Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Pierre de Vilno pour débattre des actualités du jour. Ensemble, ils reviennent sur la motion de censure du gouvernement de Michel Barnier et sur l'impact sur nos institutions.
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00:00Europe 1 Soir, 19h21, Pierre de Villeneuve.
00:03Et j'accueille mes camarades du soir, bonsoir Louis Oselter, bonsoir Pierre,
00:06journaliste politique au Figaro, bonsoir Mathieu Boquecôté, bonsoir, essayiste et
00:09détailliste au Figaro sur CNews et dans plein de publications également au
00:13Québec. On peut vous lire partout, vous êtes
00:16Worldwide comme on dit en bon français, mon cher Mathieu. Français de part et
00:19d'autre de l'Atlantique, disait le général de Gaulle. Bon ben très bien,
00:21toujours gaulliste de coeur, bonsoir Henri Guaino, bonsoir, merci d'être avec
00:26nous ancien député, ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy. Est-ce que
00:29vous êtes dans la tristesse, dans la joie ou dans l'indifférence ce soir ?
00:33Plutôt dans l'angoisse pour ce qui concerne l'avenir de nos
00:39institutions. C'est peut-être le principal. C'est peut-être le principal mais pas
00:43dans l'angoisse pour ce qui concerne, à court terme en tout cas, les finances
00:48publiques, l'économie. Non. Non et je suis très agacé je dois dire parce que
00:54j'entends de part et d'autre. Vous citiez tout à l'heure une formule de
01:00Michel Barnier, la censure n'effacera pas la dette, mais le budget qui était
01:06présenté par le gouvernement n'effacerait pas la dette non plus.
01:10Elle la contient peut-être ? Elle ne la contient pas du tout, c'est une
01:15plaisanterie, c'est un marqueur, c'est tout ce que vous voudrez mais non
01:19seulement elle ne risque pas d'effacer la dette ni même de la contenir,
01:24mais cette loi de finances menacerait d'aggraver les choses.
01:31Mais ce travail de rechercher des économies comme le dit Michel Barnier, il n'y en a pas ?
01:36Il y a des catégories de gens, il y a ceux qui disent il faut des impôts, des impôts,
01:41des impôts. C'est sûr que matraquer les entreprises et les ménages avec des
01:48nouveaux prélèvements ou des soi-disant économies qui en réalité sont des
01:53prélèvements. Quand vous désindexez les retraites,
01:56c'est comme si vous faisiez une taxe sur les retraités.
02:00Quand vous déremboursez les médicaments, ce n'est pas une économie, vous faites une
02:04taxe sur les malades qui va se reporter sur eux à travers les
02:10cotisations de mutuelles. En fait, il n'y avait pratiquement que
02:15dans ce budget, il n'y avait pratiquement que des prélèvements, des impôts déguisés.
02:19Et si vous matraquez une économie qui ne se porte pas bien,
02:24parce que le déficit de cette année est venu essentiellement de la baisse de la
02:31chute des recettes fiscales. Pourquoi ? Parce que l'activité s'est ralentie.
02:35Là, on n'est pas loin de la récession, donc si dans une économie au bord de la
02:41récession, vous augmentez les impôts sous prétexte que les recettes fiscales
02:44diminuent, vous ne rendez pas service à l'activité économique.
02:49Vous la plombez. Donc, quand vous augmentez de sang les impôts,
02:54vous ne réduisez pas forcément le déficit de sang selon les circonstances.
02:57Mais alors, qu'est-ce qu'on fait Henri Guaino ? Je veux dire que vous le connaissez.
03:00Vous entendez des contre-vérités.
03:03Oui, c'est-à-dire que ce budget, quant aux économies, pour tous les gens qui vous
03:08expliquent qu'avant on aurait dû faire des économies, on ne fait pas des économies
03:11importantes, sauf celles dont je viens de parler, qui sont en réalité des sortes de
03:15taxation déguisée. On ne fait pas des économies en deux mois de façon importante, mais c'est
03:22impossible. Il n'y a pas une organisation, d'ailleurs, qui quand elle se restructure
03:26ne commence pas par dépenser pour se restructurer. Donc il faut faire ce qu'on appelle des réformes
03:30structurelles et on n'est jamais arrivé à les faire ?
03:32Il y a deux choses. D'une part, on n'est jamais arrivé à les faire parce qu'on s'y
03:35prend toujours comme ça.
03:36Mais ça fait des années, ça fait des décennies, à gauche comme à droite, mais vous y étiez
03:42vous ?
