Mardi 26 novembre 2024, SMART BOURSE reçoit Ronan Le Moal (Directeur Général, Epopée Gestion)
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00:00Le dernier quart d'heure de Smartbourg, chaque soir, c'est le quart d'heure thématique.
00:13Le thème ce soir, c'est celui des territoires, les forces des territoires.
00:17Nous en parlons avec Renan Lemoyel, qui est cofondateur et directeur général des Popey
00:20Gestion.
00:21Renan Lemoyel, bonsoir.
00:22Merci beaucoup d'être avec nous.
00:24Un mot de ce qui a conduit à la création des Popey Gestion, qui a été créé en 2020
00:28par vous et d'autres, vous êtes cofondateur, Renan, vous quittiez à l'époque Crédit
00:34Mutuel Arkea, c'est comme ça qu'on l'appelait, après avoir dirigé pendant 12 ans cette
00:38maison.
00:39Quel est le diagnostic que vous avez porté justement à l'époque de la création des
00:44Popey Gestion sur la question de la place des territoires ? C'est votre mantra, il
00:48faut même, vous ne dites pas investir, c'est réinvestir les territoires.
00:52Il y a une notion d'oubli.
00:53Exactement.
00:54En fait, quand j'ai quitté Arkea, effectivement, cette belle maison en 2020, c'était juste
00:57avant le Covid, si on s'en rappelle un peu, c'est en février 2020, le diagnostic que
01:00je faisais à l'époque avec mon associé, moi qui partageais pas mal et toujours ma
01:04vie entre Paris et province, c'est qu'on a un pays qui est magnifique, la France, c'est
01:07un pays qui est un peu concentré dans les grandes métropoles, les habitants, les agents
01:11économiques, la pollution, les maladies, parfois, s'en fait référence au Covid.
01:15Et donc nous, on s'est interrogé en se disant, mais qu'est-ce qu'on peut faire, nous, pour
01:17rendre un peu à notre pays ce qu'il nous a donné dans notre carrière ? Et donc, vous
01:21savez, il y a un truc qu'on sait bien faire, c'est l'investissement et l'accompagnement
01:23des entreprises.
01:25Il y a un gros enjeu, c'est de réussir à faire recréer des grandes réussites, comme
01:29il y a pu en avoir avec le groupe Leduf, le groupe Samsic, Roulier, quelques autres, pour
01:33que finalement, les entreprises se créent, grandissent, créent des emplois, créent
01:36des emplois autour et finalement, se fassent vite des écosystèmes globaux, faisant cela
01:40comme Monsieur Jourdain faisait l'approche, sans le savoir, de l'écologie, de l'impact
01:43sociétal et de l'impact économique.
01:45C'est cette idée toute simple qui a présidé au choix de créer l'épopole de gestion à
01:49l'époque.
01:50Oui.
01:51Mais quand vous dites réinvestir, ça veut dire qu'il y a eu une forme d'oubli.
01:53En tout cas, il y a l'idée que les investisseurs, les professionnels de l'investissement, n'ont
01:57peut-être pas bien capté tout ce qui fait la force de ces territoires, mais tout ce
02:02qui les caractérise également dans leur manière de fonctionner par rapport aux places
02:07et aux endroits beaucoup plus centralisés.
02:08Nous, on s'adresse pas mal au Grand Ouest, qui est une région assez particulière.
02:11C'est une terre d'entrepreneurs, c'est vrai, mais une terre d'entrepreneurs qui ont compris
02:13que pour vivre heureux, il faut se cacher.
02:14Ça a beaucoup de mérite, mais des inconvénients, notamment de ne pas être bien identifié
02:17par les investisseurs.
02:18Effectivement, c'est vrai, pendant très longtemps, c'est moins vrai aujourd'hui parce qu'on y
02:22est, mais parce que d'autres y sont aussi, ces territoires n'étaient pas vraiment investis
02:26au premier sens du terme par les grands investisseurs.
02:28Les deals n'étaient pas identifiés, les tickets mis dans les entreprises n'étaient
02:32pas suffisants.
02:33Bref, le passage à l'échelle n'était pas simple.
02:34Donc, réinvestir les territoires avec ce double sens, pour réinvestir, ça a d'abord
02:38voulu dire pour nous, router 700 millions d'euros pratiquement depuis 4 ans vers les
02:42territoires.
02:43Donc, c'est une de nos grandes fiertés que de se dire que ces grands investisseurs qui
02:45nous accompagnent, ils mettaient d'abord leur argent ailleurs et depuis qu'ils sont avec
02:49nous, ils le mettent pour une bonne partie dans le Grand Ouest.
