Elisabeth Lévy : "En entendant sonner les cloches de Notre-Dame, j’ai pleuré"

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Transcript

00:00— Avec Élisabeth Lévy, nous allons revenir sur la réouverture de Notre-Dame, la renaissance de Notre-Dame.

00:05Alors d'abord, bonjour, Élisabeth. — Bonjour, Jean-Jacques. Bonjour.

00:09— Qu'en avez-vous pensé de cette soirée ? — Écoutez, d'abord, moi, je me rappelle, parce que c'était un peu comme le match retour,

00:16la cérémonie des JO avec, vous savez, le kitsch mondialisé, les poncifs progressistes. Ça ne m'a pas du tout émerveillée, je dois vous l'avouer.

00:24— Moi, j'avais adoré. Je vous le dis, Élisabeth. — Désolée. Mais samedi...

00:27— Mais chacun a son avis. — Samedi, en entendant... Alors j'étais vraiment juste à côté. En entendant sonner les cloches de Notre-Dame

00:33en fin d'après-midi pour la première fois depuis 5 ans, je dois vous l'avouer, j'ai pleuré. Oui. Le Parvis, c'est le kilomètre zéro,

00:40vous savez, des roues de France. Quand on vous dit 30 km de Paris, vous êtes à 30 km de là. C'est aussi un kilomètre... Comment dire ?

00:47Le kilomètre zéro de notre culture. Ce week-end, c'était le centre de l'Occident, le cœur battant de la France.

00:54Alors sur X, il y a une dame qui m'a demandé si j'étais chrétienne, comme si le catholicisme n'était pas une part de notre identité à tous.

01:01Alors je réponds non et incroyante, mais quand même, j'ai été bouleversée. Alors quelqu'un d'autre écrivait que tout cela n'était qu'un moment de mondanité

01:10avec tous les politicards mécréants français et le showbiz, qui finalement a été heureusement assez discret, puisque le concert a été un peu noyé.

01:18Alors peut-être que je suis bon public, Jean-Jacques, c'est peut-être ce que vous pensez, mais ça me dit, moi j'avais l'impression de voir une affirmation de la puissance française.

01:27Alors pas seulement à cause de la prouesse, de cette prouesse collective qui a été orchestrée quand même par un État pour une fois à peu près agile,

01:35ni parce que peut-être, on ne sait jamais, la paix en Ukraine, on dira peut-être qu'elle a commencé à Paris, qu'elle a commencé ici,

01:43mais aussi parce que vous savez, Jean-Jacques, la dernière fois, vous savez quand c'était la dernière fois que 50 chefs d'État de gouvernement ont été rassemblés de cette façon ?

01:52— Des attentats. — Oui, c'était le 11 janvier 2015, après les attentats. — La marche, on s'en souvient.

01:58— Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que malgré tout, malgré tous nos problèmes, quand Paris est blessé, quand Paris est attaqué, le monde souffre en tous les cas,

02:07une par une grande partie du monde, et au moins ceux qu'on appelle l'Occident. — Le monde occidental.

02:12— Oui, c'est ce qu'on appelle l'Occident. Mais pas que. En Chine aussi, il y a des gens qui... Si vous voulez aller sur le pont, là, à côté, vous verrez tout.

02:19— J'ai pas vu beaucoup de chefs d'État ou de gouvernement du... Ce qu'on appelle le sud global. — Non, ça, c'est vrai. Il y en a... Non, non.

02:27Il y avait le frère du roi du Maroc. Il y en avait quelques-uns. Il y avait Sassou Nguesso. Voilà. Le pro-occidental de la bande, d'ailleurs.

02:36Enfin bon. C'est ça, le soft power. C'est la puissance de l'imagination, la puissance de l'imaginaire qui fait que malgré donc la dette, la censure,

02:44le gouvernement, les grèves, l'insécurité, eh bien pour des milliards d'êtres humains, Paris reste encore... C'est un nom qui reste synonyme

02:51de beauté, de liberté et de grandeur. Et en plus, il y a eu un miracle politique, Jean-Jacques. Enfin ou alors c'est moi qui ai été vraiment

03:00touché par la grâce. Mais j'ai l'impression qu'on n'a pas entendu les insoumis brailler, invectiver Macron ou Trump, dénoncer les atteintes à la laïcité.

03:09Ou alors je me trompe, Chloé. — Mais certains ont dit c'est dommage, mélange des genres entre le politique et le religieux. Vous le pensez ?

03:18— Alors c'est pas un mélange. Sinon que tout le monde... Le politique et le religieux existent. Ils doivent coexister. Mais c'est pas un mélange.

03:25C'est une hiérarchie et une séparation. C'est l'État propriétaire des lieux qui remet les clés de la cathédrale à l'Église.

03:34Quand le président de la République parle, à mon avis, sobre et court et plutôt bien, c'est quoi ? La cathédrale n'a pas encore été consacrée.

03:42C'est la République qui accueille le Gotha politique européen et américain, d'où la Marseillaise dans une église. C'est pas rien, la Marseillaise

03:51dans une église. Même si elle n'a pas été encore reconsacrée. Eh bien ça veut dire que la guerre est finie. Chacun est chez soi.

03:57Mais tout de même, César a gagné. Et dimanche, bien sûr, c'était l'État qui était invité. Et là, je dois vous dire, moi, j'y ai vu une démonstration

04:06quand même de la force du catholicisme, quand l'Église ne se comporte pas comme une ONG, quand elle assume une forme de verticalité.

04:13Vous savez, on a vu la crosse de Mgr Ulrich, les oriflammes des paroisses qui étaient tournées vers le ciel. Alors c'est un rituel un peu émuable.

04:21Ça peut sembler, je ne sais pas, désuet. Mais ça nous inscrit dans la chaîne des générations. Alors bien sûr, ça ne changera bien rien.

04:29Comme Chloé l'a dit, tout va reprendre. Et surtout, je dirais que la liturgie va céder sa place au tourisme de masse.

04:36Et que Notre-Dame va malheureusement, malheureusement Jean-Jacques, redevenir une étape entre Disneyland et Versailles.

04:46Si vous voulez, elle n'a pas été faite pour cela. Mais elle est faite pour être visitée, honorée.

04:52Dans ce monde désenchanté, moi, je crois que ça représente Notre-Dame, sa renaissance. C'est une espérance, même pour les incroyants comme moi.

05:01Cette espérance qu'il y a peut-être quelque chose de plus grand que nous, quelque chose qui justifie notre passage sur Terre, que ce soit Dieu, l'art ou la révolution.

05:09Et c'est aussi une réponse à tous ceux qui pensent que le pouvoir d'achat, c'est l'alpha et l'oméga de l'existence humaine.

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