03:43On a fait un peu moins sur Sarkozy. Oui, mais c'est une réalité. Il s'est trouvé
03:48confronté à la crise de 2008, on a fait un peu moins, sauf à la fin, où sous la
03:53pression de...
03:54Pierre Moscovici qui était ministre des Finances et qui était sous Jospin disait qu'également
03:57sous son époque, on a fait moins. Alors vous, vous dites moins sous Sarkozy, Moscovici dit
04:00moins sous Jospin ?
04:01On a fait moins de bêtises de ce genre.
04:04Chacun y va de son côté, c'est ça que je veux dire.
04:06On a fait moins de bêtises de ce genre, sauf à la fin, où sous la pression de la majorité,
04:12d'une grande partie du gouvernement et de certains milieux, on a...
04:17Je me souviens, on avait demandé à Sarkozy de faire 60 milliards d'augmentation des impôts
04:23pour 2011, parce que la crise avait creusé les déficits.
04:26Bon, il a résisté autant qu'il a pu, il a fini par en lâcher 30.
04:30Quand M. Hollande est arrivé, il en a fait 30 de plus, on en a fait les 60.
04:34Ça s'appelle les vases communicants, ça existe en politique aussi.
04:37Ça a retardé de 3 ans à la sortie de la crise, ça nous a coûté infiniment plus
04:41cher que si on n'avait pas fait ce prélèvement.
04:45Et moi, je me souviens de gens qui voulaient augmenter les impôts et faire un plan d'austérité
04:50en janvier 2009, parce que la crise creusait les déficits.
04:54Voilà, c'est intelligent.
04:56Je pense qu'un diagnostic qu'on doit faire de manière un peu internationale, comme première
05:01réflexion, c'est que dans aucun pays occidental, un gouvernement, quel qu'il soit, de gauche,
05:07de droite, libéral, conservateur, socialiste, n'est parvenu à stopper, et encore moins
05:11à inverser, quelques fois à ralentir, la croissance de l'État, la croissance des
05:16fonctions de l'État, la croissance de l'administration, la croissance de la bureaucratie.
05:20Donc tous les pays occidentaux, même sous Mme Thatcher, ont la tendance à l'oublier.
05:24Il y a eu un ralentissement de la croissance de l'État, mais à l'échelle de l'histoire,
05:28Mme Thatcher n'a pas renversé la taille de l'État en Grande-Bretagne.
05:31Alors qu'est-ce qu'on voit dans toutes les sociétés ? Aucun gouvernement n'a trouvé
05:34la solution pour cela.
05:35Pour quelle raison ? A mon avis, parce qu'on est toujours dans cette logique comme quoi
05:39il faudrait d'abord dépenser moins pour ensuite taxer moins.
05:44Donc une logique de responsabilité.
05:46Je pense qu'il faut inverser la formule, et ça c'est ce que pour l'instant on ne fait
05:50pas, mais ça traîne quand même dans la pensée économique, c'est qu'il faut surtout taxer
05:53moins pour dépenser moins.
05:54C'est-à-dire qu'on est dans une logique où l'État est toujours, il dit oui un jour
05:58je réduirai mes dépenses quand ce sera nécessaire, je réduirai les taxes quand ce sera possible.
06:01Or il faut en fait renverser la logique parce que sinon on est dans cette logique de croissance
06:05infinie d'un État qui se polie toujours plus de ressources, qui vampirise toujours
06:09plus de ressources, et qui est incapable de faire autre chose que des coupes à la marge.
06:12D'abord ça fait des décennies que l'économie et la société vont mal, dans tous les pays
06:21occidentaux.
06:23Et donc plus ça va mal, et plus l'intervention de l'État est demandée, et plus elle est
06:29un besoin.
06:30Vous ne rétablirez pas les finances publiques si vous pensez qu'en commençant par essayer
06:40de mettre de l'ordre dans les finances publiques, vous allez mettre de l'ordre dans l'économie
06:44et dans la société.
06:45C'est l'inverse.
06:46Aujourd'hui on a plus de 900 milliards de dépenses de transfert.
06:51Qu'est-ce que c'est une dépense de transfert ?
06:53Une dépense sociale, une dépense de distribution.
06:56C'est pareil pour les subventions à certains catériaux, c'est de l'argent que vous prenez
07:02dans la poche des contribuables et que vous remettez immédiatement pour transférer.
07:06Le transfert de ma poche à l'administration, pas que de la mienne d'ailleurs.
07:10Parfois c'est le même, c'est le même qui reçoit et qui paye.
07:12Par la médiation d'une administration qui prend sa part ?
07:15Non mais très peu en fait.
07:17Ça dépend lesquelles.
