qui se délite et qui aboutit à des meurtres
15:42comme celui de Dominique Bernard ou Samuel Patin.
15:45– Nous discutons de l'effondrement du système scolaire,
15:48vous rappelez aussi un élément important,
15:51c'est que l'école a négligé peut-être l'intelligence de la main,
15:56en se focalisant uniquement sur celle de l'esprit,
16:00en quoi sont-elles indissociables, selon vous, ces deux intelligences ?
16:05– Alors, on est homo faber, on est homo sapiens,
16:09et pour être homo suffragens, citoyen, ce qu'on aurait public,
16:17il est nécessaire que homo faber et homo sapiens se rencontrent.
16:21Aujourd'hui, homo faber, l'élève technicien,
16:27l'élève en enseignement professionnel,
16:31il est enfermé dans une spécialisation qui ne lui ouvre plus l'esprit,
16:37il n'y a plus que 15% de matière générale sur un tronc commun,
16:42et on ne laisse plus aux jeunes qui ont cette intelligence de la main,
16:50qui est une véritable intelligence,
16:52même si elle a été méprisée au Moyen-Âge, l'intelligence de l'artisan,
17:01ces artisans qui ont fait la France moderne,
17:05des corporations jusqu'à la Révolution française, etc.,
17:09et bien cette France active de l'artisanat,
17:17cette France du travail, qui doit être nourrie intellectuellement,
17:24et j'insiste, j'insiste même pour qu'on mette de la philosophie
17:27en enseignement professionnel, on en met à l'école primaire,
17:30alors pourquoi pas en mettre en lycée professionnel,
17:34parce que je pense qu'il faut permettre à chacun de réfléchir
17:36les actes qu'il pose, et que quand on est à l'intelligence de la main,
17:39quand on est à l'intelligence d'un geste,
17:41il faut que l'on puisse lui donner un sens.
17:44– Ça renvoie à votre conclusion sur les bâtisseurs de cathédrales.
17:47– Ça renvoie à ma conclusion sur les bâtisseurs de cathédrales.
17:51– Christophe Delporte, un facteur d'abêtissement contemporain,
17:53en tout cas souvent désigné comme tel,
17:55sur lequel je voulais vous interroger, c'est l'emprise des écrans.
17:58Aujourd'hui, chez beaucoup de jeunes, au cours des dernières semaines,
18:03plusieurs voix sont élevées pour réclamer l'interdiction des écrans
18:08chez les enfants, les adolescents.
18:10Y êtes-vous favorable, et avez-vous, comme chef d'établissement,
18:13constaté les effets délétères de ce monde numérique sur les esprits ?
18:18– Oui, avec une expérience qui est double,
18:21parce que dans l'un de mes établissements,
18:24j'avais généralisé la tablette pour les élèves.
18:30Sans pour autant négliger le livre et le cahier,
18:35elle ne devait être qu'un outil complémentaire
18:38pour une information complémentaire.
18:41Parce que, et c'est ce que je reproche à l'ouvrage Petite Poussette,
18:47dont on parlait tout à l'heure,
18:49on nous laisse à croire que par les nouvelles technologies,
18:52par Internet, par Wikipédia, Edgar Morin et Serre sont béats devant Wikipédia.
19:05Je ne sache pas, je ne sache pas que l'on apprenne beaucoup à lire peu,
19:11et que l'on apprenne beaucoup par les sucédannées de réponses
19:16que l'on trouve dans des écrans qui sont manipulés
19:22par des esprits que l'on ne maîtrise pas pour le coup.
19:28Edith Stein le disait très bien,
19:31que pour être un bon maître, il faut apprendre beaucoup,
19:34et que pour être un bon élève, il faut lire tout.
19:37Et je crois que revenir au livre, c'est fondamental.
19:47Hermann Hesse disait que tout ou tard,
19:50le livre reviendrait au cœur du modèle social
19:54parce qu'il est le seul vecteur d'idéalisation du monde,
20:02et il est le seul vecteur d'ouverture aux rêves.
