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Aujourd'hui, dans « Les 4 V », Jeff Wittenberg revient sur les questions qui font l’actualité avec Raphaël Glucksmann, député européen Place publique.
Aujourd'hui, dans « Les 4 V », Jeff Wittenberg revient sur les questions qui font l’actualité avec Raphaël Glucksmann, député européen Place publique.
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00:00Bonjour Raphaël Duxman, merci d'être là en direct ce matin, surtout dans cette semaine qui s'annonce particulièrement passionnante sur le plan politique parce que demain il y a le discours de politique générale du nouveau Premier Ministre François Bayrou, on aura des réponses notamment sur les retraites, on entend beaucoup parler en ce moment d'une suspension de 6 mois, le temps de renégocier, est-ce que cette solution vous satisferait ou pas ?
00:24Oui c'est ce que nous demandons et je dois dire qu'en fait on est dans un moment particulier parce que ça fait 7 ans qu'il n'y a pas eu ce type de dialogue, qu'il n'y a pas eu ce type de négociation, pour la première fois il y a une vraie, une sérieuse discussion, une sérieuse négociation.
00:42Il y a eu plein de discussions sur les retraites depuis des années, le premier mandat, le deuxième mandat, il y en a eu dans tous les sens.
00:48De vraies négociations politiques, vous savez ça fait quand même depuis 2022 qu'il n'y a pas de majorité absolue à l'Assemblée Nationale et pour la première fois on en prend conscience et on agit de manière responsable.
00:58Et moi je pense que c'est un moment où la classe politique française doit montrer sa maturité, ça suppose des bougées de la part du gouvernement, mais vous savez nous on n'a pas envie du chaos.
01:07On voit les tempêtes géopolitiques qui vont s'abattre sur l'Europe et sur la France, on voit la crise budgétaire, on voit la crise financière possible, on voit la crise politique dans laquelle s'est enfermée notre pays depuis la dissolution insensée du 9 juin 2024.
01:21Et donc on veut agir en responsabilité et ça suppose des discussions franches, des discussions sérieuses, elles ont lieu aujourd'hui au ministère de l'économie.
01:29Moi je vais encore tout à l'heure au ministère de l'économie discuter avec monsieur Lombard et il faut qu'on obtienne un accord de non-censure.
01:36Vous le connaissez bien, c'est un ami personnel comme c'est l'ami d'Olivier Faure ou pas ?
01:39Moi je le connais, oui je le connais bien, je sais que c'est quelqu'un qui a la justice sociale dans son radar, qui est guidé par ce souci de justice fiscale et de justice sociale.
01:48Et donc c'est quelqu'un avec qui on peut discuter et surtout, surtout, c'est une démarche qui est à l'antithèse de ce qui s'est passé précédemment,
01:53c'est-à-dire que monsieur Lombard veut un accord avec la gauche et ne pas dépendre du Rassemblement National et du pouce levé ou baissé de Marine Le Pen
02:02parce qu'on a vu ce à quoi ça conduisait, c'est-à-dire à la censure de monsieur Barnier.
02:06C'est un accord qui coûte cher, vous parlez de responsabilité mais Laurent Wauquiez lui ce matin dans le Parisien a dit c'est complètement irresponsable de faire ça,
02:12ça va coûter pratiquement 3 milliards et demi d'euros en finances publiques, on a les moyens de s'offrir ça ?
02:17On a des moyens d'avoir des recettes supplémentaires, on a des moyens d'avoir des économies ailleurs.
02:20Ce qu'on n'a pas le moyen de faire, c'est de casser notre contrat social.
02:23Vous avez trois quarts des Françaises et des Français qui sont opposés à cette réforme.
02:26Vous avez eu une brutalisation du dialogue social pendant cette réforme.
02:30Oui mais en même temps, vous dites on peut trouver de l'argent comme ça, comme s'il y avait de l'argent magique, mais il manque cet argent magique.
02:34Non, non, on ne dit absolument pas ça.
02:36Ce qu'on dit c'est qu'il faut faire un effort de financement et qu'on est prêt à étudier toutes les pistes et qu'on n'arrive pas avec des méga lignes rouges.
02:43Simplement ce qu'on dit c'est qu'une réforme qui n'est pas acceptée par la société, elle doit être remise en discussion.
02:49Et c'est ce que nous voulons obtenir du gouvernement et nous agirons ensuite en responsabilité.
02:54Est-ce que d'ores et déjà vous pouvez dire, on ne souhaite pas, vous n'êtes pas à l'Assemblée Nationale évidemment,
02:58mais vous souhaitez en tout cas que la gauche et le PS ne votent pas la censure de ce gouvernement s'il y a la suspension ?
03:04Mais ce que je souhaite c'est qu'il y ait des avancées qui permettent de ne pas voter la censure.
03:07Parce que vous savez, ce n'est pas un jeu.
03:09Je veux le dire ici, la classe politique française, si elle considère les chutes de gouvernement les uns après les autres comme un jeu,
03:15elle perdra toute crédibilité, en particulier à ce moment aussi important de notre histoire.
03:19C'est quand même le PS qui a fait chuter le gouvernement précédent.