07:20On reviendra sur l'administration dans quelques minutes si vous voulez.
07:24Quelques minutes, on attend aussi le résultat du vote.
07:27T'as un 20h25 et il est 22, c'est dans 3 minutes.
07:29On le connait déjà.
07:30Bon, ne soyez pas prêts dans le jeu, il peut y avoir...
07:34Le problème c'est qu'il faut inverser la logique.
07:40Il faut essayer de remettre de l'ordre dans l'économie et dans la société.
07:43Si vous voulez pouvoir, remettre de l'ordre dans les finances publiques.
07:46Louis Oselter ?
07:47Oui, effectivement.
07:49En l'occurrence, pour en revenir à la censure, c'est pas tellement le sujet.
07:53En fait, ça pourrait d'ailleurs être un débat sur les économies, le budget,
07:57le modèle français, le modèle occidental.
07:59En l'occurrence, c'est pas vraiment pour cette raison que Marine Le Pen a décidé
08:03d'appuyer sur le bouton.
08:05Elle le fait pour des raisons politiques.
08:07Pour des raisons de calendrier.
08:09Oui aussi, parce que le bras de fer avec Michel Barnier s'est engagé
08:13au début, officiellement, sur des paramètres.
08:16Tant d'indexation des retraites sur l'inflation,
08:18tant de déremboursement des médicaments,
08:20tant de taxes en plus ou en moins sur l'électricité.
08:22On a bien vu, au fur et à mesure de la discussion,
08:24qu'en réalité, ce n'était pas vraiment le sujet pour Marine Le Pen.
08:27Le sujet, c'est qu'elle avait très envie de censurer Michel Barnier.
08:30Elle avait très envie de le censurer, de mêler ses voix à celles de la gauche
08:33pour le censurer.
08:35Et que, même s'il avait lâché sur les retraites,
08:37même si c'était ça, je ne suis même pas sûr que ça l'aurait fait renoncer.
08:40Donc là, on est vraiment dans la politique, la tactique même.
08:45Je ne crois pas que ce soit simplement un problème de tactique.
08:48Alors d'abord, puisque ce budget n'allait pas ni effacer la dette,
08:53ni redresser les dépenses publiques, pourquoi s'accrocher, bec et ongles,
08:56à ce budget ?
08:58Et l'essentiel, c'était qu'on fasse un budget
09:00avec tout ce qu'il y avait de plus raisonnable, nécessaire, etc.
09:05Mais ne pas avoir l'ambition.
09:07D'où sortent les 60 milliards ?
09:09Personne ne le sait.
09:11Vous auriez dit, le déficit est à 6-1, il restera à 6-1,
09:15on ne fera rien sans réforme structurelle,
09:17donc essayons de mettre tout le monde d'accord.
09:21Michel Barnier a été nommé, et son gouvernement aussi,
09:24pour remplir une seule mission,
09:26qui peut paraître dérisoire, mais qui est énorme,
09:29assurer la continuité de l'État dans un moment où elle n'était pas garantie.
09:33D'abord, il aurait dû négocier,
09:35c'est facile de dire ça après,
09:37mais quand même, il aurait dû négocier
09:39les grandes lignes de son budget avec les partis amants,
09:42il était obligé.
09:44Ce n'est pas faire la parbelle au régime des partis,
09:48il était obligé.
09:50Il ne fallait pas sacraliser ce budget.
09:52Lui a eu tort de sacraliser ce budget.
09:54Quant à Marine Le Pen,
09:56est-ce qu'elle avait le choix ?
09:58Quand votre base électorale,
10:00qui a compris qu'elle allait payer,
10:02vous réclame une position dure,
10:08vous êtes obligé.
10:10Il n'y a pas que les tactiques d'hémicycle.
10:12Il est encore plus fou dans les discours
10:14d'aujourd'hui et des derniers jours.
10:16Premier élément, on voit M. Attal,
10:18qui représente bien ce bloc,
10:20qui, il y a quelques semaines et quelques mois à peine,
10:22nous expliquait que le RN,
10:24c'était à ce point le mal qu'il fallait s'unir
10:26avec le NFP pour être capable de tenir
10:28à l'écart du corps national légitime
10:30les gens du RN.
10:32Aujourd'hui, il est sanctionné par les gens
10:34qu'il a fait élire du NFP,
10:36s'il vous plaît, soyez responsable.
10:38Il est traité de fasciste il y a quelques semaines à peine.
10:40Est-ce qu'il demandait aux fascistes
10:42de sauver la République ? Premier élément.
