Retrouvez les émissions en intégralité sur https://www.france.tv/france-2/telematin/toutes-les-videos/
Aujourd’hui dans « Les 4 V » Télématin revient sur les questions qui font l’actualité avec Sébastien Lecornu, Ministre des Armées et des Anciens combattants.
Aujourd’hui dans « Les 4 V » Télématin revient sur les questions qui font l’actualité avec Sébastien Lecornu, Ministre des Armées et des Anciens combattants.
Category
📺
TVTranscription
00:00Bienvenue au Ministre des Armées, Sébastien Lecornu, qui est donc avec nous en ce 11 novembre.
00:07Bonjour. Bonjour, merci de m'accueillir.
00:09Bienvenue. Jour anniversaire de la Messie de 1918.
00:12Hélas, bien sûr, on n'en a pas fini avec la guerre, comme on le voit encore d'ailleurs ce matin du côté de l'Ukraine.
00:17Vous avez vu cette allère générale.
00:19Dans tout le pays, il y a des bombardiers russes qui ont été envoyés sur l'Ukraine,
00:25alors qu'on apprend dans le Washington Post que Donald Trump a demandé à Vladimir Poutine d'arrêter l'escalade en Ukraine.
00:32On voit bien que la situation est en train d'échapper à tout contrôle, et au contrôle des Américains ou pas ?
00:37On voit bien aussi qu'il y a la communication d'un candidat aux élections américaines qui vient d'être élu.
00:43On va y revenir dans un instant. Il y a des situations tactiques et stratégiques sur la ligne de front.
00:47Et de fait, vous avez des forces qui sont relativement équilibrées sur cette ligne de front,
00:51mais avec la Russie qui continue sa progression par grignotage au prix d'ailleurs de pertes humaines absolument importantes.
00:59Et derrière, vous avez un début de changement climatique, de météo.
01:03Ça ne sera plus pour ici l'Hexagone, mais c'est encore plus vrai évidemment pour cette partie de l'Europe et du monde,
01:08et dans lequel vous allez avoir de plus en plus de frappes dans la profondeur de la part de la Russie,
01:12notamment pas que sur la ligne de front, mais aussi sur les infrastructures énergétiques ou les infrastructures civiles,
01:18ce qui d'ailleurs laisse encore avoir une aide importante à donner à l'Ukraine,
01:22notamment en matière de défense sol-air pour protéger les populations civiles.
01:30Tant à ce que Donald Trump coûte les crédits, il a parlé visiblement avec Vladimir Poutine,
01:34en tout cas c'est ce que dit le Washington Post, avec Elon Musk également dans la boucle.
01:37Est-ce que cette victoire de Trump, c'est aussi et peut-être surtout une victoire de Poutine ?
01:41L'avenir le dira. La réalité, c'est que les principes de réalité vont vite s'imposer
01:46à n'importe quelle nouvelle administration américaine, y compris celle du président Trump.
01:50Et puis, vous ne pouvez pas ne pas voir le rapprochement entre Moscou et Téhéran,
01:54entre Moscou et la Corée du Nord.
01:56Vous savez, derrière, pour beaucoup d'Américains, la vraie obsession, pardon, c'est la Chine,
02:01et de ne pas voir qu'il y a une interdépendance, une interconnexion de tous ces sujets,
02:05ce serait évidemment une erreur.
02:06Donc la réalité, c'est qu'évidemment ce coup de téléphone tel qu'il a été rappelé par les médias,
02:10ou rapporté par les médias, était quelque part attendu.
02:13La réalité maintenant, c'est à quels paramètres, avec quels critères,
02:17les discussions éventuelles pourraient être engagées.
02:19Moi, je rappelle une chose, c'est que la discussion, elle doit se faire
02:22selon les paramètres aussi des Ukrainiens.
02:24Le président Trump a eu le président Zelensky, évidemment, au téléphone.
02:27Que ça ne doit pas ressembler à une capitulation.
02:29Par définition, c'est bel et bien une discussion, s'il devait y avoir discussion,
02:33qui doit se faire sur des critères qui sont clairs.
02:35Puis après, il n'y a pas que l'Ukraine, il y a la question aussi de la sécurité de l'Europe
02:39et des Européens, parce que ce n'est pas le tout que les armes se taisent demain,
02:42encore faut-il que tout cela ne redémarre pas, ne redébute pas, ne recommence pas.
02:46Et ça, c'est évidemment aussi un des grands enjeux qui va se faire,
02:49et ça se fera forcément avec les pays européens et la France au premier chef.
02:52La tonalité côté Trump n'est pas, semble-t-il, à l'apaisement
02:55vis-à-vis de Volodymyr Zelensky.