03:21Mais parce que vous aviez un gouvernement qui faisait la danse du ventre face au RN,
03:25qui voulait éviter la censure en séduisant le RN et pas en séduisant ou en discutant sérieusement avec la gauche.
03:31Alors justement, sur le rapport au RN, il y a eu ce week-end une législative partielle du côté de l'ISA.
03:38Vous avez refusé d'adouber un candidat LFI.
03:40Ça allait dans ce sens ? Vous dites aujourd'hui que les priorités ont changé.
03:43L'ennemi numéro un, ce n'est plus le Rassemblement National. Cette bataille-là, on l'a gagnée ?
03:46L'ennemi numéro un, c'est le Rassemblement National.
03:48Mais moi, j'ai toujours dit que la seule légitimité, ce qui justifiait à mes yeux une alliance avec des partis comme la FI
03:55qui est à ce point distant de notre vision du monde, de notre rapport au débat public,
03:59c'était le risque imminent de prise du pouvoir par Jordan Bardella.
04:02C'est ça qui motivait les discussions du NFP.
04:05Or, aujourd'hui, nous ne sommes plus dans cette situation.
04:07Et dans cette législative partielle, nous ne sommes plus dans cette situation.
04:10Donc moi, ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas d'accord national qui lie place publique avec la FI à l'échelle nationale.
04:16Et donc, très clairement, nous ne voulons pas dépendre des désidératas de Jean-Luc Mélenchon et de son appareil.
04:25Ce n'est pas un mariage.
04:27C'était une unité d'action contre la perspective de la prise du pouvoir immédiate par Marine Le Pen et par Jordan Bardella.
04:34On verra aussi ce que François Bayrou dit demain de la situation internationale.
04:38Peut-être qu'il parlera de l'Algérie, parce qu'il y a une crise en ce moment entre la France et l'Algérie
04:42qui a refusé d'admettre sur son sol un influenceur expulsé de France.
04:46Est-ce qu'il doit hausser le ton, François Bayrou, sur ce sujet ou pas ?
04:49Il doit hausser le ton sur le sujet des influenceurs, mais il doit surtout hausser le ton aussi sur le sujet de Boilem Sensal,
04:54qui est, au moment où on se parle, toujours captif à Alger, dans une situation de santé extrêmement fragile.
05:01Un écrivain, un grand écrivain qui est en prison...
05:04Mais là, n'empêche pas, sur l'influenceur, est-ce qu'il faut dénoncer les accords de 1968 ?
05:10Est-ce qu'il faut faire ce genre de choses ?
05:12Juste, il faut être extrêmement ferme.
05:14Il faut cibler le régime algérien et ce qui va nuire au régime algérien,
05:18qui, je le rappelle, est ultra contesté par son peuple.
05:21Le Irak, la grande révolution démocratique du peuple algérien, c'était il n'y a pas si longtemps.
05:24Mais par contre, il faut faire attention à ne pas utiliser des moyens qui ne nuisent absolument pas au régime,
05:30parce que, finalement, remettre en cause cet accord,
05:33je ne suis pas certain que cela dérange plus que cela le régime algérien.
05:37Ça, c'est pareil pour toutes les sanctions. On peut dire la même chose de l'Iran aussi.
05:39Ça ne dérange pas forcément le régime. Souvent, ça les renforce, d'ailleurs.
05:42Non, mais ce qu'il faut, c'est cibler les décideurs algériens.
05:45Et remettre en cause cet accord, je ne suis pas certain que ça soit vraiment la meilleure manière.
05:49Il y a eu une polémique ce week-end avec Marine Tendeli, entre Bruno Rotaïo et Marine Tendeli,
05:52parce que Marine Tendeli, elle dit que c'est normal, après tout, que cette expulsion,
05:55l'Algérie n'en ait pas voulu, parce que Bruno Rotaïo n'applique pas le droit.
05:58Il lui a répondu, Bruno Rotaïo, il dit « si, si, tout à fait, le droit est appliqué ici,
06:01parce que c'est le droit administratif qui prime ».
06:03Est-ce que vous soutenez le ministre face à Marine Tendeli dans cette polémique ou pas ?
06:06Je ne rentre pas dans cette polémique.
06:08C'est dommage, c'est intéressant.
06:09Non, mais d'accord. Ce que je sais, moi, c'est qu'il faut réagir fermement à ces influenceurs
06:14qui appellent au viol, appellent au meurtre des opposants algériens sur le sol français.
06:18Et il faut protéger ces opposants algériens qui sont menacés.
06:21Et ça passe notamment par sanctionner ces influenceurs qui sont vraiment, vraiment insupportables.
06:26La France a été humiliée dans cette affaire ?
06:28Ou il y a eu une tentative d'humiliation de la France ?
06:30Vous savez, moi, je connais extrêmement bien l'Algérie.
06:32C'est finalement un des moteurs de ce régime de se légitimer soi-même en prenant pour cible la France.
06:39Et là, on est dans une phase où il y a besoin d'une surlégitimation.
06:42C'est lié notamment à la décision de reconnaître la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
06:47Et nous, nous ne pouvons pas être pris en otage par le régime algérien.