10:44Deuxième élément qui est assez étonnant,
10:46M. Wauquiez, qui est un homme de qualité,
10:48un homme intelligent, mais qui aujourd'hui
10:50a ressorti une logique, un discours antifa
10:52quasi de gauche-gauche classique,
10:54en disant qu'il y a l'extrême-gauche
10:56et l'extrême-droite qui se fédèrent ensemble
10:58contre l'intérêt général et qui reprend
11:00en extrême-droitisant le RN.
11:02Il oublie que dans quelques semaines,
11:04il appartiendra à ce bloc.
11:06Est-ce une bonne idée de fasciser l'adversaire ?
11:08Troisième élément.
11:10Il y a toujours dans le bloc
11:12droite qui se disait républicaine,
11:14j'ai vu quelqu'un parler
11:16d'une alliance qui aujourd'hui serait
11:18l'équivalent du pacte germano-soviétique.
11:20Qui a dit ça ?
11:22Une figure importante dont le nom m'échappe.
11:24La cloche sonne.
11:26Ça ne va pas tarder, Alexandre Chauveau
11:28va se connecter dans un instant.
11:30Dernier mot.
11:32Monsieur Coquerel a eu un discours
11:34au moins sincère de gauche révolutionnaire.
11:36Madame Le Pen, aujourd'hui,
11:38tenait le discours de droite libérale
11:40qui faisait le procès des dérives
11:42de l'étatisme et du fiscalisme en France.
11:44Discours qu'on exige.
11:46Les gens de la droite LR
11:48réclament ce discours du RN depuis longtemps.
11:50Avec cela, on pourra s'allier avec vous.
11:52Quand elle tient le discours de droite libérale comme ça,
11:54on la traite comme d'Orio. Ça devient fou.
11:56Évidemment.
11:58Ça vous fait rire.
12:00On vous montre à quel point le désordre des esprits
12:02est grand.
12:04On nous refait ce qu'on nous fait depuis 40 ans.
12:06Le discours de la pensée unique, de la politique unique.
12:08Il n'y a pas d'autre politique possible.
12:10Si vous en sortez, vous êtes fou, irresponsable.
12:12C'est la première chose.
12:14La deuxième, si le gouvernement
12:16ne voulait pas être renversé,
12:18il y avait une solution.
12:20La solution, c'était de ne pas mettre sur la table 49.3
12:22d'aller au vote.
12:24Le vote aurait...
12:26Yann Braune-Pivet
12:28parle, excusez-moi.
12:30Le Premier ministre doit
12:32remettre au Président de la République
12:34la démission du gouvernement.
12:36Les travaux de l'Assemblée nationale
12:38sont ajournés.
12:40La séance est levée.
12:42On va retrouver tout de suite
12:44Alexandre Chauveau d'Europe 1
12:46qui a suivi ce vote.
12:48Alexandre, la motion de censure
12:50a été adoptée contre Michel Barnier.
12:52Absolument. Je n'ai pas pu entendre
12:54le décompte exact de Yann Braune-Pivet.
12:56331.
12:58Il fallait 289 voix.
13:00Michel Barnier, vous l'avez compris, est donc renversé.
13:02C'est un événement en soi puisque
13:04c'est la première fois qu'un gouvernement
13:06tombe sur une motion de censure depuis 1962.
13:08Et sans surprise,
13:10le Rassemblement national, le parti d'Éric Ciotti
13:12et le Nouveau Front populaire ont tous voté
13:14en faveur de cette motion.
13:16Conséquence, Michel Barnier n'est plus le Premier ministre
13:18et il incombe à Emmanuel Macron
13:20la responsabilité de nommer son successeur
13:22vraisemblablement dans les prochaines
13:2424 ou 48 heures.
13:26En tout cas, l'Assemblée nationale s'inscrit
13:28le lieu de pouvoir sous cette
13:30mandature. On l'avait anticipée
13:32à l'issue des législatives de 2022.
13:34C'est plus que jamais le cas ce soir.
13:36Le palais Bourbon en effervescence,
13:38vous l'imaginez, avec de très nombreux journalistes
13:40y compris de la presse étrangère
13:42dans l'attente des premières réactions.
13:44On a les images de la salle des 4 colonnes
13:46qui est bondée de caméras
13:48et de micros. Merci Alexandre Chauveau
13:50pour Europe 1 en direct de l'Assemblée nationale
13:5220h28, 331 votes
13:54contre
13:56Michel Barnier. La censure
13:58est adoptée.
14:00Comme vient de le dire Alexandre,
14:02on est donc à la recherche d'un nouveau
14:04Premier ministre. Et on en parle
14:06avec Henri Guaino, avec Louis Halter
14:08et avec Mathieu Bocoté dans un petit instant
14:10sur Europe 1.