02:56Vous avez peut-être vu cette intervention du fils de Donald Trump,
02:58on sait combien la famille est impliquée, qui dit,
03:00dans 38 jours, Zelensky va perdre ses allocations.
03:03Voilà ce qu'il écrit, vous êtes à 38 jours de perdre votre allocation,
03:07même après l'élection, on reste dans la provoque.
03:09Oui, on verra les faits.
03:10La réalité, c'est qu'il y a un cadre aussi de référence.
03:12On n'a pas l'air de croire en beaucoup.
03:13Vous dites, voilà, il y a ce qu'on dit.
03:14Le président Trump, il a déjà 4 ans de pouvoir derrière lui.
03:16Donc, on a vu aussi ce qu'il avait pu faire pendant 4 ans.
03:18Donc, il y a le cadre déclaratoire, et puis après, il y a le cadre de la réalité.
03:23Et la réalité, c'est que personne ne peut prendre le risque, dans le monde occidental,
03:27d'abandonner l'Ukraine et de voir la Russie, demain, recommencer,
03:30et de voir l'agenda de déstabilisation de Téhéran ou la Corée du Nord,
03:34qui sont par ailleurs des pays proliférants sur le terrain nucléaire, se faire.
03:37Donc, une fois plus, moi, je suis ministre des Armées,
03:39donc je ne veux pas être dans la politique fiction.
03:42Ce que je sais, c'est que ces paramètres et ces crises sont malheureusement
03:47très difficiles et très compliquées à résoudre,
03:49et que du jour au lendemain, la table ne pourra pas être renversée,
03:52même si la communication politique peut laisser à penser que ce serait si simple.
03:56Malgré tout, vous travaillez sur d'autres scénarios, vous anticipez.
03:58Est-ce que la France et l'Europe pourront compenser un éventuel retrait américain ?
04:02Oui, alors, je vais vous dire, là aussi, une chose, ce qui m'a beaucoup frappé,
04:05y compris parfois dans nos médias pendant la campagne électorale américaine,
04:08c'est de ne pas avoir à ce point souligné que la préoccupation,
04:11pour ne pas dire plus, qu'est la Chine pour les États-Unis,
04:15était un point commun entre les Républicains et les Démocrates.
04:18Ça ne prend pas les mêmes mots, ça ne prend pas les mêmes formes.
04:20Enfin, je pense qu'il faut bien dire à nos concitoyens et nos concitoyennes
04:23que soit Mme Harris ou M. Trump, le pivot, comme on dit,
04:28c'est-à-dire le pivot vers l'Europe, vers le Pacifique Nord,
04:32au fond, le fait de dire que les États-Unis doivent moins s'occuper de la sécurité des Européens
04:36et davantage s'occuper de ce qu'on appelle l'Indo-Pacifique
04:39et l'ensemble des grands éléments et des grands événements qui peuvent se produire dans le Pacifique Nord
04:43est un point commun aux États-Unis.
04:45Donc, quoi qu'il arrive, il y a un réveil qui doit se faire par les Européens et pour les Européens.
04:50Alors, ce n'est pas un débat nouveau.
04:52Je le dis souvent, il faut se rappeler des grandes déclarations du général De Gaulle dans les années 60.
04:56Il y a toujours eu en Europe des gens qui considéraient que la question de la sécurité était trop lourde
05:01pour ne pas le faire sans les Américains avec un rapport transatlantique absolu.
05:06Puis ceux qui, comme nous, parce que l'héritage du général De Gaulle,
05:09considèrent qu'on doit pouvoir se prendre en main tout seul.
05:12Évidemment, c'est cet agenda-là qui va devoir prendre le dessus
05:14parce que dans beaucoup de capitales européennes, au moment où je vous parle,
05:17les gens ont peur parce que ce sont des puissances qui sont non dotées de l'arme nucléaire,
05:21parce que ce sont des puissances qui ont pu connaître l'occupation soviétique dans le passé,
05:25parce qu'elles sont plus proches de l'Ukraine aussi et de la Russie.
05:28Et là, on a un moment de réveil où il faut que la peur se transforme en volonté
05:32de bâtir un agenda de souveraineté, d'autonomie stratégique européenne
05:35et non pas justement d'être dans une fuite en avant, en quelque sorte,
05:39qui laisserait à déléguer encore un peu plus sa sécurité à Washington.
05:42Ce serait un contresens historique.
05:44Pour finir sur l'Ukraine, est-ce qu'Emmanuel Macron doit y aller pour réaffirmer un leadership
05:47et un soutien de la France dans ce pays ?
05:49Il ira sans doute dans les temps prochains.
05:51La réalité, c'est que ce ne sont pas les visites.
05:53Les visites, elles ont déjà eu lieu de nombreuses reprises.
05:55Je serais amené à me rendre probablement entre décembre et janvier.