06:51Alors, il y en a d'autres qui, en ce moment, humilient la France et l'Europe en général.
06:55Ce sont certains dirigeants américains.
06:57Il y a notamment Elon Musk qui se lâche ces derniers temps.
06:59Regardez ce qu'il a répondu à Thierry Breton, ancien commissaire européen que vous connaissez bien,
07:02qui lui disait qu'il faut bannir X en Europe si les contenus ne sont pas modérés.
07:06Elon Musk, il lui dit ceci.
07:08S'il n'arrête pas avec ses bêtises, je vais annuler sa note de frais de coiffeur.
07:11C'est cruel, je sais.
07:12Mais bon, on a l'impression vraiment qu'il ne prend absolument pas les institutions européennes au sérieux.
07:16Il leur marche dessus même.
07:17Il nous marche dessus, c'est exactement ça.
07:19Il nous voit comme des paillassons.
07:20Vous savez, quand vous êtes face à des gens qui ne respectent que la force,
07:23si vous faites preuve de la moindre faiblesse, ils vous écrasent.
07:27Et c'est ce que Elon Musk et Donald Trump vont faire sur l'Europe si jamais nous ne réagissons pas.
07:33Or, aujourd'hui, il y a des enquêtes qui ont été lancées sur X, sur TikTok, sur Meta.
07:38Il faut que ces enquêtes aboutissent.
07:40Il ne faut pas que la présidente de la commission, Ursula von der Leyen, ait la main qui tremble.
07:44C'est sa tendance ?
07:45Aujourd'hui, ce qu'on voit, c'est qu'il y a une réticence à assumer le rapport de force.
07:48Et c'est constitutif de l'éthos européen.
07:51Et il va falloir changer.
07:52Changer la manière dont nous voyons le monde.
07:54Changer la manière dont nous comportons.
07:56Pourquoi ?
07:57Parce qu'aujourd'hui, nous sommes dans une période extrêmement dangereuse.
07:59Nous avons Vladimir Poutine qui est en guerre contre nos démocraties.
08:02Nous avons la Chine qui cherche à écraser nos productions.
08:04Et désormais, nous avons une administration américaine qui cherche à bouleverser de l'intérieur nos démocraties.
08:08Il ne faut pas sous-estimer le danger d'Elon Musk.
08:10Vous savez ce qu'a écrit Elon Musk.
08:13Si nous n'éradiquons pas le virus progressiste en Europe, il reviendra aux Etats-Unis.
08:19Donc pour lui, finalement, déstabiliser les gouvernements européens.
08:22Déstabiliser le gouvernement anglais.
08:24Déstabiliser le gouvernement allemand.
08:25Prendre parti pour les extrêmes droites.
08:27Mais ça veut dire quoi ?
08:28Il faut interdire les activités d'Elon Musk en Europe ?
08:30Il faut faire ?
08:31Bannir X par exemple ?
08:32Il faut faire quelque chose qui est absolument logique.
08:35Et que nous n'osons jamais faire.
08:37Faire appliquer les lois.
08:39Nos lois européennes.
08:41Nous avons voté au Parlement européen.
08:43Et nous avons travaillé avec Thierry Breton.
08:45Et je dois noter, là, c'est une incise, que c'est invraisemblable que l'architecte du DSA,
08:52de la loi européenne sur les plateformes, ait été renvoyé, écarté, comme un mâle propre,
08:57pile au moment où on avait le plus besoin de lui.
08:59Et donc nous devons faire respecter ces lois.
09:01Nous devons publier les enquêtes.
09:02Il y a des amendes massives qui sont prévues.
09:05Vous êtes sur X, Raphaël Glucksmann.
09:07Est-ce que vous y restez ou pas ?
09:08Ça c'est une question majeure.
09:10Moi, mon instinct, c'est de partir.
09:12Pour ne pas nourrir Elon Musk et son pouvoir.
09:14Mais j'entends tout à fait ce qu'ils disent.
09:16Nous, nous devons rester pour mener le combat.
09:18Et donc, c'est une discussion qu'on doit avoir.
09:20Le départ doit être massif.
09:22Et il doit, s'il a lieu le 20 janvier.
09:24Mais ce qu'il faut comprendre, c'est qu'il y a X.
09:27Il y a l'agenda idéologique d'Elon Musk.
09:30Il y a TikTok, qui a été utilisé pour voler une élection en Roumanie.
09:35Et que si nous ne faisons rien, nos démocraties vont s'effondrer.
09:39Moi, vous savez, quand je viens vers vous ce matin, je ne sais pas.
09:42Je ne sais pas si dans 5 ans ou dans 10 ans, l'Europe sera encore constituée de démocratie.
09:47C'est extrêmement fragile.
09:49Et c'est sans doute l'un des moments de l'histoire,
09:51je l'ai répété pendant toute la campagne des Européennes,
09:53l'un des moments de l'histoire où se décide le destin de nos systèmes politiques.
09:57Et vous faites la comparaison avec la Tchécoslovaquie en 1938.
10:00Merci beaucoup Raphaël Glucksmann.