14:1219h21, Pierre de Villeneuve.
14:1420h32 sur Europe 1
14:16en cette soirée historique,
14:18cette Europe 1 soir où vous suivez
14:20un événement qui n'était pas arrivé depuis 1962.
14:22Le gouvernement Barnier
14:24renversé par 331 députés
14:26dont bien sûr les Insoumis.
14:28La chef de file des Insoumis
14:30dit le chaos, ça n'est pas nous.
14:32Ecoutez Mathilde Panot à l'instant,
14:34salle des 4 colonnes.
14:36Enfin, le gouvernement Barnier est tombé
14:38ainsi que son budget violent.
14:40Nous savions depuis le premier jour de ce gouvernement
14:42que ce gouvernement
14:44allait tomber pour une raison toute simple.
14:46Il était une provocation
14:48au vote des Français et des Françaises
14:50fait le 7 juillet.
14:52Et c'est par notre motion
14:54déposée par la France Insoumise
14:56et le Nouveau Front Populaire que ce gouvernement
14:58a été renversé.
15:00Pas par celle du Rassemblement National
15:02qui, comme d'habitude, n'a servi absolument à rien
15:04si ce n'est à nous faire perdre
15:06deux mois, puisque nous avions présenté
15:08dès le départ, lorsque ce gouvernement
15:10illégitime avait été présenté,
15:12une motion de censure en octobre
15:14que le Rassemblement National avait refusé
15:16de voter et il avait même
15:18voté contre la décision du Président
15:20de la République, Emmanuel Macron.
15:22Emmanuel Macron doit s'en aller, rajoute
15:24Mathilde Panot-Henriguenot.
15:26Je veux dire, la classe politique
15:28donne un spectacle qui est absolument
15:30affligeant, mais qui reflète
15:32ce dont elle est capable.
15:34Quand on entend ça,
15:36c'est pareil sur tous les bancs.
15:38Vous écoutez tous les discours de cet après-midi.
15:40Une deuxième chose que je voulais dire,
15:42c'est qu'on a accusé Mme Le Pen,
15:44que je ne défends pas particulièrement,
15:46de faire chanter le Premier ministre.
15:48Mais vous savez, dans les démocraties parlementaires
15:50où il n'y a pas de majorité au Parlement...
15:52Je ne céderai pas à la surenchère et au chantage, disait Michel Barnier.
15:54Dans toutes les démocraties
15:56parlementaires où il n'y a pas de majorité
15:58au Parlement, tout le monde fait chanter
16:00tout le monde. Le parti libéral en Allemagne
16:02vient de faire chanter M. Scholz,
16:04ça se traduit d'ailleurs par l'effondrement de la coalition.
16:06En Espagne, ce sont les indépendantistes
16:08catalans, basques
16:10et autres qui font chanter le gouvernement.
16:12En Israël, ce sont les petits partis
16:14extrémistes qui font chanter
16:16M. Netanyahou.
16:18C'était le parti libéral qui faisait
16:20chanter Mme Theresa May
16:22au moment du Brexit.
16:24Chez nous, il se trouve
16:26que les élections
16:28ont donné un résultat dans lequel
16:30il n'y a pas de majorité parlementaire.
16:32Donc, tout le monde fait chanter tout le monde.
16:34Et la dernière chose, c'est que c'est le gouvernement
16:36qui a choisi la censure.
16:38Parce que si vous mettez le 49.3 sur la table,
16:40la seule réponse
16:42possible pour les oppositions,
16:44c'est la motion de censure.
16:46La seule arme de l'opposition, c'est la censure.
16:48Ça appelle la censure.
16:50Sinon, puisqu'on vous dit
16:52je mets sur la table
16:54mon projet, tout mon projet,
16:56alors soit vous renversez,
16:58soit il passe.
17:00Même si en cas de majorité, ça ne marche pas
17:02la censure.
17:04Le 49.3 sert à deux choses.
17:06A discipliner une majorité
17:08qui est trop étroite et qui est un peu indisciplinée.
17:10Ou bien à essayer
17:12à faire le pari que
17:14lorsque les oppositions sont
17:16en majorité, elles ne vont pas s'unir.
17:18Mais pour une fois,
17:20elles se sont unies. Mais c'est la logique
17:22du 49.3.
17:24Si le gouvernement ne voulait pas
17:26de censure, le gouvernement devait aller
17:28au vote, le projet de budget aurait été
17:30repoussé et on repartait à zéro.