02:50Et le deuxième sujet, ça a été d'être au contact des entreprises pour les sourcer,
02:55les dossiers, mais aussi pour les accompagner, recruter, indéger, aller à l'international,
02:59faire sa stratégie de marketing avec lui, être un partenaire finalement qui même en
03:02étant minoritaire souvent, est capable d'apporter autre chose que de l'argent.
03:05Ça, je pense que c'est un gros atout qu'on a pu apporter vis-à-vis du territoire en
03:09question et de nos investisseurs.
03:10Qu'est-ce qui caractérise le fonctionnement de ces écosystèmes ? Pour bien sourcer les
03:13dossiers comme vous dites, pour bien appréhender les cas d'investissement, il faut comprendre
03:18comment ça fonctionne dans une région comme le Grand Ouest, mais peut-être aussi dans
03:22des bassins ou des localités avec des périmètres un peu plus restreints également.
03:26Pour filer un peu l'aboutage, Renan Lemoyel, c'est un Breton, effectivement il faut d'abord
03:30y être.
03:31Je dis ça à l'intérêt du monde, mais c'est vrai.
03:32Être partout, mais là avant tout.
03:34L'investissement, on le voit souvent comme étant dans nos métiers financiers, mais avant
03:37d'être financier, c'est une entreprise, un entrepreneur, donc il faut être à son contact,
03:40il faut être proche de lui.
03:41Pour sourcer les dossiers, il faut être là où ça se passe, et là où ça se passe,
03:44c'est pour ce qui nous concerne en tout cas dans le Grand Ouest, donc on est partout sur
03:47le territoire, partout il y a des entrepreneurs, partout on peut sourcer les dossiers.
03:50C'est comme ça d'abord qu'on arrive à attraper la matière.
03:52Ensuite, il faut de la confiance, parce que la finance, c'est de la confiance, et accepter
03:56que quelqu'un rentre à son capital, c'est beaucoup de confiance.
03:58Et puis derrière, je pense qu'il faut montrer aussi la valeur ajoutée.
04:01Pourquoi ? Parce que nous, on n'est pas un des plus gros acteurs qui existent, c'est
04:04le moins qu'on puisse dire, et donc on ne nous a pas attendu pour faire de l'investissement.
04:07En revanche, ce qu'on peut apporter de différent parfois, c'est cette capacité à être autre
04:11chose qu'un investisseur financier, quelqu'un qui va être capable d'être l'oreille de
04:14l'entrepreneur, de l'aiguiller au bon endroit, de lui donner des bons conseils, de parfois
04:18même l'aider à sourcer un certain nombre de sujets, et ça, ça crée beaucoup de valeur
04:21au-delà du financier.
04:22Et donc, c'est toute cette petite mayonnaise qu'il faut réussir à bien assembler pour
04:25créer de la valeur, finalement, être capable de vraiment leverager le territoire en question.
04:29Concrètement, chez POP Gestion, comment est-ce que ça se décline ? Quelles sont les dimensions
04:35d'investissement, les segments de marché qui vous intéressent ? Comment est-ce que
04:38vous accompagnez justement ces entrepreneurs sur le plan financier, mais au-delà ?
04:42Nous, ce qu'on aime bien, je dis souvent, on aime bien identifier un problème et lui
04:46apporter une solution par de l'investissement et de l'accompagnement.
04:48On fait donc du VC, nos Venture Capital, les start-up, parce que les start-up, elles ont
04:53beaucoup de potentiel en région, mètre carré moins cher, turnover plus faible, salaire
04:57moins élevé, donc toutes les conditions économiques qui vont bien, en revanche, elles sont plus
05:00loin, moins connectées aux écosystèmes, plus de mal à trouver l'argent.
05:02Donc là, un problème, une solution, l'argent et la connexion aux écosystèmes en question.
05:07Il faut les Capdev, donc l'investissement dans les PME, là l'idée c'est de créer
05:10les grands champions de demain et de la même manière, les PME, à une époque qui n'est
05:13pas si lointaine, on disait une start-up qui n'a pas 100 millions d'euros, elle ne réussit
05:16pas, mais quelle est la PME qui arrive à lever 5 ou 10 millions d'euros aujourd'hui ?
05:19Or, pour créer des champions en région, il faut lever de l'argent.
05:21Donc, on essaye également d'accompagner les PME de ce point de vue-là.