20:06Et l'intelligence artificielle ou tout ce que l'on voudra
20:11ne viendront jamais se substituer aux rêves,
20:14ne viendront jamais se substituer à l'intelligence de la main,
20:18à l'intelligence spirituelle de l'homme aussi,
20:24parce que la culture et l'école,
20:26elle a aussi à se soucier de la part mystique de l'enfant,
20:32et du jeune, et les nouvelles technologies,
20:34les écrans n'y feront jamais rien.
20:38Et il n'est plus le temps d'agir,
20:41parce qu'on est dans une société dans laquelle je m'aime tellement
20:48que je fais des selfies à longueur de journée,
20:51que j'envoie des selfies à longueur de journée à tout un chacun,
20:55et que j'en oublie de regarder les autres,
20:58de regarder ceux qui sont autour de moi,
21:00et à ne pas regarder ceux qu'il y a autour de soi,
21:04on arrive à des extrémités comme l'assassinat de Samuel Paty
21:10ou de Dominique Bernard,
21:11parce que justement on n'a pas prêté attention aux risques d'à côté,
21:15on n'a pas porté attention à la baïa,
21:17on n'a pas porté attention aux voiles islamiques qui se répandent partout,
21:22et il faut que l'homme reprenne en main un peu, beaucoup,
21:32ce qu'il est en réalité, c'est-à-dire un être de réflexion,
21:39et un être qui est libre parce qu'il a la connaissance,
21:45et il faut reconquérir cette liberté
21:49qui sera le gage de l'espérance de la société de demain.
21:54– Ma dernière question, Christophe Delporte,
21:55vous qui la côtoyez, et malgré les travers que vous décriez,
22:00avez-vous encore foi dans la génération qui vient ?
22:04– Oui, j'ai eu la chance,
22:11j'ai une double expérience,
22:13un livre d'enseignement privé et d'enseignement public,
22:18je ne vais pas opposer les uns et les autres,
22:21mais dans les uns et les autres, tant dans le privé que dans le public,
22:25j'ai rencontré des élèves qui voulaient y croire,
22:29et qui pensaient encore que la connaissance a une valeur,
22:35et que se distinguer par la connaissance,
22:38c'était tout aussi bien que de se distinguer par le joint
22:42qu'on a dans la poche ou par la cocaïne que l'on a le week-end,
22:46et j'ai fort apprécié des échanges avec des élèves
22:54qui n'étaient plus possibles avec des professeurs,
22:55parce que les professeurs trouvaient ces auteurs un peu dépassés,
23:00mais je me souviens de Noé par exemple,
23:04un de mes élèves de terminale qui était fasciné par Charles Péguy,
23:10tel autre qui était fasciné par Bernanos,
23:13des auteurs qu'on ne lit plus ou qu'on ne veut plus lire
23:15et qui pourtant sont porteurs d'une véritable modernité,
23:20mais que l'on n'enseigne plus,
23:21parce que maintenant c'est la littérature de gare,
23:26la littérature de supermarché en thème de gondoles,
23:29vous avez des saucissons, vous avez Marc L. et autres minceaux,
23:39voilà, il faut retrouver les fondements,
23:41et retrouver ce qui fait sens.
23:47En tout cas, je suis viscéralement ancré en espérance,
23:52et c'est pour ça que ma devise, et je la mets en quatrième de couverture,
23:57ma devise dans mon dernier établissement,
24:02une traduction un peu personnelle,
24:03ce qu'il y a de serviat qu'il sache pour qu'il serve,
24:07parce que la connaissance est là pour que nous puissions
24:11le mettre les uns au service des autres.
24:14– Merci infiniment Christophe Elleporte pour cet entretien.
24:18Je rappelle le titre de votre ouvrage paru chez Véron Éditions,
24:22Indignés, laids, sous-titrés, écrits, libres et libérés sur l'éducation,
24:26un ouvrage que vous pouvez vous procurer sur notre boutique enlignetvl.fr.
24:32Merci de nous avoir suivis,
24:34n'hésitez pas à partager cet échange autour de vous,
24:37à très bientôt sur TVI Libertés.