17:32Avec le même gouvernement, il n'y avait pas de quoi.
17:34Cela dit, ce n'est pas une catastrophe.
17:36Il faut arrêter aussi de tout dramatiser.
17:38Je ne dis pas que c'est une catastrophe,
17:40je dis juste que ça n'était pas arrivé depuis 1962.
17:42Et accessoirement, Mathieu Bocoté
17:44et comme disait Henri Guaino
17:46pendant l'Interpub,
17:48il y a eu des électeurs
17:50dans tout ça, mais on a l'impression qu'on en fait fille
17:52des électeurs.
17:54Le système électoral repose normalement sur une sociologie.
17:56Je dirais sur des courants politiques identifiés
17:58et le système électoral a pour vocation
18:00de les traduire pour former les majorités.
18:02Que s'est-il passé en France
18:04depuis quelques décennies, plus encore depuis quelques années ?
18:06Les grandes coalitions historiques,
18:08les blocs historiques se sont fracturés
18:10et on est passé d'un système globalement
18:12politiquement bipolaire à un système avec
18:14tripartite aujourd'hui,
18:16avec les fameux trois pôles dont on parle beaucoup.
18:18Et le système électoral n'est pas fait pour produire
18:20des majorités avec cela, encore moins
18:22j'ajouterais en France, où la culture politique
18:24quoi qu'on en dise, dans le langage
18:26et la rhétorique à tout le moins, demeure plus révolutionnaire
18:28que réformiste. C'est-à-dire une des raisons
18:30pour laquelle, quand on regarde ça
18:32de l'extérieur, à droite
18:34il y a le langage de la grandeur, la nation, nous incarnons
18:36la nation et ensuite il y a la déchéance.
18:38A gauche, de l'autre côté, il y a le monopole de la révolution
18:40et de l'autre côté, il y a les rebuts de l'histoire
18:42qui traînent à côté de nous. Donc une culture politique
18:44réformiste est une culture politique
18:46où on accepte la légitimité de l'adversaire.
18:48La culture politique française n'est pas nécessairement
18:50taillée ainsi, quand on pense avoir
18:52devant soi les fascistes. Non mais quand même,
18:54le front républicain, par définition...
18:56Non mais ça c'est aujourd'hui...
18:58C'est aux années 80, je crois. Oui, oui, mais justement,
19:00ça fait 40 ans que... Mais ça tient
19:02pas qu'au système électoral ou au système
19:04politique, ça tient à l'état de la société.
19:06Oui, mais le mémoire informé aussi.
19:08Et c'est pour ça qu'on retrouve ce problème
19:10dans tous les pays occidentaux.
19:12Regardez les Etats-Unis,
19:14regardez la Grande-Bretagne,
19:16regardez la société en Allemagne,
19:18regardez, enfin on va monter maintenant
19:20l'AfD, une extrême, extrême, extrême gauche
19:22de Bolchevique, on regarde l'Espagne...
19:24Oui, puis on peut aller jusqu'en Corée du Sud
19:26où le président a décidé
19:28qu'on allait pas à la loi de Marseille parce qu'il n'était pas d'accord.
19:30Si il y a des pays où le système électoral
19:32permet d'absorber l'opposition populiste
19:34c'est de la normaliser comme dans la culture de gouvernement.
19:36C'est plus le cas nulle part. Non, mais c'est faux.
19:38C'est l'Italie, c'est la Suède, c'est les Pays-Bas.
19:40Objectivement, les forces qui étaient jugées
19:42et fréquentables ont été normalisées par le jeu
19:44des institutions. Quand on est dans un système,
19:46dans un pays... Mais Marine Le Pen ne cherche pas ça.
19:48Elle ne cherche pas ça, elle cherche une élection présidentielle.
19:50Elle est pas dans la logique de...
19:52Elle est pas dans la logique de...
19:54Elle est pas dans la logique de la félicitation de la parole politique.
19:56Marine Le Pen est une conception très cinquième des institutions.
19:58Donc elle veut une élection présidentielle.
20:00Justement, écoutons Marine Le Pen
20:02qui vient de réagir sur TF1 à ce qui vient de se passer.
20:04Je n'ai pas de vertige et je ne considère pas
20:06que ce soit une victoire.
20:08Je considère que
20:10nous avions un choix à faire
20:12et le choix que nous avons fait c'est celui
20:14de protéger les Français.
20:16M. Barnier avait fait trois promesses.