05:25On a essayé d'identifier que certains entrepreneurs ont besoin parfois, pour pouvoir investir
05:28dans leur outil de production, de pouvoir vendre leurs actifs immobiliers, bureaux,
05:33logistiques, outils d'exploitation, mais il n'y a pas d'acteurs sous des tickets
05:36de 10 ou 15 millions d'euros, les gros acteurs, c'est trop petit pour eux.
05:39Donc, nous, on a créé un véhicule qui agrège tout ça, qui le propose à des grands investisseurs
05:42et qui permet, via ce qu'on appelle une sell and lease back, ce n'est pas très joli, mais
05:46de vendre et de louer ses locaux, de réinvestir dans son actif.
05:49Ça, c'est un troisième métier et le quatrième, c'est l'infrastructure.
05:51Un jour, on identifie qu'il y a une belle boîte qui s'appelle Zephyr & Boré qui crée
05:55des cargos à voile, des voiles métalliques pour faire des liaisons entre Le Havre et
05:58New York sur du chargement du fret, des bateaux de 200 mètres de long.
06:01Simplement, c'est un bateau qui a besoin d'être financé de l'Orient, de mettre à
06:05l'échelle des filières industrielles, des voiles, de l'intelligence artificielle et
06:08qui ne trouve pas de financement.
06:09De la même manière, on arrive à financer ce genre de véhicule.
06:11Voilà un peu la typologie d'acteurs qu'on accompagne et pourquoi on le fait.
06:13Un problème, une solution, l'investissement, l'accompagnement.
06:16Et vous le dites, vous parlez et vous rencontrez des entrepreneurs qui sont coupés de cet écosystème
06:21financier, parfois très parisien, voire très européen, même aujourd'hui.
06:27Il y a souvent un problème.
06:28Il ne faut pas généraliser, il y a des acteurs qui font très bien leur métier en région,
06:30y compris à Paris.
06:31Il n'y a pas d'ostracisme, on ne s'en fout.
06:33Mais c'est vrai que souvent, la confiance qui n'est pas qu'une confiance financière
06:36mais d'être du cru, si on peut se permettre l'expression, c'est un vrai sujet.
06:40Parce qu'accepter que quelqu'un, si je prends l'exemple du capital, rentre à votre capital,
06:44si c'est une boîte familiale, c'est encore pire, j'allais dire, c'est une intimité
06:47très très forte.
06:48Donc c'est vrai que cet agrédient-là, on l'a, on l'a par notre passé.
06:51Moi, j'ai cumé les routes de Bretagne pendant, je fais 12 ans de l'industrie générale
06:54d'Arkéa, mais 25 ans dans cette belle maison dont je connais à peu près…
07:00C'est un agrédient hyper important, je le découvre chaque jour un peu plus.
07:03Il y a des choses que j'apprends d'ailleurs aujourd'hui avec des gens dont j'étais
07:06le banquier qui ne me disaient pas avant.
07:07Parce que le rond-de-cloche a changé, la relation est différente.
07:10C'est quoi un exemple de belle réussite à laquelle vous avez participé, que vous
07:15avez accompagné, qu'on peut mettre en valeur ?
07:18Il y en a deux qui sont assez sympas.
07:19Il y en a pas mal.
07:20On en a plus de 50 aujourd'hui, mais deux peut-être emblématiques.
07:21Une dans le Vici, une boîte qui s'appelle Shopopop, qui est basée à Nantes, qui fait
07:24de la livraison de courses collaboratives.
07:26C'est-à-dire quoi ? Vous voulez faire vos courses, vous n'avez pas le temps, votre
07:28voisin adore aller chez une grande marque de distribution, il y va tous les jours, il
07:32fait vos courses en même temps, il vous les livre chez vous.
07:33Et ça, ça s'appelle les Shopopop, et donc ça se multiplie à loisirs, c'est incroyable.
07:36Et je suis rémunéré pour ça ? Pour apporter les courses de mon voisin ?
07:40Exactement.
07:41Très belle boîte de Nantes, qui a une très très forte réaction, qui se développe très
07:43très fort.
07:44Et un autre exemple…
07:45Mais valeur économique, valeur sociale, très forte aussi.
07:49Enorme, bien sûr.
07:50On n'a pas parlé de l'extra-financier…
07:52Bien sûr, l'extra-financier de cette boîte-là, il est bien sûr important, on le mesure,
07:56on le trace, on le moniteure.
07:58Donc ça, c'est un exemple.