05:58Le président Zelensky et le président Macron s'entretiennent régulièrement,
06:00comme le ministre Barreau et son homologue.
06:02Pareil pour votre serviteur.
06:03Je pense que là, pour le coup, la coordination avec l'Ukraine,
06:07elle est bonne entre Paris et Kiev.
06:09Alors, la coordination, elle est beaucoup moins bonne entre la France et Israël.
06:12On l'a vu, les tensions depuis plusieurs jours sont très fortes.
06:16Malgré tout, hier, Emmanuel Macron a annoncé qu'il assisterait au match France-Israël jeudi.
06:20Pourquoi cette décision ?
06:21Malgré d'ailleurs les difficultés parfois qu'on peut avoir avec les dirigeants israéliens
06:25et le fait qu'il n'y ait pas de difficultés avec l'État d'Israël.
06:28Je pense qu'il est bon aussi, dans le moment auquel nous sommes,
06:30de distinguer parfois les États, les peuples de leurs dirigeants.
06:34Et ce n'est pas faire offense à un allié que de lui dire
06:37que parfois nous trouvons que la manière dont il mène cette guerre
06:40ne correspond pas aux standards qui sont les nôtres,
06:42notamment sur le terrain du droit humanitaire, du respect du droit international,
06:46et accessoirement...
06:48Est-ce que ça va être de pire en pire, sur ce plan, avec l'élection de Donald Trump ?
06:52Parce que vous avez eu le béni d'Emmanuel Macron...
06:53Je vais vous dire une chose.
06:54Je pense qu'une succession de victoires tactiques,
06:57ce qu'incontestablement Tsaïl est en train d'avoir depuis maintenant quelques semaines,
07:02une accumulation de succès tactique ne fait pas une victoire stratégique
07:05et une victoire même politique.
07:07Et vous le voyez bien que ce risque d'escalade régionale au Proche et au Moyen-Orient,
07:12et toujours là, les médias iraniens font tête à potentiellement
07:16une nouvelle riposte contre Israël.
07:18Vous voyez bien que les opérations de sécurité qui sont menées,
07:21de guerres qui sont menées par Tsaïl au Liban,
07:23sont redoutablement complexes, avec des enjeux de sécurité importants
07:26pour nos soldats, y compris les soldats français de la Finule.
07:30Donc en fait, on est dans un moment où on a toujours dit ça,
07:32depuis un an, peut-être qu'on a été les premiers à le dire,
07:34donc malheur à celles et ceux qui sont parfois les premiers à le dire,
07:37c'est en disant mais jusqu'où on va ?
07:39On va mettre en cause la capacité d'Israël à se défendre,
07:42loin, sans faux, au contraire, parce que ce qui se joue derrière,
07:45c'est la sécurité de l'État d'Israël à 5, à 10, à 15 ou 20 ans,
07:49et donc aussi notre sécurité à nous, Européens et Français.
07:52Le titre de votre livre que vous étiez allé présenter
07:54à Bréville à Gaillard ce week-end est assez inquiétant,
07:56puisque c'est vers la guerre.
07:58Point d'interrogation.
07:59Sur la forme d'une question, évidemment,
08:00mais on imagine que cette question vous a été beaucoup posée
08:02par les Français, vous leur dites quoi pour les rassurer ?
08:04Déjà, il y a eu un débat dans mon entourage sur cette affaire de titre,
08:07entre ceux qui m'ont dit que je n'aurais jamais dû mettre
08:09un point d'interrogation parce que 20 ans de lutte contre le terrorisme,
08:1360 soldats pratiquement tombés au Sahel.
08:16Oui, on y est déjà, en fait.
08:17La guerre y était déjà, parce que tout ce dont on vient de parler,
08:20Proche et Moyen-Orient, Ukraine, n'a pas fait disparaître
08:22les menaces anciennes, dont la menace terroriste.
08:26Et en même temps, j'essaie de démontrer dans l'ouvrage
08:28que la Russie et d'autres compétiteurs, l'Iran, la Corée du Nord,
08:31sont en train de réinventer aussi de formes de guerre.
08:34Classique, ancienne, prolifération nucléaire, menace,
08:37et puis une guerre nouvelle, hybride, cyber, militarisation de l'espace.
08:43Et donc, on peut désormais être défait sans être envahi.
08:47Et c'est aussi ça que j'essaie d'expliquer à nos compatriotes,
08:50c'est de voir un peu quels sont les défis de sécurité
08:52qui nous attendent dans les 10 ou 15 prochaines années.
08:54Allez, on vous libère pour aller assister aux commémorations, bien sûr, du 11 novembre.
08:56Merci beaucoup Sébastien Lecordu.
08:57Merci beaucoup pour votre invitation.
08:58Merci à tous les deux et merci également à Ludovic Legris
09:01pour la traduction en langue des signes.