20:18Il avait fait la promesse de la justice
20:20fiscale, il a présenté
20:22un budget de 40 milliards
20:24d'impôts supplémentaires, il avait fait
20:26la promesse de la maîtrise des comptes publics,
20:28le déficit était aggravé, il avait fait
20:30la promesse de co-construire le budget
20:32avec les oppositions et
20:34il n'a pas entendu les oppositions
20:36quand il a construit son budget.
20:38Par conséquent, ce budget était
20:40toxique pour les Français et la seule
20:42solution digne pour
20:44ceux qui ont reçu le mandat de les protéger
20:46c'était de s'opposer à ce budget.
20:48Ça veut dire quoi ? Elle a fait un coup de poker Marine Le Pen ?
20:50Non, elle a suivi ses électeurs
20:52parce que sinon elle menaçait de s'en aller.
20:54La vérité c'est qu'elle a une base
20:56c'est pas la droite de la droite
20:58sociologiquement.
21:00Ça a commencé
21:02avec le Front National
21:04quand il a commencé
21:06à émerger dans le paysage politique
21:08il a pris les électeurs du Parti Communiste
21:10et ensuite
21:12puis le Rassemblement National
21:14ont pris les couches populaires
21:16et les classes moyennes et inférieures
21:18du RPR.
21:20Voilà, ça c'est son
21:22socle dur et ce socle dur
21:24ne peut pas se permettre de le perdre.
21:26Or ce socle dur, encore une fois, il a compris
21:28qu'il allait payer. Alors on me dira
21:30oui mais c'était pas grand chose, pas beaucoup
21:32sur l'essence pour les gilets jaunes c'était pas grand chose non plus
21:34mais c'était la goutte qui faisait déborder le vase.
21:36C'est-à-dire que là on est arrivé à un point
21:38où
21:40ceux qui payent et qui n'arrivent pas à finir
21:42leur fin de mois et qui souffrent
21:44de plus en plus, mais c'est pareil aux Etats-Unis
21:46le petit blanc qui vote
21:48Trump, il est exactement dans le même état d'esprit
21:50et dans la même situation.
21:52Je pense qu'en fait
21:54elle avait peut-être tellement le choix politiquement
21:56C'est ce qu'elle dit et on l'écoute
21:58elle a voté avec El-Effi
22:00on lui a beaucoup reproché, voilà ce qu'elle dit sur ça.
22:02Ça n'est pas de gaieté de cœur.
22:04Je vais vous résumer ma pensée avec une phrase
22:06d'Henri IV. L'immense amour que je
22:08porte à la France m'a toujours tout rendu facile
22:10et honorable. J'ai trouvé facile et
22:12honorable de défendre les Français, y compris
22:14au prix, effectivement
22:16d'être obligé
22:18d'additionner mes voix avec la France.
22:20Avec des gens que vous ne trouvez pas très honorables
22:22c'est vous-même qui le dites.
22:24Mais on censure le gouvernement
22:26on censure le gouvernement
22:28et au travers de cela on censure
22:30le budget. Pour protéger les Français
22:32Monsieur Boulot, il n'y avait pas
22:34d'autre solution que cette solution-là.
22:36Solution à tout prix
22:38Mathieu Bocquete. Je crois très honnêtement
22:40qu'on va se rappeler davantage de la motion de censure
22:42que de son libellé.
22:44Le texte était du
22:46La France Insoumise. Ils l'ont écrit de telle
22:48manière à ce que le
22:50RN s'humilie lui-même
22:52en votant cette motion. Mais en ce moment, le vrai enjeu
22:54c'est le fait que le gouvernement est tombé.
22:56C'est pas le texte exactement écrit par
22:58le NDP. Je suis pas d'accord avec vous. Moi je pense que
23:00ces quelques phrases sur
23:02cette collusion violente
23:04sur le fait que
23:06le RN vote contre lui-même
23:08je pense que c'est des choses qu'on
23:10trouvera et qu'on resservira
23:12dans un an, dans cinq ans, dans dix ans.
23:14Non, non, je crois pas.
23:16Si bien on aime le champagne,
23:18vous et moi, M. Bocquete,
23:20donc on va ridouler de champagne.
23:22On va le lancer sur le programme
23:24mais je crois que l'efficacité électorale
23:26de cela sera à zéro. Dans ce vote,
23:28on vote pas pour le texte,
23:30on vote pour la censure.
23:32J'ai compris. Je suis blanc
23:34mais c'est pas non plus la peine de tirer
23:36sur l'ambulance. C'était bien pire
23:38par exemple la réforme des retraites
23:40quand chacun refusait de voter
23:42la motion de l'autre alors que 75 à 80%
23:44des français ne voulaient pas de cette réforme.