07:59Un autre exemple, à 2,5 km de chez moi, chez moi au sens de mon domicile personnel,
08:03à la pointe du Finistère, à Pulgaset d'Aulas, une entreprise qui s'appelle Skibant, qui
08:06est une entreprise familiale, qui a plus de 70 ans, qui a commencé dans l'électricité
08:10générale et qui aujourd'hui fait des systèmes de serre, de chaleur, de chaleur par éolien,
08:16de chaleur par récupération de la chaleur, bref, très ESG également, qui est une très
08:19très belle PME, qu'on accompagne aujourd'hui depuis maintenant quelques mois, et qui est
08:23la preuve à la fois de la proximité territoriale, de la transition d'un modèle économique
08:27à un autre, et la transition d'un modèle, on va dire classique, à un modèle beaucoup
08:30plus vertueux.
08:31Il faut être minoritaire, il faut être majoritaire dans ces aventures, dans ces histoires ?
08:34On est plutôt minoritaire.
08:36Majoritaire, c'est un autre métier, comme je dis souvent, majoritaire, c'est être
08:39au destiné de la maison.
08:40Par contre, on aime bien être un minoritaire accompagnant.
08:42Et donc, pour accompagner, il n'y a pas besoin forcément du poids, du capital, je pense
08:47que la force des idées suffit.
08:48Un entrepreneur, c'est intelligent, si vous lui apportez de la valeur, que vous soyez
08:51minoritaire, majoritaire, il l'apprend à tous les coups.
08:53Vous êtes devenu entreprise à mission cette année, alors la raison d'être, je la cite
08:58précisément, Ronan, on vient d'en parler, réinvestir les territoires, c'est accélérer
09:02durablement leur transformation et celle de leurs acteurs, c'est vivre et travailler
09:05là où on le souhaite, et c'est réinventer le pacte économique, écologique et social.
09:10Être une entreprise d'investissement à mission, qu'est-ce que ça veut dire ? Qu'est-ce
09:15que ça change par rapport à une entreprise d'investissement qui ne serait pas une entreprise
09:19d'investissement à mission ?
09:20Je serais tenté de dire, nous, ça n'a pas changé grand-chose.
09:22Pourquoi ? Parce qu'on a pris ce statut après que tout le reste eut été fait.
09:26C'est-à-dire qu'on est une boîte relativement jeune, on a 4 ans, on est 34, on a une moyenne
09:30d'âge d'une trentaine d'années, des jeunes qui poussent très fort comme nous
09:33pour ce modèle de durabilité.
09:34Donc en fait, après avoir créé des fonds dans lesquels on a mis une partie de notre
09:38caride sur les indicateurs USG, après avoir aligné nos participations en leur donnant
09:42une feuille de route à 5 ans pour une trajectoire carbone, sociale, économique, après avoir
09:47créé un fonds de dotation qui vise effectivement à soutenir les commerces de proximité de
09:50manière non-profit, on s'est dit que la continuité logique, ayant tout aligné, c'était
09:54prendre le statut qui va bien avec ça.
09:55C'est engagant, c'est vrai, mais pas beaucoup plus engageant finalement que ce qu'on fait
09:59là.
10:00C'est la concrétisation simplement de démarches naturelles ou qui étaient mises en place
10:02naturellement depuis la création d'Épopée Gestion.
10:04Exactement, c'est une conséquence plus qu'une volonté initiale.
10:07Quelle est la feuille de route des prochaines années pour Épopée Gestion, Renan ?
10:11J'aime pas résonner en métrique, mais nous ce qu'on aimerait être, c'est un peu, alors
10:15le mot n'est pas très bon, mais le one-stop-shop pour les entreprises en région complémentaires
10:19aux banques qui permettent à des entrepreneurs d'effectivement de créer l'emploi, créer
10:22les entreprises, grandir, faire vivre des gens au pays, comme on dit effectivement.
10:25Ça c'est important.
10:26Si on arrive à faire ça, ça supposerait une certaine taille.
10:29Je pense qu'on a vraiment répondu à notre mission d'une part, à nos aspirations personnelles,
10:33à mon associé et à moi, et je pense aussi pas mal aux aspirations des équipes qui nous
10:36ont rejoints depuis 4 ans maintenant.
10:37Merci beaucoup Renan.
10:38Merci d'être venu nous parler de ces territoires.
10:40Les forces des territoires, qui sont évidemment des bassins d'investissement particulièrement
10:46intéressants, vous l'avez démontré avec la création d'Épopée Gestion il y a quelques
10:50années maintenant.
10:51Renan Lemoyal, cofondateur et directeur général d'Épopée Gestion, était l'invité de ce
10:55quart d'heure thématique de Smart Bourse ce soir sur Be Smart For Change.