23:46Et chacun se demandait s'ils étaient fous,
23:48s'ils se moquaient du monde.
23:50Marine Le Pen, en fait,
23:52elle s'explique,
23:54elle se justifie à postériori. Il n'est pas
23:56compliqué pour elle de justifier ce geste à l'égard
23:58de ses électeurs. Et d'ailleurs ça a toujours été sa boussole
24:00politique. C'est-à-dire que Marine Le Pen, quand elle est dans
24:02une situation de maelstrom politique
24:04comme celle-là, sa boussole en général
24:06c'est l'électeur d'Edinbommon, c'est l'électeur de son FIEF,
24:08c'est l'électeur RN du bassin
24:10minier, celle de sa génération
24:12et non effectivement pas celle de Jean-Marie
24:14Le Pen, pas celui qui est à la droite de la droite
24:16l'électeur classe
24:18populaire déclassée du bassin
24:20minier du Pas-de-Calais.
24:22Et l'électeur du bassin minier du Pas-de-Calais
24:24effectivement, ce budget, et surtout
24:26dans sa version initiale, ne lui était pas favorable.
24:28Je vous rappelle qu'on taxait l'électricité
24:30et qu'on sous-indexait
24:32les pensions de retraite.
24:34Le problème pour elle,
24:36c'est tous les commentaires qu'on entend
24:38depuis trois jours sur les plateaux
24:40parisiens en disant qu'elle est irresponsable,
24:42que ça ne va pas, etc.
24:44Et ça en fait, c'est toujours
24:46la marche qui la rebute.
24:48Marine Le Pen n'aime pas
24:50la droite bourgeoise. C'est très important pour
24:52comprendre sa psychologie.
24:54Elle n'aime pas quand les commentateurs
24:56parisiens, pour ne prendre que,
24:58font des commentaires sur elle
25:00en disant qu'elle inquiète les marchés,
25:02qu'elle n'a pas un programme économique qui convient.
25:04Tout ça ne convient pas.
25:06Et à chaque fois, ça la rebute. Là où Jordan Pardala
25:08essaie de conquérir
25:10cette électorat qu'ils appellent une électorat de conquête
25:12avec un discours plus
25:14droitier sur tous les plans,
25:16sur le plan économique et sur le plan identitaire aussi,
25:18Marine Le Pen refuse
25:20toujours la marche parce qu'elle
25:22considère que cet électorat-là,
25:24parce que c'est l'électorat qu'elle
25:26a conquis, considère
25:28qu'il ne faut pas le lâcher. Et ça,
25:30ça explique tout son geste. Elle pense que ce geste-là,
25:32celui de la censure, au-delà des
25:34considérations tactiques du calendrier personnel,
25:36qui sont réalité, les réquisitions
25:38qu'on peut rejoindre, elle pense
25:40cet électorat, il faut lui parler, il ne faut pas qu'il
25:42lâche. Je rappelle juste la phrase
25:44qui est la phrase incriminée que
25:46camarade Vincent Trémolet de Villers a mis en exergue
25:48dès hier matin sur Europe 1 et dans
25:50le Figaro alors qu'une large majorité
25:52de nos concitoyennes et
25:54concitoyens a fait le choix du barrage
25:56à l'extrême droite lors des élections législatives.
25:58Le Premier ministre a cédé à
26:00leurs plus viles obsessions avec
26:02une nouvelle loi immigration qui poursuivrait
26:04la faillite morale et politique
26:06de l'année dernière et une remise en cause de
26:08l'aide médicale d'État qui apporte humanité
26:10et dignité à ceux qui foulent notre sol
26:12et une mesure essentielle pour
26:14tous de santé publique. Voilà.
26:16C'est écrit noir sur blanc
26:18dans la censure
26:20que Marine Le Pen a votée.
26:22Je pense que Marine Le Pen, de son point de vue,
26:24je crois, peut dire simplement
26:26que je ne me suis pas attardé au caprice idéologique
26:28et aux taquineries
26:30de parlementaires adolescents.
26:32J'ai voté la censure, quelle que soit
26:34sa formulation. D'ailleurs, elle dit
26:36je vote toutes les motions. Prenez bien conscience que la culture sociale
26:38et celle du pouvoir d'achat sont, pour beaucoup
26:40de Français, bien plus importantes que toutes les autres
26:42même s'ils placent très haut l'immigration et l'insécurité.
26:44Voilà. C'est ce que la plupart des commentateurs
26:46parisiens ne veulent pas voir. Bien sûr. Henri Guénaud,
26:48reste avec nous et
26:50Mathieu Bocoté, Louis Oselter.